Page 1 Groupe de Chasse GC III/6 |
La CAMPAGNE de FRANCE au JOUR le JOUR ******** 10 mai 1940 18 juin 1940 Ce
texte n’est qu’une annexe à un document
en 3 parties consacré à l’histoire du Groupe de Chasse III/6 en 1939/1944,
dans laquelle l’auteur à essayé de s’intéresser à la vie et à la destinée des
Hommes autant qu’à celles des avions, contrairement à la trame habituelle des
nombreux ouvrages spécifiques publiés régulièrement sur des Groupes
d’Aviation, dans lesquels il faut souvent bien fouiller pour trouver mention
ne serait-ce que du prénom de ceux qui sont cités et qui restent anonymes sur
bien des images ! Pour cela il a utilisé les photographies inédites, les
documents et surtout les courriers personnels que sont père, Joseph BIBERT,
obscur mécanicien dans ce Groupe, a conservé de son passage, de juin 1939 à
Chartres à juillet 1944 en A.F.N., dans ce prestigieux Groupe devenu le
« Roussillon ». Il a aussi rencontré beaucoup de camarades (ou leurs descendants) de son père qui
ont sorti de leurs armoires ce qu’ils avaient eux-mêmes comme documents
oubliés jusqu’à ce jour. Les trois pages principales de « l’Histoire du GC III/6 » (1ère
partie ; 1939 - 2ème
partie : 1940 jusqu’à l’armistice
- 3ème partie : l’A.F.N.) auraient largement pu faire
l’objet d’un « beau livre »,
mail il aurait eu une diffusion très restreinte. L’auteur a donc mis son
travail de plusieurs années à la
disposition de tous sur Internet, avec un nombre et une qualité d’images
incomparables, si on laisse de coté l’écran ridicule de son smartphone et
qu’on prend la peine de visionner ces pages sur un bel écran d’ordinateur ou
de télévision ! Des
dizaines de pages annexes, toutes aussi importantes, sont également en
ligne ; albums de photographies, biographies de nombreux aviateurs,
documents historiques complémentaires etc. etc. C’est un véritable jeu de piste qui
commence pour vous : il faut fouiller dans chaque page pour trouver les
liens qui ouvrent sans cesse de nouveaux horizons... Bon voyage avec ceux du
III/6. Donc, après avoir parcouru ou lu ce document n’oubliez pas de revenir
sur : |
Page 2 10 mai 1940 - Chissey – Sur – Loue (39) Le Groupe GC
III/6 s’est déplacé de Wez-Thuisy (51) à Chissey sur Loue (39) le 30/4/1940 |
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Page 3 SITUATION LE
10 MAI 1940 |
DISPOSITION
des FORCES ADVERSES ALLIÉES et
ALLEMANDES POUR la
BATAILLE des FLANDRES |
Page 4 STATIONNEMENT
des GROUPES de CHASSE FRANÇAIS le 10 mai 1940 |
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Groupe |
Appareil |
Effectif |
Terrain |
Rattachement. |
GC I/1 |
MB 152 |
23(15) |
Chantilly les Aigles |
ZOAN (Groupement 21) |
GC II/1 |
MB 152 |
25(18) |
Buc |
ZOAN (Groupement 21) |
GC III/1 |
MS 406 |
30(20) |
Norrent- |
ZOAN (Groupement 25) |
GC I/2 |
MS 406 |
31(27) |
Toul Ochey |
ZOAE (Groupement 22) |
GC II/2 |
MS 406 |
26(22) |
Laon |
ZOAN (Groupement 23) |
GC III/2 |
MS 406 |
34(28) |
Cambrai Niergies |
ZOAN (Groupement 23) |
GC III/3 (1) |
MS 406 |
28(23) |
Beauvais-Tillé |
ZOAN (Groupement 21) |
GC I/4 |
H-75 |
30(29) |
Wez Thuisy |
ZOAN (Groupement 23) |
GC II/4 |
H-75 |
31(29) |
Xaffévilliers |
ZOAE (Groupement 22) |
GC I/5 |
H-75 |
29(25) |
Suippes |
ZOAN (Groupement 23) |
GC II/5 |
H-75 |
26(14) |
Toul Croix-de-Metz |
ZOAE (Groupement 22) |
GC I/6 (2) |
MS 406 |
25(12) |
Marseille Marignane |
ZOAA |
GC II/6 |
MS 406 |
34(20) |
Anglures Vouarces |
ZOAE (Groupement 22) |
GC III/6 |
MS 406 (3) |
36(30) |
Chissey sur-Loue |
ZOAS (Groupement 24) |
GC II/7 |
MS 406 (3) |
35(24) |
Luxeuil Saint-Sauveur |
ZOAS (Groupement 24) |
GC III/7 |
MS 406 |
34(23) |
Vitry le |
ZOAE (Groupement 22) |
GC I/8 |
MB 152 |
37(20) |
Velaine en Haye |
ZOAE (Groupement 22) |
GC II/8 |
MB 152 |
19(11) |
Calais Marck |
ZOAN (Groupement 25) |
GC III/9 |
MB 151/152 |
11(09) |
Lyon Bron |
ZOAA |
GC II/10 |
MB151/152 |
31(20) |
Rouen Boos |
ZOAN (Groupement 21) |
GC III/10 |
MB151/152 |
39(18) |
Le Havre Octeville |
ZOAN (Groupement 21) |
ECMJ 1/16 |
Potez 631 |
17(10) |
Wez Thuisy |
ZOAN (Groupement 23) |
ECN 1/13 |
Potez 631 |
12(08) |
Meaux-Esbly |
ZOAN (Groupement chasse nuit) |
ENC 2/13 |
Potez 631 |
11(07) |
Melun-Villaroche |
ZOAN (Groupement chasse nuit) |
ECN 3/13 |
Potez 631 |
12(10) |
Le Plessis Belleville |
ZOAN (Groupement chasse nuit) |
ECN 4/13 |
Potez 631 |
12(07) |
Betz Bouillancy |
ZOAN (Groupement chasse nuit) |
ENC 5/13 |
Potez 631 |
11(11) |
Loyettes |
ZOAA |
Aéronautique navale |
||||
AC1 |
Potez 631 |
08(08) |
Calais-Marck |
|
AC2 |
Potez 631 |
08(08) |
Calais-Marck |
|
AC3 (4) |
MB 151 |
12(12) |
Hyères |
|
|
|
|
|
|
NOTA |
|
|
|
|
(1) Les
escadrilles de ce groupe seront quasiment toujours dissociées. |
||||
(2) Le
GC 1/6 est envoyé dans le Nord, où il sera opérationnel le 17 mai à partir de
Lognes. |
||||
(3) Le
III/6 possède au 10 mai 3 Dewoitine D. 520 en vu de sa transformation sur ce
type d'appareil, dans le même but le II/7 en possède 4. |
||||
(4)
L'AC3 possède en plus quelques D. 510, reliquat de son ancienne dotation. |
||||
Les
chiffres donnés entre parenthèses correspondent aux appareils réellement
disponibles. |
Page 5 SITUATION LE
10 MAI 1940 |
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ORGANISATION de
la Z.O.A.S. ZONE D’OPERATIONS AÉRIENNES
SUD GÉNÉRAL
ODIC
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Le temps est calme et beau.
Prétextant vouloir assurer la neutralité de la Hollande et de la Belgique
afin de s’opposer à la volonté de l’Angleterre et de la France de s’attaquer
à l’Allemagne, Hitler lance son offensive générale en appliquant le plan « jaune »
du général Von Manstein. A 4h 30, son « groupe d’armée B » se
rue vers les plaines néerlandaises et belges. En conséquence, conformément
aux accords et au plan de manœuvre « Dyle-Breda », les troupes
franco-anglaises vont entrer en Belgique ; 7ème armée du
général Giraud vers Anvers, BEF (Corps expéditionnaire britannique) du
général Gort vers Bruxelles, 1ère armée du général Blanchard vers Namur. Dès l'aurore, de la Hollande à Lyon,
des avions allemands bombardent nœuds ferroviaires, carrefours routiers,
ports et aérodromes. Sur ces derniers en France, les dégâts sont assez
limités (une cinquantaine d’appareils). Les plus grosses pertes sont les 12
V-156F de l'Escadrille française AB3 sous leur hangar et 13 MS-406 du GC II/2
au sol. Par contre Il n'en est pas de même en Belgique, où les escadrilles se
font aplatir les unes après les autres durant toute la journée : au
soir, la 2/1/2 a perdu au sol 9 Hurricane sur 11, la 3/II/2 14 CR-42, la
1/1/2 15 Gladiator, la 6/III/2 15 Fox, la 7/11173 7 Fox, les 1/1/3 et 3/1/3
tous leurs Fox. Les Hollandais perdent pour leur part une soixantaine
d’avions. Le centre de renseignements
de la défense aérienne du territoire de Besançon a donné l’alerte à
l’officier de service du GC III/6 au même moment. A 4h 40, deux
patrouilles légères d’alerte décollent pour couvrir le terrain ; l’adj
Diaz et s/lt Capdeviolle vers Arbois, le s/c Boymond et s/lt Steunou vers
Dijon. - le s/lt Steunou,
isolé à ce moment, aperçoit vers 5h 30 un He 111 et tente de
l’engager par l’arrière. S’ensuit un combat tournoyant, puis l’adj Diaz et le
s/lt Capdeviolle interviennent. Leur gibier profite d’un léger avantage de
vitesse pour leur fausser compagnie, tandis que les français ont épuisé leurs
munitions en tirant vraisemblablement de trop loin. A 5h 35, une
patrouille simple décolle à son tour ; l’adj Japiot, le s/c le Guennec
et le sgt Gabard. Le train d’atterrissage du s/c Le Guennec ne se fermant
pas, celui-ci revient se poser. La patrouille, devenue légère, repère 5
minutes plus tard, 6 He 111. Les deux pilotes se placent dans le soleil,
et font une dizaine de passes sur les ailiers, qui continuent leur route,
malgré des fumées qui sortent de certains moteurs. A 6h 50, deux
patrouilles légères prennent l’air « à priori » ; de nouveau
les s/c Boymond et s/lt Steunou pour couvrir Chissey, cne Guerrier et sgt
Gauthier vers Dijon Repéré à l’ouest de Dôle,
un Do 17 est signalé par radio un peu plus tard : - le s/t Steunou
attaque, mais déséquilibré par le souffle des hélices du bombardier, il se
met en vrille et ne peut plus revenir au - le s/c Boymond
attaque le bombardier à son tour, appuyé par le sgt Gauthier qui fait
patrouille à ce moment avec le capitaine Guerrier : ils ont raison du
bimoteur, qui s’écrase à Port-Lesney près du terrain, alors que les trois
membres de l’équipage ont pu sauter. Il est 7h 50 ; le combat a pu
être suivi du terrain de Chissey à l’œil nu. |
Page 7 10 mai 1940 - Chissey – Sur – Loue (2) |
Une autre patrouille
composée du s/lt Villemin et du sgt Maigret avait à cet instant déjà pris
l’air (7h 30) et reste en couverture du terrain jusqu’à 9h 10. Ce n’est que dans
l’après-midi, que les opérations reprennent au III/6 qui est alerté à
14h 34 de l’approche de bombardiers à une altitude de 8 000 mètres.
