Capitaine
YVES LACLAVÈRE
(1908 -2003)
Liens :
Yves LACLAVERE (ci dessus)
Jean Louis LACLAVERE (ci-dessous)
Les textes suivants présentent un intérêt tout
particulier et sont un exemple frappant de ce « devoir de mémoire »
qui devrait s’imposer à tous.
Yves LACLAVÈRE les a rédigés en 1994, à l’âge
de 86 ans, sur un petit ordinateur Atari, lors d un
séjour en maison de retraite.
Ils ont été retranscrits par son fils
Jean-Louis (Ecole des Pupilles de l’Air - 1955) dans leur forme originale.
Ma Guerre
1939 - 1940 : Mobilisé en
Algérie et en Tunisie dans la drôle de guerre comme lieutenant commandant d'une
Compagnie de l'Air, je n'ai rien de particulièrement intéressant à signaler.
1941 – 1945 : Nous sommes
la mémoire du passé. Puisqu'on me demande de témoigner, voici mon témoignage :
En août 1941, fonctionnaire en
Algérie et en ma qualité d'officier de réserve de l'Armée de l'Air, j'ai été
contacté par une organisation para-militaire qui
faisait de la résistance passive, mais réelle, au régime de Vichy, sous le haut
patronage du général Weygand, Gouverneur Général de l'Algérie, qui n'était pas
pétainiste. A part les très rares initiés, dont je n'étais pas, certains se
doutaient que la situation ne pouvait pas durer et que quelque chose allait se
passer. Mais quoi ?
Ce fut l'origine lointaine des
Forces Françaises Combattantes, F.F.C., dont le rôle a été assez comparable à
celui des F.F.L. et des F.F.I.
Il s'agissait pour l'Algérie
d'alors, d'utiliser au mieux cette main d'oeuvre disponible qui pouvait être
utile à l'économie générale tout en assurant sa protection contre les exigences
des commissions d'armistices allemandes et du gouvernement espagnol.
Dans ce but, il a été créé,
entre autres, un Groupement de Travailleurs Etrangers Démobilisés du Sud
Oranais (T.E.D.S.O.) dans la région de Colomb-Béchar, divisé en groupes selon
la ou les origines ou les nationalités. J'ai été désigné pour l'encadrement et
l'administration d'un de ces groupes et en ai assuré plusieurs intérims, dès le
début de septembre 1941, et jusqu'à peu après le 8 novembre 1942, date du
débarquement des Alliés en Afrique du Nord, j'ai été affecté à l'encadrement et
à l'administration dans le sud algérien, de ces hommes de nationalités diverses
démobilisés, considérés comme indésirables par le régime de Vichy dans le nord
de l'Algérie.
C'étaient :
1 - des anciens légionnaires
ayant effectué plus de quinze ans de service, pour la plupart de nationalité
allemande ou autrichienne,
2 - des engagés volontaires
étrangers pour la durée de la guerre en général, jeunes ou assez jeunes, juifs,
étudiants, de professions libérales, enseignants, commerçants, médecins,
scientifiques, ingénieurs, artisans ou cadres et ouvriers qualifiés, etc. tous
émigrés d'Europe centrale, obligés de fuir les régimes nazis. Réfugiés en France,
pour eux, la vie était devenue intenable après la débâcle de 194O. Beaucoup
avaient passé la Méditerranée et trouvé un asile précaire en Algérie,
3 - un contingent de
militaires polonais démobilisés ayant servi à côté de l'armée française en
1939-40,
4 - des républicains espagnols
communistes ayant fui le régime du général Franco et réfugiés en A.F.N.,
5 - des personnalités
étrangères âgées ou inaptes à certains travaux et à la charge de la société.
Ces personnels étaient recherchés
par les commissions d' armistice pour être récupérés
et envoyés en Allemagne dans des usines de travail forcé pour la guerre ou dans
des camps d'extermination.
L'Espagne franquiste réclamait
la tête de révolutionnaires considérés comme des opposants au régime en place
ou communistes.
