Mise en ligne complète : 03/2020
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Les HOMMES du GROUPE de
CHASSE GC III/6 (3/6) La guerre de Joseph
Adolphe BIBERT 1939-1944 Seconde partie II. de WEZ THUISY au LUC en PROVENCE |
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Lien : MORANE SAULNIER MS
406 |
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Lien : DEWOITINE D.520 |
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vers la première partie : I. de
CHARTRES à BOUILLANCY Lien vers la
troisième partie : III. L’A.F.N. |
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SOMMAIRE de la
SECONDE PARTIE Cliquez sur les liens ci-dessous |
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15/11/1939 – 30/04/1940 |
30/04/1940 – 20/05/1940 |
20/05/1940 - 31/05/1940 |
31/05/1940 - 18/06/1940 |
La
Campagne de France du GC III/6 au jour le jour : 10 mai au 18 juin 1940 |
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Pour quitter cette page et aller directement à a troisième
partie de « l’Histoire du GC III/6 » : Alger |
L’histoire du GC III/6
rédigée ici, fruit de plusieurs années de travail, ne se lit pas comme un livre ! Si elle est présentée en
trois parties, sur trois pages Internet principales constituant simplement le
squelette de ce récit, de multiples
pages complémentaires (une centaine) s’ouvrent en cascade à partir des
liens soulignés (de couleur bleu-vif) : album de photographies,
biographies, articles de presses, etc. etc. A chacun d’ouvrir ces pages comme un dictionnaire, dont on n’a
jamais fait complètement le tour, d’où le
besoin et l’envie d’y revenir pour compléter son information et, je
j’espère, son plaisir... |
Ces trois pages
principales, pour ne pas les surcharger, ne contiennent qu’une partie des photographies
mises en ligne. La plupart de celles prises par Joseph Bibert, plus
personnelles, se trouvent dans les pages annexes « Album de Joseph Bibert » ou dans les pages de biographies de pilotes accessibles
par différents liens posés chapitre par chapitre. De même, si le récit est
chronologique, ce n’est pas un « journal » puisque l’historique du Groupe et les livres de marche de ses deux Escadrilles,
documents officiels au jour le jour, ont été retranscrits et mis en ligne
dans trois pages annexes accessibles par les liens suivants : |
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Après l’A.F.N : Première
Escadre Aérienne
WEZ
THUISY
15/11/1939 – 30/04/1940
Lien vers
la page :
Les
aérodromes du groupe de chasse GC III/6 de la campagne de France
« On ira pendre notre linge sur la
ligne Siegfried », chanson de Ray Ventura, est le tube musical du moment
en France. On peut penser que les « rampants » du GC III/6 s’en sont
donnés à cœur joie dans leurs véhicules pendant le trajet les rapprochant de
100km de la frontière, fanfarons inconscients, convaincus par la propagande,
comme tous les français à cette époque, que la guerre pourra être vite gagnée
et que nos troupes seront bientôt en Allemagne à portée de l'équivalent de
notre ligne Maginot !
Ligne Maginot et
« Westwal », (« Le Mur de
l'ouest »)
pour les Allemands, baptisé « Ligne Siegfried » par la propagande
alliée. Dans leur
délirante obsession de la sécurité, les milieux dirigeants politiques et
militaires français imaginèrent à partir de 1930 qu'il leur suffisait de
donner à l'armée française une aptitude exclusivement défensive pour
maintenir la paix ; ce qui est fondamentalement faux car il n'est pas de
meilleure défense que de pouvoir porter la guerre et ses ravages chez
l'ennemi. La guerre de 1914-1918, ayant révélé l'efficacité de la défensive
reposant sur des plans de feu bien disposés et continus, leur conclusion fût
que l'idéal était de constituer un tel front en profitant de toutes les
ressources de l'art de la fortification, marotte de nos militaires depuis les
Gaulois, afin que les envahisseurs trouvent pour les arrêter non de simples
tranchées creusées a la hâte mais un système complet de constructions
bétonnées et souterraines. Ainsi naquit la Ligne Maginot, du nom d'un
ministre des armées de l'époque, combattant de 14-18 où il avait été blessé
dans les tranchées. Bien que la lecture des premiers devis ait obligé à en
rabattre sur les projets initiaux, ce qui fût réalisé de 1932 à 1938 a été
assurément la plus formidable fortification du XXème siècle, et
même de tous les temps. La Muraille de Chine est plus longue, mais plus
simple techniquement et sa construction demanda des dizaines d'années, et,
sauf en de rares endroits, le « limes » romain n'était pas un mur
continu mais une suite de fortins. Le Mur de l'Atlantique ne fût qu'un
pointillé de surface. La
Ligne Maginot était composée de gros ouvrages reliés entre eux par de petits
éléments, le tout très soigneusement disposé sur le terrain. En approchant,
l'ennemi devait être gêné, et ses chars arrêtés, par des obstacles passifs
divers, notamment des rails enterrés verticalement; par contre il avait été
décidé de ne pas miner le terrain. On pensait donc que les assaillants
arriveraient immanquablement sur des zones de tir parfaitement dégagées,
battues par des armes abritées sous béton à l'épreuve absolue des obus de 210
mm, le calibre lourd allemand de l'époque ; des tourelles éclipsables
étaient également prévues pour résister à ce gros calibre. Cependant,
l'ennemi ne pouvait voir que peu de choses de l’ouvrage car l’essentiel se
passait sous terre : des centaines de kilomètres de galeries et couloirs
bétonnés, pourvus de voies ferrées, offraient des liaisons faciles et rapides
aussi bien avec l'arrière qu'avec les ouvrages voisins ou avancés. Des lignes
téléphoniques enterrées assuraient les transmissions. Sous terre encore, des
casernements complets, des dépôts de munitions, de pièces de rechange et de
vivres, des centrales électriques, des infirmeries.... Tout avait été prévu
pour que les occupants puissent mener une guerre relativement confortable, et
conforme à l'ordre social de cette époque, car, sans se poser de questions
sur les coûts supplémentaires que cela allait entraîner, les concepteurs
avaient prévu trois cuisines dans chaque bloc ; une pour les officiers,
avec réserve de bons vins et de mets délicats, une pour les sous-officiers
plus simple et une pour la troupe avec réserve de picrate et de haricots
secs... Le
gros défaut de la Ligne Maginot était de n'être construite qu'a moitié et de
s'arrêter à Montmédy. Le débat sur son efficacité, ouvert depuis le premier
coup de pioche, ne trouva jamais de conclusion incontestable. « Ça n'a
servi a rien, disent ses adversaires, puisqu'on a été envahis ! »,
« Justement, répondent ses défenseurs, on a été envahis là où elle
n'existait pas ». La
« Ligne Siegfried » suivait des principes diamétralement opposés.
Construite beaucoup plus vite entre 1937 et 1938, elle était composée de
petites casemates (jusqu'à 50 au km2) non reliées entre elles mais
échelonnées en profondeur (jusqu'à plusieurs km). Là, pas d'artillerie en
tourelles escamotables, pas de dépôts souterrains, pas de garnisons
permanentes. La Ligne Siegfried était destinée à abriter temporairement des
troupes de campagne et à leur fournir des positions un peu plus protectrices
que le trou individuel, sans plus. Mais contrairement à la Ligne Maginot, elle
était protégée par de nombreux champs de mines. Elle
joua parfaitement son rôle en septembre 1939, lors de la timide offensive que
la France mena en Sarre pour contenter son opinion publique et ses Alliés. A
peine arrivés au contact des premières casemates, les généraux français
estimèrent qu'ils n'avaient pas les moyens de les attaquer et réclamèrent un
ordre pour ne pas avoir à poursuivre leur avance ; l'État-major
s’empressa de le donner puisqu'on pouvait finalement revenir plus sûrement
attendre derrière l’imprenable ligne Maginot ! |
L’échelon roulant du GC III/6 au début de la guerre est
encore équipé de véhicules disparates
Sur ce
mauvais cliché, on reconnaît cependant un tracteur LATIL TL6 de 1935 : voir ce lien
L’arrivée en octobre de 130.000 soldats
anglais sur le sol français et de quelques unes de leurs escadrilles, et le
fait que le Congrès américain ait voté le 4 novembre la loi « Cash and
Carry », qui autorise la vente sous conditions de matériel de guerre aux
belligérants, y est peut être pour quelque chose.
Mais les premières brutalités nazies
surviennent à Prague le 17 novembre lors d'une intervention contre les
célébrations de la fête nationale de la Tchécoslovaquie, qui se sont
transformées en une manifestation de résistance nationale contre l'occupant.
Celui-ci y répond par la fermeture des écoles supérieures. Neuf leaders
estudiantins sont exécutés et 1200 étudiants sont déportés dans les camps de
concentration.
La marche vers l’abîme est maintenant
quasiment irréversible, mais personne n’en a encore conscience, personne sauf
un certain colonel De Gaulle qui, mettant à profit l’exemple polonais, s’est
permis d’écrire au C.Q.G. le 11 novembre : « Le moteur bouscule
nos doctrines… Il faut créer des divisions cuirassées. Nous avons un matériel
excellent ; il s’agit de l’organiser comme les Allemands et nous aurons la
supériorité sur eux ». Le général Gamelin, Commandant suprême, fait
répondre une nouvelle fois : « Si des chars parvenaient à
traverser notre front, leur cavalcade de l’autre côté ne serait dangereuse que
pour eux-mêmes ». La polémique commence, sans que le rôle qui
s’avérera primordial d’une aviation moderne ne soit d’ailleurs pris en compte,
ni par les anciens, ni par les modernes…
La presse pour sa part y va chaque jour de
ses couplets patriotiques et, censure oblige, ne peut que broder sans grande
précision autour des communiqués officiels. Quand on connaît la suite, cet article du
« Figaro » du 15 novembre 1939 devient une véritable page
d’anthologie : Messerschmittdt,
Heinkel 111 devenu n°3, un Junkers DO 17,
les suspentes du parachute de l’aviateur allemand abattu qui brûlent, etc. Une
belle envolée lyrique, propre à endormir toutes réflexions sur les vraies valeurs
opérationnelles de notre Armée de l’Air... « la
meilleure du monde », bien entendu !
Le 15 novembre le GC III/6 reçoit l’ordre
inopiné de quitter Bouillancy et de s’installer à Wez Thuisy dans la marne,
entre Reims et Mourmelon : voir carte. Le Groupe prend
la place du GC I/4, présent à Wez Thuisy depuis le début de la guerre, qui part
pour Norrent-Fontes dans le Pas de Calais, et se trouve administré maintenant
par la compagnie de l’Air 73/112 et rattaché pour ses ravitaillements
techniques au parc 3/112 de Reims.
Les abords de la plateforme de Wez Thuisy
se prêtent relativement bien au camouflage des appareils et des installations,
mais celles-ci sont relativement éloignées les unes des autres. Heureusement le
réseau de communications fonctionne à peu près correctement. Par contre la
plateforme elle-même, parfaitement nivelée, est parfaitement identifiable,
puisqu’elle contraste terriblement avec les champs et les bois environnants
encore bouleversés par les durs combats de la première guerre mondiale. Ceux du
GC I/4, qui ont trouvé ici en arrivant en septembre la même misère qu’à
Bouillancy, n’ont pas encore réalisé tous les aménagements nécessaires, dont le
camouflage du terrain, et le spécialiste de l’intendance qu’est le capitaine DE
PLACE va s’empresser de remédier à cet état de fait, en établissant un plan de
travaux rigoureux.
Tout le personnel du Groupe est mis une nouvelle
fois à la tâche avec celui de la compagnie de l’air, pour réaliser en priorité
les installations, tranchées et alvéoles, propices à protéger les hommes et le
matériel d’éventuels bombardements aériens. Ils seront malheureusement peu
aidés par « Dame Nature » en ce rigoureux hiver 1939/1940, car la
neige, le gel et de dégel, rendront le travail ingrat et ses résultats
décevants.
Les officiers sont logés dans les villages
de Wez Thuisy et de Prunay où cantonnent également les sous-officiers. Les pilotes
disposent d’une maison à Wez, bientôt dénommé « La Case », décorée
par les artistes du Groupe sous la conduite du sous-lieutenant SALAÜN où ils se
retrouvent quand ils ne sont pas d’alerte au terrain et où ils prennent leur
petit déjeuner. C’est là que les pilotes pourront bientôt fêter leur premier
succès à l’aide d’un produit régional approprié, le champagne, mais aussi vivre
les premiers drames.
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« La
Case » : maison mise à la disposition des pilotes à Wez où
ils peuvent passer la journée quand ils ne sont pas d’alerte |
Le sergent mécanicien Robert UMBERT, de la
6ème escadrille a témoigné :
Premier contact du sergent mécanicien
UMBERT(*) avec le terrain de Wez Thuisy « ...
notre Groupe est depuis le 15 novembre sur le Terrain de Wez Thuisy, près de
Reims et au pied du mont Cornillet, lequel était célèbre pour avoir été un
champ de bataille pendant la « Grande Guerre ». Nous trouvions sur
le terrain des obus non éclatés de 1917 qui étaient mis en tas par ci et par
là et que les armuriers faisaient éclater de temps en temps quand une envie
les prenait. Mais c’était toujours une opération clandestine. Nous trouvions
aussi des restes de fils de fer barbelés et un peu partout des tranchées
comblées et qui réapparaissaient lorsqu’un effondrement de produisait. Nous
pouvions alors voir les restes de masques à gaz ou des « boites de
singe » qui étaient le corned beef de 1914. L’époque
ne se prêtait pas aux pistes sophistiquées, le matériel « moderne »
de 1940 n’était pas très délicat et supportait tant bien que mal la boue qui
se trouvaient dans les cabines. Comment faire mieux avec des chaussures
crottées ? Sur
Morane 406, le complément d’huile de faisaient directement du bidon au réservoir
placé latéralement sur une paroi en pente et les pieds dans la boue. Le
radiateur de l’appareil était escamotable. Pour les vols de routine dans le
secteur, le mécanicien démarrait l’appareil avant de laisser la place au
pilote dont les bottes étaient pleines de gadoue. Le
Morane avait un plan fixe horizontal fixé par une traverse profilée qui
n’était pas très discrète. Cela ne nous choquait pas et nous trouvions cet
avion beau. Il n’avait pas de roulette de queue, ce qui rendait beaucoup plus
sportif ses déplacements et ses virages dans la gadoue. Le 10
mai 1949, nous avions changé de terrain. Nous bous trouvions à Chissey.
C’était le début de l’offensive nazie aux conséquences
funestes !... » |
(*) Robert UMBERT, caporal-chef
à Chartres en septembre, nommé sergent le 1 janvier 1940, mécanicien à la 6ème
escadrille depuis le début de la guerre
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Série de photographies
transmises par la famille BOYMOND que je remercie - Droits réservés
Page spécifique
consacrée au sergent-chef BOYMOND
Le GC III/6 est rattaché maintenant au
Groupement de Chasse 23, sous les ordres du Colonel CANTON basé à COURMELOIS à
1,5 km de Thuisy, avec le GC II/2 et le GC I/5. C’est suite à la chaude alerte
des 9 et 10 octobre et à la nécessité de renforcer le dispositif Nord que le GC
III/6 a été déplacé.
Pour
comprendre ce qui est dit ici de l’activité du Groupe III/6 à Wez Thuisy
pendant la « Drôle de Guerre », il est important de se référer à la
note de l’État-major du 13 novembre 1939, extrêmement complète et détaillée,
qui a fixé le cadre des missions du Groupe et la manière de les exécuter. De
larges extraits de ce précieux document et surtout, une carte détaillée du
théâtre de ses opérations, établie spécialement pour faire apparaître
clairement l’emplacement de tous les terrains d’aviation (français et anglais)
et les zones s’intervention respectives des trois Groupes constituant le
Groupement 23, font l’objet d’une annexe à cette page ; elle est
accessible par le lien suivant :
Les
missions du Groupement 23 et du Groupe de Chasse GC III/6 en décembre 1939
C’est dans ce cadre que le contact avec
l’ennemi est établi pour la première fois le 23 novembre, jour où le
sergent-chef LE GLOAN (MS n°407 n°277) et le sous-lieutenant MARTIN
(MS 406 n° 413 « La Sardine »), de la 5ème
escadrille, abattent un Dornier 17P de la 5.(F)/122 dans la Meuse après une
longue poursuite au ras des arbres, première victoire du GC III/6.
Page
spécifique consacrée au lieutenant LE GLOAN
RAPPEL IMPORTANT : Comme il a été dit plus haut, cette
page n’a pas pour but de raconter un à un les engagements, et une à une les
victoires ou les défaites du Groupe GC III/6, avec la précision chirurgicale
que certains en attendent ; ici, c’est d’abord la vie des aviateurs
pendant le conflit qui est mise en avant. Des ouvrages spécialisés et des pages
annexes sur ce site peuvent être consultés pour cela. Mais la première
rencontre victorieuse avec l’ennemi pour « les hommes du GC III/6 »
mérite d’être détaillée pour bien comprendre dans quelles conditions un peu
misérables les Aviateurs français eurent à exécuter les missions assignées par
les États-Major.
Le départ de la patrouille légère de WEZ
THUISY a eu lieu à 13h 10, sur une alerte venant du poste de guet de Mézières
qui a détecté un avion ennemi à 6 000 mètres d’altitude. En prenant en
considération les distances entre Mézières et Reims, le temps de réaction entre
l’alerte et le décollage des chasseurs français, les vitesses respectives des
appareils, la trajectoire de « l’hostile » qui peut avoir changée et
le temps nécessaire aux Morane pour monter à l’altitude de leur adversaire,
estimée initialement sans grande précision, il n’est pas nécessaire d’être
polytechnicien pour comprendre que les chances d’interception sont finalement
pratiquement nulles ; si elle peut avoir lieu, la chance n’y est pas
étrangère. Ce jour-là la chance leur a souri !
La patrouille est donc à 6 000 mètres
d’altitude, mais elle ne voit rien et s’apprête à rentrer. Elle reçoit l’ordre
lui de surveiller le secteur nord-ouest, et arrivée au dessus de la rivière La
Retourne, elle aperçoit un point noir à dix kilomètres volant à environ
5 800 mètres sud/sud- est vers Reims. C’est un Dornier 17P, appareil rapide
et racé, parfaitement adapté aux reconnaissances lointaines. Sa vitesse et la
puissance de son armement défensif en fait un adversaire particulièrement
difficile à rejoindre et à attaquer par l’arrière.
Et pourtant, les deux Morane, bien placés
dans le soleil, peuvent le surprendre et l’attaquer en « tenaille ».
Le Dornier vire plein est et pique vers le sol pour échapper aux courtes
rafales des Morane qui ont si peu de réserve de munitions. Il passe Suippes en
rase-mottes, ce qui ne permet plus à LE GLOAN et à MARTIN de l’attaquer
par en dessous. Après la traversée de la Meuse, ils peuvent se rapprocher à
moins de 100 mètres et tirer leurs dernières cartouches disponibles. Le
bimoteur finit par prendre violemment contact avec le sol près de Bras‑sur‑Meuse,
à cinq kilomètres au nord de Verdun ; les trois membres de l’équipage du
5(F)/122 alors basé à Köln-Wahn (Cologne), les lt K. Behnke, uffz. H.
Schrutek et uffz. A. Herman, sont immédiatement fait prisonniers. Mais la
« chasse » a duré près de ¼ d’heure !
Une balle allemande a atteint la rangée
des 6 cylindres droits du moteur Hispano-Suiza 12Y‑31 du lieutenant
MARTIN, une autre a traversé la carlingue sous le siège du pilote et la jambe
gauche du train d’atterrissage du Morane de LE GLOAN a été endommagée,
mais ils rentreront tous deux sans encombre.
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Dornier 17P du 5(F)/122 abattu à Bras-sur-Meuse le 23
novembre 1939 |
Citations des deux pilotes |
s/c LE GLOAN et lt/MARTIN, premiers vainqueurs de la 5ème
du GC III/6 |
Mémoires de l’adjudant René COLIN –
Mécanicien à la 5ème Escadrille ... la
première victoire de l'Escadrille — et je crois même du groupe — a été
remportée par le sergent-chef Le GLOAN, qui avait comme équipier le
lieutenant MARTIN, un jeune mais un fonceur. A chaque retour de mission, nous
avions droit à une petite séance d’acrobatie : passage en rase-mottes
avec chandelle, tonneaux en montant, ce qui ne devait pas toujours plaire au
capitaine CHAINAT. Je le vois encore disant : « M. Le GLOAN, M.
GOUJON, au lieu de vos acrobaties, vous feriez mieux de vous entraîner au
tir. Vous avez vingt obus, c’est beaucoup trop. Sur mon Spad, j'en avais,
bien moins : c'était la tête du pilote que je visais ! »... |
Si cette victoire est bien entendu fêtée, elle
fait naître cependant bon nombre d’interrogations et de doutes : l’absence
de dispositif de réchauffage des armements a fait que le canon du Morane du s/c
LE GLOAN a été enrayé après le 17ème obus et celui du
lt MARTIN après le 26ème. Pire, si on a pu compter 7 impacts
d’obus dans le Dornier, seuls 2 ont éclaté, un dans le fuselage, l’autre dans
un aileron, ne faisant que des dégâts minimes, ce qui démontre la mauvaise
qualité des fusées. Beaucoup de temps sera nécessaire pour remédier à minima à
ces problèmes. On peut lire plus loin le témoignage du s/lt mécanicien
BRAUDEAU et comprendre que la réactivité de l’Armée de l’Air, face aux
insuffisances techniques criantes des matériels, restait soumise aux procédures
administratives tatillonnes qui n’avaient pas évolué malgré le fait qu’on était
maintenant en guerre !
Deux jours plus tard, le 25 novembre 1939,
au retour de cinq patrouilles simples ayant décollé à 9h 45 pour le
Secteur de la Meuse, le groupe perd bêtement deux pilotes confirmés dans un
accident, les s/C LAMAZOU (MS 406 n°600) et adj. LE TALLEC (MS 406
n°474), qui, perdus dans le brouillard, percutent le sol près de Mourmelon.
Même si la responsabilité de ces deux
pilotes ne peut pas être totalement dégagée dans leur accident, ils seront
cités comme à l’habitude à l’ordre de la Brigade Aérienne avec attribution à
titre posthume de la Médaille Militaire.
CITATIONS de l’adj LE TALLEC et du s/c LAMAZOU « Adjudant
LE TALLEC Léon, adjudant pilote de grande classe, plein de courage et d'abnégation.
Blessé mortellement au retour d’une mission de guerre, le 23 novembre 1939.
Totalisant plus de 1 400 heures de vol. » « Sergent-chef
LAMAZOU Pierre, sergent-chef pilote de tout premier ordre, particulièrement
allant et courageux, donnant l’exemple à tous. Blessé mortellement au retour
d’une mission de guerre 25 novembre 1939. Totalisant déjà près de 645 heures
de vol. » |
Joseph BIBERT n’est pas présent au Groupe
en cette fin novembre. Il a enfin pu bénéficier d’une courte permission qu’il
met à profit pour rendre visite à une partie de sa famille paternelle qui a été
évacuée d’Alsace et se trouve à Granville où une de ses tantes travaille à
l’Hôtel Restaurant « Les Gourmets » de la famille Girard ; il en
ramené quelques photographies.
Album des photographies n°V de Joseph Bibert – Novembre 1939
à mai 1940 – Voyage à Granville
Cliquez sur le bandeau des miniatures
ci-dessus pour ouvrir la page contenant ces photos
Le 7 décembre le capitaine DE PLACE,
commandant du III/6 est remplacé par le Commandant CASTANIER, polytechnicien,
qui occupait jusqu’alors un important poste d’Etat-major, mais qui voulait
participer plus activement au combat. Une prise d’armes a lieu dans un froid
glacial pour cette prise de commandement.