La patrouille simple adj Le Gloan, sgt Trinel et s/lt Cavaroz décolle 3
minutes plus tard, mais suite à des problèmes de train, l’adj Gloan et le sgt
Trinel doivent revenir se poser. Le s/lt Cavaroz, ainsi retardé et resté
seul, peut cependant rejoindre la patrouille légère du s/lt de Rouffignac et
du sgt Hardouin, envoyée en renfort, qui s’est envolée à 14h 43. A
6 000 mètres, les pilotes aperçoivent un groupe de 10 Heinkel
HE 111 ; 3 groupes de 3 et 1 dernier fermant la marche ; c’est
celui qu’ils attaquent chacun leur tour par l’arrière, par passes successives
en léger cabré : - le sgt Hardouin
touche certainement le bombardier, mais atteint par les tirs de riposte de
celui-ci, son Morane (n°793 ?) est mis en flammes. Heureusement, le
pilote peut sauter en parachute et il atterrit sain et sauf à proximité d'un
passage à niveau. Il est rejoint par un comité d'accueil inamical qui se met
en devoir de lui casser la figure, le prenant pour un parachutiste allemand,
tant est grande la psychose développée par la propagande. Finalement
quelqu'un, en l'entendant crier qu'il est français, se décide à calmer les
excités. Il a du cependant passer chez un dentiste pour faire réparer un
bridge descellé par un coup de poing, - le s/lt Cavaroz,
distancé, et le s/lt de Rouffignac, dont le Morane a reçu plusieurs
projectiles, à court de munitions abandonnent le combat. Cependant, une troisième
patrouille, qui a décollé à 14h 59 ; adj Goujon et s/c Chardonnet,
a repéré les Heinkel et pique sur l’appareil allemand déjà pris pour
cible : - l’adj Goujon, oubliant son équipier,
effectue 3 passes sur le bombardier. Au cours de la dernière, il subit le
même sort que le sgt Hardouin : il évacue son appareil (MS n° 413), saute et se pose indemne
près de la forêt de Cîteaux. Le bombardier s’écrase finalement dans la forêt
d’Arbois (*) vers 15h 30 : la victoire
est attribuée aux 2 pilotes. Hardouin a raconté plus
tard son combat : « Goujon tire et presque
aussitôt il est touché à son tour ! Je le vois décrire des orbites avec
un grand panache de fumée qui le suit… Je suis en bonne position, le point du
collimateur un peu devant le nez du Heinkel. Je tire et je dégage : il
est atteint et vire à droite dans un demi-renversement, une traînée de fumée
le suit. Il est touché à mort… ». Cette narration n’est pas
vraiment compatible avec les rapports archivés… ********** Le Groupe obtient donc 2 victoires homologuées en ce
premier jour de la « Campagne de France « : 1 Do 17 et
1 He 111 mais il a perdu 2 appareils. Il a effectué 33 sorties en 9 missions. |
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Les mouvements amorcés la veille
continuent. La confusion règne en Hollande où les 25ème DIM et 1ère
DLM occupent Fréda et Tilbourg comme prévu. Mais les DLC françaises en
Belgique et au Luxembourg se font sévèrement accrocher. En Belgique, la chute du fort
d'Ében-Émael, près de Liège est symbolique : la population se rue vers
les derniers trains pour Lille et Paris. Le Luxembourg est occupé. Au lever du jour, 2
patrouilles simples de la 5ème Escadrille et 2 patrouilles légères
de la 6ème couvrent leur secteur respectif de 5h 00 et
6h 35. Une alerte transmise par le
service du guet, entraîne le décollage à 8h 37 d’une patrouille double
de la 5ème Escadrille ; l’adj le Gloan, les sgts Trinel et de
Gervillier forment la patrouille guide, le cne Jacobi, les s/lt Cavaroz et
Salaün, la patrouille d’accompagnement. A 8h 43 suit une
patrouille simple de la 6ème Escadrille ; le lt Legrand, le
s/c Le Guennec, et le sgt Gabard. Les pilotes du III/6
rejoignent au-dessus de Gray le s/c Doudiès du GC II/7, qui, avec sa
patrouille maintenant dispersée, vient de s’en prendre sans succès au groupe
de Heinkel signalé et qui a guidé vers lui les Morane du III/6. Le Gloan,
tire immédiatement un des bombardiers qui dégringole en spirale ; il
semble s’abattre mais il ne sera pas retrouvé (non homologué). Une partie des
Morane se relaient longuement pour attaquer l’ailier gauche de la formation
allemande, qui s’écarte finalement, moteurs fumants : il largue ses
bombes et se pose sur le ventre à 9h 58 dans un verger, au nord-ouest de
Pirey (territoire français) ; il s’agit du He 111 codé « 9K +
GH », du 1./KG 51 dont l’équipage de cinq hommes tente sans succès de
l'incendier avant d'être capturé
(Zahnle, Lenkeit, Heyer, Lachmann et Geske) Les différentes archives du
GC II/7 et GC III/6 ne sont pas totalement cohérentes sur cet
épisode et la victoire a été finalement attribuée par l’état-major à 7
pilotes ; les lt Legrand, s/lt Cavaroz, s/lt Salaün, adj Le Gloan, s/c
Le Guennec, sgt Gabard, sgt de Gervillier du III/6 et s/c Doudiès du GC II/7. En fin d’après-midi, à
18h 00, une patrouille légère double (adj Goujon, s/c Chardonnet, s/lt
Martin, s/lt Colonge) décolle sur alerte ; elle engage vers 18h 30
7 He 111 à 7000 m à la verticale d’Auxonne : - les s/lt Martin et
Colonge atteignent sans doute les moteurs du dernier appareil puisqu’il
dégage de la fumée ; son mitrailleur dorsal réplique, - l’appareil du lt
Martin (MS n°412) est mis en flammes, son pilote peut sauter en parachute
au-dessus d’Autrey-les-Gray ; il est indemne, - le s/lt Colonge
poursuit l’attaque, mais lui et son appareil (MS n°963) subissent
exactement le même sort à Beaumont-sur-Vingeanne, 3km plus loin, où il est
accueilli au sol par un groupe armé de fourches ; mais heureusement il
n'eut pas trop de mal à justifier qu’il n’était pas allemand ! |
Page 9 11 mai 1940 - Chissey – Sur – Loue (2) |
- l’adj Goujon
affirmera avoir endommagé sérieusement un autre He 111, mais à court de
munitions, et lui-même touché, il a dû se poser finalement en campagne à
Broyes les Pennes (MS n°665) (victoire probable). La journée commence
mal ! Une victoire sera
finalement homologuée et attribuée en
coopération aux s/lt Martin, Colonge et à
l’adj Goujon. Le Heinkel 111 codé
« G1 + FR » 2800 » du 7./KG55 (équipage : Keisenhoffer, Rieger, Rossmann, Schenkengerg,
Schnall) atterrit en flammes à Etuz, au nord de Besançon. Des gendarmes
et des militaires tentent de retrouver les allemands qui ont fui dans un bois
voisin ; trois aviateurs sont découverts, l’un se rend mais les deux
autres, qui tentent de se défendre à coup de pistolet, sont abattus ;
les corps sont transpostés à la mairie de Gézier où la population vient les
voir. Les deux autres aviateurs sont finalement arrêtés vers 23h. à la sortie
ouest de Brussey. Suite à cela un « Avis à la population » de la
préfecture de Haute-Saône précisera la conduite à tenir vis-à-vis des
aviateurs allemands. Le s/c Mertzisen de la 5ème
Escadrille, à bord du MS 406 n°143A, a dû ce 11 mai se poser à Dijon mais il
a effectué un « cheval de bois », sans doute au décollage :
cet incident, le deuxième jour de la grande bataille, n’est pas mentionné
dans le livre de marche de l’Escadrille. L’appareil devra être réformé. ********** En ce deuxième jour de la
« Campagne de France », le Groupe a effectué 32 sorties en 7
missions ; il revendique 2 victoires (1 seule
victoire homologuée), mais il a encore perdu 2 Morane. |
Page 10 |
Les Allemands prennent le dessus en
Hollande. En Flandre, Belges et Anglais
parviennent à constituer une ligne de défense cohérente car ils ne sont pas
exactement dans l'axe de l'effort allemand. Tel n'est pas le cas de la 1ère
Armée qui installe ses avant-postes en Wallonie, car le Corps de Cavalerie
(2+3èmes DLM), chargé de la couvrir, subit de plein fouet le choc
du 16ème PzK (3+4ème PzD). Cet épisode est la première
bataille de chars de quelque importance de l'Histoire, avec environ 500
blindés français contre 800 allemands. Les Allemands atteignent la Meuse. Plusieurs missions de
couverture du terrain et sur le secteur de Chissey sont effectuées. Arrivée au Groupe du
capitaine Stehlin (État-major) et du sous-lieutenant Satgé (6ème
Escadrille). ********** 14 sorties en 5 missions
– R.A.S. |
Page 11 |
En Hollande, la résistance des
Hollandais faiblit et la reine Wilhelmine s'embarque pour l'Angleterre. La 7ème
Armée française est maintenant en pleine retraite. Traversant les Ardennes par
surprise, les blindés allemands du « groupe d’armée A », avec en
premier échelon la « Panzergruppe von Kleist », atteignent
rapidement la Meuse en plusieurs points, dont Dinant, Monthermé et Sedan. L’infanterie peut prendre pied sur
la rive gauche permettant aux pontonniers de se mettre à l’œuvre.
L’artillerie française en position derrière Sedan, craignant d’être prise à
revers se replie en désordre, entraînant dans cette débâcle d’autres unités. Dans
la nuit du 13 au 14 mai les colonnes motorisées allemandes commencent à
franchir le fleuve. Les blindés allemands sont
méthodiquement appuyés par les Stukas du StG 77 et les Do 17Z du KG 2, tandis
que les Français n'ont droit qu'à une courte intervention des GB 1/12 et
11/12 qui, tous moyens réunis, n'arrivent qu'à engager 7 bombardiers en tout
et pour tout ! Encore s'agit-il de LeO-451, bimoteurs modernes mais pas
du tout conçus pour l'appui au sol, et dont 2 sont abattus, chiffre modeste
qui représente néanmoins un taux de pertes de presque 30%. Dans le même
secteur, les Français engagent également pour la première fois leurs nouveaux
chasseurs D-520, ceux du GC 1/3, seule formation équipée de cet appareil dans
lequel on voit traditionnellement un égal du Bf 109E allemand. Quelques décollages sur
alerte. En fin de soirée, le s/lt
Capdeviolle endommage légèrement la dérive de son appareil contre des grilles
bordant le terrain. ********** Peut-être 4 sorties (non
attestées par les archives) – R.A.S. |
Page 12 |
La situation de l'armée hollandaise
est catastrophique et celle-ci décide de cesser le combat pour éviter un
bombardement sur Rotterdam. Sur les 100 bombardiers engagés pour cela,
seulement une quarantaine reçoivent le message de contrordre ; les autres
poursuivent leur mission, détruisant les vieilles maisons en bois du vieux
quartier et tuant plus de 800 habitants. La bataille cesse en Hollande, mais
la Luftwaffe a perdu plus de 150 167 Ju 52 de transport, sans compter la
centaine momentanément endommagés. Sur la Meuse, la contre-attaque
française échoue et la 9ème armée du général Corap se replie dans le plus
grand désordre. La brèche entre les 2ème et 9ème Armées est maintenant
énorme... Une patrouille double
légère couvre le secteur est de Dijon de 7h 44 à 9h 10 ;
cne Guerrier et adj Japiot - R.A.S. A 11h 05, la
patrouille simple polonaise des cne Sulerzycki, s/lt Richlicki et
s/lt Kawnik, décolle pour une mission de couverture sur la région de
Dijon où un bombardement massif est annoncé. Le s/lt Kawnik, dont le train ne
rentre pas, doit se poser aussitôt après avoir décollé : - Le s/lt Richlicki
aperçoit un peloton de Heinkel 111, tente en battant des ailes d’en informer
son chef, le cne Sulerzycki, mais sans succès et se lance donc seul à leur
poursuite. Il fait deux passes sur un des ailiers d’un groupe de 9 bombardiers
allemands en 2 pelotons (6 + 3), appelle vainement des renforts,
mais doit finalement abandonner devant l’inefficacité de ses tirs et la
précision de ceux des mitrailleurs allemands, - Pendant ce temps, le
cne Sulerzycki, qui a continué sa route vers Dijon, attaque ¾ avant un
Heinkel venant du nord ; une sorte de combat tournoyant s’ensuit, mais
le pilote polonais, rapidement à court de munitions, abandonne la poursuite
aux environs de Gray à 7 000 mètres d’altitude, - Le s/lt Kawnik,
reparti à 11h 15 sur un autre avion, survole Dijon puis Gray, et rameuté
par son chef de patrouille, le cne Sulerzycki, il retourne sur Dijon.
Apercevant les éclatements des obus de D.C.A. il découvre un groupe de
bimoteurs (11 Heinkel 111 dans certains documents des archives du III/6 et
certains auteurs, mais il y a eu vraisemblablement confusion avec des Junkers
88), volant à 4 500 mètres, en direction du nord-est (ils viennent en
fait de bombarder le terrain de Longvic) ; il choisit un peloton de 4,
et attaque tour à tour 2 d’entre eux, à une centaine de mètres de distance,
en léger cabré. L’un d’eux part en descente avec un moteur fumant beaucoup,
suivi par deux de ses équipiers, ce qui oblige le s/lt Kawnik à abandonner le combat. Il
est 12h 30. Dans la demi-heure qui suit, le s/lt Kawnik rencontre encore
des appareils ennemis, isolés ou en formation, tente encore une dernière
attaque mais il doit rentrer à Chissey puisqu’il est à court de munitions. Finalement,
un bombardier sera retrouvé au sol à Preigney et une victoire sera attribuée au pilote polonais ; c’est en fait un Junkers 88-A1, et non un Heinkel 111, le
Ju 88 - 9K+EL-Wk n°4008 du 3./KG 51, dont l’équipage a été fait prisonnier (Fw. Friedrich
Wurth (pilote), Fw. Richard Buck (observateur), Uffz Hans Seidel
(mécanicien), Uffz Gottfried Pfeuffer (radio)). |
Page 13 14 mai 1940 - Chissey – Sur – Loue (2) |
Pendant ce temps, à
11h 35, une patrouille légère décolle pour une mission de couverture sur
la région de Dijon ; le s/lt Steunou, en difficulté doit finalement
rentrer à la base, mais le sgt Boymond, 10 minutes après avoir pris seul la direction de Dijon, attaque
courageusement 3 bombardiers au-dessus de la base de Longvic. La défense des
bombardiers le touche mortellement, et il s’écrase
(MS n°684) abattu en flammes à Prenois. A 11h 40, le s/lt Stenou redécolle et pour tenter de
se joindre à la patrouille simple de l’adj Le
Gloan et des sgt Trinel et de Gervillier mise en l’air quelques
minutes plus tôt. Celle-ci s’est dirigée sur Dijon, mais est arrivée trop
tard ; les bombes allemandes viennent de ravager la base aérienne de
Longvic. Ils sont envoyés sur Vesoul, puis rappelés vers Dijon où ils
aperçoivent un He 111 de reconnaissance, pris à partie par la D.C.A.,
qu’ils attaquent immédiatement par l’arrière, rejoint à ce moment par le s/lt
Steunou. Les deux moteurs sont atteints et le Heinkel, qui sort son train, se
pose néanmoins sur le ventre à 12h 45 près de Fougerolles, au lieu-dit
« Larrière » ; cette victoire sera
attribuée aux 4 pilotes. Il s’agit du
Heinkel 111 codé « 9Q + DD » 2648 du 3./KG51 (équipage : Oberfeldwebel Matt
Herbert, pilote, Oberlieutnant Siegfried Barth, Observateur ; sergents
Gerhard Schildt et Heinz Kazmirowski). Les aviateurs allemands sont
capturés mais l’un d’entre eux décède peu après. De nombreux appareils
photographiques sont récupérés dans l’avion. A 11h 45, une
patrouille légère (s/lt Villemin et Satgé) décolle aussi pour le secteur de
Dijon. Elle accroche encore des He 111. L’un d’eux, sur lequel les
français ont concentré leurs attaques est poursuivi jusqu’au Rhin avec des
moteurs dégageant une épaisse fumée ; une victoire probable sera
créditée aux 2 pilotes. Le s/lt Villemin revient au terrain, une main en
sang ; une balle a traversé son Morane sans faire trop de dommage. Tout l’après-midi, jusqu’à
19h 30, des Morane du III/6 parcourent encore leur secteur de
couverture, mais les bombardiers allemands sont rentrés chez eux. ********** Pendant cette cinquième
journée de l’attaque allemande, le Groupe III/6 a effectué 34 sorties en 12
missions, sans pouvoir protéger efficacement Dijon, en ayant malheureusement perdu un pilote. Triste bilan malgré 2 victoires
sûres et 1 probable. A l’examen des
comptes-rendus de mission, faisant apparaître que les différentes patrouilles
n’avaient pas toutes décollées au moment de l’alerte (de fait, entre 11h05 et
11h45), l’état-major estimera que si les pilotes du III/6 ont fait preuve
d’un « allant digne des plus
grands éloges », une « faute
de manœuvre cependant excusable » a été commise en ne concentrant
pas toutes les forces disponibles contre le dispositif allemands venu
bombarder Dijon-Longvic et en privilégiant des attaques individuelles contre
des avions isolés, à l’instar de la patrouille conduite par l’adj Le Gloan.