Bien entendu, ils n'étaient,
ni prisonniers, ni internés, libres de leurs mouvements dans les régions où ils
étaient, en principe, astreints à résidence. L'administration du Gouvernement
Général de l'Algérie leur assurait l'hébergement, la nourriture dans les
limites du rationnement et l'habillement civil, contre un prélèvement sur leur
salaire, lorsqu'ils avaient un emploi rémunéré. Les malades ou les inaptes
étaient complètement pris en charge par l'Administration.
Voici, pour mémoire et
l'anecdote; deux cas particuliers :
- un ancien chef d'orchestre
juif du grand théâtre de Bordeaux, placé dans la musique de la Légion Etrangère
de Saïda dont pratiquement, il était devenu le chef ; il fut même l'organiste
des offices dominicaux à l'église de Saïda.
- un éminent médecin
chirurgien et gynécologue, juif autrichien, placé comme infirmier à l'hôpital
de Saïda, y a assuré dans de bonnes conditions la direction médicale.
Les autres, en fonction de
leurs compétences professionnelles, occupèrent la plupart des emplois de
maîtrise ou d'encadrement et d'ouvriers qualifiés dans une mine de charbon à Kénadza et dans la construction de la voie d'une ligne de
chemin de fer qui devait s'appeler le Méditerrannée-Niger
et dont 150 kilomètres ont été mis en service avant le débarquement allié de
novembre 1942.
Et puis voici comment, dans le
cadre de mes attributions, (et toujours pour l'anecdote), j'ai été amené à
monter une petite affaire de fabrication d'espadrilles. Il s'agissait d'occuper
des hommes âgés, inaptes à certains travaux en entreprises et à qui il fallait
donner une occupation pouvant leur permettre de préserver leur dignité en leur
faisant gagner assez d'argent de poche pour satisfaire certains besoins
élémentaires tels qu’objets de toilette, cantine, cinéma, cigarettes, etc. et
même faire des économies.
Mon groupe disposait d'un
stock de vieilles tenues militaires réformées et dans lesquelles on pouvait
récupérer des morceaux de tissus en assez bon état pour découper des dessus. Un
autre groupe, stationné dans une sorte de pampa, pouvait faire des semelles
avec de l'alfa, grande herbe qui, séchée, se tressait assez facilement.
Ainsi, avec mon collègue nous
avons pu approvisionner le commerce régional d'un produit chaussant qui
manquait cruellement.
Dans les mois qui suivirent le
débarquement, la majorité de nos travailleurs a été récupérée
par les Alliés qui les ont engagés comme pionniers dans leurs services et dans
les ports d'A.F.N. pour effectuer des travaux portuaires
sur leurs navires.
Moi-même, ai été alors rendu à
l'Armée de l'Air et affecté au Corps Expéditionnaire Aérien dépendant de
l'Armée américaine et ai participé au premier débarquement en opérations en
Corse, en septembre 1943, puis en Sardaigne, les « porte-avions » qui
servaient de bases de départ aux bombardiers pour le sud de l'Europe. Et,
enfin, j'ai été débarqué avec mon unité à Marseille début octobre 1944, pour de
nouvelles opérations à partir de Lyon et ensuite de Saint-Dizier.
Ma guerre était finie !
Les restrictions
Comment ai je pu résoudre une
petite partie de certains problèmes, peut-être mineurs ?
Les populations civiles d'A.F.N. manquaient de tout ce qui antérieurement arrivait de
la métropole et des colonies ; particulièrement de sucre et surtout de
tous les produits textiles. Or, j'avais une épouse enceinte et deux enfants à
faire subsister. Et, pas mal de militaires sous mes ordres étaient dans la même
situation. Il leur était matériellement impossible, même avec les tickets de se
procurer de la layette et du linge d'usage courant.