Page
spécifique consacrée au commandant CASTANIER
Les adjoints du Commandant CASTANIER sont
toujours le lieutenant JACOBI pour la 5ème escadrille et le
lieutenant GUERRIER pour la 6ème, ce dernier également
polytechnicien, mais aussi chasseur de lapins et pêcheur émérite ne sera jamais
considéré comme un « foudre de guerre » par ses pilotes !
Comme son prédécesseur, le Commandant
CASTANIER ne souhaite pas reprendre des anciennes traditions pour ses deux
escadrilles, et c’est finalement lui qui choisira le 15 février 1940 les deux
insignes du GC III/6, le masque « Tragédie ou Sévère » pour la 5ème
et le masque « Comédie ou Rieur » pour la 6ème, dessinés
sans doute par les lt GUERRIER et s/lt SALAÜN. De l’avis même du capitaine
DE PLACE, « Tragédie » et « Comédie » correspondent bien à
l’état d’esprit du Groupe et selon la formule littéraire, « Tragedia e Comedia, totta la caccia ! » (Tragédie et Comédie, c’est
toute la Chasse !) :
Quelques personnages importants rendent
visite au Groupe : Mr Laurent EYNAC (premier Ministre de l’Air
en 1928, sénateur en 1939, il sera de nouveau Ministre de l’Air du 21 mars au
16 juin 1940)
i) et le Général D’ASTIER, commandant la Zone Aérienne du Nord, le 12 décembre
1939, l’ Air Marschal A.S. BARRATT, Commandant en chef de la R.A.F. en France,
le lendemain, la commission sénatoriale, le 28 décembre, M. Guy LACHAMBRE,
Ministre de l’Air le 13 janvier 1940, accompagné du Général VUILLEMIN,
Commandant en Chef des Forces Aériennes Françaises. Mais ces visites sont
insuffisantes pour rompre réellement la monotonie des longues journées d’hiver
faites surtout de longues attentes ; les Morane ne volent vraiment pas
souvent, au grand désespoir des pilotes, qui, après des jours et des jours
d’entraînement depuis plusieurs années ne s’attendaient pas, une fois entrés en
guerre à vivre cette situation frustrante !
Il est cependant inquiétant, en lisant le
livre de marche de la 6ème escadrille, de constater que depuis le début
de la guerre, les premiers exercices de tir sur manche tractée semblent n’avoir
été faits qu’au cours du mois de décembre. Les résultats ont été désastreux,
mais cela ne semble pas avoir trop inquiété le rédacteur qui tourne cela
plusieurs fois en plaisanterie...
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Terrain de Wez Thuisy - 12 décembre 1939 : départ de
M. Laurent EYNAC après sa visite au III/6 |
Le Général VUILLELIN et l’Air Marschal BARRATT |
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Lieutenant ASSOLLANT |
Sous-lieutenant COLONGE |
Capitaine JACOBI |
Sous-lieutenant MARTIN |
Sous-lieutenant SALAÜN |
Quelques pilotes du GC III/6 à Wez Thuisy
Noël du
GC III/6 dans les caves POMMERY à SILLERY
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Mistress JAMES, la
marraine américaine du GC III/6 est nommée « sous-lieutenant
honoraire » du Groupe Lt GUERRIER, s/lt STEUNOU, cne GUERRIER et cdt CASTANIER |
Mistress JAMES est la marraine de guerre
du Groupe III/6, selon une coutume datant le la guerre 14/18, liée à
l’implication de l’escadrille américaine « La Fayette » dans la
grande guerre. C’est Jean ASSOLLANT, qui par ses relations outre-atlantique, a
pu obtenir le parrainage de cette riche Américaine liée à la Compagnie
« Pan American Airways » et qui vit alors en France. Pour permettre
aux Hommes du III/6 de passer le meilleur Noël possible, elle n’a pas hésité à
affronter une météo exécrable et de verglas des petites routes de campagne
française pour arriver à Wez le 24 décembre. Elle a organisé à Sillery dans la
cave de la célèbre maison de Champagne Pommery, un arbre de noël où tous les
personnels sont conviés et se sont vus offrir un cadeau identique ;
friandises et vêtement chaud. Un film est également projeté. Le colonel ETIENNE
a même trouvé le moyen de faire radio-diffuser cette petite fête en Amérique.
Chacun donne de la voix pour entonner, entre autres, le « Minuit
Chrétien »...
La soirée est chaleureuse ; Mistress
JAMES est promue « sous-lieutenant honoraire » du Groupe et tout le
monde s’en va à WEZ participer à la messe de minuit ; certaines libations
préalables conduirent à ce que les chants fassent trembler cette nuit là les
voûtes de l’église d’une manière inhabituelle !
Les pilotes terminent la nuit à « La
Case », décorée pour la circonstance, où un repas froid les attend.
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Dans la cave Pommery à Sillery, la fête de Noël organisée
par Mistress JAMES, la marraine de guerre américaine du GC III/6 |
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En haut au haut second
rang, le lt ASSOLLANT et le lt GUERRIER qui chantent avec toute l’assistance, en bas le col ETIENNE, Mistress JAMES, le cdt CASTANIER et
deux épouses d’officiers |
Jean ASSOLLANT et
Mistress JAMES distribuent les cadeaux |
Page
spécifique consacrée au capitaine ASSOLLANT
Le 31 décembre 1939 ; Joseph BIBERT
écrit à son épouse «...
une bonne nouvelle pour nouvel an : je quitte le MGT et prend la 6ème
Escadrille comme « chef de hangar ». Comme on change d’avions, le
pars à Paris pour 15 jours du 8 au 21 janvier 1950 pour un stage chez Bloch...
je me débrouillerai pour partir le 6, donc samedi prochain, et passerai 2 jours
à Chartres ainsi que le dimanche 14.... prépare « trotinette » (la
Peugeot 201). J’ai le cric, as-tu gardé l’eau de vidange où faut-il que je
ramène le l’alcool ?... »
Il faut bien se débrouiller un peu !
On trouve effectivement dans les archives
du Groupe l’information disant que Joseph BIBERT a permuté avec l’adjudant
PÉRALES le premier janvier 1940 ; Joseph, passant des M.G.T de
l’État-major du groupe au « second échelon » (c'est-à-dire la sixième
escadrille du lieutenant GUERRIER, qui sera d’ailleurs nommé capitaine le 1er
février) avec les fonctions de « Chef de Hangar », et vice-versa. Il
se donnera beaucoup de mal pour faire honneur à ceux qui lui ont confié cette
responsabilité, et quelques mois plus tard il pourra arborer avec fierté sur sa
poitrine l’insigne métallique du « masque rieur », emblème de la 6ème
dont il resta fier sa vie durant.
Quand au début du mois de janvier le
lieutenant GUERRIER et le s/C BOYMOND sont envoyés à Toul pour renforcer le G.C.
I/3 tout le monde pense les rejoindre bientôt et se rapprocher ainsi de la
frontière allemande, mais trois jours après la patrouille est rentrée et c’est
une grosse déception pour les aviateurs avides de combats.
Le sous-lieutenant STEUNOU (Pilote) ainsi
que les sergents BIBERT, HOULES et ROBERT (mécaniciens) sont envoyés en mission
à Villacoublay le 7 janvier en vue d’une « transformation » sur BLOCH
152, décision « accueillie très
froidement » (SIC). Ils rentrent le 22 « encore plus désenchantés » (SIC).
A priori il n’y aura pas de suite à cette formation. Heureusement pour le
Groupe !
Le 17 février 1940 ; autre lettre «... aujourd’hui j’ai parlé longuement
au capitaine (Guerrier) ce matin. Il est très content de moi. Depuis que le
suis en escadrille je me trouve mieux et je suis vraiment dans mon élément.
Avec un peu de courage et beaucoup de persévérance je crois que je tiendrai
très bien ma place... je t’écris ce soir dans un baraquement de la 6ème
escadrille qui sert de bar, P.C. etc. On n’y est bien chauffé. On dirait une
cabane de chasseurs d’ours (trappeurs)... »
22 février ; « ... je suis naturellement dans ma
cabane. J’ai mis de l’ordre et je suis bien à présent. Pour aujourd’hui, pas
mal de travail en vu ; graphiques des heures de vol et des vidanges
d’huile, tours de service des mécanos. Il y a déjà du mieux à l’escadrille,
mais il reste pas mal de choses à mettre au point, et j’ai honneur à employer
les grands moyens pour faire marcher les gens. Pour le moment de suis
personnellement une discipline assez sévère ; à l’heure fixée, toujours au
travail, enfin, un tas de choses où je suis le premier à donner l’exemple.
C’est je crois une des seules méthodes qui prendra et qui donnera des résultats
parce que personne n’aura rien à me reprocher. Je me trouve même un peu seul,
car tout en étant bon copain avec Jean Emery, Japiot et Diaz, je ne fais plus
partie de leur équipe... je me dais mettre en boîte, me traiter de lâcheur,
mais je tiens bon... ».
Comme on le voit ici, comme on le sait,
être distingué par ses chefs et devenir soit même chef n’est jamais chose
facile ; le manque de tolérance, les critiques, les jalousies, les petites
bassesses... sont souvent des freins au travail harmonieux d’une équipe !
L’hiver 1939/1940 sous la neige est très
rude et reste donc très calme militairement parlant, mais la troupe
souffre !
Extrait du journal de marche de l’unité
administrative du groupe :
« … nous abandonnons la grange de Wez pour une baraque isolée se trouvant dans
un bosquet à 2 km du P.C., nous sommes en plein cœur des champs de
bataille, notre baraque est située entre deux tranchées ; le sol est
jonché de vieux vestiges (obus, casques, bidons, etc.). Le confort est absent
dans notre nouveau logis, le froid, le vent et la pluie y pénètrent sans
difficulté ; nous nous calfeutrons le plus possible et aménageons petit à
petit notre triste intérieur ; nous remplaçons l’électricité par des
bougies et l’eau courante par un tonneau de 200 l que nous allons remplir à 3km.
Nous souffrons beaucoup du froid qui sévit particulièrement dans cette région
désertique, tout est gelé et de ce fait nous restons quelques temps sans
eau ; chose désagréable et peu hygiénique… »
L’hiver 1939/1940 sous la neige est très
rude et reste donc très calme militairement parlant, mais les officiers, les
sous-officiers et surtout la troupe souffre !
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Terrain de Wez Thuisy
– Février 1940 sous la neige, deux Morane 406 de la 5ème Escadrille |
Sgt Le MAT, adj COLIN
et sgt PIESVAUX, mécaniciens 5ème Escadrille |
Retour de mission S/c LE GLOAN , cne JACOBI et s/c CHARDONNET |
Série de photographies
faites par Jules PIESVAUX, transmises par son fils Alain que je remercie -
Droits réservés
Le commandant CASTANIER fait ce qu’il peut
pour que la base dont il a le commandement puisse recevoir les aménagements
strictement nécessaires à son bon fonctionnement, comme le prouvent les
demandes répétées, voire les mises en garde, qu’il transmet régulièrement à sa
hiérarchie, mais celles-ci restent la plupart du temps sanas réponse...
Installation du Groupe III/6 sur le
terrain de Wez Thuisy Lettre du 10 mars 1940 du Commandant CASTANIER, commandant la base de
Wez Thuisy, à Monsieur le Colonel commandant le Secteur de l’Air 52 Objet : Aménagements Base Aérienne de Wez Thuisy. J’ai l’honneur de vous rendre compte de ce qui suit : 1) Tous les Hommes (Pionniers de Compagnie et compagnie du 86ème Régiment d’Infanterie) mis à la disposition pour les travaux de la base de Wez Thuisy, rappelés par leur Chef de Corps, ont quitté la base le 6 mars. La compagnie de l’air 73/112 dont l’effectif est par trop insuffisant se trouve dans l’impossibilité de terminer les travaux en cours qui sont d’une importance capitale. Il serait nécessaire que je dispose d’extrême urgence d’une compagnie de travailleurs ou plutôt d’une compagnie de génie avec tout son encadrement. A l’heure actuelle, pas un seul merlon de ceux qui ont été prévus dans le dernier programme des travaux n’est encore terminé ; il en résulte que la majorité de mes appareils ne sont pas abrités aux coups malgré le desserrement effectué. 2) Le montage des 3 baraques du cantonnement des officiers par une entreprise civile va être achevé prochainement. Ces baraques ne pourront être habitées que lorsque leur aménagement intérieur sera exécuté. L’exemple du Foyer du Soldat prouve que le GC III/6 et la Compagnie de l’Air 73/112 ne peuvent assurer cet aménagement rapidement et correctement. En conséquence, il y aurait lieu de donner le travail de peinture, de pose de vitres et des serrures, etc. à une entreprise civile dont le rendement serait bien supérieur. 3) L’électrification de la Base n’est pas encore commencée – alors que je m’attendais à ce qu’elle soit terminée pour mars. 4) Il serait indispensable de faire forer un puits dans le cantonnement des officiers et d’y installer une pompe avec un réservoir. Signé :
Castanier |
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Installation du Groupe III/6 sur le
terrain de Wez Thuisy Compte rendu du 12 mars 1940 sur le fonctionnement des postes de guet
complémentaires, suite à demande 1205/3S du 22 février 1940. 1ère Armée Aérienne Zone d’Opérations Nord Secteur de l’Air 52 Groupe de Chasse III/6 Le poste de guet complémentaire est constitué par le poste de la section de Défense et de Sécurité situé à proximité immédiate du P.C. du Commandant de Base (Distance 25 m. voir croquis ci-dessous) PERSONNEL : Le poste de défense qui fonctionne déjà comme poste vigie et comme poste d’alerte a été renforcé de deux hommes afin de pouvoir assurer dans de bonnes conditions sa nouvelle mission. MATÉRIEL : · Abri du poste de défense · Une longue-vue · Une table d’orientation · Un carnet de silhouette · Un carnet de message de guet LIAISON : Le renseignement est inscrit par le chef de poste sur une feuille de message de guet. Ce dernier est remis immédiatement à l’officier de service au P.C. qui en assure la transmission téléphonique au P.C. de Laon et éventuellement à la 14ème batterie et au 5ème Groupe d’Artillerie qui sont reliés par fil direct avec la base. MISSION DU POSTE : Elle est précisée par écrit et affichée dans le poste de guet et dans le P.C., elle consiste à signaler tout avion ennemi ou douteux vu et entendu. Pour les avions amis, des instructions seront données ultérieurement. Signé :
Castanier |
Deux notes du commandant
CASTANIER permettant d’apprécier la grande misère de l’aviation française de
1940...
A deux mois de l’invasion
allemande, il est sidérant de constater la lourdeur administrative qui règne au
niveau des structures de commandement de l’Armée de l’Air !!
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P.C. de l’État-major du Groupe |
Cantine des sous officiers de la 5ème |
Tente P.C. |
Sgt PIESVAUX – 5ème |
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Vues générales du terrain de Wez Thuisy début 1940 sous la
neige |
La tanière des mécaniciens de la 5ème
Escadrille |
Souvenirs d’un soldat affecté à
l’Unité Administrative du GC III/6 (pour rappeler ce qu’était en 1940 les conditions de vie
de la plupart des militaires de carrière, rappelés ou appelés...) « ...nous
quittons Bouillancy le 11 novembre au matin à destination de Wez Thuisy
(Marne) où nous arrivons dans l'après-midi. Notre cantonnement se trouve au
village de Wez ; nous couchons dans une grange où nous restons une
quinzaine de jours ; notre bureau se trouve sur le terrain à proximité
du P.C. Nous abandonnons la grange de Wez pour une baraque isolé se trouvant
dans un bosquet a 2 km du P.C. : nous sommes en plein coeur des anciens
champs de bataille ; notre baraque est située entre deux
ex-tranchées ; le sol est jonché de vieux vestiges (obus, casques,
bidons etc.) Le confort est absent dans notre nouveau logis, le froid, le vent
et la pluie y pénètrent sans difficulté; nous nous calfeutrons le plus
possible et aménageons petit à petit notre triste intérieur ; nous remplaçons l'électricité par les
bougies et l'eau courante par un tonneau de 200 l. que nous allons
remplir à 3 km. Nous souffrons beaucoup du froid qui sévit particulièrement dans cette région
désertique ; tout est gelé et
de ce fait nous restons quelques temps sans eau ; chose désagréable et
très peu hygiénique. Nous
vivons en troglodytes pendant des
semaines dans notre petit bois ; nous nous croyons dans un refuge de
montagne perdu dans une épaisse couche de neige. Le
Capitaine DE PLACE est muté sur Paris et remplacé par le commandant
CASTANIER, et le sergent-chef NUGUE, venant de l’École de Versailles, est
affecté dans notre Unité. Les
distractions sont très rares dans cette région déserte, le village le plus
proche (Prosnes) est à 3 km ; nous y descendons assez souvent où
nous y passons des soirées agréables ; le champagne est la boisson
nationale. Nous pouvons nous rendre à Reims une fois par semaine. A
notre grand plaisir nous revoyons les premiers beaux jours ; la neige à
disparu et a fait place aux violettes annonciatrices du printemps ;
notre petit bosquet devient très agréable ; nous aménageons les abords
de notre « villa » et constatons avec joie le fruit de nos efforts.
Notre camarade LANGLINAY nous quitte, il est muté au Groupe I/16 C'est
avec regret que nous quittons notre cottage (le 30 avril) à destination
d'Arc-et-Senans, petit bourg aux confins du Doubs et du Jura. Notre
cantonnement est situé dans une immense propriété appelée « Les
Salines ». Nous avons l'heureuse
surprise de coucher dans un lit, car depuis la mobilisation cela ne nous est
encore jamais arrivé. Nous passons un heureux séjour dans cette splendide
région. » |
Le commandant CASTANIER a également la
charge de reconnaître des sites où l’État-majorenvisage de créer un nouveau de
campagne pour rapprocher le Groupe de la frontière. On a trouvé dans les
archives du III/6 deux compte rendus signés de sa main concernant une zone
entre Hirson et Rocroi, 50 km au nord de Reims, où des terrains envisagés à
Silly-le-Petit (24 janvier) et au Grand-Douaire (7 mars 1940) ont été reconnus,
mais les avis du cdt CASTANIER sont plus que réservés !
Projet de terrain de
campagne (sans suite) à la frontière
belge entre Hirson et Rocroi reconnus par le commandant CASTANIER
à SIGNY LE PETIT (zone non identifiée) ou dans la clairière
de la ferme u Grand Drouaire (Ardennes)
Les mécaniciens des deux escadrilles, un
peu désoeuvrés, commencent à peindre les nouveaux emblèmes du groupe sur les
Morane de leurs pilotes fin février, ce qui permet ainsi de dater certaines
photographies. Quelques appareils devront attendre car le problème « de la
peinture des ailes et empennages qui s’en va par plaques au cours des
vols » (voir rapport du le 12 octobre à Bouillancy (lien) n’a encore pas
été réglé correctement ; ce n’est que début avril que les derniers Morane
concernés, convoyés à Reims pour cela, reviendront avec une nouvelle
« robe », ce qui explique que leur camouflage ne corresponde plus à
celui reçu en usine à Bouguenais.
Le samedi 24 février le premier rédacteur
du livre de marche de la 6ème cède sa plume. Celui qui le remplace
résume ainsi le début de la guerre et semble affirmer que le moral des troupes
reste bon malgré la longue attente : « Samedi 24 février 1940 -Dans une semaine exactement il y
aura six mois que nous sommes en guerre. Ces six longs mois ne furent troublés
par aucun incident marquant en ce qui concerne le conflit actuel, sauf que la
« guerre des nerfs » a battu son plein, dans tous les domaines.
Celle-ci heureusement a trouvé des nerfs bien tendus et insensibles aux
vibrations, ces messieurs les nazis auront fort à faire pour en attaquer la
charpente »
Le s/lt mécanicien Pierre BRAUDEAU a
témoigné :
Les détentes des armes des Morane ne
fonctionnent pas correctement en altitude... « ...
c’était l’époque où le III/6 envoyaient chaque jour des patrouilles à
8 000 m. où elle se relayaient pour guetter les avions de reconnaissance
allemands. Les pilotes revenaient au terrain furieux et désespérés de n’avoir
pu descendre un Heinkel 111 qui prenait des photos alors qu’ils l’avaient à
bonne portée dans leur collimateur mais leurs armes refusaient de
fonctionner : en altitude, les détentes étaient gelées !... Ces
avions n’avaient pas été faits pour voler aussi haut ! Tout
est rentré dans l’ordre avec de nouvelles détentes, en essai à Cazaux depuis
un an ; le Ministère de l’Air n’avaient pas eu le temps de les
homologuer ! Le commandant du Groupe réussit à se les procurer à l’usine
qui les fabriquait. Cette initiative contre nature fut connue en haut lieu et
le commandant CASTANIER reçut la visite d’un officier supérieur du Ministère
de l’Air qui lui reprocha son « indiscipline » et se ... fit mettre
courtoisement à la porte ... Un mois plus tard tous les Groupes de Morane
406, y compris le III/6, reçurent l’ordre de monter en urgence cette nouvelle
détente, enfin homologué et disponible sans tous les parcs de matériel de
l’Armée de l’Air... » |
C’est sans doute grâce à cette
« indiscipline » du cdt CASTANIER dont parle le s/lt BRAUDEAU,
que le tandem LE GLOAN, MARTIN de la 5ème escadrille, peut
avoir raison le 2 mars 1940, plus facilement que lors de leur difficile
première victoire du 23 novembre 1939, d’un second Dornier 17P de
reconnaissance. Il ne leur faut cette fois que 7 à 8 minutes pour coincer
l’appareil WNr 17360, codé 6M+AM, du 4.(F)/1 et endommager son
empennage ; le pilote allemand est alors contraint à poser son avion sur
le ventre au lieu-dit La Ferme Sainte-Marie, 2 km au sud-est de Bouzonville
(Moselle). Le livre de marche de la 5ème précise avec humour
que : « LE GLOAN a huit
balles dans la queue. » (SIC). On bouchera les trous dans
son appareil avec des petits morceaux de toile sur lesquels a été peinte une
croix gammée !
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Morane 406 de la 5ème Escadrille à Wez Thuisy |
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Le Morane 406 n°413
codé « 2 » du Lieutenant MARTIN, ici avec le sergent de GERVILLIER
à droite Cet appareil, touché en combat, sera perdu par l’adj GOUJON
le 10 mai 1940, et parachuté sur la forêt de Citeaux |
Bien évidemment le lt MARTIN et le
s/c LE GLOAN reçoivent une nouvelle citation pour leur seconde victoire.
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Dornier 17P
WNr 17360, codé 6M+AM, du 4.(F)/1 abattu à Bouzonville le 2 mars 1940 par le lieutenant MARTIN et le sergent-chef LE GLOAN
(seconde victoire des deux pilotes) |
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X, s/c BORREYE, Y, sgt PIESVAUX |
Sgt Le MAT et sgt
PIESVAUX, deux amis inséparables |
s/c Omer BORREYE, sgt
PIESVAUX, X |
Sgt Le MAT et sgt PIESVAUX |
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Entre autres... sgt PIESVAUX et sgt De GERVILLIER |
A droite, adj GOUJON, sgt De GERVILLIER, s/c MERTZISEN |
Au premier plan, adj GOUJON |
A gauche, adj GOUJON, sgt De GERVILLIER, s/c MERTZISEN |
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Terrain de Wez Thuisy – Réchauffage du moteur d’un MS 406
– Sgt PIESVAUX au centre |
Terrain de Wez Thuisy – Quelques Morane 406 de la 5ème
Escadrille |
Série de photographies
faites par Jules PIESVAUX, transmises par son fils Alain que je remercie -
Droits réservés
Le 10 mars 1940, grande effervescence à la
sixième escadrille, une équipe du Service Photographique de l’Armée de l’Air
débarque sur le terrain avec caméras et appareil photographiques pour réaliser
un reportage, aussi bien au sol qu’en l’air. Quelques minutes de ce genre de
films étaient montées avec des invraisemblables commentaires de propagande
dithyrambiques - « Nous vaincrons
parce que nous sommes les plus forts !» - pour être projetées en
première partie dans les salles de cinéma du pays, non pour informer, mais pour
soutenir le moral des français que cette « dôle de guerre »
anesthésiait ! Heureusement de très beaux agrandissements ont été distribués
plus tard à beaucoup de ceux qui étaient à Wez ce jour-là, et ils les ont
heureusement conservés en souvenir ! Ceux de Joseph BIBERT sont présentés
dans une page en annexe accessible en cliquant sur la bandeau des miniatures
ci-dessous :
Exemple de film du Service Cinématographique des Armées au
service de la propagande gouvernementale
Lien
pour écouter la bande son de ce film de novembre 1339 – Qui pouvait être
dupe ?