Ces attaques individuelles se renouvelleront malheureusement, tant l’espoir
d’augmenter son score individuel est fort dans l’esprit de certains pilotes. |
Page 14 SITUATION LE
16 MAI 1940 |
OPÉRATIONS
DEPUIS le 10 MAI FRONT le
16 MAI APRÈS la PERCÉE des ARDENNES et la
PRISE de SEDAN |
Page 15 |
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Le gouvernement hollandais donne à
ses troupes un ordre de cesser le feu mais refuse tout armistice. L’aile
droite de la deuxième armée en se repliant malencontreusement aggrave la
situation. Montcornet tombe dans la soirée. Pour les Allemands la route à la
mer est ouverte. Le 17 mai les Allemands prennent
Charleroi et Bruxelles. Le 18 mai le Maréchal Pétain entre
au gouvernement en qualité de Ministre d’Etat, Vice-Président du Conseil. Le 19 mai, le général Maxime Weygand
est nommé commandant en chef des armées françaises, en remplacement du
général Maurice Gamelin. Missions de couverture
classiques, surtout les 15, 16 et 19 mai, mais après son raid réussi sur
Dijon la Luftwaffe ne se montre quasiment plus en Haute-Saône. Le potentiel du Groupe
reste théoriquement élevé, avec 2 Escadrilles quasiment complètes, mais les
Morane Saulnier 406, éprouvés par 10 journées d’un emploi intensif, n’ont pas
pu bénéficier d’un travail d’entretien suffisant et encore moins d’une révision
complète. Une prise d’armes a lieu le
16 mai en présence du Général Odic, commandant la Z.O.A. S (Zone d’Opérations
Aériennes Sud). Les obsèques du s/c Boymond
ont lieu le 19 en présence du personnel disponible et de nombreuses
personnalités régionales. Ce même jour à 17 h.,
l’adjudant Goujon vient récupérer à Broyes les Pennes son Morane n°665, avec
lequel il s’est posé en campagne le 11 mai, et dont le moteur vient d’être
changé. Il heurte une pierre de bornage au décollage ; il est indemne mais
le train d’atterrissage et une aile de l’appareil sont brisés ;
l’appareil sera abandonné. **********
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Page 16 |
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Deux divisions de panzers commandées
par Heinz Guderian atteignent Abbeville et la mer. La Wehrmacht parvient ainsi
à couper les armées alliées en deux. Un million de soldats français, belges
et britanniques sont isolés entre la Manche et les troupes allemandes dont
les chars poursuivent leur progression vers la côte. En début de matinée, la patrouille
légère polonaise du cne Sulerzycki et du s/lt Kawnik part à la poursuite
d’un Dornier 17 de reconnaissance signalé comme volant à haute altitude. Il est finalement rejoint
aux environs de Dôle vers 9h 30, à 2 500 mètres d’altitude, et tiré
à bout portant par le s/lt Kawnik qui, une fois de plus, attaque seul ;
15 obus et une soixantaine de balles ! L’appareil pique vers le sol
entre les nuages, mais, malgré une information venue du Groupement 24 signalant
un avion désemparé tombé en flammes aux environs de Dôle, aucune confirmation
ne viendra. Une victoire probable sera néanmoins attribuée au s/lt Kawnik. Les autres missions ne
donnent rien ; 9 sorties pour 4 missions
pour la matinée. Au moment où le dispositif
de bataille franco-anglais est maintenant séparé en deux par la percée des
Allemands qui occupent maintenant Amiens, sont à la lisière de Cambrai et
dont des éléments avancés ont atteint Abbeville, le Groupe est manifestement
trop à l’écart des zones d’opérations. L’état-major a donc pris la décision
de le rapprocher de la ligne de front, en l’intégrant au Groupement de Chasse
23 commandé par le Général Romatet : sa destination est Coulommiers. L’ordre de départ est
transmis au Groupe en début de matinée, et dans l’après-midi, 25 Morane (*) quittent
Chissey, suivis par 2 Bloch 220 d’Air-France réquisitionnés qui transportent
les mécaniciens. L’échelon roulant lourd ne rejoindra Coulommiers par chemin
de fer que le lendemain soir. (*) n°136, 273, 448, 458, 462, 474, 524, 558, 575,
597, 627, 651, 671, 673, 674, 675, 677, 687, 689, 700, 803, 921, 925, 930 et
933. Comme il l’a été dit plus
haut, les avions sont dans un triste état, et un récapitulatif figurant dans
le journal de marche de la sixième Escadrille le confirme :
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Page 17 20 mai 1940 – Coulommiers (77) |
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Page 18 SITUATION LE 21
MAI 1940 |
OPÉRATIONS
DEPUIS le 16 MAI FRONT le
21 MAI APRÈS la FULGURANTE AVANCE ALLEMANDE
VERS la MER à ABEVILLE |
Page 19 |
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La deuxième « Infanterie-Division
(motoriziert) » s'installe dans le secteur d’Abbeville et forme deux
têtes-de-pont (Abbeville - Saint-Valery-sur-Somme) afin de sécuriser le front
sud allemand et permettre à la 2ème « Panzer-Division »
d'avancer sur Boulogne. A proximité de Dunkerque, la
Luftwaffe coule le torpilleur français « Adroit »
tandis que le dragueur anglais « Corbum »
saute sur une mine dans la Manche. A Paris, Paul Reynaud fait un grand
discours au Sénat : « La Patrie
est en danger... ». Un avion estafette se pose
à Coulommiers vers 13h 30, portant l’ordre écrit n°/3.S. émanant du P.C.
et signé du général ROMANET à 13h 15 : Ordres
pour l’après-midi du 21 mai Mission :
Couvertures aux coups de la zone ARLEUX–IWUY–CAMBRAI- LE CATELET- FINS Moyens :
(La patrouille basse est patrouille guide)
Durée : 40
minutes sur le secteur. Conditions
d’exécution : La
patrouille supérieure s’intégrera dans le dispositif à l’arrivée au-dessus du
point fixé pour le rendez-vous dans le tableau précédent. Observations : Il
s’agit de couvrir une contre-attaque importante de nos troupes. |
Page 20 21 mai 1940 - Coulommiers (2) |
Le commandant Castanier décide
de se porter à la tête de cet important dispositif qu’il constitue de la
manière suivante : Patrouille triple basse (guide) Patrouille
guide : Commandant
CASTANIER Lieutenant
MARTIN 1ère
patrouille d’accompagnement (moyenne) : Capitaine
JACOBI Sous-lieutenant
SALAÜN Sous-lieutenant
CAVAROZ 2ème
patrouille d’accompagnement : Adjudant
GOUJON Capitaine
SULERZICKI Sous-lieutenant
KAWNIK Patrouille
triple moyenne Patrouille
guide : Capitaine
GUERRIER Adjudant
DIAZ 1ère
patrouille d’accompagnement (moyenne) : Lieutenant
LEGRAND Adjudant
JAPIOT 2ème
patrouille d’accompagnement (moyenne) : Sous-lieutenant
VILLEMIN Capitaine
ASSOLLANT Vers 16h 00, les 9
appareils en patrouille moyenne et les 9 autres en patrouille basse du III/6
sont donc en mission de couverture sur le secteur qui leur a été assigné, en coopération
avec une patrouille haute de 9 Dewoitine 520 du I/3. De 16h 30 à
17h 00, évoluant à 2 000 mètres sous les nuages, plus bas que
prévu, les Morane sont la cible permanente des obus fusants de 88mm et
traçants de 10mm de la Flak. 3 Morane sont alors plus ou
moins gravement atteint : - l’adj Goujon, avec
le fuselage et une aile fortement endommagés, va se poser à Romeschamps, fait
le plein, décide de retourner sur zone, mais doit atterrir finalement à
Villacoublay, - l’adj Diaz récupère
un éclat dans un plan, - le cne Sulerzycki,
fortement atteint, doit se poser en campagne à proximité du terrain de
Chantilly. Il peut être ravitaillé en essence, repart, mais doit se reposer,
train rentré, au même endroit ; son Morane (n°930) est détruit, mais il
est indemne. La Flak cesse le feu 5
minutes avant la fin de la mission, pour laisser la place à une formation de
6 Bf 109 et 3 Bf 110. Les Morane, à cause de la couche de nuages,
malheureusement pas visibles de la patrouille haute du I/3 (*) sont immédiatement surclassés par la vitesse des appareils
allemands : |
Page 21 21 mai 1940 - Coulommiers (3) |
(*) Circonstance aggravante, la patrouille haute
du GC I/3, avec ses Dewoitine 520, utilise pour ses communications une
longueur d’onde différente de celle du III/6. Elle s’est retrouvée d’ailleurs
engagée contre des formations de bombardiers et a perdu deux pilotes :
un tué (s/lt Jean Parisse) et un autre prisonnier (sgt - le s/lt Cavaroz, qui
pilote ce jour-là le Morane n°597 codé « 6 » de Gloan (selon son
souvenir, en 1993), est grièvement blessé à la jambe par un éclat d’obus,
mais il peut cependant se poser sur le terrain du Plessis-Belleville. Il restera
hospitalisé de long mois. Son avion sera récupéré, - le sgt de Gervillier (MS n°803) est abattu et tué à Villers-Plouich, quelques kilomètres au sud de Cambrai, - le s/lt Salaün (MS
n°462), grièvement blessé, saute en parachute et se pose dans les lignes
ennemies où il est fait prisonnier (*). (*) Ilse trouve que le sergent BIARD, pilote
au GC II/3 a été abattu quelques heures plus tôt au même endroit, qu’il a
écrit ses carnets de guerre, et qu’il a été témoin de la chute du
s/lt SALAÜN : « …je
saute aussitôt de la carlingue et regarde autour de moi. Je vois des civils à
200 m, je les rejoins, un side-car militaire m’emmène à un Q.M. Je suis
10 km au sud de Douai, à Arleux. Les boches sont à 2 km de là et
j’ai failli tomber chez eux. J’explique ma situation. Aussitôt après
j’assiste à un combat entre un Curtiss contre 5 Messerschmitt. Le Curtiss
descend un Messer mais (son pilote) doit sauter en parachute également. Avec
quelques soldats je pars à sa recherche. Quand nous sommes en rase campagne
arrive un Messerschmitt 109 à 100 m au-dessus de nous. Nous faisons un
plat ventre avec ensemble et j’ai bien peur qu’il nous voie. Certainement il
nous aurait mitraillé. Mais il passe à la verticale de nous et ne voit rien.
Soulagements. Deux heures après un autre combat, c’est un Morane qui est en
flammes. Le pilote, le s/lt Salaün du 3/6 saute en parachute. De nouveau
on part à sa recherche ; on le trouve blessé de deux balles à la
jambe… » Seul le lt Martin a pu
engager un combat tournoyant avec 2 Messerschmitt 109 dont il se sort
miraculeusement avec un appareil percé de partout. ********** Très dure journée pour le
III/6 : 1 tué, 2 blessés graves dont
1 prisonnier (mais considéré comme
disparu), 3 avions perdus et 2
sérieusement endommagés en une seule et unique
mission (17 sorties). |
Page 22 |
De plus en plus soucieux de leur
rembarquement, les Anglais s'assurent de Calais en y envoyant leur 30ème
Brigade et des éléments importants de leur 1ère DB (3ème Bataillon
Blindé + 1er Bataillon Motocycliste, en tout 80 chars. Churchill vient à Paris discuter
avec Paul Reynaud. Weygand leur expose un superbe plan de contre-attaque et
demande l'appui de l'aviation anglaise. Churchill approuve et promet, mais en
fait, les derniers avions anglais s'en vont le jour même tandis que l'armée
anglaise ne s'occupe plus qu'à préparer son départ. Un dispositif équivalent à
celui de la veille est commandé pour se mettre en place à 6h 00
au-dessus du terrain du GC I/3 de Meaux-Esbly pour couvrir le quadrilatère
Bapaume-Cambrai-Marquion-Erviller, au moment où dans ce secteur la 1ère
armée, au nord, doit tenter d’opérer la jonction avec la 7ème
armée, repliée sur la Somme, toutes deux séparées par la percée allemande. Mais les conditions
météorologiques médiocres depuis plusieurs jours ne le permettant pas, le
dispositif ne peut se mettre en place qu’en début d’après-midi : la
patrouille guide basse est composée des adj Le Gloan, s/lt Kawnik et sgt
Trinel, la 1ère patrouille d’accompagnement des adj Diaz, s/lt
Capdeviolle et s/lt Steunou, la 2ème des adj. Japiot, s/t
Menneglier et sgt Bouin. Survolant Doullens au
retour, après avoir perdu depuis longtemps la couverture des Dewoitine du GC
I/3, les avions du III/6 reçoivent au centre du dispositif une salve d’obus
anti-aérien qui le disloque complètement. Des Messerschmitt Bf 109 et Bf 110
s’en prennent immédiatement après, mais sans succès, au s/lt Kawnik et au sgt
Bouin ; finalement tous les avions rentrent à Coulommiers, mais comme la
mission a été longue, plusieurs ont dû aller se ravitailler d’abord à Rouen. ********** C’est la seule mission de
la journée (9 sorties). |
Page 23 |
Les blindés allemands de la pince
sud de la tenaille allemande sont arrivés à Boulogne et menacent Calais. La
bataille fait rage. La Luftwaffe y coule le
contre-torpilleur français
« Orage ». C'est en effet l'artillerie de nos bateaux qui
combat les chars allemands. Calais est encerclé. Payant d'audace, la
Kriegsmarine, malgré son infériorité, envoie ses vedettes rapides marauder
autour de Dunkerque, où elles coulent le contre-torpilleur français « Jaguar ». Très mauvais temps – Pas
d’activité aérienne française. Cependant l’activité des
bombardiers et des avions de reconnaissance allemands est grande sur les
arrières de la 7ème armée, jusqu’à la région parisienne. |
Page 24 |
Les Allemands attaquent violemment
Calais que les Anglais évacuent précipitamment en laissant aux Français le
soin de couvrir leur rembarquement. Les avant-gardes de Guderian
établissent six têtes de pont sur l'Aa et atteignent Bourbourg. Elles ont
pratiquement le champ libre lorsque l’ordre impératif de ne pas dépasser la
ligne Gravelines-Béthune est donné par le général von Rundstedt, confirmé par
Hitler. Les blindés allemands seront ainsi stoppés jusqu'au matin du 27 mai.