Alors, j'ai pris l'initiative,
auprès des cuisiniers des troupes alliées de récupérer tous les sacs vides en
bonne toile, ayant servi d'emballage à de la farine, sucre, riz, légumes secs,
et autres produits alimentaires. Ils étaient tous imprimés de manière presque
indélébile en anglais de l'indication de leur contenu. Ils ont servi à faire
beaucoup de layette et de linge de maison, imprimés de curieuses mentions. Mais
un problème crucial pour des familles était résolu et c'était
l'essentiel !
Toutes les relations postales
et autres étant complètement interrompues entre la France et les territoires
occupés par les alliés et nous étions coupés et sans nouvelles de mes parents
qui gardaient une de mes filles à Castelmayran (Tarn
et Garonne). Toutes les tentatives de communiquer avec eux, ou eux avec nous,
par l'intermédiaire de la Croix-Rouge Internationale ou du Vatican, n'ont pas
abouti.
A part quelques faits
rapportés ci-dessus, dont certains relèvent de l'anecdote, j'ai fait mon devoir
dans la guerre comme combattant volontaire. J'aurai pu en être dispensé, car en
1941, j'étais chef d'une famille nombreuse (trois enfants).
Courant 1946, en fonction de
mes connaissances générales et de mes compétences en matière d'aéronautique;
j'ai fait carrière dans l'Aviation Civile en cours de création au moment du
développement que l'on sait du Transport Aérien.
9 avril 1994
Yves LACLAVÈRE (86 ans)
Capitaine pilote de l'Armée de
l'Air
Officier d'Etat Major de
réserve
Ingénieur des Etudes et de
l'Exploitation de l'Aviation Civile
Chevalier de la Légion
d'Honneur
Croix de Combattant volontaire
41-45 dans les Forces Françaises Combattantes.
Médailles de l'Aéronautique et
du Mérite Civique et diverses autres décorations commémoratives.
Origine des Forces
Françaises Combattantes
Le 8 novembre 1942, un
débarquement anglo-américain dirigé par le général américain Eisenhower prend
pied à Casablanca au Maroc, à Oran et Alger en Algérie. Une extraordinaire
confusion s'installe aussitôt en Afrique du Nord, tandis qu'Hitler envahit
la"zone libre" et que la flotte se saborde à Toulon.
Après avoir un peu résisté aux
envahisseurs, les vichystes ne savent plus à quel
saint se vouer, sinon l'amiral Darlan, qui se trouve par hasard à Alger. Il
espère le pouvoir. De
Gaulle qui n'avait pas été prévenu et dont il est peu de dire que les
Américains se méfient de lui et qui ne comptait pas beaucoup de partisans à
Alger lors du coup de force qui a neutralisé l'administration de l'Etat
français avant l'arrivée des Américains, veut s'imposer.
Pendant quelques semaines, un
climat lourd s'appesantit sur Alger. Il en est résulté un certain imbroglio.
L'amiral Darlan assassiné, de Gaulle prend le pouvoir.
Il se passa alors autre chose
de plus glorieux. Les Américains avaient débarqué au Maroc et en Algérie. Les
Allemands débarquent en Tunisie des troupes d'élite équipées de chars
performants qui feront merveille partout. Il a fallu s'en occuper.
Ce fut ainsi que l'armée
française entra dans la guerre. Les unités misérables de l'armée d'Afrique
repousseront tous les assauts allemands contre le secteur central de la dorsale
tunisienne que l'état-major allié leur avait affecté entre un corps anglais et
un corps américain. On a vu ces unités de pieds noirs, de réfugiés
métropolitains, de tirailleurs et de goumiers tenir tête aux Allemands en
Tunisie. Pour la nouvelle armée française, des Forces Françaises Combattantes,
encore très mal équipée ce fut l'armée de tous les dangers dont elle se tira
avec honneur.