10 mars 1949 – Reportage photographique du Service Cinématographique
de l’Armée de l’Air à Wez Thuisy : 6ème escadrille du GC III/6
26 images scannées d’une exceptionnelle qualité à partir des
agrandissements 13 x 18 qui ont été conservés par Joseph Bibert
Cliquez sur le bandeau des miniatures
ci-dessus pour ouvrir la page contenant ces photos
Le s/lt MENNEGLIER, affecté à la 6ème
,est arrivé 4 jours plus tôt au III/6
avec son camarade le s/lt CAVAROZ, affecté à la 5ème en provenance
du C.I.C. de Chartres, tout deux étant sortis de l’École de l’Air en 1939. Une
fois en retraite il a écrit pour sa famille ses mémoires, et ce texte d’une
grande précision est un précieux témoigne pour « l’Histoire du GC
III/6 ». De nombreux extraits en sont reproduits dans les différentes
pages de ce site ; remerciements chaleureux à son fils Philippe qui nous
en fait bénéficier !
Les premiers souvenir du s/lt
MENNEGLIER après son arrivée au GC III/6 le 6 mars 1940. Le
commandant CASTANIER avait trois
adjoints : le cne CHAINAT, le
cne TRAVERS, et le cne ASSOLLANT... Le « Père
Chainat » était une vieille connaissance... (voir ce qu’en dit Jean MENNEGLIER sur la page du cdt CASTANIER) Le cne
TRAVERS aimait bien lever le
coude. Il avait commandé un groupe de l'escadre de chasse de Dijon. Je ne
sais plus exactement quelle catastrophe s'était produite à l'occasion d'un
déplacement de son groupe. Certains avions avaient été au tapis. On l'en
avait rendu responsable et relevé de son commandement pour l'envoyer comme
adjoint au III/6. Quand il avait quelques verres dans le nez il aimait bien
évoquer ses malheurs. Je l'ai revu d'ailleurs bien après la guerre en AFN. Il
était toujours capitaine et manifestement alcoolique. C'était triste à
voir.... Le cne
ASSOLLANT, que nous appelions
« Monsieur Jean », était célèbre pour sa traversée de l'Atlantique
nord à bord de « l'Oiseau Canari » avec Lefèvre et Loti et un
passager clandestin qui s'était glissé dans l'avion juste avant le départ des
USA. A l'époque, il devait être un des dirigeants d'Air Madagascar. Il y
retourna après l'armistice et fut descendu par les anglais lors d'une de
leurs attaques contre l'île en 1942. Le
Groupe avait deux escadrilles. La première à laquelle j'appartenais était
commandée par le cne GUERRIER, un
polytechnicien au poil roux qui ne devait pas honorer son nom comme nous
pûmes le constater après le 10 mai... ...
Parmi les officiers pilotes il y avait le lt STEUNOU, un de nos anciens de la promo « Astier de
Vilatte », le lt LEGRAND, un
vieux pilote passé par le rang, grand fumeur de pipe qu'on appelait
familièrement le « Père Legrand ». Il devait être le plus âgé de
tous les pilotes du Groupe. Le s/lt
CAPDEVIOLLE (*), un E.O.A. de notre promotion, était un provençal très
fier lui aussi de son crâne romain et plutôt original. Il s'était procuré un
cor de chasse dont il essayait de jouer et promenait avec lui un cocker noir.
Il fumait avec componction une pipe en écume de mer qu'il affectionnait
particulièrement. Le s/lt VILLEMIN,
un autre E.O.A. de ma promotion, complétait le groupe des officiers qui
devait être rejoint plus tard par SATGÉ
de ma promo, en retard sur nous dans son entraînement à Chartres pour des
raisons inconnues. On me donna comme chef de patrouille l'adjudant JAPIOT qui ne se révéla pas, lui aussi,
comme un foudre de guerre. L'autre
escadrille était commandée par le cne Jacobi, un officier de réserve en
situation d'activité. CAVAROZ,
aussi de ma promo, fut affecté à cette escadrille qui comptait le lt MARTIN, un de nos grands anciens qui
nous avait encadré à Salon. Il y avait aussi SALAÜN et COLONGE,
tous deux de nos anciens et DE
ROUFFIGNAC, un autre E.O.A. de notre promotion... MENNEGLIER – STEUNOU – SATGÉ – CAPDEVIOLLE et son
cocker... Les
commandants de groupes de chasse avaient une grande autonomie. Nous étions
placés en DAT (Défense Aérienne du Territoire) et reliés au centre de
renseignement le plus proche qui nous transmettait tous les messages
provenant des postes de guet aérien. On les reportait sur une carte de
situation et le commandant décidait lui-même d'intervenir ou non sur les
raids. Ce système avait l'inconvénient de voir des patrouilles de deux
groupes différents attaquer le même avion et se disputer sa destruction. Il
ne permettait ni l'économie des forces, ni la concentration des moyens sur
des raids importants ce que le système anglais des salles d'opérations
autorisera et qui sera décisif lors de la bataille d'Angleterre. Quand
j'arrivai à Wez-Thuisy La première escadrille s'était signalée par deux fois
en descendant chaque fois un Dornier Do 17. C'était la patrouille adj LE GLOAN - lt MARTIN qui s'était illustrée dans les
deux cas. Les Dornier interceptés à haute altitude avaient piqué jusqu'au sol
pour essayer de regagner l'Allemagne en rase-mottes ce qui facilitait le
travail du mitrailleur arrière qui n'avait plus à défendre le secteur sous le
fuselage. MARTIN et LE GLOAN avaient eu leur avion touché
à tour de rôle dans les deux engagements. On avait rebouché les trous de
balles dans l'entoilage du fuselage à, l'aide de pastilles frappées de la
croix gammée. Je partis à mon tour avec mon C.P. (Chef de Patrouille)
exécuter ces missions. Comme le MS 406 n'avait pas la carlingue
chauffée, on revêtait sous la combinaison des vêtements chauffants, pantalon
et veste, ainsi que « cagoule » en soie sous le casque et gants
chauffants sous les gants fourrés à crispins. Aux pieds on mettait les bottes
fourrées passées sur les chaussures. On avait sur la poitrine un boîtier de
raccordement relié à l'avion par un câble, sorte de cordon ombilical, boîtier
sur lequel on branchait les prises du courant de chauffage, les écouteurs et
le laryngophone pour la radio et le tube de caoutchouc de l'inhalateur. Ainsi
équipés on montait aux environ de 8 000 mètres pour rejoindre notre secteur
de surveillance. Très rapidement le froid nous saisissait. Le volant de
commande du plan fixe se bloquait, la graisse durcissant avec le froid. Le
débattement du manche prenait des « durs » comme s'il y avait des
crans dans la commande. L'avion ne réagissait plus, quand on poussait le
moteur, qu'avec un certain retard, ce qui obligeait à faire attention dans
les manœuvres en patrouille. Ensuite, au retour, il fallait faire très
attention à l'atterrissage car on n'appréciait plus très bien la hauteur au-dessus
du sol et on avait tendance à arrondir un peu trop haut... |
(*) André CAPDEVIOL, né
à Grenoble le 3 avril 1916 (dont le nom devient plus tard officiellement
CAPDEVIOLLE), breveté pilote militaire le 27/07/1935 sous le n°24569,est sergent
pilote à Istres en 1935 quand il obtient son brevet civil n°5 014 le
12/12/1935.
Page
spécifique consacrée au lieutenant STEUNOU
Le 16 mars Joseph BIBERT, qui a enfin
obtenu sa première permission P.L.D. (2 semaines), quitte momentanément le
Groupe : avec sa voiture personnelle et beaucoup d’inconscience..., dans
des conditions difficiles du fait de la « drôle de guerre », il se
rend en Alsace quelques jours pour présenter son épouse à sa famille qu’il n’a
pas vue depuis le printemps 1939. Sa mère, sa soeur et sa nièce ainsi que
quelques proches de Marckolsheim, ville inaccessible puisque près du Rhin sur
la ligne Maginot, ont pu se réfugier dans le charmant village de Ranspach, dans
la vallée de Saint-Amarin, au pied du col de Bussang, où une tante Religieuse,
Sœur YVO, est Directrice de l’école des filles. Le 30 mars, Joseph est de
retour à Wez Thuisy. Des précieuses photographies de ce périple ont pu être
préservées.
Album des photographies n°V de Joseph Bibert – Novembre 1939
à mai 1940 – Permission en Alsace
Cliquez sur le bandeau des miniatures
ci-dessus pour ouvrir la page contenant ces photos
Il ne retrouvera sa jeune épouse à Alger que
le 19 août 1940 et il lui faudra attendre l’hiver 44/45, 5 ans ½ plus tard,
pour pouvoir embrasser à nouveau sa mère et sa soeur, à Thann, en pleine
bataille pour la libération de l’Alsace : une vraie aventure racontée dans
la troisième partie de ce document.
Les conditions climatiques de ce début de
l’année 1940 restent mauvaises : « Le
printemps doit avoir peur de la guerre » écrit le rédacteur du livre
de marche de la 6ème escadrille. De ce fait on ne vole toujours pas
beaucoup !
Le 29 mars 1940 arrive au Groupe une
patrouille de pilotes polonais composée du Capitaine SULERZYCKI, des
Sous-lieutenants RYCHLICKI et KAWNICK. Ils sont affectés à la 5ème°Escadrille.
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Capitaine Mieczyslaw Sulerzycki (jusqu'en 1930, il utilisait le nom de Szufel), né le 1er juillet
1905. En 1926, il rejoint la 61ème escadrille (6ème
Régiment de l’Air) à Lwow à l École de L'armée de l'air polonaise, où il
est breveté observateur. En 1932, il suit les cours de pilotage et est
affecté à la 122ème escadrille de chasse, puis à la 123ème.
À partir de 1936, il est commandant adjoint de la 122ème. En 1939
il est instructeur du CWL 1 à Deblin. En 1940, en France, il commande la
section polonaise du GCIII/6. En Grande-Bretagne, il est contrôleur des
salles d'opérations des 302ème et 308ème Escadrons,
attaché à la RAF à Northolt et à la RAF à Tangmere, officier de liaison du
Groupe HQ 11 Group. Crédité d'un avion allemand probablement abattu.
Décédé le 6 décembre 1983 à Mabledon. |
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Sous-lieutenant Erwin Kawnik, né le 30 avril 1913. En 1927, il est diplômé d'une école de pilotage
et affecté à la 121ème escadrille (2ème Régiment de l’Air) à Cracovie. En
1939, il est commandant adjoint de la 123ème escadrille de chasse. Le 2 septembre 1939, début de la campagne, il est commandant de la
123ème. En 1940, en France, il est pilote à la section polonaise du GCIII/6.
En Grande-Bretagne il est pilote au 308ème Escadron, puis commandant de vol.
Tué au combat au –dessus de la France le 2 juillet 1941. Trois victoires. |
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Sous lieutenant Boleslaw Rychlicki, né le 19 janvier 1915. Officier de réserve, mobilisé en 1939 à la
31ème escadrille (3ème Régiment de l’Air, appelé « Poznan »
Army »). En 1940, en France, il est pilote de la section polonaise du GC
III/6. En Grande-Bretagne il est pilote au 316ème Escadron. A partir de 1942
pour des raisons médicales, il est transféré à des fonctions au sol. Après la
guerre il a émigré au Canada. A travaillé à l'Association du Transport Aérien
international (IATA). Décédé le 11 septembre 1994 à Montréal. |
Mémoires de Jean MENNEGLIER – Arrivée
de la « Patrouille Polonaise » ...Nous
vîmes arriver un jour trois Morane portant le damier rouge et blanc.
C'étaient des Polonais ayant échappé aux Allemands en passant par la Roumanie
lors de l'invasion de leur pays. Ils étaient venus en France où on les avait
regroupés et entraînés. Ils portaient l'uniforme polonais, leur pays étant
toujours en guerre et représenté par un gouvernement en exil. Il y avait le
cne SULERZYCKI, grand, maigre et
taciturne ; le s/lt KAWNICK,
un petit blond, râblé avec une tête ronde de slave qui, parait-il, avait eu
plusieurs victoires sur P.Z.L. et le s/lt
RICHLICKI, un nom difficilement prononçable, qu'on appelait
« Rikiki », blond, fin, qui jouait du Chopin quand il pouvait
trouver un piano, ce qui fut le cas un soir où nous étions allés faire une
virée dans la Montagne de Reims. Il leur arrivait d'avoir le bourdon, ce qui
se comprend, car ils avaient laissé leurs familles au pays et n'en avaient
guère de nouvelles. Le soir où le spleen les prenait on pouvait vérifier ce
que voulait dire : « Saoul comme un polonais ! » Ils
volèrent toujours ensemble jusqu’au 10 mai, date à laquelle la patrouille fut
dispersée.... |
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A Lyon-Bron, le 27
mars 1939, très bel alignement des Morane MS 406 préparés, à leurs couleurs,
pour les Pilotes polonais qui vont rejoindre les différents Groupes
de Chasse français dans lesquels ils ont été affectés |
Ces trois pilotes sont immédiatement
rejoints par six compatriotes mécaniciens, dont cinq sont brevetés
avions : les sergents KULIKOWSKI et DARBAK, les caporaux-chefs MAKOWSKI,
DZIEKANSKI et JOSEFOWSKI. Le sixième, le sergent PACULA, est un mécanicien
d’armement. Tous rivaliseront d’ardeur et de dévouement avec leurs collègues
français.
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Si le capitaine
GUERRIER est bien le chef de sixième Escadrille du GC III/6... |
Le s/c BOYMOND devant son MS 406 n°684
« Homicide » |
Le sgt GAUTHIER sur son MS n°684
« Mektoub ! » |
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... il est aussi un infatigable pêcheur à la ligne ! |
Ce jour là, le sgt
GAUTHIER vole avec l’appareil du sgt BOYMOND Sur l’aile, son mécanicien, le sgt LEVÊQUE |
Le sgt GAUTHIER devant
son MS n°684 « Mektoub ! » Photographie prise à Chissey sur
Loue après sa victoire du 19 mai 1940 sur un Dornier 17 en collaboration
avec le s/lt STEUNOU et le sgt BOYMOND |
Série de photographies
faites par Georges GAUTHIER, via Lionel PERSYN que je remercie - Droits
réservés
Début avril, petit à petit les choses
bougent, le GC III/6 sort de sa léthargie et l’activité devient plus
soutenue ; il va être de nouveau confronté à l’ennemi. Les « tenus de secteur à priori »
et les « décollages sur
alerte » se multiplient. Des avions allemands isolés sont bien pris en
chasse, mais à chaque fois la vitesse insuffisante des 406 en altitude leur
permet de s’échapper. Cependant la 6ème escadrille connaît son vrai
baptême du feu le 7 avril dans les Ardennes. Le s/lt LEGRAND revendique un
Messerschmitt 110, mais cette victoire sera finalement attribuée seulement à un
autre groupe équipé de Curtiss qui avait également participé à la chasse ;
frustration générale au Groupe ! Mais ce n’est que partie remise...
Quatre jours plus tard, le 11 avril,
l’escadrille des masques « rieurs » fête enfin ses deux premières
victoires officielles ; un Dornier 17P (appareil de la 4.F/122) est abattu
à quelques kilomètres du terrain par le lt STEUNOU et s/c BOYMOND, et
un Heinkel 111 (appareil H17A+GL WNr 2305 de la 3.F/121) dans la région de
Sissonne, au NO d’Amifontaine, par les s/lt VILLEMIN, sgt PIMONT et
sgt MAIGRET. On peut imaginer qu’une activité somme toute réduite, deux
victoires sans perte, l’exposition des trophées au bar de l’escadrille et une
fête bien arrosée au champagne donnèrent à ceux du GC III/6 des sentiments de
sérénité et de force peut être disproportionnés par rapport à la réalité des
choses, comme la suite des évènement le démontrera malheureusement.
CITATION du s/lt STEUNOU « Jeune
officier pilote plein d’allant. Le 11 avril 1940, équipier d’une patrouille
de chasse, a participé à l’interception d’un avion de reconnaissance ennemi,
puis aux attaques portées contre cet appareil qui a été abattu dans nos
lignes » Croix de guerre avec étoile d’argentl |
CITATION du s/lt VILLEMIN « Chef
de patrouille calme et résolu. Le 11 avril 1940, a très brillamment mené en
patrouille l’attaque d’un avion He 111 et l’a abattu dans nos lignes. » Croix de guerre avec palme |
CITATION du sgt PIMONT « Pilote
adroit et audacieux. Le 11 avril 1040 a participé à un combat aérien qui
s’est terminé par la chute d’un He 111 dans nos lignes. » Croix de guerre avec palme |
Dans le livre de marche de la 6ème,
encore à Wez Thuisy le 22 avril : « ... malgré un temps splendide aucune alerte ne trouble la
douce quiétude dans laquelle nous sommes plongés… »,
et le 3 mai à Chissey sur Loue : « ... belle journée dans un cadre montagneux ; se
croirait-on en guerre ?... ». Une semaine plus tard sera une autre
histoire...
Il ne se passera plus rien de bien
important pour le III/6 jusqu’à son départ de Wez Thuisy le 30 avril.
Notons que depuis qu’il est arrivé en
champagne le 15 novembre 1939, 13 nouveaux pilotes ont rejoint le Groupe :
6
décembre 1939 |
sergent |
THIROUXde
GERVILLIER |
5ème |
7
décembre 1939 |
Commandant |
CASTANIER |
E.M. |
8
janvier 1940 |
capitaine |
TRAVERS |
E.M. |
6 mas
1940 |
sous-lieutenant |
CAVAROZ
|
5ème |
|
sous-lieutenant |
MENNEGLIER |
6ème |
|
sergent |
HARDOUIN |
6ème |
|
sergent |
MAIGRET |
5ème |
|
sergent |
TRINEL |
5ème |
29
mars |
lieutenant |
SULERZYCKI. |
5ème |
|
sous-lieutenant |
KAWNICK. |
5ème |
|
sous-lieutenant |
RYCHLICKI |
5ème |
5
avril 1940 |
sergent |
BOUIN |
6ème |
12
avril 1940 |
sergent |
GABARD |
6ème |
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Wez Thuisy – Les
trophées exposés dans le bar de la 6ème Escadrille du GC III/6 Hélice et croix noire prélevés sur l’épave du Heinkel 111
(appareil H17A+GL WNr 2305 de la 3.F/121) abattu à Amifontaine le 11 avril
1940 par les s/lt VILLEMIN, sgt PIMONT et sgt MAIGRET |
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Wez Thuisy – Camouflage du MS 406du s/lt MENNEGLIER - 6ème
escadrille |
Wez Thuisy – Tente du P.C. du Groupe – s/lt CAVAROZ,
STEUNOU et CAPDEVIOL |
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Auberge du Cheval
Blanc aux Sept Saulx s/lt CAPDEVIOL et STEUNOU, cne TRAVERS et JACOBI, lt
LEGRAND (de dos), cne GUERRIER |
Auberge du Cheval
Blanc aux Sept Saulx A gauche, sans doute des « invités » - A droite,
lt LEGRAND, cne GUERRIER et s/ltSTENOU |
Série de photographies
faites par Jean MENNEGLIER, transmises par son fils Philippe que je remercie -
Droits réservés
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Le sergent de
GERVILLIER devant son Morane,« masque sévère » de la 5ème
et son mécanicien Rare série de photographies
d’un MS 406 sous tous les angles ayant permis aux illustrateurs, artistes et maquettiste d’en réaliser
des représentations parfaitement fidèles |
A Wez Thuisy, le
sergent Arnould Jean Sebran, comte deGERVILLIER à bord de son MS 406
« Le Dahut » Cette photographie permet d’apercevoir à droite le
tragique « Mont CORNILLET » de la guerre 14/18 |
Série de photographies
transmises par la famille de GERVILLIER que je remercie - Droits réservés
Page spécifique consacrée au sergent De GERVILLIER
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Profils, dessin d’artiste
et maquette du Morane Saulnier MS 406 n°803 (L832) « Le Dahut » (*) du sergent De GERVILLIER (*) Un dahu :
sans « t », est un animal imaginaire. On propose à une personne
crédule de « l’emmener à la chasse au dahu » |
CHISSEY
SUR LOUE
30/04/1940 – 20/05/1940
Lien vers
la page :
Les
aérodromes du groupe de chasse GC III/6 de la campagne de France
Document
officiel décrivant les caractéristiques principales de la Base Aérienne de
Chissey
Photographie
aérienne du 1er avril 1940
PROJET DE CAMOUFLAGE DE LA BASE DE
CHISSEY DU 17 AVRIL 1940 établi par la Compagnie de l’Air n°23/102 Suivant les ordres de la Note de Service n° 1901/S/ 4T du 4ème Bureau de l'État-major de la ZONE D'OPERATIONS AÉRIENNES SUD, un projet de camouflage a été établi pour la Base Aérienne de Chissey répondant aux questions posées : A - Création de fausses-routes traversant la plateforme En s'inspirant des chemins existants avant l'occupation de ce terrain d'une part, et également en prolongeant des routes ou chemins venant actuellement s'arrêter en bordure du terrain, le projet de fausses-routes a été donc conçu de la façon suivante : 1° En bordure ouest et sud du terrain sur un ancien emplacement de chemins de terre figurant sur la carte au 1/5 000 un faux-chemin a été prévu partant d'un sentier actuellement existant, orienté ouest-est venant de Chissey et s'arrêtant en bordure de la piste. Ce faux-chemin suivrait donc approximativement sur les cotés ouest et sud le sentier disparu pour aboutir à la route des alvéoles nouvellement créés. 2° Un faux-chemin coupant la piste dans le sens longitudinal ouest à est partant du sentier existant ouest-est venant de Chissey (déjà cité ci-dessus) et allant aboutir à 1a patte d'oie de la route des Alvéoles. 3° Une fausse-route coupant en biais la partie nord au terrain faisant suite à une route nord-sud venant de forêt de Chaux aboutissant en bordure du terrain sur la route de Chissey à Arc-et-Senans, cette fausse route irait également aboutir à la patte d'oie. 3° Prolongement en direction de l'est de la route des alvéoles par un faux chemin pour se perdre dans les broussailles de la rive nord de la rivière de la Loue. B - Champs artificiels à réaliser Une étude a été faite à ce sujet, sur le plan au 1/50 000 ci-joint. L’étroitesse des bandes de cultures des terrains environnants a été reproduite dans ce projet sur le terrain, ces bandes allant en général de 30 m., 40 m., 90 m, à 100 mètres maximum, et donnera donc l'aspect des cultures environnantes. Quelques haies ou broussailles ont été également figurées le long des faux-chemins principalement dans le centre de la piste, des broussailles existant dans le paysage des alentours. C - Déplacement éventuel des hangars et leur camouflage La Base Aérienne da Chissey, ne possédant actuellement aucun hangar, la question de leur déplacement et camouflage na se pose donc pas. Il est à signaler à ce sujet, que sur le plan de Base, il a été prévu la construction de deux hangars en lisière ouest du village de Chissey, et très près des maisons de ce pays de façon à en assurer un camouflage dans les conditions meilleures au possible. .../... |
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En plus au sud-est du terrain des alvéoles ont été entreprises dont une est terminée et camouflée et cinq autres en cours de construction ou de camouflage. Ces alvéoles sont réparties en général entre 250 et 300 mètres de distance le long de la rive nord de la rivière de la loue et placées de façon à se confondre le plus possible avec les arbres et les broussailles existants le long de cette rive. D - Emplacement des fausses plateformes Il semble très difficile à première vue de tromper l'ennemi sur l’emplacement du terrain de Chissey par une fausse plate-forme, ce terrain étant entouré de points de repère, très précis, ceux-ci étant les villages de Chissey et d'Arc et Senans, la rivière de la Loue, la forêt de Chaux, la voie ferrée et la route d'Arc et Senans à Chissey. Néanmoins, des recherches ont été effectuées pour la création d'une fausse plate-forme à l'Ouest du village de Chissey, où un terrain a été trouvé semblant pouvoir offrir les aspects d'une vraie plate-forme et dont les dimensions seraient approximativement de 800 x1 200 m. bordé sur le côté par la route de Châtelet à Çhamblay, au nord par un chemin de terre, et à proximité de la rivière de la Loue. MOYENS NÉCESSAIRES POUR L’ÉXECUTION DU CAMOUFLAGE DE LA BASE DE CHISSEY Les moyens, en personnel et en matériel, si l’on se rapporte aux données de l’Exposé sur le camouflage des Bases Aériennes d’Opérations, (stage des Officiers – Coulommiers – Février 1940) sont de 50 hommes et un certain matériel dont la compagnie ne dispose pas, en ce qui concerne : A - Le personnel La Compagnie de l'Air n°23/103, peut avoir dans son effectif propre une soixantaine de travailleurs y compris la section de Défense et de Sécurité dont trente environ pourraient être mis à l’établissement de ces fausses routes, le reste des travailleurs étant occupé à la construction de postes de tir, alvéoles, baraques HPF, baraques Hamont, peintures et poses de grilles etc. etc. et il serait également nécessaire que l'apport des matériaux soit assuré par des camions et du personnel de la compagnie de Transport de Munitions n°4/102 comme il a été fait du reste pour la création de la nouvelle route, des alvéoles. B – Le matériel La compagnie possède deux tracteurs à 3 roues FA5, des brouettes, des pelles, et également 2 camions-bennes prêtés par la Compagnie de l'Air n°32/l02. A ce sujet, une de ces bennes est en transformation en tonne à eau par les soins des services des Ponts et Chaussées, en plaçant sur cette benne un réservoir de 3 000 l. muni d'une rampe d'écoulement. Il faudra donc, que la Compagnie de l’Air n°32/102, par suite de cette transformation, soit dotée d’une nouvelle benne. Un compresseur à moteur pour peinture et ses accessoires et 2 pompes à bitume à pression seraient également: nécessaires à ces travaux. Signé : capitaine MONTEILLET, commandant la Compagnie de l'Air n°23/102. |
Deux notes concernant le
camouflage de la Base Aérienne de Chissey datant du mois d’avril 1940, entre le
départ du GC I/6 et l’arrivée du GC III/6, particulièrement savoureuses...