Dunkerque ne sera donc pas prise le lendemain comme cela semblait
inéluctable, ce qui va permettre la fuite des Anglais. Mais cette décision
est motivée logiquement motivée par le fait que les unités blindées
allemandes sont tombées à environ 50% de leur effectif, que le terrain des
Flandres, coupé de canaux, n'est pas favorable à leur emploi. En outre, une
attaque française venant du sud aurait pu encore avoir lieu. Le temps reste mauvais. Une première mission de
couverture prescrite au-dessus du secteur Bapaume – Croisilles – Arleux –
Cambrai ne peut être exécutée. A 12 heures, le Groupe
reçoit du général Romatet des ordres modifiant ceux du matin ; le
secteur à protéger devient celui de Arras – Marquion – Croisilles, ce qui
prouve que la situation au sol évolue très vite. Le III/6 forme donc en
début d’après-midi une patrouille triple basse dans un dispositif ou figurent
deux autres patrouilles triples (GC II/3 – Cdt Morlat et GC III/3 – cne
Duval) pour une mission de protection, fixée à 40 minutes sur zone, de deux
formations de Glenn-Martin 167 et de Douglas DB-7. Le courageux
commandant Castanier partira encore une fois en tête. La patrouille guide basse
est composée des cdt Castanier, s/lt Martin et s/lt Colonge, la 1ère
patrouille d’accompagnement des cne Guerrier, cne Assollant et sgt Gauthier (*), la 2ème des adj
Japiot, s/t Menneglier et sgt Pimont. Le départ à lieu à 13h 00. (*) Ce pilote doit retourner au terrain, son
train ne se rentrant pas. Il redécollera sans pouvoir rejoindre le
dispositif. A 13h 25 le cdt
Castanier déclenche une attaque contre une formation importante de Dornier 17
qui se dispersent rapidement dans les nuages. Sa patrouille se reforme sans
le lt Martin, qui à court de munitions, a pris la décision de rentrer. Arrivés près de Cambrai,
les avions du III/6 attaquent une autre formation d’une vingtaine de
bombardiers en même temps que les D.520 de la patrouille haute du II/3, mais
les Messerschmitt 110 de protection fondent sur les assaillants, ce qui
entraîne une confusion hallucinante. La patrouille du GC III/3
livre également une dure bataille de son côté avec ses Morane ; elle
perdra 3 pilotes, s/c Firminhac et sgt. Békarian, tués, s/lt Kruml, blessé. Le bilan est également
désastreux pour le III/6 : - le cdt Castanier (MS n°134) ne rentre pas ; très grièvement blessé,
il a sauté. On saura plus tard qu’il a été amené au groupe sanitaire
divisionnaire de la 5ème DINA où il est décédé. Ses restes ne
seront retrouvés qu’après l’armistice. |
Page 25 24 mai 1940 – Coulommiers (2) |
- le s/lt Colonge, son
avion en flammes (MS n°575), blessé également, se parachute et il est
fait prisonnier, mais le Groupe n’aura de ses nouvelles qu’une fois arrivé en
A.F.N. - le sgt Pimont, tombé
en panne pendant la mission, s’est posé près de Beauvais ; il ne
rentrera à Coulommiers que le lendemain. Plusieurs appareils
allemands ont sans doute été abattus : l’adj Japiot sera cité pour une
victoire probable. ********** C’est sans doute la plus
dramatique journée de la campagne pour ce valeureux Groupe III/6 qui a
effectué 14 sorties en 3 missions et qui a perdu
son commandant. Le capitaine Stehlin
assure dorénavant le commandement du Groupe « casus morti ». |
Page 26 |
Les unités de la 7ème
armée établies sur la Somme et sur l’Aisne et les forces alliées encerclées
qui tiennent encore Valenciennes, Cambrai et Arras poursuivent leurs
tentatives de jonction. La résistance cesse à Boulogne et la
21ème DI disparaît, comme d'ailleurs la 5ème DIM, dont
ne subsistaient que quelques éléments épars depuis le 17 mai. La situation de
l'armée belge empire. L'armée anglaise commence son repli vers Dunkerque. Après avoir entendu Weygand exposer
la situation militaire, Reynaud parle d'armistice. Un Potez 63 de
reconnaissance, en panne d’essence après une très dure mission de
reconnaissance sur Lille et Dunkerque, s’est posé en campagne la veille à la
tombée de la nuit ; il atterrit à Coulommiers pour se ravitailler à
5h 45. Au sein d’un important
dispositif impliquant théoriquement une patrouille triple moyenne du GC III/3
et une patrouille triple haute du GC I/3 (Dewoitine), le III/6 ne peut
fournir qu’une patrouille double basse conduite par le cne Chainat, avec
comme équipiers les s/lt de Rouffignac et s/lt Richlicki (patrouille guide),
suivis de la patrouille d’accompagnement des cne Jacobi, adj. Le Gloan et sgt
Trinel,), ainsi qu’une patrouille double légère haute ; lt Legrand (chef
de patrouille) et s/c Le Guennec (patrouille guide), suivis de l’adj. Diaz et
du s/lt Capdeviolle (patrouille d’accompagnement). La mission vise à couvrir
le quadrilatère Péronne-Nesles-Chaulnes-Herbécourt. Pour sa part, le GC III/3,
désorganisé par la transformation en cours d’une de ses Escadrilles sur
D.520, ne peut participer à cette mission. Ne trouvant pas les
patrouilles de protection au-dessus de Chantilly à 6h 30, les pilotes du
III/6 poursuivent seuls leur mission. En fin de mission, une formation de 24
Dornier 215 (porteurs sur le fuselage d'un fanion triangulaire jaune, très
allongé) est repérée 500 mètres plus haut. Au cours d’une manœuvre permettant
de lancer une attaque dans de bonnes conditions, les Morane du III/6 sont
surpris par 18 Messerschmitt 110. Le s/lt de Rouffignac dont
l'appareil est criblé de balles et d'obus doit se poser au Sud de Montdidier.
Son MS 406 n°627 est irréparable. Deux autres Morane reviennent transformés
en passoire ; celui du cne Chainat et le n°674 de l'adj Diaz. Une balle
explosive est passée à 5 cm de son oreille droite ; il a été sauvé des
Messerschmitt grâce à l'intervention du lt Legrand. Le s/lt Richlicki assez
sérieusement touché, à court d’essence, doit se ravitailler à Compiègne avant
de rentrer à Coulommiers. Un Bf 110 a été
probablement abattu par le s/c Le Guennec dans la région de Lassigny. Au même moment, vers
7h 30 deux avions se rapprochent du terrain de Coulommiers où la
patrouille légère du s/lt Villemin et du sgt Maigret est en alerte
renforcée ; elle décolle immédiatement. Ce sont deux Dornier 17, volant
à 3 500 mètres, qui se bornent à entreprendre une large boucle autour du
terrain avant de disparaître. |
Page 27 25 mai 1940 – Coulommiers (2) |
La patrouille française se
porte en couverture entre Meaux et Coulommiers et découvre un troisième
Dornier faisant route au nord, qu’elle prend en chasse. Violemment pris à
partie par le s/lt Villemin, le Dornier riposte, et touche gravement le
Morane ; le s/lt Villemin pose son appareil (MS. n°458) en feu près
d’Ambleny (réservoir d'éthane percé) ; malgré une vilaine blessure à la
main il peut en sortir à temps. Pendant ce temps le Dornier pique vers le
sol, un moteur dégageant de la fumée noire et se pose train rentré au nord de
Vézaponin dans l’Aisne (*). Le lt
Villemin est envoyé en convalescence et ne reviendra plus au Groupe. Le jeune sgt Maigret ne
rentre pas ; il est porté disparu.
L’épave de son Morane (n°534) sera inspectée plus tard près de Travecy par
les Allemands ; ce sont vraisemblablement eux qui ont enterré le pilote
sur place ; sa dépouille sera transférée au cimetière de
Boulogne-Billancourt en 1948. (*) Cette victoire sera finalement homologuée
aux deux pilotes ; s/lt Villemin et sgt Maigret. Dernière alerte pour le
III/6 en fin d’après-midi lorsque la formation de bombardiers ennemis qui
vient de ravager le terrain de Meaux Esbly du GC I/3 passe à l’horizon en
direction de l’Allemagne. La patrouille simple d’alerte de la 6ème
Escadrille, adj. Japiot, s/lt Menneglier et sgt Gabard décolle et tente de se
joindre aux D.520 du GC I/3 partis à la poursuite du Heinkel, mais elle est
vite distancée. ********** Encore une très mauvaise
journée pour le III/6, qui a effectué 15 sorties en 3 missions et qui perd un pilote. |
Page 28 |
Après une bataille acharnée, la 10ème
PzD, appuyée par les StG 2 et 77, s'empare de Calais : si 3 400
Anglais ont pu s'enfuir depuis 48 h, 20 000 Français sont capturés.
Avant 19 h, Londres ordonne de passer à l'exécution de « Dynamo », c‘est à dire le
rembarquement massif et immédiat de ses troupes, sans concertation avec les
autorités françaises. Celui-ci pourra se poursuivre malgré
la pression allemande jusqu’aux premières heures du 3 juin 1940. A la fin de
l’opération c’est environ 200 000 britanniques et 140 000 français
qui auront pu traverser le Chanel ; les pertes seront importantes, les
conditions terribles et 40 000 hommes qui n’auront pu embarquer à temps
seront faits prisonniers. Roosevelt fait savoir à son
ambassadeur à Paris que ça serait bien si la flotte française pouvait se
réfugier en lieu sûr, c'est-à-dire se livrer aux anglo-saxons. Il trouverait
encore mieux que ça soit l'Amérique qui en ait la garde, par exemple aux Antilles... Il envoie aussi un message à
Mussolini, se proposant de transmettre aux Franco-anglais les « légitimes aspirations » du
Duce « dans l'espoir de contribuer
à la cause de la paix ». ! Le potentiel du Groupe
III/6 est trop réduit pour permettre des missions de combat. Les mécaniciens
rafistolent en catastrophe un sixième appareil pour être capable de fournir
une patrouille double pour Le Bourget. Ces six Morane ont pour
mission d’escorter jusqu'au large du Calvados un Dewoitine 338 d'Air France
emportant vers Londres le ministre Paul Reynaud. Le voyage se déroule sans
incident, uniquement troublé par une escale de ravitaillement à Mantes et par
l'inquiétude des pilotes peu habitués à voler au-dessus de la mer ; ce
sont les cne Guerrier, sgts Gauthier et Pimont et lt Legrand, s/c le Guennec
et s/lt Steunou. Mais le Morane du lt Legrand a une fuite d’essence et ne
peut décoller et celui du cne Guerrier ne peut dépasser Le Bourget ;
pare-brise innondé d’huile suite à une rupture de canalisation. On peut
heureusement envoyer à la rescousse l’adj. Goujon qui prend la tête du
nouveau dispositif (1 patrouille simple et 1 légère) ! Alors que ces patrouilles,
viennent tout juste de rentrer, le terrain de Coulommiers est bombardé à
13h 15 par une formation de 30 Heinkel 111 suivie de
4 Messerschmitt 110 volant en ordre serré vers 2 500 m. Bien que l’alerte n’ait été
donnée qu’à l’arrivée des bombardiers, la quasi-totalité des personnels
pourra se protéger. Une centaine de bombes de 50 et de 100 kg ont été
larguées. Le soldat armurier Emile Marchal, atteint par un éclat de bombe,
est gravement blessé ; il décèdera dans la soirée. Le soldat Langren est
légèrement blessé au bras. Tous les autres dommages sont matériels. Le
capitaine Stehlin dans le rapport qu’il rédige immédiatement pour le général
Romatet commandant le Groupement 23, en fait une liste assez précise : |
Page 29 26 mai 1940 – Coulommiers (2) |
Destructions suite au
bombardement (Rapport
STHELIN) Avions : Morane
406 n°558 Incendié, complètement détruit n°234 très
fortement endommagé, à évacuer n°925 idem n°673 idem En
outre les avions suivants étrangers au Groupe ont été touchés : 1
Potez 63 (ECMJ I/16 à Meaux) Complètement détruit 1
Potez 63 (ECMJ I/16 à Meaux) Très endommagé 6
Appareils de la section d’avions estafettes : 1
Goéland Complètement détruit 1
Goéland Complètement détruit 1
Goéland Très endommagé 2
Simoun Complètement détruits 1
Potez 58 Très endommagé 2
avions de liaison britanniques Légèrement atteints Armement : 1
remorque d’armurerie d’Escadrille complètement détruite Armes
et munitions – Divers (destruction) : 11
caisses de 2 025 cartouches 7 caisses de 120 obus 2
fusils mitrailleurs 29 2
fusils gras model. 92 4
mitrailleuses M.A.C. 6 révolvers 3 collimateurs O.P.L. 20
chargeurs de canon H.S. 404 (vides) 40
chargeurs de mitrailleuses (vides) 2 carabines 6 mm Munitions
de révolvers 8mm Outillage 2 mitrailleuses photos 1 lunette de réglage Terrain : Le
terrain sera inutilisable même après reconnaissance de bandes d’atterrissage. Un
nombre encore indéterminé de bombes n’ont pas éclaté. Le
bombardement a eu lieu au moment où une patrouille double envoyée
conformément aux ordres reçus (sous-entendu : VOS ordres pour la mission
de protection du Premier Ministre !) venait d’atterrir, ce qui n’a pas
permis de faire décoller ceux qui étaient au sol. |
Page 30 26 mai 1940 – Coulommiers (3) |
Cette dernière phrase
laisse songeur ! (*). Le capitaine Stehlin précise en outre que « tous ces avions situés à plus de 200 mètres les uns des autres
ont été touchés par des bombes différentes ». C’est étonnant vu que
5 avions venaient juste d’atterrir et cela ne correspond pas exactement aux
témoignages ultérieurs et aux photographies retrouvées ; sans doute une
justification à priori un peu maladroite de certaines défaillances dans la
protection des hommes et du matériel à Coulommiers… Avec la crainte d’un
nouveau bombardement, l’activité reprend avec fébrilité ; on tente de
réparer ce qui peut l’être et on fait le maximum pour remettre quelques
avions supplémentaires en état de voler. La compagnie de l’Air rebouche les
entonnoirs les plus importants. L’unité administrative dont de cantonnement
est jugé comme étant trop rapproché du terrain va s’installer dans un petit
village 3 kilomètres plus loin… La patrouille simple adj.
Japiot, s/lt Menneglier et sgt Gabard décolle encore sur alerte à
18h 15, mais aucun avion suspect n’est découvert. ********** Seulement 8 sorties en 2
missions en ce jour de bombardement. (*) Il n’y a pas que cette
phrase qui peut laisser songeur. Le Général Stehlin publiera ses mémoires en
1964. Il a consacré une petite page à cette journée de bombardement. Les
contre-vérités multiples, la minimisation des pertes, la mise en avant de ses
actions personnelles et les critiques véhémentes des décisions de
l’État-major et de ses chefs font qu’on ne peut plus lire la suite sans être
échaudé et rendu très prudent. On a vraiment l’impression que le Général
Stehlin de 1964 ne supportait pas de n’avoir été en 1940 qu’un simple
capitaine, affecté tardivement dans un Groupe opérationnel dont son brillant
Commandant, le cdt Castanier, son second, le fameux capitaine Chainat, as de
1914/18, et le célèbre vainqueur de l’Atlantique nord de 1929, le capitaine
Assollant, en avaient la vedette. C’est finalement par un concours de circonstances
imprévisibles qu’il en récupéra le commandement à la mort du cdt Castanier,
puisque ni Chainat, vu son âge, ni Assollant vu sa situation militaire, ne
pouvaient y prétendre. |
Page 31 |
Le repli anglais vers Dunkerque,
soigneusement préparé depuis plusieurs jours, est foudroyant. Ses
conséquences sont immédiates ; l’Armée belge est contrainte à la
capitulation, mais le Roi décide de rester dans son Pays, et la 1ère
Armée française sans protection se trouve dès lors en très mauvaise posture. La Luftwaffe attaque Dunkerque en
force. Les He 111 des KG 1, 4 et 54, les Do 17Z des KG 2 et 3, les Ju 87 du
StG 2, s'y succèdent 14 heures. La ville est pratiquement rasée. Les morts
sont peu nombreux mais les gravats bloquent les rues, ce qui est très gênant
pour l'évacuation. Les installations du port sont gravement endommagées.