Yves LACLAVÈRE
*******************
En 2008, son fils Jean-Louis LACLAVÈRE (JJL)
écrit :
« J’ai retrouvé cinq ans après sa mort,
un vieux cahier d’écolier où mon père Yves LACLAVÈRE (1908-2003) a laissé
plusieurs brouillons de textes que j’ai essayé de remettre en ordre. Ce qui
suit est donc une synthèse de plusieurs notes manuscrites qui se recoupent,
rédigées pêle-mêle, en maison de retraite alors qu’il avait plus de 86 ans. Mon
père a tenté de répondre à une requête de l’ ANAFACEM.
Ce texte comporte certainement des erreurs de
retranscription (matériels, orthographes des noms propres liées aux difficultés
de déchiffrage) »
Dans « Terre d’
Envol » n°20, vous demandez aux anciens de l’ANAFACEM,
anciens navigants, pilotes et radionavigants, de faire appel à certains de
leurs souvenirs d’une époque à jamais révolue, d’en écrire quelques uns et de
nous en faire part.
Note de JLL : Je
ne sais pas si mon père a effectivement envoyé sa réponse.
Pourquoi et comment je
suis devenu pilote en 1926 ?
Issu d’un milieu familial
modeste (longue lignée de paysans pauvres), je suis né en février 1908. Je suis
sorti en 1925 bachelier d’un collège du Sud-Ouest. J’avais préparé et été reçu
à un concours des PTT. Comme ma nomination tardait, j’ai eu connaissance que
l’Armée, qui n’était pas encore celle de l’Air, proposait des bourses de
pilotage.
Pilote d’avion ?
Avion ? Je n’avais qu’une très vague idée de ce que cela pouvait être.
Je n’avais vu d’avion, qu’en
photo ou image et rarement volant dans le ciel de Gascogne. La curiosité, le
désir de partir l’emportant, je fis acte de candidature et fus convoqué à
Toulouse.
Après une sérieuse visite
médicale, et une épreuve de culture générale, je fus admis avec une quinzaine
d’autres candidats, qui en savaient aussi peu que moi sur ce qui nous
attendait.
Nîmes Courbessac : France-Aviation
La formation au pilotage dura
de fin mars 1925 à septembre à l’école civile privée de pilotage sous contrôle militaire
France-Aviation, sur l’aérodrome de Nîmes, qui fut
inaugurée peu après notre arrivée par le sous-secrétaire d’Etat à l’Aviation, Laurent-Eynac.
Arrivée à l’Ecole à Nîmes-Courbessac ; vaste surface plane gazonnée, deux
hangars, des baraquements ; station météo, petits bâtiments de direction,
radio, pylônes etc. et une poudrière en bordure du terrain. C’est là que nous
avons eu le premier contact, vu et touché un avion. Pour la plupart d’entre
nous tout était nouveau.
Note FXB : voir quelques photos
des années 1920 empruntées au site Internet NEMAUSEN.COM
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Le camp d’aviation de
NÎMES COURBESSAC en 1923 |
Bâtiment du camp d’aviation de NÎMES -COURBESSAC |
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Camp d'Aviation de
NÎMES –COURBESSAC Dortoir et Ateliers |
Ecole de mécaniciens de l'Armée de l'Air de COURBESSAC en 1930 -
Cours de télécommunications |
Les avions arrivèrent en même
temps que nous. Le matériel sur lequel nous avons été formés consistait en surplus
provenant des stocks de la guerre 14-18 et était en état d’entretien minimum
(avions entoilés, stockés en plein air depuis des années).
Nous attendaient un avion
rouleur aux ailes rognées (note FXB : pour les exercices de roulage
au sol), des Nieuport 18 et 23 sesquiplans à moteur rotatif 130 CV, Morane
Parasol à moteur rotatif 90 CV, et même un biplan anglais, et enfin des Spad 7 (avion de Guynemer) et un (?), bimoteur Hispano-Suiza 180 CV (rassurant, le réservoir d’essence
entre le pilote et le navigateur !!).