...sachant que la
position du terrain, si elle ne figure pas sur les cartes de l’Armée, est
parfaitement explicite à cette époque sur la carte Michelin détaillée de la
région !
Réunion au 1er mai 1940 à
Chissey, de la Commission prévue par la note de service
2353/S. et T de la Zone d'Opérations Aériennes Sud pour arrêter le
plan de camouflage de la Base (sur propositions fournies par le Capitaine commandant
la Cie. de l'Air, n°2 050 C.A. du 17/4/40) I°- FAUSES ROUTES Acceptées avec fausses haies. II°- FAUSSES CULTURES Réduire le nombre des parcelles, n’en colorer que 8 à 10 convenablement disséminées sur le terrain. Pour le reste, procéder par fauchages intermittents, les bords des parcelles étant accusées par une application légère d’émulsion de bitume. III°- HANGARS Les hangars prévus ultérieurement seront disposés et camouflés selon les instructions données par la Z.O.A.S. IV°- FAUSSE PLATEFORME La plateforme proposée étant en culture ne sera complètement uniforme qu'à l’époque des moissons et fenaisons. Néanmoins il sera fait des aménagements de faux- hangars et fausses-constructions en bordure de la route. V°- ALVÉOLES Le procédé de camouflage des alvéoles existantes est à poursuivre dans les mêmes conditions pour les alvéoles à construire. VI°- POSTES DE TIR Camoufler une partie des postes de tir en « meules de paille » par l'application des filets paillés, genre Base Tavaux Signé : Capitaine PEPIN, représentant
le Général commandant la Z.O.A.S. Capitaine MONTEILLET, commandant la
Compagnie de l'Air n°23/102. Lieutenant BORDEAU, représentant le
commandant du Secteur de l’Air n°16 |
Pour faire face à la menace d’une attaque italienne,
le GC III/6 quitte Wez le 30 avril 1940 et prend possession de l’aérodrome de
Chissey sur Loue, base 42E4, à mi-chemin entre Besançon et Lons le Saulnier
dans le Jura : voir carte. C’est là
qu’il sera engagé dans la campagne de France en faisant face, mais d’un peu
loin, à l’offensive allemande du 10 mai 1940. Les lettres de noblesse de
l'aérodrome de Chissey seront donc écrites par le GC III/6.
Gérard RAMPIN et Jean Pierre GIRARDIER,
deux habitants de la région, sans se prétendre historiens, ont écrit en 2002 un
remarquable ouvrage « CHISSEY
1929-1945 – Histoire méconnue du camp d’aviation », auquel on peut
utilement se reporter. Daniel GILBERTI d’autre part, qui fait de son coté un
travail considérable de recherche sur l’aviation du département de la Côte
d’Or, a créé le site Internet « histavia21.net »
d’une richesse infinie et ce sont en partie leurs travaux qui ont permis
d’écrire les quelques lignes qui suivent :
Dès 1924, un petit aérodrome civil
existait à Chissey, à la sortie du village en direction d'Arc-et-Senans. En
1931, le Ministère de l'Air décide de l'agrandir pour créer un aérodrome de
campagne et procède, à l'époque, à l'achat de deux cent trente-huit parcelles
pour une superficie totale de soixante-neuf hectares permettant d’utiliser une
piste de huit cents mètres sur quarante mètres, suffisante pour les avions de
l'époque. Quelques hectares supplémentaires seront ajoutés en 1935
(déclaration d’utilité publique du terrain de Chissey).
L’aménagement et l’organisation de la Base
aux débuts des hostilités avec l’Allemagne reposent sur la compagnie de l'air
23/102 qui arrive à Chissey le 28 août 1939, sous les ordres du
capitaine Monteillet, avec 120 hommes. En septembre 1939 ce sont d’abord 11
antiques Bloch 200 du 2ème Groupe de la 32ème escadre de
Châteauroux qui sont positionnés pendant quelques semaines sur ce terrain de
campagne, avant d’aller ailleurs, en novembre, pour se faire heureusement
réformer ! C’est le calme plat ensuite jusqu’au 8 mars 1940 avec l’arrivée
du Groupe de chasse GC I/6 du capitaine TRICAUD et de ses Morane 406, en
provenance de Marignane (1ère
Escadrille, capitaine MAUVIER et 2ème Escadrille, capitaine BRUNEAU),
qui marque le vrai point de départ de l’activité aérienne de guerre à Chissey.
Le dispositif de camouflage prévu peut
sembler très sophistiqué d’après les deux notes ci-dessus, mais ce n’est qu’à
l'arrivée du I/6, grâce à la détermination de son commandant et à l’implication
de ses hommes, que les travaux d’équipement de la Base sont réellement
entrepris. La construction d’un P.C. d’escadrille souterrain « dont le toit affleure au ras de terre
» est longuement décrit avec humour dans le célèbre journal de marche
de la seconde Escadrille du Groupe I/6, remarquablement illustré avec humour
par le s/lt DEMOULIN, d’ailleurs futur chef d’Escadrille du III/6 en
A.F.N. en 1944.
Illustrations du livre
de marche de la 2ème Escadrille par le s/lt DEMOULIN
La chasse aux
grenouilles – Le PC de l’Escadrille avec ses couchettes superposées – La
victoire du 7 avril 1940 de 10 MS 406 sur un malheureux Junkers 52
Page
spécifique consacrée au capitaine DEMOULIN
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Extrait du livre de
marche de la 1ère Escadrille du GC I/6 : on peut voir que la
construction des baraques HPF est rapidement menée !
« ...cabane en bois aux trois quarts enterrés et qu si
invisible en l’air... on commence à s’installer... on pense déjà à semer des
radis sur la toiture... »
« au voisinage
de la Loue, de grands espoirs aux pêcheurs, car elle est poissonneuse et la
truite l’habite... »
Le poste de commandement du Groupe est
placé le long de la route à la sortie de Chissey et les avions sont répartis
dans des alvéoles le long du bois en bordure de la Loue. Trois soutes à essence
enterrées de 180 hectolitres chacune (540 hectolitres au total) permettent leur
ravitaillement. La piste d’envol est recouverte de grilles métalliques et un
chemin goudronné serpente en bordure pour desservir ces alvéoles et les
différentes installations montées ou construites, tentes, abris, magasins,
armureries et une petite infirmerie en bordure d’un bois. On crée aussi
quelques faux-chemins et la fausse plateforme d’Ounans, dispositions de
camouflage toutefois bien limitées, car il semble difficile de tromper l'ennemi
sur l'emplacement d’un terrain entouré de points de repère si précis ;
villages de Chissey et d'Arc-et-Senans, rivière la Loue, forêt de Chaux, voie
ferrée et route d'Arc-et-Senans à Chissey.
Deux dépôts de munitions ont été
installés, un dans la plaine en face du camp, l’autre à proximité de la forêt
de Chaux. Il existe aussi un petit « bunker » en béton dont on ne
sait plus rien de sa construction et ne figurant pas sur les cartes ; il
reste aujourd’hui, avec une petite zone bétonnée où se trouvait une des trois
citernes, les seuls témoins de la présence en 1939/1940 de la « Base de
Chissey ».
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Chissey sur Loue en 1960 |
Chissey sur Loue en 2006 |
Salines Royales d’Arc et Senans en 2006 |
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Plateforme bétonnée –
Ancienne soute à essence Photographies FXB |
Visite des vestiges de
la Base Aérienne de Chissey sur Loue le 6 février 2006 Le « Bunker », petit abri bétonné de protection
des personnels contre les bombardements |
Le GC I/6 ne restera qu’un mois à Chissey,
sans qu’il se passe grand-chose sur le plan militaire, hormis la destruction
d’un Junkers 52 le 7 avril près de Luxeuil par une meute de 10 Morane
comme signalé plus haut ; il est déplacé à Berck-sur-Mer le 11 avril.
A noter que le capitaine GUERRIER, commandant la seconde Escadrille du GC III/6
qui va prendre la suite du GC I/6, lieutenant en 1936, était alors le commandant
en second de ce Groupe...
Les travaux menés se poursuivent cependant
conformément aux projets, et, quand le III/6 s’installe à Chissey 3 semaines
plus tard, le commandant CASTANIER félicite par écrit la Compagnie de l’Air
23/102 pour la qualité des aménagements et des travaux de camouflage. La
défense du terrain en incluant les moyens propres de la Cie de l’Air et du
Groupe comprend 16 mitrailleuses M.A.C., cinq jumelages de Lewis et quatre
fusils-mitrailleurs. Des emplacements pour des canons de 25mm ont été préparés,
mais ceux-ci n’arriveront que plus tard.
Le Groupe dispose enfin pour ses transmissions du détachement 6/702,
type IV.
Les officiers de l’État major du Groupe et
un certain nombre de pilotes et de sous-officiers sont logés dans le cadre somptueux
des Salines Royales d’Arc et Senans et la région est attrayante. Tout cela fait
que Chissey a été le terrain de campagne le plus apprécié de la campagne par
ceux du III/6, même s’ils n’y sont restés que 3 semaines.
Mémoires de Jean MENNEGLIER – Chissey
sur Loue ...nous apprîmes que nous allions faire
mouvement pour occuper le terrain de Chissey, situé à côté de ce village du
Jura au bord de la Loue. Je fis mouvement le 30 avril avec mon avion Le
Groupe installa son PC à Chissey. Nos prédécesseurs, le 1/6, le groupe,
avaient aménagé des abris sur le bord de la Loue. Nous prîmes leur suite.
Nous logions à Arc et Senans, célèbre par les salines construites par Ledoux
dans lesquelles cantonna la troupe. Nous installâmes notre popote dans le
restaurant à côté de l'église. Je logeais chez la sage-femme à proximité de
la gare et du passage à niveau. Elle était mariée à un suisse qui n'était
évidemment pas mobilisé. Le lendemain matin on frappa à ma porte. Ma logeuse
m'apportait sur un plateau une tasse de café noir et un bouquet de muguet,
car nous étions le 1er mai. Je fus très touché de cette délicate attention. Nous
reprîmes l'alerte au terrain. Ceux qui étaient d'alerte le matin arrivaient
avant le lever du jour, s'équipaient et essayaient de poursuivre le sommeil
interrompu à l'intérieur du P.C. d'escadrille. Celui-ci était occupé en
permanence par notre secrétaire, le 2ème classe Michel, un paysan
breton de la région de Rennes. Il laissait son lit à l’un d'entre nous et
essayait de dormir la tête sur les bras appuyé sur la table portant le
téléphone de campagne nous reliant au P.C. du Groupe. C'était un garçon en or
qui participait vraiment à la vie d'escadrille. Un jour le téléphone sonna.
En général c'était pour nous donner l'ordre de décoller. C'était un sergent
fourrier qui demandait qu'on lui envoie quelqu'un pour des questions
d'habillement. Michel le rabroua vertement : « Sergent, ici on fait
la guerre, il ne faut pas nous déranger pour rien ! »... ...un jour, deux patrouilles trouvèrent un
Dornier, dont une emmenée par le chef d'escadrille, le cne GUERRIER. Il se tint à l'écart,
prétextant que s'il était intervenu c'est à lui qu'on aurait donné la croix
de guerre. Il est vrai qu'à l'époque l'État-major se montrait moins généreux
qu'au début de la guerre pour attribuer les citations. On ne les donnait plus
qu'aux C.P. Cela nous mit la puce à l'oreille mais nous ne devions avoir
confirmation que plus tard du manque d'agressivité (pour employer une
litote), de notre chef d'Escadrille ! Pour l'instant, on inscrivait à
son actif que c'était un enragé pêcheur au lancer et qu'il nous avait pris
une magnifique truite dans la Loue qu'on nous servit cuite au bleu à la
popote ! Le
mois de mai commençait à être chaud. Quand nous partions sur alerte, nous courions
à nos avions, parachute sur le dos, engoncés dans nos combinaisons
chauffantes. Nous prenions une bonne suée et nous nous retrouvions quelques
minutes après à 7 ou 8 000 mètres avec une température de -20 ou -25
dans la carlingue. Je ne sais si c'est à cause de ces variations de
température, mais j'attrapais un rhume de cerveau carabiné... |
Si le déplacement principal de l’échelon
roulant de Wez à Chissey s’est fait par voie ferrée comme indiqué dans les
archives, il semble bien que certains se sont quand même déplacés par la route,
car quelques photographies faites par Joseph Bibert, non datées et non
légendées, ont été faites à priori dans la vallée du Doubs à cette occasion.
Plus tard, il a pris également quelques clichés sur le terrain de Chissey.
Album des photographies de Joseph Bibert n°V -
Novembre 1939 à mai 1940 - Chissey sur Loue
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pour ouvrir la page contenant ces photos
Le groupe de chasse III/6 à Chissey,
territoire du Secteur de l’Air 16 (lieutenant-colonel RICHARD) est affecté au
groupement de chasse 24 commandé par le lieutenant-colonel LAMON (poste de
commandement à Dijon-Longvic), tout comme le groupe de chasse II/7 volant aussi
sur MS 406 (commandant DURIEUX), stationné à Luxeuil depuis septembre
1939.
Le groupe II/7 qui est au service de la
VIIIème Armée est chargé de couvrir la Haute Alsace, la trouée
de Belfort et la partie de la région frontière suisse avoisinant la haute
vallée de la Saône.
Le groupe III/6 reçoit la même mission
principale que celle du I/6 ; assurer la défense aérienne du territoire de
la région de Dijon dans une zone d'action limitée au sud par la frontière
suisse, et, au nord, par la ligne Monbard, Langres, Gray, l’Isle sur le Doubs,
Pont de Roide. Les missions secondaires étant :
·
le renfort du Groupe II/7 pour protéger
les avions de reconnaissance de la VIIIème Armée,
·
la destruction d’intrus dans la zone de la
VIIIème Armée,
·
le recueil des Potez 63 du groupe de
reconnaissance 1/55 (Commandant BISSON) de la 6ème Division
Aérienne.
Jusqu’au 7 mai, même si le commandement a
été informé de l’imminence de l’attaque allemande, seules quelques couvertures
sur alerte ont lieu. Le 6 mai, un Dornier venant du sud est aperçu par la
patrouille légère JAPIOT, MENNEGLIER, mais ceux-ci ne peuvent pas l’attaquer
utilement. L’activité est grande le 8 mai, mais de la même façon, une attaque
menée sans cohérence sur un Dornier par la patrouille simple JACOBI, SALAÜN,
CAVAROZ reste infructueuse. Le 9 mai, le temps est mauvais mais c’est quand
même le grand calme avant la tempête...
Depuis le début des hostilités le III/6 a
accompli 250 missions de guerre en 540 sorties avec 4 victoires homologuées.
Mais est-il réellement prêt ? Moralement et professionnellement,
certainement, mais le matériel, l’organisation et les pratiques de l’Armée de
l’Air ne sont certainement pas à la hauteur de la rude tâche qui s’annonce pour
lui !
LA CAMPAGNE DE FRANCE Pour alléger ce récit, l’activité aérienne détaillée du
GC III/6 au jour le jour entre le 10 mai 1940, début de l’attaque
allemande dans les Ardennes, jusqu’au 18 juin, date à laquelle l’armistice
se profilant, le Groupe a été « exfiltré » vers l’Afrique du Nord,
fait l’objet d’un document particulier mis en annexe. Il peut permettre à
ceux qui sont surtout passionnés par la chronologie précise des combats, par
les numéros des machines, par les décomptes des heures de vol, des victoires
et des pertes de retrouver la trame traditionnelle des nombreux ouvrages
publiés traitant de l’historique d’un Groupe d’aviation. Mais gardons à
l’esprit qu’il n’est pas possible d’être exhaustif sur ce sujet car trop de
pièces du puzzle, malgré les recherches et les archives, manquent encore...
Pour chaque journée, un résumé des
faits marquants de la guerre précède la narration de l’activité du Groupe
III/6... |
Pour
les spécialistes : La Campagne de France du GC III/6 au jour le jour |
Tableau
des profils et des caractéristiques des chasseurs engagés dans la campagne de
France – Document de la Luftwaffe
Les adversaires allemands
des Chasses françaises et britanniques pendant la Campagne deFrance
Pour chaque journée de la « Campagne de France » un
lien sur la date renvoie vers la page correspondante du document annexe plus
complet « au jour le jour »
Le
10 mai c’est la grande offensive allemande à travers les Ardennes et vers
le nord de la Belgique. Les Allemands vont bientôt franchir la Meuse. La ligne
Maginot ne tombera pas, elle sera simplement contournée !
Les patrouilles du Groupe III/6 sont en
l’air dès 4h40 et voleront toute le journée. Le Groupe effectue 33 sorties et
enregistre deux victoires, une pour chaque Escadrille ! Il
perd deux Morane, le n°793 du sgt HARDOUIN et le n°413 le
l’adj GOUJON qui peuvent tous les deux sauter en
parachute et rejoindre Chissey. Par contre des Heinkel 111 du 7/KG51
« Edelweiss » (*) venant de Landsberg et Wörishofen sont quand même
passés et ont pu larguer leurs bombes explosives et incendiaires sur la Base de
Dijon-Longvic ; on déplore officiellement 5 tués dont le colonel LAMON (commandant
le Groupement 24), une dizaine de blessés, 2 hangars endommagés et plusieurs
magasins en flammes. A Chissey, pour les pilotes, et pour tous ceux à terre,
mécaniciens, armuriers, médecins, administratifs, simples soldats qui n’ont
qu’un seul but , faire en sorte que les Morane du Groupe puissent voler
dans de bonnes conditions, la journée a été dure et angoissante, mais
finalement tous les pilotes sont rentrés, deux « boches » sont au
tapis et peut être deux ou trois de plus si on prend en compte les différents récits
des combats faits au retour des missions, et les informations sur ce qui c’est
passé à Dijon ne sont pas encore connues, ou plus simplement évacuées... ;
le taux d’adrénaline de chacun est redescendu, le moral reste haut et la
confiance en la victoire est encore totale. Mais les mécaniciens dormiront
peu ; il faudra qu’ils s’y habituent...
|
Mécanicien du GC III/6 au travail sur un Morane 406 |
(*)
Une énorme erreur a été faite par ce Groupe ce jour là : plus de la moitié
de ses avions qui avaient été envoyés sur Dijon et Tavaux ont en fait bombardé
la ville allemande de Freiburg-en Breslau, faisant des victimes et provoquant
une colossale colère de Goering. On tentera outre–Rhin de parler de
« bombardiers français », mais des rapports de la Luftwaffe font état
de « ressemblances entre les terrains de Freiburg, de Dijon et de
Tavaux », pourtant distant de 150 km. ! Il n’est pas impossible que
l’action de la chasse française en ce premier jour de guerre totale ait quelque
peu perturbé les jeunes aviateurs allemands...
10 mai
1940 : la victoire du s/c BOYMOND et du sgt GAUTHIER (Port-Lesney -
7h 00)
Fernand PROST, depuis son logement,
au dernier étage d'un immeuble rue Pasteur à Dôle a vu le combat qui se déroulait devant
ses yeux le 10 mai 1940 à 7h00 : il raconte... « Ce
matin du 10 mai 1940, il était environ 7h 00, lorsque je fus surpris par
le vrombissement de moteurs d'avions et dans le même temps par des rafales
d'armes automatiques. Regardant par-dessus les toits juste en face, j'ai
aperçu un bimoteur Domier 17 pris en chasse et attaqué par un Morane Saulnier
français. Il faisait un temps magnifique, le soleil brillait dans un ciel
tout bleu. J'ai eu l'impression que le combat se déroulait au-dessus de la
Bourse du Travail à une altitude comprise entre 2 000 et 3 000 mètres. Le
chasseur montait, descendait, tournait autour et à chaque fois qu 'il se
trouvait en position de tir, envoyait une rafale. Dans le même temps lorsque
le chasseur s'écartait, j'entendais des tirs de D.C.A et je voyais un panache
blanc lorsque l'obus éclatait. A chaque tir, je m'attendais à voir ce
bombardier en difficulté mais il continuait sa route comme si de rien n
'était à mon grand désappointement. Il remontait le canal Charles Quint en
direction de la forêt de Chaux vers Chissey – Arc et Senans et là, je l'ai
perdu de vue dans la brume matinale mais j'entendais toujours le crépitement
des armes... » |
|
Article de presse envoyé à sa famille par Georges GAUTHIER
conservé dans l’album familial |
|
Le Dornier 17 abattu
le 10 mai 1940 à Port Lesney (Jura) par le s/c BOYMOND et le sgt GAUTHIER de
la 6ème relevé le lendemain par une équipe du Parc 11/101 de
Dijon-Longvic à l’aide d’une remorque Boilot |
CITATION du sgt GAUTHIER « Jeune
pilote habile et audacieux. Le 10 mai a combattu avec acharnement un bimoteur
ennemi. L’a abattu en collaboration avec le sergent-chef Boymond. » Croix de guerre avec palme |
10 mai
1940 :La victoire de l’adj GOUJON et du sgt HARDOUIN du 10 mai 1940 (Forêt
d’Arbois - 15h 30)
Mémoires de Charles GOUJON - 10 mai
1940 ...à
peine étions-nous installés près des bords du Doubs que le soleil se levait
sur une date que personne n'oubliera : le 10 mai 1940 ! Si nous
n'avions pas vu beaucoup d'ennemis dans le ciel jusqu'à ce jour, tous ceux
qui s'étaient tenus loin de nos regards semblaient, cette fois, s'être donné
rendez-vous. Ce furent d'abord, à l'aube, des avions de reconnaissance. Nous
décollâmes, les uns après les autres, pour leur donner la chasse. Mais sans
succès. Lorsque nous arrivions à une altitude convenable, les Allemands
étaient repartis après avoir fait ample provision de photographies. Puis
ce furent les bombardiers. On en signalait du côté de Dijon. Je décollai une
fois encore en même temps que deux autres chasseurs. Impatient de me battre,
je faisais donner tous ses chevaux à mon Morane. C'est qu'il fallait faire
vite. Après quelques minutes de vol, j'avais distancé mes équipiers. J'étais
seul en l'air. Petite erreur de tactique. J'étais trop impétueux, trop pressé
d'arriver. Enfin je les vis. Ils étaient 10, magnifiquement bien groupés. La
sagesse eût voulu que j'attendisse mes amis. Mais allez donc parler de
sagesse à un jeune fou qu'enflammé, avant la lettre, l'odeur de la poudre. Je
commençai une première attaque, une première passe. Vingt mitrailleuses
crépitaient dans ma direction. Je fis une deuxième passe. Puis une
troisième... Alors
je jouai le tout pour le tout. Il m'en fallait un. A tout prix. J'attaquai le
dernier du peloton, juste dans l'axe, par l'arrière. Les balles traçantes
qu'il m'envoyait dessinaient devant moi comme une toile d'araignée. Elles
commençaient à tambouriner sur mon Morane quand le Heinkel se trouva à bout
portant dans mon collimateur. Enfin ! Je
déchargeai toutes mes armes. L'avion ennemi, aussitôt, décolla du peloton,
laissant derrière lui les fumées caractéristiques de sa mort prochaine (dans la forêt d’Arbois). Au même moment,
alors que je dégageais pour porter une dernière attaque dans les mêmes
conditions, le feu se déclara à bord. Déjà la fumée me montait jusqu'au
visage. J'étais touché, moi aussi. Sans doute par l'une des balles qui
tambourinaient tout à l'heure. Je n'avais plus qu'une ressource : sauter.