Malgré tout, les Anglais réussissent à rapatrier près de 8 000 hommes. Un ordre de mission du
Groupement 23 pour une patrouille triple du III/6, daté du 27 mai à
0h 00, arrive au Groupe avec du retard, tandis que les mécaniciens, par
trop habitués à ne pas fermer l’œil de la nuit, dans des conditions de
travail épouvantables, font leurs obscurs miracles habituels pour remettre un
maximum d’avions en état avant l’aube ! Outre-le III/6 qui doit
fournir la patrouille triple basse guide (2 500 m), la mission
concerne le GC III/2 pour la patrouille triple moyenne (4 000 mètres) et
le GC I/3 pour la patrouille haute (6 000 m). Le point de rendez-vous
est fixé à Beauvais à 4h 50 pour une couverture de 40 minutes de la zone
Abbeville-Moyenneville- Saint-Rémy. Si les mécaniciens du III/6
ont pu préparer au mieux 10 Morane, on ne peut finalement faire décoller à
4h 20 que 7 avions suite à des pannes de dernière minute ; cne
Guerrier (chef de patrouille) et Sgt Piémont, s/c Le Guennec et Sgt Gauthier,
adj Le Golan, s/c Mertzisen et sgt Trinel. Le temps est toujours
mauvais et la Luftwaffe a réduit sensiblement le nombre de ses sorties et
s’il il y a peu de bombardiers en l’air, la chasse ennemie est toujours à
l’affût. A 5h 40, le cne Guerrier à la tête de la patrouille guide
aperçoit un Henschel 126 et seul, passe si brusquement à l'attaque
qu'il se « sonne » et dégage finalement sans avoir pu tirer. Voyant
cela, ses équipiers croient à une erreur d'identification, d'autant qu'ils
pensent de leur côté avoir affaire à un Morane 230 ! Le « mouchard de la Wehrmacht »
s'échappe tranquillement... La patrouille de Le
Guennec, dit « cri-cri »,
attaque un appareil sur lequel il a cru discerner des croix noires, mais
celui-ci bat des ailes pour monter ses couleurs anglaises ! Sur zone, les pilotes
peuvent observer au sol une très forte activité ; nombreux convois,
nombreuses batteries, mais la Flak est moins mordante que d’habitude ;
tirs peu nourris et imprécis. La mission prend fin sans autre incident. ********** Sans doute qu’une autre
mission de protection du terrain a eu lieu puisque les archives parlent de 11
sorties en 2 missions pour ce 27 mai. |
Page 32 |
Après 18 jours de combats
disproportionnés, ayant conduit leur Roi, Commandant en Chef de l’Armée, à
capituler, hantés par le souvenir des massacres du début de la 1ère
guerre mondiale, fuyant les bombardements, près de 2 millions de Belges vont
prendre le chemin de l'exil. Nombreux, cependant, seront ceux qui reviendront
dans le courant de l'été 1940, après la capitulation française. Au nord, les Anglais parviennent à
évacuer près de 20 000 hommes, mais L'événement principal de la journée
a lieu sur le front sud : les Français essayent de déloger les Allemands
d'Abbeville. La contre-attaque est confiée aux 2 et 5ème DLC, qui
n'ont aucune puissance de rupture, et à la 4ème DCR du colonel de
Gaulle qui, non encore remise de ses exploits de Montcornet, n'a que 100
chars disponibles. On gagne un peu de terrain. La situation autour de
Dunkerque étant toujours aussi dramatique, une mission identique (ordre daté
du 28 mai à 1h 00) à celle de la veille est commandée au
Groupe III/6. Celui-ci doit fournir deux patrouilles triples (basse et
moyenne), tandis que la troisième (haute) est à la charge du GC II/3. Le
rendez-vous est fixé à 5h 45 au-dessus du Betz-Bouillancy où stationne
encore ce Groupe, pour 45 minutes de couverture au-dessus d’Abbeville. Malgré le dur labeur de la
nuit des mécaniciens, une seule patrouille triple peut être mise en ligne,
d’autant plus que cet ordre ne parvient à Coulommiers qu’à 5h 30. Elle
est constituée des lt Legrand (C.P.), s/c Le Guennec et sgt Gauthier (guide),
adj Diaz, s/lt Capdeviolle, sgt Pimont (1ère d’accompagnement), lt
Martin, lt Kawnik et sgt Trinel (2ème). La patrouille du III/6
n’atteint le point de rendez-vous qu’à 5h 55, tourne au-dessus du
terrain de Bouillancy pendant 5 minutes et ne voyant décoller aucun avion du
GC II/3, part vers Abbeville avec un plafond très bas. Cinq Dewoitine de la
patrouille de protection, partie également en retard, sont alors aperçus 15
minutes plus tard. Il n’y a pas d’avion allemand dans le ciel, la Flak ne
réagit que mollement et la mission se termine. Dans l’après-midi, alors
que la 7ème armée tente encore de résorber les têtes de ponts sur
la Somme à Abbeville et Corbie, on demande au III/6 une seconde mission,
cette fois par téléphone ; une patrouille triple basse en collaboration
avec le I/8 (moyenne) et toujours le II/3 (haute) devra être de 18h30 à 19h10
sur zone. Seulement 8 avions peuvent
prendre l’air ; cne Guerrier (C.P), sgt Gauthier, s/lt Steunou (guide),
sgt Japiot, sgt Gabard (1ère d’accompagnement), cne Jacobi, adj Le
Gloan, s/lt Kichlicki (2ème). Ce dernier, victime d’une fuite
d’huile devra se poser à Beauvais-Tillé et ne rejoindra Coulommiers que le
lendemain. Alors que le temps est
devenu franchement mauvais, cette pénible mission ne rencontre heureusement
que des tirs épisodiques de la Flak, mais les pilotes aperçoivent au sol de
nombreux tirs d’artillerie. |
Page 33 28 mai 1940 – Coulommiers (2) |
Deux incidents surviennent
à Coulommiers : un Morane heurte une borne dissimulée dans les hautes
herbes que la Compagnie de l’Air n’a pas fauchées malgré les demandes
répétées des aviateurs, et un autre avion, celui d’un Chef de patrouille,
s’enlise dans un trou de bombe mal rebouché, événements mineurs que ne manque
pas de dénoncer le commandant du Groupe par écrit au Général Romanet, qui
doit pourtant bien avoir dans l’heure des soucis plus importants. L’ambiance est lourde… et
le moral des troupes à Coulommiers est au plus bas ! Le cne Stehlin écrit encore
au Génaral Romatet : « Le
Groupe étant en alerte dès le lever du jour à 7 heures du soir, il est
extrêmement difficile d’exécuter les travaux de révision en raison du temps
très long que demande le décapotage et le recapotage d’un Morane »
et il demande « la permission
d’octroyer à ses pilotes de temps à autres une demi-journée de repos pour
permettre la révision des avions ». ! Est-ce bien vraiment le
moment ? Quelques jours plus tôt le cdt Castanier était systématiquement
en vol à la tête de son Groupe… ********** Pour ce jour, on dénombre
17 sorties en 2 missions. |
Page 34 |
Le temps reste couvert sur Dunkerque
pendant toute la matinée puis se dégage, ce qui permet à la Luftwaffe
d'attaquer en force avec les Ju 88A des KG 30 et LG 1 et les
Ju 87 des StG 2, 51, 76, 77 et I(St)/186(T). Malgré l'intervention de la
RAF9 les bombardiers allemands coulent une impressionnante série de
navires : le croiseur auxiliaire « Crested
Eagle », le torpilleur « Grenade »,
les dragueurs « Waverly »
et « Gracie Field »,
auxquels s'ajoutent ceux détruits par la Kriegsmarine, les torpilleurs « Grafton » et « Wakeful. » Mais plus de
45 000 hommes passeront malgré tout le « Channel ». Au sud, la bataille pour Abbeville
continue avec des résultats insignifiants. Une couverture du secteur
Beauvais-Gournay-en-Bray par une patrouille double est commandée pour
10h 30 à 11h 30, mais toujours « à
cause de la défaillance permanente des personnels chargés des transmissions
au Groupement 23 », selon un rapport justificatif sans complexe du
cne Stehlin (n°371/G.3/6 du 29, avec demande de sanctions, adressée au
Général Romatet qui commande justement ce Groupement !!!), cet ordre ne
parvient au Groupe qu’avec 1h 30 de retard. La patrouille double mixte
qui est alors mise alors en l’air ; adj Goujon (C.P.),
s/c Mertzisen et sgt Gabard (guide), adj Diaz, s/lt Satgé, s/lt
Capdeviolle (accompagnement), doit revenir au terrain, ayant trouvé à
proximité de la zone d’intervention un plafond de moins de 200 mètres. ********** Ces 6 sorties sont la
seule mission de la journée. |
Page 35 |
Dans les Flandres le groupe des
Armées du nord agonise. A Dunkerque, le ciel est nuageux. La
Luftwaffe coule le croiseur auxiliaire anglais « King Orry » tandis que le torpilleur français « Bourrasque » saute sur une
mine. Malgré tout, plus de 50 000 hommes font la traversée, dont les
premiers français. Devant Abbeville, la DCA allemande
de 88 bloque net l'attaque de la 4ème DCR. Le mauvais remps ne permet
toujours pas d’envisager des missions de guerre dans la matinée. Au début de l’après-midi,
une patrouille double peut décoller pour une mission sur le secteur
Beauvais-Clermont. Elle est composée du cne Jacobi, lt de Rouffignac, s/t
Kichlicki (guide), adj Diaz, s/lt Capdeviolle, s/lt Satgé (accompagnement). Mais comme la veille le
plafond trop bas la contraint à rentrer. Cette mission (6 sorties)
est la dernière du Groupe dans la Z.O.A.N. L’État-major lui donne l’ordre de
descendre le lendemain dans le midi, sur le terrain du Luc en Provence, dans
le Var, pour s’équiper enfin de Dewoitine 520. Pour remédier au manque
d’avion du III/6, une dizaine de MS 406 en provenance du GC III/2 est
convoyée à Coulommiers. Le journal de marche de la 6ème Escadrille
mentionne cette arrivée de façon éloquente : « Nous sommes néanmoins très désappointés d'avoir encore des
Morane à casser, quand verrons-nous les D.520 ou Curtiss P-.40 ??? ».
Ils ne savaient pas encore que ce serait pour le lendemain et que ces Morane
permettraient à la plupart d’entre eux de rejoindre Le Luc par la voie des
airs ! ********** En 21 jours face à la
Luftwaffe, tant en ZOAN (nord) qu’en ZOAE (est), c’est plus de 300 sorties
(près de 100 sorties de guerre), dont près des ¾ sur alerte, que le
GC III/6 a assurées, malheureusement au prix de 4 pilotes tués en combat aérien et 1 soldat tué au sol, deux
prisonniers et un blessé grave. Sept victoires lui ont été attribuées. |
Page 36 31 mai 1940 – Le Luc en Provence (83) |
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Page 37 |
A Dunkerque, la Luftwaffe coule le
dragueur anglais « Devonia »
et la Kriegsmarine le torpilleur français « Siroco »
mais près de 70 000 hommes arrivent en Angleterre, dont le général lord
Gort, qui commandait le Corps Expéditionnaire Anglais en France. C'est au cours de cette journée que
le bombardement français fournit son plus grand effort diurne de la
campagne : 57 avions sont engagés, dont 12 ne reviennent pas ;
parmi eux, 8 LeO‑451 d'une formation de 21 constituée par les GB 1/11,
1/12 et 11/31. Ainsi donc, la totalité de notre Armée de l'Air ne parvient à
faire décoller que l'équivalent d'un Groupe 1/2 de la Luftwaffe ! Le GQG crée la 10ème
Armée qui prend à son compte tout le secteur devant Abbeville, ex gauche de
la 7ème Armée bis. La marine anglaise coule le
sous-marin allemand « U13 »
en Mer du Nord. Les pilotes sont prévenus
dans la matinée de préparer leur départ immédiat pour le Midi, afin d'y
échanger les Morane à bout de souffle contre des Dewoitine 520 sortant
d’usine. On peut imaginer leur satisfaction ! Partis à 16h 00, les
Morane font escale pour se ravitailler en carburant sur le terrain de
Lyon-Bron, avant de gagner le terrain du Luc, dans le Var. En raison de
l'heure assez tardive, plusieurs appareils sont contraints de se poser à Aix
en Provence, Marignane et Hyères. Le III/6 vient remplacer le Groupe II/3 qui
a terminé depuis le 18 mai sa transformation sur D.520. La patrouille polonaise,
immobilisée à Bron en soirée, est victime du bombardement que les Allemands
exécutent ce jour-là sur ce petit aérodrome. Les pilotes rejoindront Le Luc
par chemin de fer le 3 juin, à l’exception du lt Kichlicki qui arrive dans l’entretemps,
une fois son Morane remis en état de marche ********** |
Page 38 |
Le beau temps règne sur Dunkerque et
la Luftwaffe coule le torpilleur français « Foudroyant »,
les torpilleurs anglais « Basillsk »,
« Keith » et « Havant », la canonnière
anglaise « Mosquito » et
le dragueur anglais « Skipjack »
et l'artillerie allemande le dragueur anglais « Brighton Queen ». L’hécatombe des bateaux de
transport est telle qu’il est décidé de ne plus procéder qu’à des évacuations
de nuit. Malgré tout, près de 65 000
hommes arrivent ce jour de l’autre côté de la Manche. Dans la nuit du 1er
au 2, les Anglais décident de mettre fin à l’opération « Dynamo » mais dans les trois jours qui suivent ce
sont peut-être encore 80.000 hommes, la plupart français, qui pourront
traverser. Pendant ce temps, les 7 divisions
encerclées à Lille depuis le 27 mai, ayant épuisé tous leurs moyens de
combat, capitulent. La Luftwaffe envoie des formations
de Heinkel dans le sud de la France par la vallée du Rhône jusqu’à Toulon et
Marseille au milieu de la journée, démontrant ainsi sa capacité à atteindre
maintenant n’importe quel point de l’hexagone, mais sans faire de dégâts
importants dans un premier temps. L’historique officiel du
Groupe dit que l’échelon roulant, embarqué par chemin de fer quitte
Coulommiers en fin de matinée le 1er juin, est arrivé au Luc le 2
juin vers 20 heures. Dans la réalité, il part le 2 mai et ne s’installe au
Luc que le 5 mai. Cinq Morane de la 5ème
Escadrille, indisponibles depuis le bombardement du 26 mai ont dû être
abandonnés ; leurs canons seront récupérés par le Groupe III/7 qui le
2 juin prend la suite du III/6 à Coulommiers et, comme ils sont d’un
type plus récent, les monteront sur leurs avions encore équipés de canons
H.S.9. à cadence de tir plus lente. Ce même jour, le
MS 406 n°933 resté à Bron est détruit durant le bombardement du terrain. L’État-major s’attend à des
attaques allemandes sur la côte méditerranéenne et le III/6 a reçu l’ordre la
veille de tenir dès l’aube une patrouille triple en alerte. Sur alerte du
service de guet de Toulon elle décolle à 9h 00 pour couvrir à 3 000
mètres le secteur Toulon-Marseille ; adj Le Gloan (C.P.) (patrouille
élémentaire), adj Goujon et adj Japiot. (C.P. des 2 patrouilles
d’accompagnement) Les artilleurs français de la défense aérienne peu aguerris
et servant pourtant des canons désuets s’en prennent à elle par erreur; le
Gloan décide d’abandonner ce secteur un peu trop dangereux ! La mission
est longue : la patrouille légère le adj. Japiot doit se poser à
Marigane pour faire les pleins, de même que le sgt Hardouin. Le s/c Mertzisen
qui n’avait pas verrouillé son train était immédiatement retourné au Luc. C’est à la mi-journée que
la Luftwaffe effectue avec des appareils dont le rayon d’action a pu être
amélioré ses premiers raids sur Toulon et Marseille sans opposition ; un
bateau est incendié, mais les résultats ailleurs sont maigres. Ces premiers bombardements
en Méditerranée peuvent laisser à penser qu'ils seront suivis de l'attaque en