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Nieuport Nie-23 Monoplace de chasse
dérivé du Nieuport Nie-17. Sesquiplan. Envergure : 8.17 m Longueur : 5.77 m Hauteur : 2.40 m Surface portante :
14.75 m² Equipage : 1 Masse à vide : 375 kg Masse totale : 560 kg Motorisation : 1 Le
Rhône 9Jb de 120 ch Vitesse maximale : 165
km/h Autonomie : 250 km Armement : 1
mitrailleuse Vickers de 7.7 mm synchronisée |
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Morane-Saulnier MoS-30 Monoplace d'entrainement à la chasse 1918 Monoplan parasol. Envergure : 8.51 m Longueur : 5.65 m Hauteur : 2.40 m
Surface portante : 13.39 m² Equipage : 1
Masse à vide :
406 kg Masse totale : 526 kg Motorisation : 1 Le
Rhône 9Jb de 120 ch Vitesse maximale :
197 km/h à 2000 m Montée à : 2000 m en5 mn 12 s Plafond : 6000 m |
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SPAD S-VII Monoplace de chasse.
Premier vol en avril 1916. Plus de 6000 exemplaires construits Biplan. Envergure : 7.82 m Longueur : 6.08 m Hauteur : 2.20 m Surface portante :
17.85 m² Equipage :1 Masse à vide : 500 kg Masse totale :
705 kg Motorisation : 1 Hispano-Suiza 8Ab de 180 ch Vitesse maximale :
212 km/h Montée à : 2000 m en 4
mn 40 s Autonomie : 350 km Armement : 1
mitrailleuse Vickers de 7.7 mm synchronisée |
L’encadrement comprenait un directeur
chef pilote, deux instructeurs techniques, deux moniteurs, un sous-officier
chargé de notre préparation militaire. Régime de l’internat et emploi du temps
peu ou pas contraignant ; éducation physique élémentaire, initiation au
matériel, circulation au sol, double commande, lâcher, vols d’entraînement
progressif et préparation aux épreuves du brevet, cours techniques,
aérodynamique, avion, moteur, météo, etc.
Pas de bâtiment
scolaire ; dortoir, repas en restaurant-cantine
qui servait aussi de salle de cour. La formation technique était de bonne
qualité.
Istres le Tubé
Aérodrome principal - A
proximité de l’autodrome de Miramas - Les Alpilles au nord - Breguet 14,
Caudron C59 et Nieuport.
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Breguet Bre 14 A2 1917 Biplace de reconnaissance et d'observation. 3916 exemplaires
construits pour l'aéronautique militaire française. Biplan. Structure
métallique. Envergure : 14.86 m Longueur : 9.00 m Hauteur : 3.30 m Surface portante :
49.00 m² Equipage : 2 Masse à vide : 1141 kg Masse totale :
1704 kg Motorisation : 1
Renault 12Fex de 280 ch Vitesse maximale :
180 km/h à 0 m Montée à : 3000 m en13
mn 20 s Plafond : 6000 m Armement : 1
mitrailleuse Vickers de 7.7 mm synchronisée de fuselage, 2 Lewis de 7.7 mm
mobiles arrière |
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Caudron C.59 1921 Biplace d'entrainement. Premier vol en août 1921. 1800 exemplaires construits pour
l'aéronautique militaire française et l'exportation. Biplan. Construction en bois,
revêtement entoilé. Envergure : 10.24 m Longueur : 7.80 m Hauteur : 2.90 m Surface portante :
26.00 m² Equipage : 2 Masse à vide :
700 kg Masse totale :
990 kg Motorisation : 1 Hispano-Suiza 8Ab de 180 ch
Vitesse maximale :
170 km/h Montée à : 2000 m en14
mn 0 s Plafond : 5500 m Autonomie : 500 km |
Par la suite et pendant
longtemps l’aérodrome est devenu une des plus belles plateformes de France.
Là, j’ai eu comme moniteur
Louis Bastié, passionné d’aviation besogneux, qui s’est tué en octobre 1926 à Bordeaux,
l’époux de Maryse (1), qui a fait la carrière que l’ on sait à la recherche de
records de distance dans l’ armée de l’ Air et de raids à sensations.