J'étais à 5 000 m. Je coupai le moteur, mis l'avion en chandelle et
basculai sur le côté pour faciliter l'évacuation. Et hop. Dehors ! Bien
entendu, j'ouvris aussitôt mon parachute. Je devais rester ainsi,
lamentablement pendu entre ciel et terre, durant une douzaine de minutes. La
rage au cœur, je vis les Allemands lâcher leurs bombes sur la base de Dijon.
La lueur que j'aperçus dans le ciel, un peu à l'est, ne me consola pas.
C'était pourtant le bombardier, touché quelques instants auparavant par mes
mitrailleuses, qui explosait. Plus loin, une traînée noire : mon Morane
plongeait vers la terre pour aller s'écraser dans un bois. À
cette époque, la hantise des parachutistes allemands tenait en haleine tous
les hommes au sol. L'un de mes équipiers (le sgt HARDOUIN)
qui s'était attaqué après moi (*) aux
mêmes bombardiers, et avait été descendu lui aussi, en fit la dangereuse
expérience. À peine arrivé au sol, le long d'une voie ferrée, il fut
appréhendé par une bande d'énergumènes qui, malgré ses protestations, le rouèrent
de coups, lui brisant les dents, lui fracturant la mâchoire. Mon
arrivée au sol fut heureusement moins dramatique. Je tombai dans des
broussailles juste à l'orée d'un petit bois, et me débarrassai aussitôt de ma
combinaison de vol. C'est donc en uniforme d'adjudant (tout récent) de
l'Armée française que je me dirigeai vers les soldats que je venais de voir,
au bout du champ, sauter d'une voiture pour se coucher à plat ventre. Je
devinai que les canons de leurs fusils étaient braqués sur moi. Alors, les
mains en porte-voix et de toute la force de mes poumons, je me mis à
hurler : - «
Ohé! les gars, je suis Français ! Leur
attitude prouvait qu'ils ne me croyaient qu'à moitié. Cette proie qui leur
échappait, c'était bien dommage. Tout de même, ils ne tirèrent pas et me
firent signe d'avancer. Quand ils reconnurent leur erreur, ils m'entourèrent
avec sympathie. Un groupe de plus en plus compact se formait autour de
moi ; ces pauvres fantassins n'avaient pas tous les jours une attraction
de ce genre, quand un gros officier, court sur pattes et rouge de trogne,
fendit la foule en hurlant : - « Où
est-il ? Qu'on me le donne ! » Quel
ne fut pas son désappointement quand il vit que j'étais Français. Il était
venu, en triomphateur, chercher "sa" victime. Le soir même, j'avais rejoint mon escadrille. Le
lendemain, je me battais de nouveau. Cette fois, nous étions 3 contre 5. Nous
qui nous étions plaints de manquer de gibier, nous en avions trop
maintenant... Extrait de
« Trident » - France Empire – 1956 (*) D’après les
documents retrouvés dans les archives du III/6 et les souvenirs du sgt HARDOUIN, l’attaque de celui-ci
aurait précédé celle de l’adj GOUJON... |
CITATION de l’adj GOUJON « Brillant
chef de patrouille. Le 10 mai 1940, a attaqué sous un feu intense un peloton
ennemi de bombardiers. A abattu un de ses ennemis avec la collaboration d'un
autre chasseur. Puis son appareil en flammes, a sauté en parachute. » Croix de guerre avec palmes |
Mémoires de Jean MENNEGLIER –
L’accueil des parachutistes au sol ...le 10 mai, HARDOUIN, dut sauter en parachute, avion en feu. Il atterrit sur
ou à proximité d'un passage à niveau et fut rejoint par un comité d'accueil excité
qui se mit en devoir de lui casser la figure, le prenant pour un parachutiste
allemand tant était grande la psychose développée par la propagande.
Finalement quelqu'un en l'entendant crier qu'il était français se décida à
calmer les excités et à examiner calmement son cas. Il dut faire réparer un
bridge descellé par un coup de poing. Encore heureux pour lui qu'ils n'aient
pas eu de fusil. C'était arrivé à un rescapé d'un avion tombé en parachute
dans une rivière qui fut fusillé à bout portant lorsqu'il arriva à la berge.
Dans l'autre escadrille, COLONGE,
eut le lendemain des problèmes pour s'éjecter sur le dos de son avion en
flammes et fut, lui aussi, accueilli par un groupe armé de fourches près de
Beaumont-sur-Vingeanne. Heureusement ils étaient moins excités et il n'eut
pas de peine à justifier son identité et reçut un accueil plus normal... |
RÉPUBLIQUE
FRANÇAISE PRÉFECTURE
DE LA HAUTE-SAÔNE Cabinet du Préfet AVIS À
LA POPULATION Les incursions
ennemies sur notre territoire menacent la vie et les biens de tous. L'intérêt
de chacun est donc d'aider les autorité à découvrir et capturer les
militaires - aviateurs – parachutistes et agents a ennemie se trouvant pour une
raison quelconque sur notre sol. CONDUITE
À TENIR 1° - Un
avion ennemi est contraint d'atterrir pour quelque motif que ce soit : GARDER
A VUE L’ÉQUIPAGE ET PRÉVENIR AUSSITÔT LE MAIRE ET LA GENDARMERIE 2° - Un
parachutiste est aperçu descendant vers le sol : suivre sa descente
jusqu'à ce qu'il mette pied à terre, GARDER
A VUE ET PREVENIR AUSSITÔT LE MAIRE ET LA GENDARMERIE 3° -
Militaires ou civils à allure suspecte : des personnes portant un
uniforme français peuvent demander des renseignements sur la route à suivre,
ou tous autres renseignements, avec un accent étranger, GARDER
À VUE ET PRÉVENIR AUSSITÔT LE MAIRE ET LA GENDARMERIE |
CITATION du sgt HARDOUIN « Jeune
chasseur plein de fougue. Le 10 mai 1940, a attaqué sous un feu intense un peloton
serré de bombardiers. A abattu un des ennemis avec la collaboration d’un
autre chasseur, puis, son appareil étant en flammes, s’est jeté en
parachute. » Croix de guerre avec palme |
11
mai 1940 : la victoire des lt LEGRAND, s/lt CAVAROZ, s/lt SALAÜN, adj
LE GLOAN, s/c LE GUENNEC, sgt GABARD, sgt DE GERVILLIER du III/6
et du s/c
DOUDIÈS du GC II/7 (Pirey – 10h 00)°
|
|
|
Pirey – 10h 00 –
Le Heinkel 111 codé « 9K + GH », du 1./KG 51 posé sur le ventre.
L’équipage de cinq hommes a tenté sans succès de l'incendier Les aviateurs allemands Zahnle, Lenkeit, Heyer, Lachmann
et Geske ont été capturés |
CITATION du lt LEGRAND « Chasseur
audacieux et habile. Le 7 avril s’est engagé avec un seul équipier contre une
formation de quinze multiplaces. Le 11 mai, a abattu dans nos lignes un
bombardier ennemi ». Croix de guerre avec palme |
CITATION du s/lt SALAÜN « Jeune
chasseur plein d’allant. Le 11 mai 1940, a pris part a un combat acharné
contre un peloton de seize bombardiers ennemis » Croix de guerre avec étoile de vermeil |
CITATION du sgt GABARD « Jeune
chasseur plein d’allant. Le 11 mai 1940, a pris part à un combat contre un
peloton de seize bombardiers ennemis. » Croix de guerre avec étoile de vermeil |
11 mai 1940 : la
victoire de l’adj GOUJON et des s/lt MARTIN et COLONGE (Etuz –
18h 30)
Avion abattu : |
Heinkel 111 codé « G1 + FR » 2800 » du
7./KG55 |
KEISENHOFFER,
RIEGER, ROSSMANN, SCHENKENGERG, SCHNALL |
Perte : |
Morane Saulnier MS n°963 |
S/lt COLONGE parachuté à Beau mont sur Vingeamme |
Perte : |
Morane Saulnier 406 n°665 |
Adj GOUJON posé en campagne à Broyes les Pennes |
CITATION du lt MARTIN « Magnifique
officier au caractère droit et énergique animé des plus belles qualités
morales. Au cours d’un très dur combat contre un peloton de sept bombardiers,
a abattu son troisième avion ennemi. A dû se jeter en parachute, son appareil
ayant été mis en flammes par le feu adverse. » Croix de guerre avec palme - Chevalier de la
Légion d’Honneur |
CITATION du s/lt COLONGE « Jeune
chasseur calme et audacieux. Le 11 mai 1940, avec deux autres chasseurs, a
livré à sept bombardiers un dur combat qui s’est terminé par la chute d’un
des avions ennemis dans nos lignes. S’est jeté en parachute hors de son
appareil en flammes. » Croix de guerre avec palme |
11 mai
1940 : le s/c MERTZISEN met le MS 406 n°143 en cheval de bois à Dijon –
Appareil réformé
|
|
Incertitude sur le
pourquoi et le comment d’un décollage à Dijon du s/c MERTZISEN avec le MS
n°143 le 11 mai 1940 Le message « codé »
signalant l’incident indique « cheval de bois au départ » et ne
prescrit aucune enquête ; l’appareil sera réformé « Vautour ?»
à « Racine ?» : Taquin (= GC III/6) – Avion 14 (=MS 406) |
CITATION de l’adj GOUJON « Bien
qu'il ait été, la veille, contraint de se jeter hors da son avion en flammes
au cours d'un combat victorieux contre dix bombardiers, a Iivré de nouveaux
combats, avec deux autres chasseurs, à un peloton e sept ennemis et abattu
l'un deux dans nos lignes » Croix de guerre avec palmes |
Après ces deux première journées de la
Campagne de France, c’est le calme plat le 12
mai (à part l’arrivée du capitaine STEHLIN comme second du commandant
CASTANIER et du s/lt SATGÉ à la 6ème), et le 13
mai dans le secteur de Chissey où les aviateurs ne semblent pas être au
courant des nouvelles ; on lit dans le livre de marche de la 6ème
Escadrille pour le 13 : « Journée
calme, plusieurs décollages sur alerte ont bien lieu sans résultat. En fin de
soirée le s/lt CAPDEVIOLLE fait un essai de résistance de son gouvernail de
direction contre les grilles qui bordent le terrain ! Essai satisfaisant
pour les grilles !!!... » et le 14
mai « Début de matinée
calme… ». Rien à ces deux dates dans le livre de
la 5ème…
Mais pour la sixième Escadrille du GC
III/6, ce 14 mai sera quand même journée de deuil : le sergent-chef
BOYMOND, dans la pagaille du désastreux second bombardement de l’aérodrome de
Dijon-Longvic, se retrouve seul, sans protection, et attaque néanmoins avec
courage un groupe de trois bombardiers allemands, tandis qu’au même moment
l’adjudant LE GLOAN préfère conduire un groupe de quatre Morane à la
poursuite d’un seul Heinkel 111, qui sera finalement et heureusement mis
au tapis, mais cette poursuite en valait-elle le prix ? Le
lieutenant-colonel DAUPHINET, dans don rapport (voir plus- bas), ne manquera
pas de faire remarquer à demi-mot l’individualisme de certains pilotes.
14 mai 1940 : la mort du s/c BOYMOND (Prenois
– 12h 00)
Photographie du sergent-chef d’Émile BOYMOND
Offert à l’auteur par Mme. Corinne CEYLERON que je remercie
Page spécifique
consacrée au sergent-chef BOYMOND
|
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Destructions sur la
Base du Dijon-Longvic du 14 mai 1940 infligées par les bombardiers allemands
que le s/c Émile BOYMOND a attaqués seul, courageusement Collection
François-Xavier BIBERT |
14 mai
1940 : la victoire du s/lt KAWNICK (Preigney – 12h 45)°
|
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Le Junkers 88-A1
W.Nr.4008 9K+EL 3./KG 51- abattu le 14 mai 1940 à Preigney par le
sous-lieutenant KAWNICK – Les militaires sont des éléments du VIème
Groupe du 294ème R.A.L.P., témoins du combat Archives
Pierre BIARD via Daniel GILBERTI |
CITATION du s/lt KAWNICK « Chasseur
audacieux et habile. A abattu, le 14 mai, un bimoteur ennemi ». Croix de guerre avec palmes |
14 mai
1940 : la victoire de l’adj LE GLOAN, du s/lt STENOU et des sgt TRINEL et
DE GERVILLIER (Fougerolles -12h 45)°
|
Heinkel 111
« 9Q + DD » du 3./KG51
abattu à Fougerolles le 14 mai 1940 équipage : Matt Herbert,
Siegfried Barth, Gerhard Schildt et Heinz Kazmirowski. |
Rapport
du lieutenant-colonel DAUPHINET (*) commandant
le Sous-Groupement 41 « Dans cette affaire, les éléments du Groupe III/6 engagés contre un ennemi très supérieur en nombre, ont fait preuve d'un allant digne des plus grands éloges. Il est vraisemblable que les résultats obtenus auraient été bien supérieurs si les patrouilles avaient agi avec plus de cohésion. L'examen des comptes rendus montre, en effet, des départs successifs de patrouilles. · Patrouille polonaise 11h05 · s/c BOYMOND 11h35 · adj LE GLOAN 11h 40 · s/lt VILLEMIN 11h45 Exception faite pour la patrouille polonaise décollant sur un renseignement déterminé, les trois autres patrouilles devaient constituer un tout et s'attaquer, toutes forces réunies, à l'expédition de bombardement de la base aérienne de Longviv. Au contraire, les efforts ont été dispersés, le sergent-chef BOYMOND, le sous-lieutenant KAWNICK se trouvant isolés, attaquent chacun un peloton alors qu'une patrouille entière (patrouille de l'adjudant LE GLOAN) s'attaque à un seul Heinkel 111. Il est parfaitement admissible d'excuser cette faute de manoeuvre après quatre jours de combats intensifs. Les résultats de l'engagement (deux avions abattus) ont heureusement couronné les efforts individuels ; toutefois, nous avons à déplorer la perte de sergent-chef BOYMOND, qui avec le plus grand courage, s'est porté seul à l'attaque de trois avions ennemis. » (*) Le lieutenant-colonel DAUPHINET a succédé au colonel LAMON (+ 10/05/1940) comme
Commandant du Groupement de Chasse 24. A la date du 15 mai, ce Groupement
devient le Sous-Groupement 41. C’est donc lui qui a la charge d’analyser les
comptes-rendus d'engagement des pilotes, avant de les transmettre au Général
commandant la zone des opérations aériennes. Nota : Un nouveau groupement 24 a été formé sous les ordres du colonel TURENNNE ; il comprend toutes les formations de l’aviation de chasse de la zone d’opérations aérienne des Alpes. |
CITATION du sgt TRINEL « A
abattu le 14 mai 1940, en collaboration avec trois autres pilotes un
bombardier ennemi. » Croix de guerre avec étoile de vermeil |
Le 17 mai Joseph écrit à son épouse :
« Le bruit court que Chartres
a été bombardé… je crois néanmoins en notre force et tout doit bien se
passer… ».
Dans ces carnets, Julienne écrira le
Dimanche 19 mai : « bombardement
de Chartes à 18 heures »
Le 18 mai, Joseph : «…calme plat – Bon moral… ».
Le
19 mai l’adjudant GOUJON retourne récupérer son Morane
n°665 posé à Broyes les Pesmes après son combat victorieux du 11 mai. Les
mécaniciens ont du beaucoup suer pu changer sur place le moteur qui avait été
atteint par les mitrailleuses du Heinkel... Au décollage, GOUJON heurte une
pierre de bornage et détruit le train d’atterrissage et l’aile gauche de
l’avion qui sera finalement abandonné... De la même manière qui le 11 mai pour
l’accident de MERTZISEN à Dijon (voir plus haut) un message « codé »
est envoyé au même destinataire « Racine » ?
(avec toujours Taquin = GC III/6 et Avion 14=MS 406), par
un autre émetteur « Sautoir » ?,
mais cette fois le commandant du sous-Groupement demande une enquête, ce qui
entraîne la rédaction d’une note au chef du « 3ème Bureau,
Section, I, Inspection intéressée ». Alors que tous ceux qui sont sur le
terrain, pilotes, mécaniciens, et soldats sont en pleine adversité, on reste
confondu en constatant qu’à l’arrière « la procédure » mobilise tant
de monde et tant d’énergie... comme si on était en toujours en temps de
paix !
Notes concernant l’accident
du MS 406 n°665 de l’adjudant GOUJON du 19 mai 1940
Ce même jour, le colonel DE GAULLE, que personne
n’avait voulu écouter, mis à part les généraux allemands, fait parler de lui
pour la première fois en contre attaquant avec ses chars à Montcornet, pour
l’honneur.
Joseph, comme sans doute tout le monde au
III/6, n’a certainement jamais entendu parler de ce Général, mais il a perçu la
rumeur qui annonce un très prochain déplacemebt de son Groupe. Il écrit le
19 mai : « …je
crois que je ne resterai pas longtemps ici. Dommage, c’était un beau pays et
les gens étaient très sympathiques. Je n’ai pas eu un journal depuis 4 jours, je ne
sais donc pas ce qui se passe… »
C’est sur des cartes lettres fournies par
la poste aux armées que Joseph écrit dorénavant presque tous les jours à son épouse.
Seules une dizaine de ces cartes lettres ont pu être sauvegardées à temps car
le reste de la correspondance et beaucoup de documents familiaux, pourtant
conservés par Julienne pendant plus de 60 ans, ont été malheureusement brûlés
par elle après la mort de Joseph en 2002, au grand désappointement de ses deux
enfants…
Joseph ne s’était pas trompé : son
Groupe, finalement peu sollicité en cette première semaine de la Campagne de
France, se trouve trop excentré par rapport aux zones de combats principales.
La décision a été prise : il doit remonter le 20 mai plus au nord et
ce sera à Coulommiers.
Pour l’échelon au sol, les mécaniciens et
quelques pilotes, deux Bloch 220 d’Air France sont réquisitionnés pour leur
transfert en fin de l’après-midi du 20
mai. Joseph BIBERT s’est fait photographier avec son appareil pendant ce
vol dans la cabine d’un de ses appareils, rare image...
|
|
Chissey – 20 mai 19490
– Départ pour Coulommiers Embarquement des personnels du GC III/6 dans deux Bloch
220 d’Air France |
Joseph BIBERT, crâne
rasé, et d’autres mécaniciens dans un Bloch 220 pendant le vol entre Chissey et Coulommiers |
Notons que depuis qu’il est arrivé dans le
Jura, seuls 2 nouveaux pilotes ont rejoint le Groupe :
12 mai
1940 |
capitaine |
STEHLIN |
E/M. |
7
décembre 1939 |
sous-lieutenant |
SATGÉ |
6ème |
Par contre le capitaine TRAVERS, nommé commandant
du GC I/10 (note en date du 2 mai, avec ordre de
départ donné le 20 mai par le général
Odic, commandant la Z.O.A.S) ne suit pas le III/6 à Coulommiers et
part à Oran vers sa nouvelle affectation. Il n’est resté que 4 mois ½ au Groupe
et n’a quasiment pas volé. Il commandait le GC III/3 à sa création, Groupe qui
fut victime d’un drame épouvantable le 28 août 1939, lors de son déplacement de
Salon de Provence à Dijon. C’est le capitaine TRAVERS qui le conduisait, mais
il du faire demi-tour à cause d’une panne de son appareil, et c’est donc son
second qui en pris la tête. Malheureusement celui-ci n’avait pas participé à la
préparation du vol et quand les Morane se sont retrouvés perdus dans une brume
épaisse, la décision prise de voler à vue au ras du sol fut une erreur. Les
appareils se dispersèrent et sept d’entre eux percutèrent dans une vaste zone
de plus de 40 km en Saône et Loire. On déplora trois pilotes tués et 4 blessés
graves. L’Armée de l’Air et le chef du Gouvernement décidèrent de tirer un
voile pudique sur ce tragique évènement au moment de l’entrée en guerre du
Pays, mais la carrière du capitaine TRAVERS, qui ne reprit jamais le dessus, en
subit évidemment les conséquences...
Photographie aérienne de 1960 prise à la verticale de l’ancienne
plateforme de Chissey, entièrement remise en culture dès 1943
COULOMMIERS
20/05/1940 – 31/05/1940
Lien vers
la page :
Les
aérodromes du Groupe de chasse GC III/6 de la campagne de France
Ce furent à Coulommiers 10 jours terribles
pour le Groupe GC III/6...
On peut croire que la réalité de la
situation commence à apparaître pour ceux du GC III/6 et le moral semble
devenir plus fluctuant. La censure ne permettant pas de parler géographie,
Joseph écrit à son épouse en la contournant :
Le 21
mai : «…On
a liquidé l’ancien quartier. On a été prévenu hier à 10 heures. A 15 heures on
était en l’air, pilotes et mécanos. On est parti par un avion d’Air France. On
est à 52 km de la capitale, sur l’horizontale à l’est. On ne sait quoi
faire et je crois qu’on est de passage ici… ».
De fait près les vingt Morane 406 rescapés
qui ont décollé le 20 mai en début d’après midi de Chissey, suivi un peu plus
tard des deux Bloch 220 d’Air France avec les mécaniciens et le petit chevreau
devenu dans le Jura la mascotte de l’Escadrille sont bien arrivés la veille à
Coulommiers.
S’ajoutant à l’inévitable sentiment de
fatigue, une bien désagréable surprise attend à présent les pilotes du GC
III/6 : Coulommiers est loin d’être dans la réalité des choses la base
« modèle » qu’il leur avait été décrite.
Le terrain est situé sur le territoire du
secteur de l’Air 51, commandé par colonel DOMINO. Son poste de commandement est
à Paris. Il est rattaché pour ses ravitaillements techniques au Parc 12/118 d’Orly.