règle de tous les ports Français du sud de la France et présager que l’Italie
se prépare à entrer en guerre contre la France. ********** |
Page 39 1 juin 1940 – Le Luc en Provence (2) |
Situé à 4 km à l’est
du petit bourg le terrain mesure 1 000 x 800 mètres, en bordure d’un
petit bois idéalement placé pour camoufler les appareils, et à proximité du
« Château Colbert » appartenant au Marquis de Colbert, une belle
propriété qui permet d’y accueillir confortablement les moyens techniques et
des cantonnements pour les « roulants ». Autour du terrain, deux
hangars existent au nord-est et un peu à l’écart des baraques pour les postes
de commandement. La base est administrée par
la Compagnie de l’Air 75/118 et ses ravitaillements sont à la charge du parc
13/125 de Brignoles. Elle dépend territorialement du Secteur de l’Air 15
commandé par le colonel Quir-Monfollet, ancien attaché de l’Air à Lisbonne puis
à Barcelone. Le GC III/6 remplace au Luc
le GC II/3 qui a été équipé en Dewoitine 520 du 10 au 18 mai. Il est affecté
au Groupement de Chasse 24 alors commandé par le colonel de Turenne (*) qui est basé
à Valence. Ce Groupement est rattaché à la ZOAA (Zone des Opérations
Aériennes des Alpes) commandé par le Général Odic, également basé à Valence. Le Groupement de Chasse 24,
dont les moyens sont répartis en deux Sous-Groupements (Nord, et Sud), a deux
missions : 1)
La Défense Aérienne du
Territoire (D.A.T.) pour la région lyonnaise, les centres industriels de
Saint-Etienne, Givors, Roanne ainsi que les bases aériennes de la vallée du
Rhône et les bases aéronavales de Toulon, Marseille et Berre, 2)
En cas de l’entrée en
guerre de l’Italie, la Chasse aux Armée sur la Tarentaise et la Savoie, les
régions de Gap et de Briançon, la Maurienne, les Alpes-Maritimes. Le III/6 est affecté au
Sous-Groupement n°3 de la zone sud, théoriquement sous les ordres du
capitaine Arnaud à Salon de Provence ; ses missions particulières sont
la couverture des plateformes de la Crau et des barrages de la vallée du
Rhône et le renforcement à la demande de son voisin à Toulon, le
Sous-Groupement 44 du capitaine Labonde. Mais l’additif n°1 à la
note n°213-S/3 du 7 juin définissant « l’ordre
d’opérations du commandant du Groupement de Chasse 24 pour l’emploi de la
chasse à partir de ce jour » est extrêmement ambiguë sur le niveau
d’initiative de chacun et demande au commandant du III/6 « de lui adresser avant le 12 juin une copie des ordres qu’il
aura donnés après s’être mis en liaison avec les différents Sous-Groupements
intéressés ». On croit rêver, mais on a là un exemple exceptionnel
des conséquences catastrophiques de la verticalité administrative de l’Armée
de l’Air avant et pendant la guerre ! C’est dans cette période de
réflexion pour savoir qui commande qui et inversement… que les Italiens
attaqueront. (*) Armand
Jean Galliot Joseph de Turenne, marquis de Turenne d'Aubepeyre, (né le 2
avril 1891 au Mans – mort le 10 décembre 1980 à Paris) est un as de
l'aviation française de la Première Guerre mondiale, au cours de laquelle il
remporte 15 victoires homologuées et cinq victoires probables. ********** |
Page 40 |
A Dunkerque, aucun bateau et aucun
avion anglais ; seuls des bâtiments français continuent la navette, mais
par suite des bombardements on décide d’attendre la nuit. La Luftwaffe s’en prend de nouveau à
Marseille. Lyon et Grenoble sont également bombardées. Au cours d'une réunion houleuse à
Paris, Reynaud, Darlan et Weygand critiquent fortement le lâchage des Anglais
à Dunkerque. De ce fait les évacuations nocturnes reprennent et dans les
nuits des 2, 3 et 4 juin c’est un total de 75 000 français qui pourront
ainsi être encore transbordés. L’offensive aérienne
allemande s’est poursuivie pendant la nuit ; Marseille a de nouveau été
attaquée, un réservoir de carburant de la raffinerie de pétrole de Berre est
en feu. Nouveaux bombardements de
8h 30 à 10h, visant avec une certaine efficacité les installations
pétrolières de la région, Berre, Martigues, Port-de-Bouc. La vallée du Rhône
est également ciblée, dont les deux terrains d’aviation du pourtour de
Valence. La patrouille double du
III/6, conduite par les cne Stehlin et Jacobi, alertée trop tard, se porte
sur Marseille mais arrive après les bombardements. L'état-major de la ZOAS
donne l'ordre au III/6 de mettre à la disposition de l'armée des Alpes une
patrouille de 10 Morane, pour pouvoir former une patrouille triple sur le
terrain de Valence-Trésorerie. C’est vers midi que partent du Luc seulement 4
pilotes de la 5ème Escadrille au lieu des 6 prévus (lt Martin, adj
Le Gloan, sgt Trinel et sgt Hardouin) et 4 pilotes de la 6ème
Escadrille (cne Guerrier, s/lt Capdeviolle, adj Japiot et sgt Gauthier).
Mais tout restera calme ; pour le III/6 seulement deux vols de
couverture le 4 juin (adj Le Gloan, sgt Trinel et lt Martin, pour Valence et
le sud de la région Lyonnaise et sur alerte de fin de journée (*), cne Guerrier, adj Japiot
et sgt Gauthier, pour le terrain de Valence), des réglages d’armes et des
essais de transmissions puisqu’un détachement radio « Type IV » de
Salon de Provence a été mis à la disposition de ce détachement du III/6. Le 5
au matin les pilotes rentrent au Luc. (*)
Livre de marche de la 6ème Escadrille : « Un message a annoncé l’arrivée d’une vague d’avions douteux.
La patrouille d’alerte prend l’air en même temps que se pose une vingtaine de
Morane 406 en repli, qui n’étaient autres que les avions douteux
signalés ! » Pour la petite histoire,
disons que le Groupe ne possède aucune carte de la région et le lt de
Rouffignac doit se rendre en avion à Valence pour en chercher quelques
jeux ! ********** |
Page 41 SITUATION LE 4
JUIN 1940 |
AVANCE
ALLEMANDE VERS DUNKERQUE du 21 MAI
au 4 JUIN LIGNE de
FRONT SUR la LA SOMME |
Page 42 |
Le fait marquant pour l’histoire du
3 juin d’un point de vue militaire est l’opération aérienne stratégique « Paula » où la Luftwaffe engage
500 avions (bombardiers des KG 1, 2, 3, 4, 30, 54 et LG 1 ;
chasseurs des JG 2, 53, 54, 77 et ZG 76) pour détruire l'infrastructure
aéronautique française : usines et aérodromes. Les Français, qui
s'attendaient à la chose, sont prêts à engager les 250 chasseurs des GC 1/1,
II/l, III/l, 1/2, II/2, 1/3,1/5, II/5, 1/6, II/7, III/7, 1/8, II/9 et 1/145
pour y faire face. En fait, ce grand déploiement n'a, de part et d'autre, que
de modestes résultats. Faute de radars, les interceptions sont peu nombreuses
et difficiles. Bref, les Allemands perdent 26 avions et les Français 33 (17
en l'air + 16 au sol) (*). Tous les objectifs désignés ont été
bombardés sans encombre mais les dégâts sont peu importants. (*) Bien que tous les chiffres de pertes soient toujours
donnés à l’unité près dans ce texte, il faudrait peut-être mettre un
« +/- » devant à chaque fois ! Tôt dans la matinée du 4 juin, les
Allemands entrent dans Dunkerque et capturent 40 000 français qui n’ont
pas pu réembarquer. Les marines britannique et française ont perdu au moins
80 navires marchands et navire de guerre Churchill fait sans doute le plus
célèbre de ses discours de guerre : « …Nous
combattrons sur les plages... nous ne capitulerons jamais… un jour, le
Nouveau Monde, avec toute sa puissance et sa force, fera un pas en avant pour
secourir et libérer le vieux… » Les attaques allemandes sur la ligne
de la Somme commencent le 5 juin. Le Cabinet est remanié et Daladier,
ministre des Affaires étrangères, quitte le gouvernement. Charles de Gaulle
est nommé sous-secrétaire d'État au ministère de la Défense nationale. Les forces allemandes atteignent la
Seine à Rouen et prennent la ville le 9 juin. Dieppe et Compiègne tombent
également. A l’est, elles franchissent la Marne. |
Page 43 3 au 9 juin 1940 – Le Luc en Provence (2) |
|||||||||
Tout le monde sait que
l’entrée en guerre de l’Italie est éminente, mais on parle peu, le moral
n’est pas au plus haut, chacun se pose la question sur le sort que l’avenir
lui réserve et a besoin d’un peu de repos. On sait que les vieux Morane 406
vont être remplacés par les magnifiques Dewoitine D.520 ; les
mécaniciens font cependant ce qu’il faut pour que les 406 soient encore prêts
pour faire face à la « Regia-Aeronautica » italienne dont les
appareils sont considérés comme peu dangereux. Les journées sont occupées
à procéder aux révisions indispensables, à améliorer les transmissions
hertziennes et filaires, à régler les armements sur les buttes de tir de
Cannes-Mandelieu et de Hyères-Palyvestre. Un premier groupe de
mécaniciens et de pilotes part à Toulouse pour recevoir une instruction
rapide sur le Dewoitine D.520 ; adj Augst pour l’E.M. ; adj Diaz
(pilote), sgts Bibert et Robert (mécaniciens) le 7 mai pour la 6ème
Escadrille; adj Goujon (pilote), adj Colin et sgt Defossés (mécaniciens) le
lendemain pour la 5ème. Les suit le 9 juin un
premier groupe de pilotes qui convoient leurs vieux Morane à Toulouse pour
littéralement choisir leur nouvelle monture parmi la centaine d’appareils,
tout neuf, qu’ils découvrent avec stupéfaction bien alignés devant l’usine de
Saint-Martin ! Pourquoi pas plus tôt, diront-ils tous ultérieurement. Le 9 juin une première
prise d’armes a lieu au Luc après que l’information de la découverte du corps
du commandant Castanier porté disparu le 24 mai et maintenant officiellement « mort pour la France », ait
été donnée au Groupe ; chacun peut alors se recueillir à la mémoire de
leur ancien commandant, toujours en tête lors des dures missions du III/6
au-dessus du nord de la France. ********** |
Page 44 |
Le front est maintenant rompu sur la
Somme et en Champagne. Les armées que le III/6 survolaient
deux semaines plus tôt sont en pleine retraite ; les Allemands sont en
basse Seine, devant Châlons-en champagne, Paris est menacé. Le général en chef Maxime Weygand
informe le Président du Conseil Paul Reynaud que la rupture définitive de nos
lignes de défense peut survenir d'un moment à l'autre et conclut avec
pessimisme : « Si pareille
éventualité se produisait, nos armées continueraient à combattre jusqu'à
l'épuisement de leurs moyens et de leurs forces. Mais leur dissociation ne
serait qu'une affaire de temps ». A 18h00, Benito Mussolini, en grand
uniforme noir de la milice, apparaît au balcon de la Piazza Venezia pour
annoncer à la foule : « ...une
heure marquée par le destin a sonné dans le ciel de notre Patrie : l'heure
des décisions irrévocables. La déclaration de guerre a été signifiée aux
ambassadeurs de Grande-Bretagne et de France... » Les capitaines Stehlin et
Assollant, et 2 pilotes de la 5ème Escadrille, le cne Jacobi
et l’adj. Le Gloan ont le privilège d’être les premiers à ramener au Luc leur
beau D.520, respectivement les n°331, 302, 229 et 277. Le versement des Morane au
Parc 15 de Toulouse et l’arrivée des Dewoitine au Luc se poursuivra dans les
jours suivants. Les derniers appareils arriveront le 16 mai avec des pilotes
de la 6ème Escadrille. Les derniers mécaniciens rentrent le 17
mai. Ce sera désormais sur ce
chasseur moderne qui peut rivaliser avec les meilleurs appareils ennemis que
le GC III/6 continuera le combat contre l'aviation italienne, et plus tard
contre l’aviation anglaise en Syrie, mais ceci est une autre histoire… Ce même jour une nouvelle
prise d’Armes a lieu en présence du Général Odic commandant la ZOAA ; le
capitaine Chainat, as de 14/18, 48 ans, remet la croix de guerre à son jeune
et ambitieux chef, le capitaine Stehlin, 33 ans. De valeureux pilotes et d’obscurs
mécaniciens besogneux devront attendre, la plupart en vain ! Toujours le 10 juin, par
l’ordre d’opérations n°269-S/3, le Général Odic, sous la pression des
évènements… et du capitaine Stehlin, remanie son dispositif. Le Groupement 24
est subdivisé dorénavant en trois Sous-Groupements ; s/g Nord,
commandant Viguier à Satolas, avec le GC III/9, l’Escadrille de chasse de
nuit 5/13 sur Potez 63 et « l’Escadrille mixte polonaise » ;
s/g Sud, capitaine Stehlin au Luc, avec le GC III/6, la patrouille simple
polonaise arrivant de Montpellier et une patrouille simple dite « patrouille
de marche du Groupe de Remorquage 4/108 » ; s/g 44, capitaine
Labonde à Toulon-Gambin avec une Escadrille de la Marine sur Bloch 151 et
diverses formation d’hydravions au service de l’Amiral commandant la 3ème
Région Maritime. Les missions du GC III/6
dont le commandant a gagné un échelon hiérarchique restent globalement les
mêmes, mais tournées un peu plus vers l’Italie menaçante. ********** |
Page 45 L’Aviation
italienne en juin 1940 Texte de J-P. DEFFIEUX |
La « Regia Aeronautica »
a pour unité élémentaire l'Escadrille ou Squadriglia
qui possède au plus 10 avions (monomoteur) et souvent moins (multimoteurs : 7
ou 8 seulement). Avec 2 Escadrilles de bombardement ou 3 de chasse, on
obtient un Groupe ou Gruppo et
avec 2 Groupes (parfois 3 dans la reconnaissance) on a une escadre ou Stormo de 35 bombardiers (25 à 50
chez les Français, 100 chez les Allemands) ou 60 chasseurs (75 chez les
Français, 100 chez les Allemands). Il existe des Groupes et Escadrilles autonomes, ainsi que
quelques sections indépendantes. Les irrégularités ou anomalies dans la
composition des Groupes et escadres sont rares. La numérotation des escadres,
Groupes et Escadrilles est totalement indépendante, contrairement à ce qui se
passe en France et en Allemagne, où Groupes et Escadrilles font
habituellement référence à l'escadre de rattachement même si celle-ci est
incomplète ou inexistante. Le 10 juin 1940, on trouve : 8 ESCADRES (1, 2. 3,
4, 51. 52, 53, 54) + 4 GROUPES (2, 3. 6,160) + 8 ESCADRILLES (161, 163, 356, 409, 410, 411. 412. 413) DE CHASSE (total de 65 Escadrilles)
avec 511 appareils (504 avions + 7 hydravions) : 201 CR-42,158 CR-32, 81
G-50, 64 MC-200, 7 Ro-44 25
ESCADRES (7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 18, 30, 31, 32, 33, 34,
35, 36, 37, 38, 39. 41, 43. 46. 47) + 1
GROUPE (49) + 1 ESCADRILLE
(41) DE BOMBARDEMENT (total de 101
Escadrilles) avec 682 appareils (634 avions + 48 hydravions) : 395
SM-79, 107 BR-20, 90 SM-81, 48 Z-506, 24 Z-1007,18 Ca-133. 4 ESCADRES
(19, 20, 21. 22) + 5
GROUPES (61, 62, 64, 73, 76) + 6
ESCADRILLES (33,110,114. 120. 124. 132) DE RECONNAISSANCE (total de 38 Escadrilles) avec 242
avions : 216 Ro-37, 26 Ca-311 2 ESCADRES
(5, 50) D'ASSAUT
(total de 10 Escadrilles) avec 52 avions : 24 Ca-310,17 Ba-88,11 Ba-65 1 GROUPE (96) DE BOMBARDEMENT EN PIQUÉ (total de 2
Escadrilles) avec 14 SM-85 4 GROUPES (145.