Accident d’avion
Enfin vint le temps des
épreuves du brevet ; en ce qui me concerne l’avant-dernière consista en un
vol à vue Nîmes-Montélimar et retour.
L’aller se passa bien. Au
retour sur la vallée du Rhône à la hauteur de (??) mon moteur s’arrêta après
quelques éternuements. Comme le Spad 7, avion lourd
ne pouvait planer qu’une fois et demi sa hauteur, il me fallait atterrir très
vite. Il n’ y avait à la verticale que de petites prairies entourées de
peupliers. Je n’eu que le temps de planer sur quelques mètres et de viser entre
deux peupliers. Ce fut très vite fait ; mes plans se brisèrent et mon
train d’atterrissage s’écrasa sous le fuselage. Avion brisé, pilote choqué,
indemne. D’une maison voisine du monde vint immédiatement m’extraire des
débris, hébété mais sauf !
Dans l’heure, j’ai téléphoné et
rendu compte à mon directeur de l’école de pilotage. Après un bref entretien,
il m’a dit de retourner par le train à Montélimar, où un autre Spad 7 me serait convoyé le lendemain, et de terminer mon
épreuve Montélimar – Nîmes !
Il me restait encore à effectuer
la dernière épreuve Nîmes - Istres et retour, ce qui fut fait et je gagnais mon
brevet.
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Officier
Je n’ai pas gardé d’ Istres de
l’époque 1926-27 un très bon souvenir. Corvées de toutes sortes aussi désagréables
que répugnantes (latrines). Les jours de mistral, les vols étaient
suspendus ; ramassage des cailloux de la Crau pour dégager des surfaces
d’atterrissage et arrachage des genêts ou autres pour servir aux cuisines et
chauffer les logements du personnel d’encadrement.
Dans les six premiers mois de
mon service militaire de 18 mois, quelque peu déçu et écoeuré par la vie d’un
soldat de 2ème classe à Istres en 1925, toujours impécunieux (solde 0,25 - 2,50
prime de vol), je voulu m’élever dans la hiérarchie militaire.
Dès que je pouvais le faire,
je me portais candidat à tous les pelotons pouvant me permettre d’améliorer ma
situation. Caporal, sous-officier, préparation au concours d’ Officier de
Réserve et enfin admis comme EOR du Personnel Navigant au Camp d’ Avord ;
6 mois d’ intense instruction militaire, cours de haut niveau, formation
technique de navigation aérienne, de radiotélégraphie, photographie aérienne,
liaisons air-sol, sol-air, infanterie, artillerie etc., etc. .Enfin examen et
concours de sortie. Au bout d’un an, le 14 novembre 1927, je fus promu
sous-lieutenant de réserve, pilote et navigateur, plus jeune officier de l’ Armée Française (toute vanité mise à part), pendant
quelques semaines avant ma vingtième année. Je gagnais alors 1750 francs, le
double de ce que gagnait mon père fonctionnaire au sommet de sa carrière.
Au terme du service militaire
de 18 mois, l’Armée me proposa de faire (?) une carrière d’officier d’active
après un stage probatoire de 2 ans. Je fus entre temps reçu au concours des
PTT, et ma famille me dissuada de la carrière militaire (risques d’accidents
aériens élevés). Je le regrette encore.
Le lieutenant Yves LACLAVERE
devant un bombardier Bloch 200
Vers 1940
« Le MB 200 est un
avion lent même d’après les standards du début des années 30. Il est obsolète
dès son entrée en service en 1933. Au début de la deuxième guerre mondiale, 169
avions sont encore en activité dont 92 opérationnels au sein de sept Groupes de
Bombardement : ils sont rapidement relégués en seconde ligne… »
Carrière civile
J’ai donc suivi le conseil de
mon père, et décidais de faire une carrière civile coloniale ; ce fut
l’Algérie et le grand sud algérien jusqu’ en 1939-1940. De 1941 à 1945 je fus
de nouveau militaire ; lieutenant puis capitaine dans les Forces
Françaises combattantes.