L’impréparation de la plateforme est
totale alors qu’on vantait partout le camouflage de la Base réalisé par les
meilleurs spécialistes ! Il est vrai que des bandes de formes et de
couleurs diverses ont été mises en culture, mais l’herbe haute, jamais fauchée,
dissimule des bornes en pierre dangereuses, mais surtout, il n’y a ni postes de
commandement enterré, ni tranchées pour abriter le personnel. Rien n’existe à
proximité pour le loger, à part quelques fermes éloignées. Les officiers et
sous-officiers pilotes doivent s’installer à huit kilomètres dans le village de
Faremoutiers, ce qui n’est pas idéal en cas d’alerte. En effet le colonel
Domino a refusé de les loger en hôtel à Coulommiers. Les mécaniciens sont à
Boussois et l’unité administrative dans une ferme isolée à Voisins !
La Compagnie de l’Air 75/118 du capitaine
Constantini est aux abonnés absents. En matière de transmissions, il n’y a pas
de détachement attaché à la Base d’une part, et d’autre part, il n’y a même pas
de liaison entre les postes de commandement du Groupe et de ce ceux des
Escadrilles, les fils aboutissant en plein champ permettant à n’importe qui de
se mettre à l’écoute !
Il faut enfin ajouter à ce triste tableau
une organisation l’absence de dépôt de munitions et de stock de bouteilles
d’oxygène.
La défense du terrain comprend :
·
Quinze mitrailleuses M.A.C.
·
Trois canons de 85 m/m montés,
·
Trois canons de 25 m/m mon encore montés.
Devant l’ampleur de ces multiples
carences, le commandant CASTANIER du GC III/6 va s’empresser de faire toutes
les demandes nécessaires pour tenter de remédier tant bien que mal à la
situation. Il est d’ailleurs assez curieux de souligner ici que Coulommiers
n’est pas à cette date une base aérienne inactive puisqu’elle abrite déjà une
Escadrille de la RAF, le N°. 212 Squadron de reconnaissance photographique,
équipée de Bristol Blenheim et d’un Spitfire.
|
Coulommiers - Bristol « Blenheim » MK 4 –
Serial L94466 – Codé « PZB » de la R.A.F. |
|
Coulommiers - Bristol « Bombay » MK 1 de la
R.A.F (transport de troupes). |
|
Curtiss H-75A-1 n°36
du cdt Georges GUYOT commandant le Sous-Groupement de Chasse 43 Photographies de Robert ROHR, mécanicien de la 5ème
Escadrille |
Mémoires de Jean MENNEGLIER –
Coulommiers
...Comme il nous manquait des avions je fis le trajet à bord d'un
Bloch 220 d'Air France réquisitionné pour les transports militaires. Coulommiers
était le terrain d'essai du camouflage. Mais la proximité d'une fourche
caractéristique de routes nationales ne devait pas rendre son repérage
difficile ! On avait même tracé une fausse route entre un hangar et le
Club House converti en P.C. du Groupe. Les bombardiers allemands qui nous
rendirent visite (le 26 mai) durent s'aligner sur elle pour leur attaque...
...peut-être le camouflage des bâtiments aurait-il pu tromper des chasseurs,
quoique je ne me souvienne pas d'avoir eu de difficulté pour retrouver le
terrain en rentrant de vol... Nous
arrivâmes à Coulommiers au moment de la percée de Sedan. Je vis un jour une
unité d'artillerie de 105 « Rimailho » tractée par des chevaux
traverser la ville. Au moment où les chars allemands déferlaient sur le nord
de la France cette vision me surprit un peu. Mais encore plein d'espoir sur
les capacités de nos forces terrestres je ne me rendis pas exactement compte
de ce que ce spectacle avait d'anachronique et si j'avais réfléchi davantage
j'aurais sans doute été pris de crainte sur la suite des événements. A
Coulommiers, nous logions à l'hôtel de l'Ours qui avait été réquisitionné.
Nous y prenions nos petits déjeuners et certains de nos repas. Le terrain
était situé assez loin au nord de la ville. Notre Escadrille était logée sous
deux tentes « Sarrade » noires qui devaient bien se voir au milieu
du champ de blé en herbe dans lequel on les avait dressées. Nous étions
placés en « chasse d'armée », c'est à dire que nous devions assurer
la couverture des troupes.... |
Lettre du 21 mai 1940 de la mère de Jean MENNEGLIER, promotion 1937 de l’École de l’Air jeune sous-lieutenant à La 6ème Escadrille du GC
III/6 |
|
Mardi, 21 mai 1940 Mon Jean, Nous vivons
des instants graves. L’appel ce soir du Chef du Gouvernement a jeté dans nos
cœurs, sinon le désespoir, du moins la minute du danger. Ayons foi en la
miséricorde et attendons avec confiance. De plus en plus notre pensée est
avec toi qui nous en sommes sûrs fais vaillamment ton devoir. Quel rôle
difficile vous avez à remplir ! Ici,
tranquillité relative, trop de lourdes pensées. La vie continue pour papa el moi... |
Notez la
flamme postale sur l’enveloppe : « L’AVIATION EST LA PLUS BELLE DES
CARRIÈRES » !
Dès le lendemain matin, le 21
mai, 18 Morane du GC III/6 sont engagés dans le Secteur de Cambrai-Bapaume
où ils doivent rejoindre à 16h 00 des Dewoitine 520 du GC I/3 de
Meaux-Esbly. Le résultat est catastrophique. Les avions du GC III/6
réussissent à éviter les tirs de barrage de la « Flak », mais la
patrouille basse est prise à partie par 6 Messerschmitt Bf 109 ; un
pilote est tué, le sgt THIROUX de GERVILLIER sur son
MS n°803 « Le Dahut », (6ème) un autre
est gravement blessé, le s/lt CAVAROZ (5ème), et un troisième,
également blessé, est fait prisonnier, le s/lt SALAÜN (5ème).
Le Groupe perd finalement 3 avions et 2 autres sont très sérieusement
endommagés. Les Messerschmitt 109 se sont avérés une nouvelle fois plus rapide
que les Morane 406.
Page spécifique consacrée au sergent De GERVILLIER
CITATION du s/lt CAVAROZ « Jeune
pilote plein d’allant. A contribué, le 11 mai 1940, à une victoire sur un
avion ennemi. Assez grièvement blessé par des éclats d’obus, le 21 mai, a fait
preuve d’un magnifique courage en ramenant en territoire français son avion
très endommagé par des tirs de défense contre avions. » Croix de guerre avec palme |
CITATION de l’adj GOUJON « Chef
de patrouille de grande valeur, a été attaqué, la 21 mai 1940, par trois
avions ennemis. Après avoir réussi à dégager son équipier, a eu son avion
gravement endommagé par un obus de la Flak et a dû, faute d'essence, atterrir
à quelques kilomètres des lignes ennemies. A pu rentrer à son terrain après
s'être procuré du combustible, dans des conditions difficiles, Le 10 mai, a
sauté en parachute, son avion en flammes. Le 11 mai, est revenu avec un avion
criblé de balles » Croix de guerre avec palmes |
Joseph, le 22
mai : « …sur
ma paillasse, une lampe de poche dans ma main gauche… dans le secteur, rien de
nouveau, santé, moral bon, sans excès… ».
Un groupe de 9 MS 406 du GC III/6
décolle en début d’après-midi pour effectuer une nouvelle mission sur le
secteur de Bapaume-Cambrai, mais ce jour là tous les chasseurs rentrent sans
problème.
CITATION du sgt BOUIN « Jeune
pilote courageux, équipier d’une patrouille légère, s’est trouvé engagé à sa
première sortie contre quinze Me 110 ; a très bien soutenu son chef de
patrouille qui a contribué à abattre un Me 110 dans nos lignes. Le 22 mai
1940, après avoir été pris à partie par un violent tir de Flak, se trouvant
seul, a été attaqué par deux Me 110 ; a réussi à se dégager et ramener
son avion sur un terrain français. » Croix de guerre avec étoile de vermeil |
CITATION du s/lt MENNEGLIER « Jeune
officier pilote de chasse qui a effectué de nombreuses missions de défense
aérienne du territoire, le 22 mai 1940 a assuré une mission de chasse d’armée
jusqu’au bout sous un tir violent de D.C.A. » Croix de guerre avec étoile de bronze |
Mémoires de Jean MENNEGLIER –
Coulommiers – 22 mai 1940 – Première mission ...nous
fîmes une première mission le 22 mai au-dessus de la Somme où les Allemands
venaient de faire une percée pour tenter d'encercler les troupes anglaises et
les nôtres engagées en Belgique au moment de leur attaque le 10 mai. Je me
souviens encore de l'angoisse qui m'étreignait en attendant au sol l'heure du
départ. Elle disparut heureusement quand je me trouvai en l'air. Nous fûmes
accueillis par un feu nourri de D.C.A. Bien qu'évoluant et changeant
d'altitude nous fûmes encadrés par de gros flocons noirs. Nous entendions le
bruit des explosions et étions secoués par leur souffle. Nous parcourûmes
ainsi tout le cours de la Somme jusqu'à la mer. A un moment un obus éclata
juste devant moi. Je passai dans le nuage noir et rentrai instinctivement la
tête dans les épaules craignant de recevoir des éclats alors que tout danger
était passé. En évoluant on pouvait voir notre route jalonnée d'éclatements.
Les bougres devaient avoir avec eux un sacré nombre de pièces de D.C.A. et
des munitions en abondance. Certains prétendirent avoir aperçu des
Me 110 mais, même quand nous sortîmes du champ d'action de la D.C.A à
l'embouchure de la Somme, je ne vis rien. Nous allâmes nous poser sur le terrain
de Rouen pour faire le plein avant de rentrer à Coulommiers. Il faut dire que
c'était une sage précaution. En effet en patrouille de chasse il faut évoluer
constamment pour surveiller les arrières du C.P. et pour cela adopter un
régime moteur supérieur au sien, donc consommer davantage. Aussi ne devait-il
pas se fier aux indications de son jaugeur et penser que ses équipiers
auraient la panne sèche avant lui... |
Joseph le 23
mai :
«…demain je vais avoir une chambre chez l’habitant…RAS toujours, j’ai bon
espoir… »
Toujours des opérations de soutien aérien
aux troupes françaises qui tentent vainement de freiner l’avance de la
Wehrmacht dans le Nord et en Picardie.
Le 24
mai les choses vont plus mal : « J’ai passé une bonne nuit, dans un bon lit, chez
l’habitant dans un patelin voisin… Les Fritz passent tous les jours. Chez nous,
trois disparus : deux sous/off et le commandant du Groupe, sans nouvelles
depuis 48h…. »
C’est en effet au cours d’un rude combat
opposant 12 Messerschmitt 110C à 3 MS 406 du GC 3/3, 2 du GC III/6 et 3
Dewoitine 520 du GC II/3 que le Morane Saulnier 406 n° 134 du Commandant
CASTANIER a été sévèrement touché près de Cambrai. Grièvement
blessé et pris à partie de surcroît par la DCA française, il saute en parachute
alors que son Morane s’écrase en flammes. Il mourra le lendemain dans un
hôpital lillois. Le s/lt COLONGE, avec le MS 406 n°675, également blessé
s’est parachuté et a été fait prisonnier.
Le Commandant CASTANIER pressentait la
défaite à venir et il avait fait part à certains de ses hommes que de sa propre
autorité il conduirait le Groupe en là où on pourrait encore poursuivre le
combat, ceci trois semaines avant l’appel du Général de Gaulle. Il est remplacé
« casus morti » par le capitaine STEHLIN (33 ans), qui vient d’arriver
le 12 mai à l’État-major du Groupe, après avoir été attaché militaire à
l’Ambassade de France à Berlin de 1935 à 1939 sans avoir beaucoup volé.
Page spécifique consacrée au commandant
CASTANIER
CITATION de l’adj JAPIOT « Excellent
chef de patrouille, a attaqué le 24 mai 1940 une grosse formation de
bombardiers, a atteint deux d’entre eux qui ont été vraisemblablement abattus. » Croix de guerre avec étoile de vermeil « Excellent
sous-officier. Bon pilote de chasse plein d’allant et de courage. A participé
à toutes les missions importantes du Groupe. |
CITATION du cne BERNACHE ASSOLLANT « Pilote
de grande classe ayant conservé la plus grande modestie. Excellent chasseur
animé du plus bel esprit de sacrifice et de la plus grande ardeur au combat.
A donné la mesure de ses qualités de pilotes dans les combats aériens des 21
et 24 mai en protégeant ses camarades contre une chasse ennemie très
supérieur en nombre. » Croix de guerre avec étoile de vermeil |
Mémoires de Jean MENNEGLIER –
Coulommiers – Le 24 mai 1940
...il y eut une autre mission le 24 Mai vers le nord avec une formation très importante
qui comportait une patrouille triple, c'est à dire 9 avions. J'étais équipier
bas de la patrouille inférieure. Les patrouilles évoluaient les unes par
rapport aux autres pour se protéger mutuellement. Je vis à un moment passer
près de moi l'avion de Kawnick reconnaissable à son damier. Je ne sais ce
qu'il faisait là car il était équipier haut de la patrouille supérieure. A un
moment je vis en dessous de nous, essayant de se faufiler dans une couche de
strato-cumulus, une formation d'Amiot 143 qui normalement pratiquait le
bombardement de nuit. C'étaient des avions périmés et très lents. Je plaignis
de tout mon cœur les gars qui faisaient cette mission de sacrifice. Je ne me
souviens plus très bien du reste de la nôtre. Il me semble que ma patrouille
se trouva séparée du reste de la formation. J'étais avec Japiot qui, à un
moment, se mit à gigoter devant moi. Je regardai de tous mes yeux mais ne vis
rien. Nous finîmes par nous retrouver avec la patrouille Guerrier-Assolant et
rentrâmes au terrain. Ils prétendirent avoir vu des avions allemands. Ce fut
ce jour-là que le cdt Castanier fut tué, Colonge et Salaün descendus et faits
prisonniers.... |
Le 25
mai, les pilotes du III/6 attaquent vaillamment des groupes ennemis malgré
leur grande infériorité numérique et c’est au cours de ces journées que la
fougue des pilotes du GC III/6 s’exprimera le mieux et deviendra légendaire.
Plusieurs appareils sont perdus et plusieurs autres gravement endommagés. Les
Morane du vétéran, le capitaine CHAINAT et de l’adj. DIAZ sont littéralement à
l’état de passoire quand ils reviennent se poser à Coulommiers. Malheureusement
le sergent MAIGRET a été tué près de Travecy à bord du Morane
n°524 (6ème ). Un BF 110 et un Dornier 17 ont été
abattus. Les s/lt DE ROUFFIGNAC et VILLEMIN gravement touchés doivent se poser
en catastrophe en picardie. Le GC III/6 n’a plus que cinq appareils en état de
vol.
Page spécifique consacrée
au sergent MAIGRET
L’épave du MS 406 n° 525 du sergent Charles MAIGRET de la 6ème
Escadrille
à Travecy,
16 km au sud de Saint-Quentin, sous la garde de soldats allemands
|
|
|
Le Morane Saulnier MS
406 n° 627 codé 7 « Pita » du s/lt DE ROUFFIGNAC de la 5ème
posé en campagne, mal en point, près de Montdidier le 25 mai 1940 Photographies
Jean MENNEGLIER – Droits réservés |
||
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CITATION du s/lt de ROUFFIGNAC « Jeune
officier, brave autant que modeste, excellent pilote de chasse. Le 25 mai
1940, pris à partie par plusieurs Me 110, son avion ayant été criblé de
balles et d’obus par l’ennemi, a réussi à ramener son avion dans nos lignes
après s’être dégagé par d’habiles manœuvres. » Croix de guerre avec étoile de vermeil |
CITATION du s/lt CAPDEVIOLLE « Jeune
officier courageux et bon chasseur. Le 25 mai 1940, a très bien soutenu son
chef de patrouille engagé contre une formation de Me 110, très supérieur en
nombre. » Croix de guerre avec étoile de bronze |
Joseph le
26 mai : « Donc
il parait que c’est aujourd’hui notre bombardement. Hier déjà 28 méchants ont
survolé le terrain. Ils ont tout lâché à plusieurs kilomètres mis en fuite par
autant de chasseurs. A part cela, tout va bien. La confiance règne et bientôt
Hitler aura fini de régner…Chartres a donc eu le baptême du feu. Soit toujours
très prudente et n’aie pas peur de te sauver si tu vois les nazis… »
Le 27
mai : « Comme
prévu, on a bien eu notre baptême du feu. Sous le coup de 13h30 un des sous-off
voit apparaître une vague d’avions suspects. Juste le temps de courir dans un
fossé. On a été bien arrosé de bombes et même mitraillé. 70 bombes sont
tombées. 1 Morane 406, 2 Simoun (1), 1 hangar, 1 soldat ne répond plus à
l’appel. On attend incessamment la suite. Ne craint rien. Je surveille
l’horizon et me débinerai à temps… »
(1) Caudron Renault C.635
« Simoun » : appareil de tourisme à aile basse monomoteur de
1935, aussi utilisé par l’Armée de l’Air comme appareil de liaison et
d’entraînement au pilotage
C’est le 26 mai, au moment ou 6 Morane du
Groupe rentraient d’une mission d’escorte d’un Dewoitine 338 d’Air France vers
Londres avec le premier Ministre Paul RAYNAUD à son bord, que 30 bombardiers
Heinkel 111 volant à 2 500 mètres avec des bombes de 50 et 100 kg,
escortés par 4 Messerschmitt 110 ont attaqué Coulommiers. Les archives
militaires situent cette attaque à 13h 15. Les dégâts et les pertes sont
finalement minimes par rapports aux moyens employés et la piste reste
praticable. Un soldat a été tué lorsque l’armurerie de la 5ème
Escadrille a été touchée et un autre blessé. Le Morane 406 n°558 (ci-dessous)
a totalement brûlé, et trois autres, les n° 234, 673 et 925 fortement
endommagés seront évacués.
Le MS
n°558 de la 5ème Escadrille incendié lors du bombardement du 25 mai
Photographie de Robert
ROHR, mécanicien de la 5ème Escadrille
Le soldat tué s’appelle Émile MARCHAL.
Il entre en effet à l’hôpital militaire de Coulommiers le 26 mai où il décède
le même jour, mort au Champ d’Honneur. Il n’y a donc pas que les pilotes qui
sont victimes du conflit. Dans la courte énumération des pertes que le s/c
BIBERT fait à son épouse la perte de « son » Morane et de
« son » hangar sont cités avant celle de ce modeste « troisième
couteau » ! Celui-ci, comme bien d’autres, faisait pourtant la guerre
avec autant de détermination et de courage que ceux qui ont été mis en lumière
par l’Histoire. Ces obscurs passèrent cependant à travers les distributions
d’honneurs, médailles et citations ; c’est pour ne pas les oublier, qu’ici
en annexe, une page a été consacré ce valeureux jeune armurier...
Page spécifique
consacrée au soldat MARCHAL
Joseph, comme tout les autres, eut
« la trouille de sa vie » ce jour là, ce qui le décida à prendre
quelques photographies des hangars détruits. C’est ainsi qu’on dispose
aujourd’hui d’une des rares images du MS 406 du capitaine Jean ASSOLLANT,
le n°673 (L-702) de la SNCAO qu’il toucha à Nantes au début du mois de novembre
1939. Liberté des chefs charismatiques, ASSOLLANT a fait peindre sur la dérive
l'insigne de la S.A.C.M. (Société de l’Aviation Civile de Madagascar) et a
baptisé son appareil « La Pouille ».
|
|
Ces deux photographies
ont été prises par le s/c BIBERT, chef de Hangar de la 6ème
Escadrille après le bombardement du terrain de coulommiers le 25 mai 1940 Sur la photographie de
droite, on voit le MS 406 n° 673 « La Pouille » du capitaine Jean
ASSOLLANT (État-major du Groupe),
reconnaissable à l’insigne de la S.A.C.M (Aviation
Civile de Madagascar) Le 25 mai 1940,
l’avion était immobilisé dans ce hangar depuis deux jours car un bout de plan
était à changer. Il sera abandonné au départ du Groupe le 31 mai. C’est à partir de ce document exceptionnel que des
illustrateurs ont pu immortaliser cet appareil mythique affecté en 1940 au
premier Français à avoir traversé l’Atlantique nord en 1929 ! Photographies
Joseph BIBERT – Droits réservés |
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Morane Saulnier MS 406 n° 673 « La Pouille » du
capitaine Jean ASSOLLANT |
|
Lire :
« ASSOLLANT, ses « Pouilles » et MADAGASCAR » (Avions HS n°34)
Mémoires de Jean MENNEGLIER –
Coulommiers – 26 mai 1940 – Bombardement ...Un après-midi·j'étais sur le terrain dans
la tente de l'escadrille. Une formation de plusieurs avions venait de rentrer
de mission et on était en train de faire le plein quand la sirène d'alerte
retentit. Etant sorti, j'aperçus une formation de Heinkel 111 en deux
sections qui se dirigeait droit sur le terrain. Aucun avion n'était en mesure
de décoller à part un Potez 63-11 d'observation qui roulait en se dirigeant
vers la soute et prit le parti de décoller. Comprenant que nos avions
allaient être la cible, nous nous mîmes à courir à travers champs pour nous
en éloigner le plus possible car il n'y avait aucune protection à proximité.
Au moment où les bombes commencèrent à tomber en sifflant nous étions en
terrain découvert. Nous entendîmes les premières explosions. Chacun se jeta
dans un sillon. Au lieu de nous éloigner de la traînée, nous nous étions
presque mis dessous car la section qui visait nos avions rata complètement
son tir et envoya ses bombes dans les champs. La traînée passa à une
cinquantaine de mètres de moi. J'étais secoué à chaque explosion et je
sentais les ondes de choc me frôler le dos. A un moment je reçu un éclat de
bombe qui vint me tomber sur la main, me brûlant légèrement. Nous nous en
sortions bien. L'autre escadrille avait été un peu plus secouée. Quelques
avions avaient été touchés et un soldat qui, les jambes coupées par la peur,
avait un peu trop tardé à rejoindre la tranchée-abri, fut tué par un éclat.
Nous n'avions pas eu de dégâts et nos avions étaient intacts. Nous nous mîmes
à creuser des tranchées à proximité de la tente ce que nous avions
complètement négligé de faire auparavant. Nous n'étions vraiment pas préparés
à faire la guerre. Il y
avait à côté de nous une batterie de jumelage Hotchkiss de 12 mm servie
par du personnel de la Compagnie de l'Air. Ils avaient tiré courageusement
sur les avions qu'ils ne risquaient pas d'atteindre à l'altitude où ils
étaient et quand nous les avons interrogés pour savoir comment ils faisaient
leur visée ils répondirent qu'ils visaient les croix noires. Eux aussi
étaient mal préparés. |
Sur le front, ce n’est pas encore la
débandade, mais ces trois dernières lettres terribles de Joseph témoignent bien
de l’incompréhension totale des événements que ressent la majorité des combattants
à ce moment de la guerre qui s’avère maintenant perdue.