147,148,149) + 2 ESCADRILLES (615,
616) DE TRANSPORT (total de 11
Escadrilles) avec 57 avions : 21 SM-75,13 SM-73, 12SM-82.8SM-83 4 GROUPES (79, 83.
84. 85) + 10 ESCADRILLES (142,
143, 144. 145, 148, 170, 171, 182, 199. 231) D' 2 GROUPES (1, 2) COLONIAUX + 2 ESCADRILLES (26, 99) SAHARIENNES
(total de 7 Escadrilles) avec 31 Ca-309 2
ESCADRILLES (613, 614) DE SAUVETAGE
avec 11 hydravions : 6 Z-506, 5 SM-66 Donc au total 1717 appareils (1534 avions + 183 hydravions)
distribués dans 39 escadres, 21 Groupes et 31 Escadrilles (total de 256 Escadrilles) auxquels il faut
ajouter 49 hydravions Ro-43 catapultables embarqués sur les cuirassés et
croiseurs de la flotte. Ces chiffres bruts doivent cependant tenir compte de quelques
correctifs : le CR-32 est un biplan complètement périmé ; le CR-42 est récent mais biplan; le G-50 est un monoplan inférieur à ses
adversaires potentiels ; le
MC-200 est interdit de vol en juin 1940 à la suite d'accidents
inexpliqués ; le Ca‑133
est périmé ; Les Ro-37, Ro-43 et Ro-44 sont des biplans anciens et dépassés ; les Ba-65, Ba-88 et SM-85 se
révéleront inutilisables ; le Ca-309
n'est pas un avion de combat ; enfin, le SM-66 et le Z-501 sont
pratiquement sans défense. Restent donc, pour affronter l'ennemi les Ca-311 (d'observation), BR-20 (modernes), SM-81 (valables mais vieillissants), Z-506 (très modernes mais
hydravions), et surtout les SM‑79
et Z-1007 (l'un et l'autre très
modernes et soutenant la comparaison avec n'importe quel bombardier étranger
disponible en juin 1940). La flotte de bombardement italienne doit être considérée comme
bien supérieure à celle de la France et sa petite flotte de transport est
aussi meilleure que celle des Franco-anglais. L'industrie aéronautique
italienne se révélera incapable de maintenir les effectifs et d'améliorer les
fabrications (peu de variantes, les chasseurs modernes livrés à partie de
1942 seront équipés de moteurs allemands). L'aviation italienne présente deux
caractéristiques notables : elle est la seule au monde à avoir misé sur
la formule trimoteur pour des avions de combat ; elle est fortement
exportatrice (et sans préjugés, vendant aux ennemis potentiels, comme la
Yougoslavie, et sans l'entrée en guerre de juin 1940 elle aurait aussi vendu
à la France et à l'Angleterre) alors qu'elle n'arrive pas à couvrir les
besoins nationaux. |
Page 467 |
Paris est déclarée ville ouverte.
Les restes des forces françaises battent en retraite dans la confusion au sud
de la Seine et de la Marne. Les forces blindées allemandes prennent Reims. Compte tenu de la quasi-inexistence
du bombardement français sur le front des Alpes, les Anglais ont envoyé en
France des Wellington de l'Escadrille 99 qui doivent bombarder l'Italie. Mais,
au moment où ils vont décoller, les autorités locales françaises, craignant
des représailles de l’aviation italienne, bloquent l'aérodrome et empêchent
le décollage. Pendant que les échos de cette affaire remontent aux
gouvernements respectifs, les Anglais font quand même partir, de chez eux
cette fois, 36 Whitley des Escadrilles 10, 51, 58, 77 et 102 vers l'Italie,
que 11 d'entre eux bombardent, les autres n'ayant pas trouvé l'objectif. Le lt Martin (n°301), l’adj
Goujon (n°350) et l’adj Diaz (n°138), ramènent des Dewoitine de Toulouse dans
la journée. Ils y sont remplacés par quatre de la 6ème Escadrille
(cne Guerrier, lt Legrand, s/lt Capdeviolle et sgt Gabard) et un de la 5ème
(s/c Chardonnet). Arrivant du C.I.C. de
Montpellier, les lieutenants polonais Wienzylaw Baranski et Jan Borowski
rejoignent la 5ème Escadrille et le sergent Michal Cwynar la 6ème.
Ce dernier, qui se couvrira de gloire par la suite en devenant
« As » dans la R.A.F. et qui survivra à 4 ans de guerre,
écrira plus tard quelques pages sur son passage au III/6 au Luc ; elles
ne manquent pas d’intérêt pour en remettre certaines autres, plus romancées,
à leur juste place. Les MS.406 restants
effectuent encore quelques sorties de couverture. La prise en main des
Dewoitine D.520 est tellement facile qu’une première patrouille simple du
III/6 sur Dewoitine peut décoller pour une telle mission en fin d’après-midi
de ce premier jour de guerre avec l’Italie. ********** |
Page 47 |
Weygand estime, en qualité de
commandant en chef de l'armée française, qu'il est nécessaire de demander un
armistice. Il signe l'ordre de retraite générale sur la Loire. Philippe
Pétain, le vice-président du Conseil français, est du même avis, mais Reynaud
repousse énergiquement cette proposition. C'est donc ce jour qu'au niveau des
principaux dirigeants français les rôles sont distribués. Au duo Reynaud-de
Gaulle partisan de la poursuite de la guerre s'oppose le tandem
Pétain-Weygand préférant arrêter les frais. Pétain et Weygand, brouillés
depuis des années, deviennent solidaires par la force des choses, et
peut-être aussi parce que l'un et l'autre détestent de Gaulle, qui le leur
rendra bien. Un cinquième personnage pourrait jouer un rôle important :
Darlan. Il a sur tous les autres l'avantage, devenu rare en ces jours de juin
40, de disposer d'un instrument intact et invaincu, sa superbe marine. Mais
il ne manifeste à l'époque aucune volonté de jeu personnel. Les cinq pilotes qui ont
passé la nuit à Toulouse sont rejoints par l’adj Japiot, le sgt Pimont, le
s/lt Satgé et le s/c Cwynar. Ils effectuent leurs premiers vols avec les
Dewoitine qu’ils ont perçus. Au Luc, les Morane restent
en alerte. Les Italiens envoient quelques avions survoler Antibes et
Saint-Tropez. Deux patrouilles simples de le 5ème Escadrille du
III/6 couvrent à priori la région de Menton de 14h 25 à 16h 05 et
de Saint-Tropez sur alerte de 18h 30 à 19h 20 (s/c Le Guennec, s/lt
Steunou, sgt Gauthier de la 6ème) mais elles ne découvrent pas
d’avions italiens. Sur les D.520 déjà au Luc,
les codes tactiques sont peints : le n°229 du cne Jacobi récupère
logiquement le « 1 », le n°301 du lt Legrand le « 2 », le
n°277 de l’adj Le Gloan le « 6 », le n°350 de l’adj Goujon le « 7 »
et le n°138 de l’adj Diaz le « 29 ». Pour le n°331, le cne Stehlin
se singularise avec un « A »", tout comme le cne Assollant sur
son n°302 avec un « S » auquel est ajouté l’insigne de la SACM de
Madagascar et le nom de baptême « La Pouille » (comme sur son 406).
Les vols d’essai se multiplient et quelques-uns font l’aller-retour à Cannes
pour y régler les armes. Ils ne tarderont plus à être prêts pour le combat. Dans la nuit les bombardiers
Italiens s’en prennent sans opposition, mais sans résultat, à l’usine de
fabrication de torpilles de Saint-Tropez. ********** |
Page 48 SITUATION LE
12 JUIN 1940 |
AVANCE
ALLEMANDE VERS PARIS du 4 au 12
JUIN LIGNE de FRONT
SUR la SEINE |
Page 49 |
Les forces françaises à l'ouest de
Paris battent maintenant en retraite vers la Loire. Depuis son entrée au Gouvernement en
mai, Pétain avait assisté plutôt que participé aux discussions. Reynaud ne
l'avait appelé en fait que pour couvrir ses décisions du nom du « glorieux-vainqueur-de-Verdun ».
Lors d’une discussion orageuse entre Weygand, le militaire, et les ministres,
Pétain intervient au moment où on s'y attend le moins. Il sort un papier et
le lit. C'est un petit discours dont la conclusion est la suivante : « Je déclare en ce qui me concerne que, hors du Gouvernement
s'il le faut, je me refuserai à quitter le sol métropolitain. Je resterai
parmi le peuple français pour partager ses peines et ses misères. L'armistice
est à mes yeux la condition nécessaire à la pérennité de la France ».
Reynaud est furieux mais la séance
doit être levée dans la hâte lorsque des bombes tombent à proximité. Le
Gouvernement a juste le temps de décider à l'unanimité : 1) que « l'intérêt
supérieur de la Patrie est en jeu et exige l’union sacrée » ... 2) qu’il doit se replier à Bordeaux ! Une première patrouille de
Morane de la 6ème (même composition que la veille) couvre à priori
la région niçoise en tout début de matinée mais ne trouve pas « l’Italien de service ». Au départ d’une patrouille
de la 5ème à 6h 15, le Morane n°675 du s/c Mertzisen percute
le Dewoitine n°350 de l’adj Goujon. Les deux hélices à remplacer ; l’adj
Goujon retournera néanmoins rechercher un nouveau D.520 à Toulouse deux jours
plus tard. Sur appel du centre de
Toulon, une patrouille simple de D.520 prend l’air à 11h. L’adj Le Gloan, le lt Martin et l’adj Goujon s’envolent vers la côte et
repèrent rapidement un peloton de quatre Fiat BR 20 de la 3a Squadriglia
du 43° Gruppo faisant route à l’ouest à la verticale de Hyères. Les bimoteurs
italiens font demi-tour et larguent leurs bombes en mer mais ils sont facilement
rejoints. Les trois pilotes français
coordonnent leur attaque au canon sur l’ailier droit que l’adj Le Gloan tire
par en dessous et les deux autres par au-dessus. Armes muettes à cause d’un
fusible grillé, le lt Martin doit rentrer au Luc, mais les deux pilotes chevronnés
de la 5ème ont fait mouche ; l’équipage peut sauter en
parachute tandis que le bombardier italien
dégringole en flammes au large du cap Camarat.
Un parachutiste tombe en mer et se noie, deux autres pris à partie par des
tirs de mitrailleuses sont tués avant de toucher le sol sur la commune d’Agay
où les deux derniers sont pris à partie par des habitants excités ; un
seul pourra être soustrait à la vindicte populaire par des gendarmes. Pendant de temps les 2
Français poursuivent les 3 Fiat italiens ; deux d’entre eux parviennent
à se réfugier dans les nuages, mais pas le troisième qui subit à son tour les
tirs des seules mitrailleuses des D.520 dont les canons n’ont plus d’obus. Le
bombardier accuse le coup et perd de l’altitude. Le Gloan et Goujon n’ont
plus de munitions et l’abandonnent à son sort au large des îles de Lérins. Le BR 20 parviendra à passer la frontière et amerrira quelques kilomètres plus loin devant Santo Stefano al Mare. Son
épave est aujourd’hui un site régulièrement visité par les amateurs de
plongée. |
Page 50 13 juin 1940 – Le Luc en Provence (2) |
Dans leur rapport de
combat, les deux pilotes mettent l’accent sur le fait qu’ils n’ont pas subi
le moindre tir défensif de la part des bombardiers italiens, ce dont ils
n’avaient pas l’habitude face à ceux de la Luftwaffe. Et de fait, les deux
Dewoitine sont intacts alors qu’ils ont effectué des tirs très rapprochés.
Après ces premières victoires sur D.520, les trois mêmes pilotes redécollent
sur alerte dans l’après-midi. Mais 50 minutes plus tard, ils sont de retour
sans avoir croisé le moindre avion ennemi. Des attaques italiennes sur
les terrains de Fayence et de Cannes-Mandelieu et sur la ville de Toulon
n’obtiennent que peu de résultats ; des messages d’alertes diffusés trop
tard n’ont pas permis au III/6 d’intervenir malgré le double décollage de la
patrouille simple adj Le Gloan et lt de Rouffignac à 15h45 et à 16h 40. ********** Les Dewoitine du III/6
ont effectué 14 sorties en ce 13 juin 1940, leurs premières... mais à
quelques jours seulement de l’armistice et deux
bombardiers modernes italiens ont été au tapis... |
Page 51 |
Paris est occupée par les troupes
allemandes sans le moindre combat. Deux millions d’habitants d’Ile de France fuient
vers le sud. Ils s’ajoutent aux deux millions qui ont déjà quitté le nord de
la France : c’est l’exode ! Ce qui reste de la 7ème
Armée française du général Frère et la garnison de Paris se replient sur la
Loire. Ayant remarqué que la Ligne Maginot
se dégarnissait, les Allemands attaquent en Sarre au sud de Sarrebruck ;
la ligne Maginot est percée. En Champagne, la 45ème DI est anéantie. Les Anglais décident l'évacuation
totale. Ils réussiront à ramener plus de 100 .000 hommes du continent de
leurs services d'arrière. En Méditerranée, le torpilleur
italien « Strale » coule
le sous-marin anglais
« Odin » tandis que la marine française bombarde Gênes en même
temps que 8 Wellington anglais des Escadrilles 99 et 149. Le gouvernement français quitte
Tours pour Bordeaux. Le sous-secrétaire d'Etat à la
guerre, le général Charles de Gaulle, est à Londres pour faire le point avec
le Premier ministre Winston Churchill sur la situation. Franco profite de ce que tout le
monde regarde ailleurs pour occuper Tanger. Dans la nuit est lancée
l’opération « Vado » ; une quinzaine de bâtiments de la Marine
nationale quitte Toulon pour attaquer les ports de Gênes et de Vado Ligure en
Italie. Sur le retour, ils sont couverts dès l’aube par une patrouille de Bloch
151 de l’AC 3 qui sera relevée de 6h 40 à 7h 40 par une patrouille
double du Groupe. A 6h 15, les six Dewoitine des cne Stehlin, cne
Jacobi, adj Diaz et adj Le Gloan, lt Martin et adj Goujon quittent le Luc et
rejoignent la flotte française qui se trouve encore dans les eaux italiennes.