Courant 1946 je fus admis dans
l’Aviation Civile (S.G.A.C.C.) comme commandant d’aérodrome auxiliaire à
Marignane puis à Alger ; lors de mon intégration en qualité « d’Ingénieur
d’Exploitation de la Navigation Aérienne » à Alger puis à Casablanca, et
enfin « Ingénieur des Travaux de la Navigation Aérienne » et
« Commandant de l’Aéroport » de la capitale du Maroc, Rabat-Salé.
En prison au
Maroc ?
A Rabat Salé, il m’arriva un
drôle d’aventure :
Commandant de l’Aéroport de la
Capitale du Maroc, j’étais, par voie de conséquence au premier rang lors
d’arrivées, de départs ou de cérémonies officielles sur l’Aéroport et au
courant de bien des choses et même d’informations sur ce qui se passait à la
Cour de S.M. Mohamed V.
Un jour de 1958, Le Roi, le
Prince héritier et presque toute la Cour devaient aller de Rabat à Tunis en
voyage officiel en avion DC4. Ses invités, huit chefs historiques du F.L.N. ont
été embarqués sous mes yeux dans un DC3. Cet appareil fut détourné en cours de
vol sur la Méditerranée au large d’Alger et contraint d’atterrir et ses
passagers faits prisonniers. Le Roi furieux de ce grave incident diplomatique
fit faire des enquêtes serrées en vue de rechercher et trouver l’auteur du
renseignement fourni à l’Armée de l’ Air Française.
Officier français, croyant à l’époque à l’Algérie française, j’avais donné, en
toute bonne foi, le renseignement demandé par la Sécurité française, et
n’avais, sur le moment pas envisagé les conséquences qu’il pouvait y avoir. Ma
hiérarchie, DAC du Maroc DNA, sachant ce qui pouvait m’arriver (arrestation
certaine), décida ma mutation à l’ Aérodrome de
Cherbourg en urgence.
(Note de JJL : Les brouillons
s’arrêtent là…)
(Notre de FXB : Malheureusement…)
(1) Maryse BASTIE (1898-1952)
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Marie Louise DOMBEC est
née à Limoges le 27 février 1898. Son père meurt alors qu'elle n'a que 11 ans.
Elle commence son extraordinaire existence comme simple ouvrière dans une usine
de chaussure comme piqueuse sur cuir.
Elle épouse son filleul
de guerre, le lieutenant pilote Louis BASTIÉ et découvre sa passion pour
l'aviation. Elle passe son brevet de pilotage en 1925. En 1926, son époux meurt
dans un tragique accident d'avion. Elle est engagée à son tour comme monitrice
de pilotage.
En 1928 Maryse Bastié
et Maurice Drouhin battent le record de vol en ligne
droite en parcourant 1058 km entre Paris et Trepton
en Poméranie dans un avion léger biplace. En 1929 par elle bat le record de
France féminin de durée de vol avec 10h30 et le record international féminin de
durée avec 26h44.
Dès lors les records
s'enchaînent :
- le 2 septembre 1930,
après 4 tentatives, elle reprend le record de durée avec un vol de 37h55
marquant la un exploit exceptionnel
- le 28 juin, elle
pulvérise le record international de vol en ligne droite avec 2976 Kms
parcourus entre Le Bourget et Yurino en Russie
- le 30 décembre 1936,
elle traverse l'atlantique Sud, ralliant Dakar à Natal au Brésil en 12h05, ce
qui lui vaut la Légion D'honneur
Grande résistante de la
seconde guerre mondiale, elle recevra le grade de commandeur de la Légion
d'honneur.
Lors d'un meeting le 6 juillet
1952, elle meurt dans le crash d'un Noratlas. Elle
est citée à l'ordre de la Nation.
Mise en page et compléments iconographiques :