Joseph le
28 mai : « Il
est 5h10. Je suis au volant de la Matford. On attend d’un instant à l’autre
l’ordre de départ. Les Fritz n’ont pas osé venir hier. Cela n’empêche que dès
qu’on voit des avions suspects on se planque dans notre terrier. Moi en
principe je me débine soit en vélo soit en Matford… ici on bouche les trous… tu
pourrais peut être tenter de venir ici avec la voiture mais c’est
risqué… »
Une
commande de camions Matford prête à être livrée à l’Armée de l’Air en 1939
Ceci est le dernier courrier de Joseph à
Julienne connu et du fait des mouvements de l’un et de l’autre dans les semaines
qui suivirent, il est fort possible qu’il n’y en ait pas eu d’autres. Ces
courriers sont soumis à la censure militaire et restent donc très flous sur les
pertes. Les victimes sont « disparus » ou « ne répondent pas à
l’appel » : il faut préserver le moral de ceux de l’arrière…
La mention du vélo, dans le courrier daté
du 28 est intéressante. Joseph et Julienne avaient chacun un vélo au début de
la guerre. Joseph a toujours dit à son épouse : « Quoi qu’il arrive, ne t’encombre pas de la voiture (leur Peugeot
201 acheté la veille de leur mariage en octobre 1939) parce que tu ne trouveras
peut-être pas d’essence, mais ne te sépare jamais de ton vélo... ». Il
a réussi l’exploit de ne pas se séparer du sien pendant toute la bataille, le
transportant dans un véhicule de l’échelon roulant et à l’embarquer dans le
bateau qui évacuera le Groupe en Algérie (21 au 27 juin). La voiture de Joseph
et Julienne servit pour l’exode de sa famille, elle survécut à la guerre,
cachée dans une grange à Chartres. Joseph, Julienne et leurs deux enfants en
profitèrent ensuite de 1945 à 1953. Julienne quitta Chartres dans un convoi
militaire quand les personnels civils de la BA 122 où elle travaillait reçurent
le 12 juin l’ordre d’évacuation immédiate vers Cazaux. Ils y arrivèrent le 13
au soir après une nuit passée à la caserne de Poitiers. Elle avait réussi à
charger son vélo sur le toit d’un des autocars de ce convoi qu’elle pu ainsi
récupérer en Gironde !
La Mère de Julienne, sa belle sœur et ses
deux nièces, sa ½ sœur, une tante paternelle et ses deux petits-enfants, ayant
quitté Chartres avec la 201 et une autre voiture dans lesquelles ils
s’entassèrent avec quelques bagages, arrivèrent tant bien qu mal jusqu’à
Vodable, charmant petit village au dessus d’Issoire dans le Puy de Dôme, où
deux veuves charitables purent leur fournir de quoi se loger sommairement.
Après l’armistice Il fut très difficile à Julienne de savoir où sa famille et
son mari, mais quand elle eut le 6 juillet 1940 les informations nécessaires
sur sa présence en Algérie, c’est à bicyclette et au prix d’incroyables
aventures qu’elle effectuera les 500 kilomètres séparant Cazaux de Vodable où
elle arrivera le 29 juillet 1940. Après avoir repris des forces, c’est avec la
même ténacité, ayant décidé contre toute raison de quitter Vodable et de
rejoindre Joseph au-delà de la Méditerrannée, qu’elle gagnera un peu plus tard
Marseille par le train... avec sa bicyclette en bagages accompagnés ! Elle
s’embarquera avec culot et en toute illégalité sur un des derniers bateaux en
partance pour l’Algérie, toujours avec sa bicyclette..., pour retrouver enfin
son époux à Alger la blanche le 19 août 1940. A Fort de l’Eau, à quelques
kilomètres d’Alger et au bord de la mer, là où Joseph et Julienne habitèrent
dans une petite maison jusqu’à l’automne 1944 pour lui et jusqu’au printemps
1945 pour elle, les deux bicyclettes furent un luxe particulièrement apprécié.
Mais ceci est une autre histoire...
Vodable
(Puy de Dôme) en juillet 1940 et juste après la guerre
Fin mai, le Groupe III/6 est littéralement
à bout de souffle et n’a quasiment plus d’avions en état de vol, mais le moral
semble encore bon. Le 29
mai est calme. Le 30
mai, il reçoit pour survivre une dizaine de Morane Saulnier 406 en mauvais
état, en provenance du GC III/2 ; le journal de marche de la 6ème
Escadrille mentionne : « Nous sommes néanmoins très désappointés
d’avoir encore des Morane à casser, quand verrons nous les Dewoitine 520 ou
Curtiss P-40 ». Les nouveaux pilotes envoyés en renfort n’ont pas encore
l’entraînement nécessaire aux opérations de première ligne.
Le Groupe totalise à ce jour 96 missions
de guerre et 324 sorties.
Deux documents permettant
d’apprécier les préoccupations administratives de l’Armée de l’Air en pleine
guerre...
Dans le même temps on casse des
Morane qui coûtent un peu plus qu’un kilo de sucre ou qu’un
caleçon !
|
|
Nombre de jours |
Effectifs max. |
Effectifs min. |
Journées |
Pain |
Pain par homme |
Vin |
Vin par homme |
Viande |
Viande conserve |
Viande par homme |
Haricots |
Pâtes |
Riz |
Total par homme |
Sucre |
Sucre par homme |
Café |
Café par homme |
Graisse |
Sel |
Sucre |
Sucre par homme |
Chocolat |
du |
au |
|
|
|
|
kg |
gr. |
litre |
litre |
kg |
kg |
gr. |
kg |
kg |
kg |
gr. |
kg |
gr. |
kg |
gr. |
kg |
kg |
kg |
gr. |
kg |
24-mai |
25-mai |
2 |
115 |
112 |
227 |
110 |
484 |
110 |
0,5 |
88,0 |
|
388 |
|
|
11,0 |
48 |
10,0 |
|
|
|
|
|
10,0 |
|
|
26-mai |
27-mai |
2 |
110 |
110 |
220 |
110 |
500 |
110 |
0,5 |
88,8 |
|
404 |
11,1 |
11,1 |
|
101 |
|
|
|
|
10,0 |
|
|
|
|
28-mai |
29-mai |
2 |
109 |
139 |
248 |
110 |
443 |
110 |
0,4 |
88,0 |
|
355 |
11,0 |
|
11,0 |
89 |
20,0 |
|
22,0 |
|
10,0 |
13,2 |
20,0 |
|
|
30-mai |
31-mai |
2 |
139 |
139 |
278 |
140 |
503 |
140 |
0,5 |
112,0 |
|
403 |
|
14,0 |
14,0 |
101 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
1-juin |
2-juin |
2 |
132 |
132 |
264 |
132 |
500 |
132 |
0,5 |
105,6 |
|
400 |
13,2 |
13,2 |
|
100 |
8,4 |
|
6,1 |
|
8,0 |
5,3 |
8,4 |
|
|
1-juin |
Vivres de route |
4 |
132 |
132 |
528 |
370 |
700 |
264 |
0,5 |
|
158,0 |
299 |
36,0 |
|
36,0 |
136 |
25,0 |
|
19,0 |
|
5,5 |
|
25,0 |
|
27,0 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
TOTAL |
|
|
|
1765 |
972 |
550 |
866 |
0,5 |
482,4 |
158,0 |
363 |
71,3 |
38,3 |
72,0 |
103 |
63,4 |
36 |
47,1 |
27 |
33,0 |
18,5 |
63,4 |
36 |
27,0 |
Bordereau
récapitulatif des denrées délivrées à titre gratuit par la Compagnie de l’Air
75/118 au Groupe de Chasse III/6 pour la période du 24 mai au 6 juin 1940
Le
fait que le 1 juin ont été distribués des vivres pour 4 jours de route semble
bien prouver que le déplacement de l’échelon roulant de Coulommiers au Luc i=ua
lUv
DATES |
DETAIL DES EFFETS REÇUS Inscrire les effets à la
suite des uns des autres exemple : 22 chemises,
15 caleçons... |
DATES |
DETAIL DES EFFETS TRAITÉS Inscrire les effets à la
suite des uns des autres exemple : 22 chemises,
15 caleçons... |
15
mai 1940 |
20
vestes de treillis |
13
avril 1940 |
4 capotes AA |
|
20
pantalons de treillis |
|
22
vestes drap |
|
Pour la Compagnie de l’Air 23/102 |
|
12
pantalons drap |
|
|
|
27
pantalons de treillis |
26
mai 1940 |
11
vareuses AA + 16 ceinturons |
|
5 caleçons |
|
5 pantalons AA ° 15 bretelles de fusils |
|
12
vestes de treillis |
|
4 vestes de treillis |
|
38
paires de chaussettes |
|
1 pantalons de treillis |
|
11
bérets |
|
3 chemises |
|
12
sabots (paires) |
|
7 caleçons |
|
20
chaussons (paires) |
|
11
paires de chaussettes |
|
25
chaussures (paires) |
|
Pour le Compagnie de l’Air 75/118 |
|
Effets à réformer à la base de Reims, |
|
|
|
Service Habillement de l’A.R. 52 |
Le
8 juin 1940 |
65
pantalons AA |
|
|
|
15
casques AA |
20
avril 1940 |
8 paires de brodequins |
|
5 chemises AA |
|
50
paires de bandes moletées |
|
50
bérets |
|
|
|
20
vestes AA |
|
|
|
|
15
mai 1940 |
200
couvertures |
|
|
|
50 cache-nez |
|
|
|
44 passe-montagnes |
|
|
|
6 peaux de moutons |
|
|
|
Effets
remis à la à Compagnie de l’Air 23/102 |
|
|
|
|
Une
double page du registre du suivi des mouvements des effets d’habillements
concernant le GC III/6
LE LUC
en PROVENCE
31/05/1940 – 18/06/1940
Terrain du
Luc en Provence – Photo aérienne de 1950
L’espoir de tous les pilotes et mécaniciens
de toucher enfin les fameux Dewoitine 520 est finalement exaucé par le Général
d’HARCOURT, conscient de l’état de fatigue du GC III/6.
On annonce alors au Groupe, à son grand
soulagement, après les très dures journées de Coulommiers, son prochain
transfert sur la base du Luc, dans le Var, à la fois pour faire face à l’entée
en guerre de l’Italie qui semble inéluctable et aussi pour recevoir et prendre
en main ses nouveaux appareils : voir carte.
Le D.520 restera le seul chasseur français de 1940 capable de rivaliser avec
les meilleurs chasseurs allemands du moment ; s’il est un peu moins rapide
et moins bien armé,il peut prendre l’avantage grâce à une plus grande
maniabilité. Mais il est arrivé bien tard dans les escadrilles !
Le III/6 reçoit l’ordre de son départ dans
la soirée du 30 mai et le lendemain 31
mai les Morane décollent à 16h 00, via Lyon Bron pour un
ravitaillement. Mais avec la nuit tous n’arrivent pas ce jour la au Luc ;
un reste à Lyon, pour être détruit le lendemain lors du bombardement de cet
aérodrome (MS 406 n° 933), d’autres se posent à Aix en Provence, Marignane
ou Hyères.
Le Morane MS 406 n°933 de la patrouille polonaise du GC
III/6 posé à Lyon Bron le 31 mai et détruit le 1er juin 1940
Une partie des mécaniciens, dont Joseph BIBERT,
sont transférés par la voie des airs. L’échelon roulant suit par voie
ferrée ; le sergent mécanicien de la 5ème Jules PIESVAUX a pris
les trois photographies ci-dessous, images rares et inédites, qui permettent de
penser que son transfert aura duré 4 jours, du 2 au 5 juin, mais il est
vraiment étonnant de lire dans les archives officielles « L’échelon roulant, embarqué sur chemin de fer, quitte
Coulommiers au début de la matinée du 1er juin pour arriver le
lendemain soir en gare des Arcs où il est débarqué aussitôt ». Qui
croire ? Des imprécisions de ce genre de retrouveront d’ailleurs dans des
documents officiels postérieurs...
|
|
Jules PIESVAUX a pris
ces trois photographies du transfert de l’échelon roulant du III/6 de Voisins-Coulommiers
au Luc en Provence Embarquement le 2 juin1040 à 7h 00 à la Ferté Gaucher
(Seine et Marne) – Arrivée le 5 juin au Luc en Provence (Var) via Marseille |
|
|
|
Les Sergent Yves LE MAT et Jules PIESVAUX qui voyagent sur
une plateforme avec les véhicules ! |
Photographies Jules
PIESVAUX – Droits réservés
Mémoires de Jean MENNEGLIER – Le Luc
en Provence ...nous fîmes mouvement le 31 mai. Le
terrain du Luc était situé à proximité de la route qui relie cette ville à Saint-Raphaël,
dans cette vallée qui contourne le massif des Maures au nord. Le terrain
était entouré de pins. Il y avait quelques collines escarpées à l'ouest
couvertes de la végétation typique de la Provence. Le terrain était desservi
par une Compagnie de l'Air de recrutement local qui semblait être loin de la
guerre. En cas d'alerte le personnel avait la consigne de prendre son arme et
de se disperser dans la nature, en quelque sorte prendre le maquis. Stehlin fut très surpris le jour où
un secrétaire qui lui avait été fourni par la compagnie, en attendant
l'arrivée de l'échelon roulant, lui apporta un paquet de messages de guet en
lui disant qu'il n'avait pas voulu le déranger à chaque arrivée et qu'il
avait attendu qu'il y en ait assez pour les lui apporter. Comme il lui
demandait s'il fallait les enregistrer Stehlin,
après lui avoir expliqué calmement qu'il devait lui apporter ces messages au
fur et à mesure qu'il les recevait, eut la tentation de lui répondre par
l'affirmative... A gauche, le « Château
Colbert » au Cannet des Maures en 1940 A droite, la popote du
GC III/6 : la fille des propriétaires, Le GUENNEC, CHARDONNET ,PIMONT,
Mme CHARDONNET, LE GLOAN ...je fus hébergé, ainsi que Satgé, chez le Marquis de Colbert qui possédait une grande bâtisse, presque un
château, au nord de la voie ferrée, à mi-chemin entre le Luc et le terrain.
Nous couchions dans la chambre des petites filles de la Marquise. Le cdt Stehlin et le cne Chainat étaient également leurs hôtes. Eux, eurent sans
doute des contacts avec les propriétaires. Nous, petits sous-lieutenants, on
se contenta de nous loger. Nous avions établi notre popote dans un restaurant
du Luc où je me souviens qu'il y avait une vaste terrasse ombragée par un
platane. Nous y prenions l'apéritif et peut-être nos repas. Il me semble que
nous aperçûmes un jour parmi les hôtes Martha Eggerth que j'avais beaucoup
admirée dans la « Symphonie inachevée » (film de Willi Forst de
1933). Sur le
terrain du Luc il y avait un détachement anglais avec un Spitfire de
reconnaissance camouflé en permanence sous un hangar ; on ne le sortait
que pour aller effectuer des couvertures photo sur l'Italie qui n'était pas
encore en guerre. Il décollait presque tous les jours. Un Lockheed Ventura
venait d'Angleterre tous les jours emmener les magasins photo impressionnés
et les échanger contre des vierges. Le jour où les Italiens entrèrent en
guerre, le Spitfire rencontra un avion italien au-dessus de la mer et se mit
à faire des feintes de passes sur lui. Or ce Spitfire n'était pas armé.
L'Italien finit par se poser sur l'eau et le « Spit » prit une
photo de sa victime. Les Anglais fêtèrent leur victoire dans les bars du Luc
où certains de nos pilotes apprirent de leur bouche ce qui s'était passé.... |
Mémoires de Robert UMBERT (*)
– Le Luc en Provence ...sur le Morane 406, le complément d’huile
se faisait directement du bidon au réservoir placé sur une paroi en pente et
les pieds dans la boue. Le radiateur de l’appareil était escamotable. Pour les
vols de routine (couverture du terrain) le mécanicien démarrait l’appareil
avant de laisser la place au pilote dont les bottes étaient plaines de
gadoue. Le
Morane avait un plan fixe horizontal fixé par une traverse profilée qui
n’était pas très discrète. Cela ne nous choquait pas et nous trouvions cet
avion très beau. Il n’avait pas de roulette de queue, ce qui rendait beaucoup
plus sportif ses déplacements et ses virages dans les terrains
meubles !… … au
Luc, il y avait de l’herbe, même séché c’était bien mieux que la boue de
Champagne. Les Italiens nous ont déclaré la guerre, nous nous étions
rapprochés du théâtre des opérations. C’est ici que nous avons reçu nos
Dewoitine 520. Nous avions enfin une roulette de queue, des capotages plus
pratiques qui ne tenaient pas comme
sur le Morane par des « cordes à piano » s’enfilant dans des
encoches. Cet avion avait une particularité : son trou d’homme dans le
fuselage qui était une sorte de coffre à bagages. La roulette de queue jouait
quelques tours de temps à autre ; elle était maintenue dans l’axe par
deux tendeurs de caoutchouc qui pouvaient se rompre au décollage s’ils
étaient trop malmenés. Elle se mettait alors en travers à l’atterrissage ce
qui provoquait un superbe « cheval de bois » et souvent un avion
sur le ventre en bout de piste si le train lâchait... Le sgt Robert Umbert (mécanicien) qui a peint au Luc le
code « 29 » sur le D.520 n°138 du l’adj Jean DIAZ de la 6ème |
(*) Robert Nicolas UMBERT,
caporal-chef à Chartres en septembre, nommé sergent le 1 janvier 1940,
mécanicien à la 6ème escadrille depuis le début de la guerre
Liste des Morane 406 utilisés par le
Groupe GC III/6 de septembre 1939 à juin 1940
Merci à Lionel PERSYN et à Alain COSTE de m’avoir autorisé à publier une
partie des résultats de leurs longues et patientes recherches sur la destinée
des Morane 406
Près de 1 100 appareils de ce type ont été construits : ils en
ont identifiés 94 qui ont été utilisés par les pilotes du III/6 avant la
restitution des survivants à Toulouse en juin 1940
Le terrain du Luc en Provence, mesure
1 000 x 800 mètres ; il est situé en bordure d’un petit bois
idéalement placé pour camoufler les appareils.
Les officiers de l’État- major et quelques
autres logent au Cannet des Maures dans le château du Marquis de Colbert, les
autres officiers et les sous-officiers pilotes logent au Luc. Ils ont établi
leurs popotes dans deux restaurants différents ; certains sous-officiers
mécaniciens ont trouvé à se loger chez l’habitant.
Le III/6 remplace au Luc le II/3 qui a été
équipé en Dewoitine 520 du 10 au 18 mai. Comme ce dernier, iI est affecté au
Groupement de Chasse 24 alors commandé par le colonel DE TURENNE qui est basé à
Valence. Ce groupement est rattaché à la Z.O.A.A., Zone des Opérations
Aériennes des Alpes, commandé par le Général ODIC, également basé à Valence.
A peine arrivé au Luc, Marseille est
bombardée les 1er et le 2 juin par des avions allemands à long rayon
d’action. Malgré l’absence de l’échelon roulant quelques Morane du III/6 sont
envoyés en couverture sur le secteur mais sans se trouver confrontés à
l’aviation adverse. Par contre le 1erjuin en matinée la patrouille triple de LE
GLOAN a reçu, heureusement sans dommage, le feu des artilleurs français peu
aguerris et qui tirent avec des canons désuets !
Quelques jours après son arrivée, le
capitaine Stehlin aura une nouvelle fois l’opportunité, comme à Coulommiers, de
« demander une sanction sévère » au commandant de la ZOAA, pour un
officier des transmissions, le lieutenant D. qui commande la section 78/708, et
qui n’aurait pas mis assez de bonne volonté à satisfaire les demandes du
« pacha » du III/6 ! Cette sévérité se manifestera encore
souvent, comme par exemple en 1943, alors qu’il n’est plus commandant du III/6
mais commandant de la section d’aviation côtière, lorsqu’il a été chargé par
les Américains d’un rapport sur les incidents constatés sur les fragiles
moteurs des Bell P-39 du III/6 « Roussillon ». Ceux-ci supportaient
mal le sable du bled algérien. C’est son propre ancien officier mécanicien de
1940, le capitaine Nicolas qui n’en pouvait mais, qui sera sa cible, et qui a
été muté sans délain au grand dam de ses chefs et de son personnel, sans que
les moteurs américains Allison V-1710… et le Américains par conséquence soient
ainsi trop mis en cause. Les « incidents » continuèrent...
Le 2 juin quelques pilotes sont envoyés sur le terrain de
Valence-Trésorerie pour être à disposition de l'armée des Alpes plus rapidement
si une éventuelle attaque italienne survenait ; rien ne se passe et le
matin du 5 juin les Morane sont de retour au Luc.
Pendant que le III/6 poursuit son
installation au Luc, le terrain d’aviation de Chartres a subi le 3 juin un nouveau bombardement. Une bombe est tombée dans
le jardin de la maison de la mère de Julienne BIBERT, au 65, de la rue
Saint-Chéron, sans exploser, mais elle a étêté le beau sapin bleu dont la
famille était si fière ! Par contre, une autre bombe a détruit la petite
maison du 13 de l’avenue Neigre, à quelques dizaines de mètres des hangars
d’aviation, où Joseph et Julienne avaient loué deux modestes pièces jamais
occupées puisque leur mariage avait eu lieu en octobre 1939, second mois de la
guerre ; ce qui démontre bien qu’en octobre 1939 on imaginait que la
guerre serait courte ! Voir
deux photographies par ce lien.
Bien que de mauvaise
qualité, celle photographie, faite sans doute à l’arrivée du III/6 au Luc, doit
être publiée ; c’est la seule connue sur laquelle, autour du Commandant du
Groupe, le capitaine STEHLIN,
figurent ses deux commandant d’Escadrille, les cne JACOBI (5ème)
et GUERRIER (6ème) ainsi que l’adj LE GLOAN avec d’autres pilotes
ayant au moins une victoire homologuée à leur actif, ainsi qu’un mécanicien
Le 5 juin, le premier ministre REYNAUD remanie le gouvernement
et le Général DE GAULLE, fait général de brigade à titre temporaire, est nommé
sous secrétaire d'état à la guerre dans l’indifférence générale. Le 10 juin , le gouvernement quitte Paris pour Tours. On
commence à parler d’armistice. Les Allemands s’approchent de Chartres et, le 12
juin, c’est le départ vers le sud pour Julienne BIBERT avec le Parc d’Aviation
; sa famille est partie en exode quelques jours plus tôt et se trouve
complètement dispersée, sans nouvelle entre les uns et les autres...
Au Luc, les pilotes, par petits groupes,
transfèrent peu à peu sur le parc de Toulouse leur vaillants Morane. Bien que
techniquement dépassés ces appareils avaient certaines qualités et ils ont pu
être efficaces et redoutés de leurs adversaires, grâce surtout à la valeur et
au courage de leurs pilotes. Ceux-ci reviennent au Luc avec de magnifiques
Dewoitine 520 flambant neufs qui vont être rapidement engagés dans la bataille
contre les forces aériennes italiennes, puisque Mussolini, pour tenter
s’arracher quelques dépouilles à la France en voie d’être définitivement
vaincue, s’apprête stupidement à entraîner son Pays dans la guerre, par simple
opportunisme.
L’adjudant DIAZ, pilote, le s/c
BIBERT et le sgt ROBERT, mécaniciens partent le 8 juin à l’usine Dewoitine
de Toulouse ainsi qu’une équipe de la 5ème, lt MARTIN,
adj COLIN et sgt DESFOSSEZ, pour recevoir une formation sommaire à
l’usage et à l’entretien de ce nouvel avion qu’ils ne connaissent pas encore. DIAZ
et MARTIN ramènent leur Dewoitine au Luc le 12 juin. Les deux mécaniciens ne
rentrent que le 16 : il était juste temps !
En leur absence, le 9 juin une première
prise d’armes à lieu en mémoire du commandant CASTANIER, considéré jusqu’alors
comme « disparu » mais dont la mort a été annoncé.
Le lendemain 10 juin, au cours d’une
seconde prises d’armes, le Général ODIC, commandant la Z.O.A.A., remet les
décorations correspondantes à ceux qui depuis plusieurs semaines ont été
cités ; il laissera le soin au capitaine CHAINAT, as de 14/18 et second du
Groupe de remettre la croix de guerre à son Commandant, le capitaine STEHLIN.
Ce même jour l’Italie, comme prévu, entre en guerre pour la curée...
|
|
Le Luc - 10 juin 1940 – Le capitaine CHAINAT et le capitaine
STEHLIN |
Le capitaine CHAINAT félicite le capitaine STEHLIN pour sa
croix de guerre |
|
|
S/c CHARDONNET, adj LE GLOAN, cne JACOBI, cne
SULERZYCKI : 5ème Escadrille |
Le lieutenant MIRAND
commandant l’Unité Administrative remet au capitaine
STEHLIN sa citation lui ayant valu la croix de guerre en présence du capitaine CHAINAT |
Photographies Jean
MENNEGLIER – Droits réservés
Le 11 juin arrivent du C.I.C. de Montpellier, les lieutenants
polonais Wienzylaw BARANSKI et Jan BOROWSKI, affectés à la 5ème et
le sergent Michal CWYNAR la 6ème .Ce dernier deviendra
« As » dans la R.A.F. et livrera plus tard un témoignage de son court
passage au GC III/6 ; inconnu jusqu’à la rédaction de ces pages, il a
permis de comprendre un peu mieux le déroulement de la journée du 15 juin 1940
(voir plus bas).
Page spécifique consacrée à Michal CWYNAR
La journée du 12 juin est calme. Joseph BIBERT, sans nouvelles de son
épouse depuis longtemps, ne sait pas que celle-ci évacue Chartres à cette date
avec les militaires et les civils travaillant encore au Parc 122 de la Base
Aérienne. Ce n’est que deux mois plus tard qu’ils sauront chacun ce qu’à été le
sort de l’autre pendant la débâcle...
Le 13 juin, les adjudants LE GLOAN et GOUJON abattent
deux bimoteurs italiens BR 20 « Cigogna » le long de la côte, près
d’Agay. Totalisant ainsi 6 victoires, LE GLOAN fait donc déjà partie des
« As » de la campagne de France, mais deux jours plus tard il fera
mieux.
CITATION de l’adj GOUJON « Pilote hors de pair, chasseur audacieux,
a attaqué avec son chef de patrouille une formation de quatre bombardiers
italiens qui ont fait demi-tour sans avoir accompli leur mission. A
contribué, au cours de ce combat, à abattre deux Fiat BR 20 tombés dans
nos lignes. A ainsi remporté ses troisième et quatrième victoires ». Croix de guerre avec palmes |
CITATION du lt MARTIN « Chasseur
confirmé, plein de fougue. Malgré un enrayage de ses armes a secondé son chef
de patrouille pour dissocier un peloton de quatre bombardiers ennemis et a
contribué à la destruction dans nos lignes de deux Fiat BR 20 » Croix de guerre avec étoile de vermeil |
CITATION de l’adj GOUJON « Brillant
sous-officier, magnifique pilote de chasse, modèle de bravoure et d'habileté.
A engagé à plusieurs reprise, la combat contre un ennemi très supérieur en
nombres. Est descendu deux fois en parachute. Compte quatre victoires et
quatre citations à l'ordre da l'armée » Médaille militaire - Croix de guerre avec
palmes |
Ce même jour le sergent chef
MERTZISEN roule au sol avec le Morane 406 n°675 et il heurte au sol le
Dewoitine 620 n°350 qui est celui que Goujon a ramené de Toulouse 2 jours plus tôt.
Comme pour son accident du 11 mai 1940, un message « codé » est
envoyé. L’émetteur « Lenoir ? »et
le destinataire « La Bruyère ? »
changent. Pour le reste, « Miltande
= Le Luc » mais on donne en clair le code postal
« SP 814 » comme le nom du Groupe « GC II/6 » ! Par contre un MS 406 est toujours un « avion type 14 »
et on apprend qu’un D.520 est un « avion de type 84 ». Les deux appareils sont
déclarés « réparables 3ème
degré ». En fait ce sont les deux hélices qui sont à changer. Le
Morane sera envoyé plus tard au dépôt de stockage (DS) d’Istres avant d’être
réformé en 1942 tandis que le Dewoitine 350 ne traversera pas la méditerranée
avec le III/6 faute de pouvoir être réparé à temps. Goujon devra retourner à
Toulouse le 15 juin « choisir » un autre Dewoitine, ce sera le
n°340 ; quand au n°350, il passera une fois réparé en A.F.N. et on le
retrouvera en 1941 en Tusinie, au GC II/7, avec le lt Marcel MERLE aux
commandes ! Il n’est pas impossible que les deux photographies ci-dessous,
prises par Jean MENNEGLIER, sans légende et sans date, correspondent à ce petit
accident...
|
|
Peut-être au Luc en Provence le 13 juin 1940 après la
« rencontre » au sol du MS 406 du s/c MERTZISEN avec le D.520 de
l’adj GOUJON... |
Photographies Jean MENNEGLIER
– Droits réservés
De la même manière, ces trois
photographies de Jean MENNEGLIER représentant des pilotes en alerte ont
peut-être été faites au Luc en Provence. En alerte, le pilote a son casque à portée
de main et porte sur sa poitrine le boîtier relié par un câble à l’avion à
l’aide d’une prise multiple : sur ce boîtier viennent se ficher les prises
des écouteurs et du laryngophone relié à l’inhalateur que l’on voit pendre et
il se fixe au casque par deux crochets. Sous sa combinaison de toile, il revêt
une combinaison de chauffage à laquelle se raccordent par des contacts à
pression les gants chauffants et la cagoule chauffante.
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Capitaine Jean ASSOLLANT – E.M. |
Lieutenant Georges LEGRAND – 6ème |
Sergent Jacques BOUIN – 6ème |
Photographies Jean
MENNEGLIER – Droits réservé
Mémoires de Jean MENNEGLIER – Le Luc
en Provence (suite) ...notre Groupe échangea ses Morane contre des
Dewoitine 520. Un premier détachement de la 5ème escadrille, dont Jacobi et Le Gloan, partit à Toulouse récupérer leurs nouveaux (avec le cne Stehlin). Dès
qu'ils furent rentrés nous partîmes à notre tour vers Toulouse. Nous nous
posâmes le 15 juin à Francazal où nous abandonnâmes sans regret nos vieux
Morane. On nous conduisit en car à Blagnac où nous prîmes contact avec le
Dewoitine 520. Celui qu'on me donna portait le n° 358. C'était un avion
magnifique. Il était bien armé avec 4 mitrailleuses dans les ailes,
alimentées par bandes ce qui lui donnait une durée de tir supérieure à celle
du Morane (700 contre 350 cartouches par arme). Et les armes étaient
réchauffées. II y avait aussi le canon de 20 mm tirant dans l'axe de l'hélice
avec 80 cartouches au lieu de 60. Le train d'atterrissage était verrouillé
mécaniquement en position rentrée donc pas de problème en cas de balle dans
le circuit hydraulique. Enfin c'était un avion rapide qui faisait partie
égale avec le Me 109. Et puis il était très fin à piloter, virait bien
et avait des réactions très saines. Que se serait-il passé si nous l'avions
eu plus tôt ? A la
prise en main je fus surpris par la sensibilité du gouvernail de direction et
serpentai un peu au décollage mais je m'y fis très vite. Après quelques
minutes de prise en main je revins me poser à Francazal que nous quittâmes en
patrouille le lendemain (16 juin) pour rejoindre lle Luc. Nous apprîmes à l'atterrissage
ce qui s'était passé la veille pendant notre absence... |
Le 14 juin la Marine Nationale attaque dans la nuite les ports
de Gênes et de Vado. A 6h 15, une patrouille double du III/6, à laquelle
participe le capitaine STEHLIN, décolle du Luc pour prendre la suite des Bloch
151 de l’AC 3 qui couvrent depuis une heure le retour des bâtiments de guerre
français vers toulon. Le vice-amiral DUPLAT félicite le soir même par écrit le
général ODIC, commandant la Z.O.A.A. pour son concours. C’est à la suite de
cette mission que le capitaine STHEHLIN recevra sa citation, datée du 17 juin,
qui lui vaut la croix de guerre. On comprend mal que celle-ci lui ait été
remise une semaine plus tôt... et d’ailleurs, en 1940, certains pilotes du
III/6 et d’autres Groupes ont mal supporté que citations et médailles aient pu
être distribuées facilement aux « Seigneurs
de la Guerre » qui ne volaient pas souvent en tête des patrouilles le
leur Groupe. Les témoignages à ce sujet ne manquent pas...
CITATION du capitaine STEHLIN « a
remplacé en pleine bataille son chef tombé à l’ennemi. A montré à la tête de
son Groupe les plus belles qualités de Chef. Le 14 Juin a assuré lui même avec
plein succès, par mauvais temps la réussite d'une importante mission, la
protection d'une escadre de la flotte française. » Croix de guerre avec étoile de vermeil |
Ce même jour, les troupes allemandes
entrent dans Paris.
Le 15 juin va devenir le jour de gloire de Pierre Le GLOAN,
récemment nommé adjudant, et du GC III/6 tout entier. L’histoire a été
racontée partout à de multiples reprises. A la mi-journée, plusieurs grosses
formations italiennes de Fiat CR 42 « Falco » ont été lancées
pour procéder au mitraillage des terrains de Cuers, près de Toulon, et du Luc.
Le GC III/6, tardivement prévenu, n’est pas sur ses gardes et c’est un peu la
pagaille ; il n’a jamais été possible de reconstituer avec exactitude
l’enchaînement de la riposte, les documents officiels étant contradictoires.
L’analyse des combats du 15 juin entre les
avions italiens et français, par les archives et des témoignages dont certains
inédits, fait l’objet d’une page spécifique en annexe accessible par ce
lien :
15
juin 1940 – GC III/6 contre Regia Aeronautica
Dans un premier temps, trois avions
peuvent au moins se regrouper et former une patrouille improvisée. Elle est
constituée de l’adjudant Le GLOAN, des capitaines ASSOLLANT (n°302) et JACOBI
(n°229). Certains témoignages laissent à penser que les pilotes étaient en
l’air à ce moment pour « prendre en
mains » leur nouvelle monture et comme le Dewoitine n°277 de
l’adjudant LE GLOAN n’était pas prêt, celui-ci vole en fait avec le n°301
du lieutenant MARTIN, peut-être sans son parachute qui serait resté dans son
avion...
Le
Dewoitine 520 n°302 « La Pouille » (*) de Jean
Assollant le 15 juin 1940
(*) voir Note FXB un
peu plus bas
L’avion du cne JACOBI cafouille et il
doit rentrer au terrain. Le GLOAN et ASSOLLANT rejoignent alors rapidement la
formation ennemie qu’ils surprennent et ils abattent sans opposition deux
premiers appareils italiens au dessus de Saint-Tropez. Les armes du D.520
d’ASSOLLANT s’enrayent malheureusement et il doit décrocher. Restant seul,
LE GLOAN poursuit l’attaque et s’en prend à un troisième CR 42 ;
il sera sans doute considéré à tord comme détruit, mais plus probablement, il
aurait pu rejoindre l’Italie bien qu’endommagé. Revenant vers l’aérodrome du
Luc pour se poser, LE GLOAN peut abattre un dernier CR 42 occupé à
mitrailler les avions au sol. Immédiatement après, il aperçoit un gros bimoteur
BR 20 en approche, venu pour observer les résultats de l’attaque du
terrain. LE GLOAN, poursuivant son vol, attaque l’Italien et peut
l’abattre avec les quelques cartouches sont il dispose encore. En moins de ¾
d’heure et en une seule sortie, Le GLOAN, avec l’aide d’ASSOLLANT pour les deux
premiers, a donc officiellement détruit cinq avions, mais plus
vraisemblablement quatre, après analyse. Pour l’Histoire, sa mission du 15 juin
1940 restera cependant un « quintuple » !
Quoi qu’il en soit, son exploit du 15 juin
est bien réel et il mérite absolument d’être considéré comme un des meilleurs
« As » de 1939/40 et d’être entré ainsi définitivement dans la grande
légende de l’Aviation et dans l’Histoire tout court. Immédiatement sont
annoncés l’homologation de 5 victoires à son crédit et sa promotion au grade de
sous-lieutenant (à titre temporaire, décision ministérielle du 17 juin 1940).
Illustration
de Lucio Perinotto (2020) à gauche et image 3D d’un jeu vidéo à droite (2012)
Page spécifique consacrée au lieutenant Le GLOAN
La France avait besoin de héros en ces
jours où la défaite ne faisait plus de doute pour personne ; l’exploit de
LE GLOAN tomba à pic
La précipitation avec laquelle fut annoncé
à la France le « quintuple » de Le GLOAN est totalement démontrée par
le communiqué de guerre officiel du gouvernement n°574 repris par toute la
presse dès le 17 juin : de plus il faut noter la petite exagération, sans
doute pas involontaire, puisqu’il est question de « 3 chasseurs et 2
bombardiers » ; la population étant bien entendu plus concernée par
les bombardements que par les combats individuels entre les « chevaliers
du ciel »...
COMMUNIQUÉ
n°574 du 16 juin au soir Les attaques ennemies se sont répétées aujourd'hui sur tout le front de bataille. A l'ouest de Paris, dans la région de Laigle et de La Ferté-Vidame, ses efforts ont été contenus par nos troupes qui ont exécuté des contre-attaques locales. Au sud-est de Paris, l'ennemi a continué sa progression. Il a franchi la Seine dans les environs de Melun et de Fontainebleau, Il a, d'autre part, poussé au-delà d Auxerre des éléments d'avant-garde dans la direction de Glamecy et d'Avallon. Au sud du plateau de Langres, ses colonnes blindées et motorisées ont atteint la région au nord de Dijon et la Saône en amont de Gray. Des éléments légers ont franchi la rivière. En Lorraine et en Alsace, les mouvements prescrits par le commandement français s'exécutent conformément aux ordres donnés. Pendant les deux derniers jours, de nombreux combats aériens ont été livrés; en particulier, dans la journée du 15, le sergent-chef Le Gloan a abattu à lui seul, au cours d’une même sortie, cinq avions italiens, dont trois chasseurs et deux bombardiers. |
Pour l’État-major et le Capitaine STEHLIN,
commandant du Groupe III/6, qui fit ce qu’il fallait pour le magnifier et en
tirer gloire, masquant ainsi le fait que la protection de l’aérodrome du Luc avait
été plus ou moins bien assurée ce jour-là, les dégâts étant finalement plus
importants que ce qui en a été dit car plusieurs Dewoitine arrivant tout juste
de Toulouse ont été en fait endommagés. Joseph BIBERT n’a pas été un témoin
direct de ces événements, puisqu’il était encore à Toulouse chez Dewoitine.
Mais en classant ses photographies de guerre, on lui montra un jour un cliché
de LE GLOAN et GOUJON qu’il avait prise sur une plage près d’Alger, sans
doute pendant l’été de l’année 1941, et on lui demanda d’évoquer ses souvenirs
au sujet de « l’As » : « ...ce n’est pas ce qui lui est arrivé qui l’a rendu plus facile
à vivre, et puis … quand il a abattu ses italiens au Luc, il s’est passé de
drôles de choses ce jour là…!!! ». On n’en sut jamais plus de
sa part, mais d’autres ont également raconté leur 15 juin d’une manière un peu
différente de celle du Général STEHLIN dans ses mémoires écrites en
1964... !
CITATION du cne BERNACHE ASSOLLANT « Excellent pilote de chasse, d’un sang-froid et d’un
courage admirables. A attaqué avec son chef de patrouille une formation de 12
chasseurs ennemis. A contribué à la destruction de deux d’entre eux tombés
dans nos lignes » Croix de guerre avec palme |
Note FXB : Il m’a souvent
été demandé pourquoi les avions de Jean ASSOLLANT avaient été baptisés « La Pouille ». Je n’en savais
strictement rien, malgré quelques recherches ! J’en ai eu la réponse le 3
avril 2020, tout à fait par hasard, quand j’ai reçu une communication de Madame
M. GUILBAUT m’interrogeant sur l’opération « Ironclad », l’attaque
anglaise contre Madagascar du 5 mai 1942, qui avait vu son père, officier des
« corps francs », être fait prisonnier en octobre et envoyé pendant
18 mois comme prisonnier de guerre au camp n°375 de Londiani au Kenya avec des
Italiens, dans des conditions difficiles ; une « poussière
d’Histoire » mise comme d’autres de cette époque sous le sous le tapis...
Il se trouve que ses parents à Madagascar avant la guerre étaient des amis
proches de Jean et Suzanne ASSOLLANT, et qu’elle, jeune enfant à l’époque, en
avait des souvenirs précis 80 ans plus tard. Et en m’en racontant quelques uns,
elle me fit cette confidence : « c’était
drôle, Jean appelait sa femme Poupouille... »... C’est seulement après
qu’elle eut raccroché, que je fis le rapprochement avec « La Pouille » ! Une autre « poussière
d’Histoire », mais celle-ci est maintenant connue de tous... !
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Le Luc – 17 juin 1940 –
Le Dewoitine 520 n°358 du s/lt MENNEGLIER |
Peinture de la cocarde
et du code « 26 » par un mécanicien de la 6ème |
A noter que l’insigne
« Masque Rieur » ne sera
peint qu’en juillet à Alger |
Mémoires
de Jean MENNEGLIER – 17 juin 1940 - La visite du général... ! ...Nous eûmes
aussi la visite d'un général qui commandait une organisation territoriale
dont nous dépendions. Je suppose que les victoires de Le Gloan devaient y être pour quelque chose. A un moment donné,
évoquant sans doute l'attaque dont nous avions été l'objet, il demanda à Stehlin s'il faisait mettre les
mitrailleurs dans les avions pour participer à la défense du terrain comme
cela à avait été prescrit récemment par le Commandement de manière à ajouter
le feu des avions à celui des armes terrestres. Stehlin qui était un peu
pince sans rire lui dit qu'il n'avait pas trouvé de dispositif permettant
d'orienter les avions de chasse au sol. En effet le chasseur a un armement
fixe et il tire en orientant l'avion. Passant devant un Dewoitine le général
dit : « Alors ce sont vos nouveaux avions. Qu'ont-ils comme
armement ? » Stehlin lui montra l'emplacement des mitrailleuses et
du canon. « Tout çà c'est pour tirer vers l'avant mais qu'avez-vous vers
l'arrière ? » Il fut surpris d'apprendre qu'il n'y avait rien vers
l'arrière et que le chasseur se défendait en manœuvrant. Puis le général qui
pilotait un Simoun demanda quel était le sens de décollage. Stehlin lui dit
que c'était face à l'ouest. « Non; dit-il, dans ce sens il y a la
montagne. » C'était une colline à environ 3 kilomètres du terrain. Il
décolla vent arrière en direction de Saint-Raphaël. Heureusement le vent
n'était pas très fort... » |
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Sous-lieutenant CAPDEVIOLLE
avec la mascotte de la 6ème |
Moment
de repos au Luc – Sous-lieutenant CAPDEVIOLLE Le chevreau a suivi
la 6ème Escadrille depuis
Chissey sur Loue... |
Le sous-lieutenant
STEUNOU de la 6ème Escadrille |
Photographies Jean MENNEGLIER – Droits
réservés
Le dimanche 16 juin 1940, à Bordeaux, le Président du Conseil Paul
Reynaud démissionne et le maréchal Philippe Pétain est chargé de former un nouveau
gouvernement. Au même moment l'armée allemande traverse la Loire. Le 17 juin le vieux Maréchal appelle la France à cesser le
combat et le général de Gaulle quitte Bordeaux pour l’Angleterre. Le lendemain 18 juin à 20 heures le général de Gaulle, dans un
communiqué fait à la BBC, appelle les français à la résistance depuis Londres.
Dans le chaos le plus total, l’armistice avec l’Allemagne est finalement signée
dans la soirée du 22 juin à Rethondes. L’armistice avec l’Italie suivra le 24 à
Rome. Les pilotes français se sont bien battus mais ils étaient inférieurs en
nombre et ils disposaient de matériels moins performants et d’une intendance
aléatoire. L’absence d’une politique réaliste d’armement avant 1939, les
doctrines obsolètes, la manière dont les ressources disponibles en hommes et en
matériel ont été utilisées et la nature de bien des missions décidées par
l’État-major font et feront encore aussi couler beaucoup d’encre chez les
historiens. Quoi qu’il en soit la France aurait perdu 150 pilotes, environ 500
chasseurs, 200 bombardiers et un minimum de 150 avions d’observation. On a
longtemps cru au mythe des « 1 000 avions ennemis abattus »,
mais les meilleurs spécialistes ont maintenant démontré que la réalité était
autre et que ce chiffre tournait plutôt autour de 700.
Le Groupe de Chasse III/6, et beaucoup
d’autres, ainsi que de nombreux Groupes de Bombardement et de Reconnaissance
qui sont équipés avec des appareils dits « modernes », ayant la
capacité de traverser la Méditerranée, reçoivent l’ordre donné par le Général
VUILLMEMIN, à qui il faut reconnaître le courage de celle belle décision, de
quitter l’hexagone au plus vite. Les Dewoitine du III/6 gagnent Perpignan le 18
juin pour préparer leur grand saut vers l’A.F.N. et plus précisément vers
Alger...
Rappel des liens permettant d’atteindre les
principales annexes à cette page
Album
des photographies n°V de Joseph Bibert – Novembre 1939 à mai 1940
Les
missions du Groupement 23 et du Groupe de Chasse GC III/6 en décembre 1939
Liste des Morane 406 utilisés par le
Groupe GC III/6 de septembre 1939 à juin 1940
La
Campagne de France du GC III/6 au jour le jour
Poursuivre l’histoire du GC III/6 : III. l’A.F.N.
Revenir au tout début : I. de CHARTRES à BOUILLANCY
Retour à la
première partie partie
APPEL à
TÉMOIGNAGES
Ce site a été créée en juin 2008, et le
début de « l’Histoire des Hommes du Groupe GC III/6 » a été mis
en ligne en septembre. Depuis, ce sont les nombreuses annexes à cette page
(voir ci-dessous) dont les biographies de certaines « Figures » de ce
célèbre Groupe qui ont été rédigées et mises en ligne. D’autres pourront encore
être ajoutées. Toutes ces pages ne sont pas figées et elles sont modifiées et
complétées au fur et à mesure que des informations nouvelles sont connues et
que de nouveaux documents sont mis à la disposition de l’Auteur... Merci aux
nombreux contributeurs ! C’est le point fort d’Internet que de pouvoir
procéder ainsi pour les études historiques...
SOMMAIRE de cette
« HISTOIRE DU GC III/6 » Au GC III/6 EN FRANCE Première
partie : Avant la
guerre L’entrée
en guerre : de CHARTRES à VILLACOUBLAY BETZ
BOUILLANCY (3/09/1939 15/11/1939) Seconde
partie : WEZ
THUISY (15/11/1939 – 30/04/1940) CHISSEY
SUR LOUE (30/04/1940 – 20/05/1940 COULOMMIERS
(20/05/1940 – 31/05/1940) LE LUC (31/05/1940
– 18/06/1940) Vers et en A.F.N. Troisième
partie : PERGIGNAN
LA SALANQUE (18/06/1940 – 20/06/1940) LE
TRANSFERT EN ALGÉRIE ALGER
MAISON BLANCHE (20/06/1940 - 24/06/1940) CONSTANTINE
(24/06/1940 – 11/07/1940) ALGER
MAISON BLANCHE (11/07/1940 – 21/01/1943) AÏN SEFRA
(21/01/1943 – 19/06/1943) PORT-SAY
– BERKRANE (19/06/1943 – 03/08/1943) LAPASSET (03/08/1943
– 25/04/1944)... Joseph
BIBERT : à Alger dans le corps des interprètes... Avec la première Escadre de Chasse GC I/3
« Corse » - GC I/7 « Provence » - GC II/7
« Nice » LA LIBÉRATION DE LA
FRANCE LUXEUIL (21/10/1944
- 25/12/1944) HAGUENAU
- BISCHWILLER (25/12/1944 - 01/01/1945) TOUL –
OCHEY (01/01/45 - 14/01/45) ESSEY LES
NANCY (14/01/1945 - ...) etc... |
Quelques articles de presse parlant de l’aviation française
au début de l’hiver 1939/1940
Le « Figaro » du
15 novembre 1939 : « Un Junkers tombe en flammes dans nos
ligne »
Voir
les meilleures pages consacrées au GC III/6 de ce domaine référencées par
Google
Le CD complet de la carrière militaire de Joseph Bibert
(document familial -
diffusion restreinte)