Les conditions atmosphériques sont exécrables, aucun avion italien ne se
montrera. Mais la Marine a apprécié le concours des chasseurs de l’Armée de
l’air et leur exactitude au point de rendez-vous, ce qui vaudra au général
Odic commandant la ZOAA de recevoir les remerciements écrits du vice-amiral
Duplat qui commandait l’escadre engagée. Par ricochet, le cne Stehlin
récoltera une surprenante citation à l’ordre de l’aviation de chasse avec
étoile de vermeil. Après la guerre, certains pilotes du III/6 pourront dire
et écrire qu’ils avaient mal supporté que les médailles et les citations
étaient souvent distribuées d’abord aux « seigneurs
de la guerre » ! Le mauvais temps sévit
toute la journée et ce sera la seule mission accomplie par le GC III/6. Une
douzaine de pilotes reviennent de Francazal avec leurs nouveaux appareils, ce
qui porte désormais à dix-neuf le nombre de Dewoitine D.520 sur le terrain du
Luc. ********** |
Page 52 |
L'Armée Française perd encore 2
divisions, la 20ème DI et la 82ème DIA. Les Allemands
tiennent presque toute la haute Marne, s'emparent de Langres et de
Verdun : nos armées de l’est sont donc bien séparées des autres. En
plus, ils attaquent en Alsace et passent le Rhin à Neuf-Brisach malgré la 104ème
DIF. Irrités par les bombardements de
Gênes, les Italiens répondent en engageant une partie notable de la Regia
Aeronautica. Malgré tout, les résultats sont insignifiants car au soir on
compte 6 avions italiens abattus en combat aérien pour 4 français, tandis
que quelques autres avions français ont été détruits au sol. La RAF envoie
encore 8 Wellington des Escadrilles 99 et 149 bombarder Milan. La marine italienne perd le
sous-marin « Marcalle »
par accident. A Bordeaux, le Gouvernement se
déchire entre partisans de la lutte à outrance (Paul Reynaud) et de
l’armistice (Pétain et Chautemps) : c’est une des journées les plus
dramatique de l’histoire de France. De Gaulle est à Londres et se
prépare à éviter à la France un déshonneur absolu ! Pour le GC III/6, c’est la
journée mémorable qui contribua le plus à la gloire de ce Groupe et qui fit
que l’adjudant Le Gloan se retrouva le lendemain sous-lieutenant avec 5 victoires
supplémentaires à son actif (le seul « quintuple » français de
1939/1945) dont une ou deux (selon les rapports et documents officiels
existants) en collaboration avec le cne
Assollant. Dans la biographie de
« l’As » En effet tout ce qui est
écrit, dans les livres de marche, les cahiers d’ordre, les rapports
d’engagements, les historiques officiels écrits plus tard et qui ont pu être
raturés ou modifiés n’est pas très cohérent. C’est surtout, ce que Paul
Stehlin en a écrit dans son livre de mémoires « Témoignage pour l’Histoire » qui a finalement créé le
plus grand doute. On peut affirmer que la glorification justifiée de l’adj.
Le Gloan a été aussi un moyen pour l’État-Major, quelques jours avant
l’armistice, de masquer ses insuffisances pendant toute la campagne et pour
le Commandant du Groupe, habitué aux honneurs dans ses récentes fonctions
politiques d’Attaché de l’Air à Berlin, d’en obtenir des nouveaux. Certes, il ne faut pas
minimiser l’exploit de l’adjudant Le Gloan : les italiens ont bien reconnu la chute de 5 Fiat CR 42 (4 victoires homologués à Le Gloan) et d’un BR 20 (la 5ème
victoire officielle du jour pour Le Gloan), et, que son palmarès réel soit de
4 ou 5 italiens en 15 ou 45 minutes, en collaboration ou non pour certains,
ne changera pas la face du monde… |
Page 53 15 juin 1940 – Le Luc en Provence (2) |
Ce qu’il ne faut pas
oublier dans cette affaire, c’est que deux importantes formations italiennes
ont attaqué par surprise au milieu de la journée les terrains d’aviation des
« marins » de Cuers- Il faut en effet savoir
que : 1)
A Cuers- 2)
Au Luc le mitraillage du
terrain pendant 17 minutes prend tout le monde de court, qu’un bimoteur
britannique (Douglas à moteurs Wright Cyclone), que deux Morane (n°448 et
887) et que quatre Dewoitine, ont été peu ou fortement endommagés (le D.520
n°53 codé « 4 » devra être laissé sur place), qu’il n’y avait
manifestement pas de patrouille en couverture, et que seul le retour de Le
Gloan a permis de voir un Fiat 42 et le Fiat Br 20 être abattus, 3)
Le décompte des victoires
françaises ne colle pas vraiment, 4)
L’implication d’une
patrouille du III/6 avec l’adj. Japiot et le s/lt Capdeviolle qui
revendiquent un temps leur participation au Luc aux chutes d’un
Fiat CR 32 (appareil ancien remplacé peu à peu par le CR 42)
pour le premier et du BR 20 pour le second est un épisode des plus
confus, 5)
Pour l’anecdote, l’adj Le
Gloan ne vole pas pour cette mission sur son « fameux » D.520 n°277
comme la légende le raconte, mais sur le n°301 codé « 2 » emprunté
au lt Martin car son appareil fétiche codé « 6 » n’avait pas
voulu démarrer, 6)
Michal Cwynar a raconté la
précipitation avec laquelle les officiers et sous-officiers pilotes qui se
préparaient à déjeuner dans leur restaurant-popote du Luc à 5 kilomètres de
là sont montés dans leur camion pour s’en retourner au terrain où ils ont pu,
du sol, admirer les dernières évolutions de l’adj Le Gloan ! Son
témoignage, assez accablant, peut être lu
par ce lien. Dans la bouche d’un des
sous-officiers mécaniciens qui n’est revenu de Toulouse au Luc que le
lendemain : « Je n’y étais
pas, mais je sais qu’il s’est passé de drôles de choses au Luc ce
jour-là ! ». ********** |
Page 54 |
La 56ème DI française,
qui se trouvait en Champagne sur l'un des axes de progression ennemis, est
anéantie, tandis que la Division de Marche « Regard » est dispersée.
Les Allemands atteignent Besançon. Le croiseur auxiliaire anglais « Andania » est coulé par
le sous-marin allemand « UA1 »
et le paquebot « Lancastrian »
par un Ju 88A du KG 30 avec 6 000 hommes à bord (probablement plus de
3 000 morts, sans doute les pertes anglaises les plus élevées en une
seule journée de toute la guerre). En France, Reynaud est complètement
désemparé ; ayant mis depuis 15 jours ses derniers espoirs dans une
implication rapide de l’Amérique de Roosevelt qui n’est pas venue, il adopte
le fameux projet de « fusion
complète » entre l'Angleterre et la France et le propose au conseil
du Gouvernement qui le refuse. Il démissionne. Le nouveau Gouvernement est formé
dans la douleur : cette fois, « Pétain-le-glorieux-vainqueur-de-Verdun »
en est le chef. De Gaulle n'en fait pas partie ; craignant d'être
arrêté, il demande un refuge à Spears. Dans la nuit, le nouveau
Gouvernement fait demander un armistice par l'intermédiaire de l'ambassadeur
d'Espagne. Les derniers pilotes encore
à Toulouse arrivent au Luc avec leur nouvelle monture en fin de matinée. La
transformation du GC III/6 est achevée. Trente superbes machines sont
maintenant à la disposition du Groupe. Profitant de la présence du
D.520 d’instruction n°3 au Luc, quelques pilotes de la 6ème
s’exercent à faire des virages circulaires car ils ont constaté lors des
premiers vols que leurs appareils pouvaient partir en vrille plus facilement
que leurs anciens MS 406. Une couverture sur alerte
est effectuée à 18h 30 sur le secteur Le Luc- Hyères pendant 45
minutes ; s/lt le Gloan (n°277), adj Goujon (n°340) et s/c
Chardonnet (n°301), cne Jacobi (n°229) et lt Baranski (n°331) ; sans
résultat. ********** |
Page 55 |
La 29ème DIM de Guderian atteint
Pontarlier et la frontière suisse, achevant ainsi l'encerclement de nos
armées de l’est. A l'ouest, les Allemands occupent Caen, Laval, Le Mans et
Orléans. La 7ème PzD de Rommel avance de 240 km dans la
journée. Des croiseurs quittent Brest en
emportant une partie de l'or de la Banque de France. En Méditerranée, l'aviso
français « La Curieuse »
coule le sous-marin italien « Provana ». La Luftwaffe avait attaqué et manqué
plusieurs fois un train chargé de munitions. Elle finit par le coincer à
Rennes et le fait sauter au milieu de la gare où se trouve 5 trains de
réfugiés : il y aura près de 2 000 morts. A 12 h30 Philippe Pétain à la
radio : « ...sûr de l'appui des
anciens combattants que j'ai eu la fierté de commander, je fais à la France
le don de ma personne pour atténuer son malheur... c'est le cœur serré que je
vous dis aujourd'hui qu'il faut cesser le combat... je me suis adressé cette
nuit à l'adversaire, pour lui demander s'il est prêt à rechercher avec nous,
entre soldats, après la lutte et dans l'honneur, les moyens de mettre un
terme aux hostilités... » Grâce à Spears, de Gaulle prend
l'avion pour l'Angleterre avec en poche 100.000 francs pris sur les fonds
secrets, dernier cadeau de Paul Reynaud à son protégé... 09h 30 : Couverture
sur alerte avec une patrouille ; lot Legrand (n°312), s/c le Guennec
(n°295) et s/lt Menneglier (n°358). 09h 40 : Couverture
sur alerte du secteur de Saint-Raphaël avec une patrouille simple ; cne
Jacobi (n°229), lt de Rouffignac (n°301) et s/c Chardonnet (n°302). 11h 50 : Couverture
sur alerte avec une patrouille simple ; cne Guerrier (n°313), sgt
Gauthier (n°364) et sgt Pimont (n°330). 17h 50 : Couverture
sur alerte sur Le Luc avec une patrouille simple ; adj Goujon, lt Martin
et sgt Hardouin. 19h 00 : Couverture
sur alerte sur Marseille avec une patrouille simple ; cne Sulerzycki, lt
Baranski et lt Borowski. Les 15 sorties des appareils
du GC III/6 de cette journée seront les dernières de cette funeste « Campagne de France » qui a
vu ses armées être balayées en 5 semaines, son territoire métropolitain
être envahi au 2/3, ses institutions être mises à mal par le vote des pleins
pouvoirs au vieux Maréchal Pétain par des députés défaillants depuis de trop
longues années. Dans l’après-midi les
personnels du III/6 apprennent qu’un armistice est sur le point d’être signé
avec l’Allemagne. De nombreux Groupes de chasse reçoivent l’ordre de
rejoindre Perpignan pour se préparer à traverser la Méditerranée, mais le GC
III/6 a encore pour mission de défendre le Sud-Est de la France contre
l’Italie avec qui l’armistice n’est pas encore d’actualité. ********** |
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Le Général Pennès,
commandant les forces aériennes et les forces terrestres antiaériennes en
Afrique du Nord a reçu le 16 juin par l’instruction personnelle et secrète
(n°3770‑‑3/0 du 16 juin) du Général Vuillemin, Commandant en Chef
des Forces Aériennes Françaises, l’ordre de préparer l’arrivée du plus grand
nombre de groupes de chasse, bombardement et reconnaissance de l’Armée de
l’Air en A.F.N. L’interprétation de cette décision sera, pour l’Histoire,
source de débats inépuisables… Pour la chasse, seuls les
Groupes équipés de Curtiss et de Dewoitine sont aptes à effectuer la
traversée. Au Luc le GC III/6 va être
remplacé par le GC III/9 équipé de Bloch 152 et l’ordre de départ est donné à
l’échelon volant ; il quitte le Luc au grand complet entre 16 et 17
heures « pour se poser en ordre
parfait » (*) à Perpignan La Salanque 1h 20 plus tard, au milieu d’une
concentration d’avions arrivés plus tôt et rassemblés dans le plus grand des
désordres ; plusieurs appareils se sont posés sur le ventre ou ont été
mis en pylône. Les deux jours qui suivent seront consacrés à la préparation
de la traversée de la Méditerranée ; grand saut dans l’inconnu pour des
machines non conçues pour cela et pour des hommes à l’avenir plein
d’incertitude. (*)
Pourtant, dans ses mémoires le sgt Gabard raconte : « … je suis obligé de revenir ayant des problèmes de
carburation. Je me retrouve donc seul au Luc avec mon mécanicien. Celui-ci
réussit à réparer sommairement mon appareil pour me permettre de rejoindre
Perpignan. J’y arrive dans la nuit… j’ai pu récupérer le lendemain un nouvel
appareil en meilleur état avec lequel j’ai traversé la Méditerranée »
(non vérifié). Dans le même temps
l’échelon roulant se prépare à gagner Marseille où il doit être embarqué. Avant de s’envoler,
certains ont pu entendre vraisemblablement l’allocution du Maréchal Pétain
annonçant la demande d’armistice ; aucun bien entendu n’a eu vent à ce
moment de « l’Appel » du général de Gaulle. Les aviateurs qui ont
parlé ou écrit plus tard, avec sérénité, sans tentation de justification, au
sujet de ce qu’était leur état d’esprit à cette époque sont rares ; ce
n’est sans doute qu’après les dernières journées mouvementées et harassantes
de juin pleines d’incertitude, avant que leur situation se stabilise un tant
soit peu sur le terrain d’aviation de Constantine, et l’attaque anglaise de
la flotte française à Mers el Kébir le 3 juillet, que la prise de conscience
de ce qu’ils venaient de vivre a pu se faire. Il y avait au III/6 parmi
les pilotes des polytechniciens, des hommes issus de grandes familles
militaires par tradition, des réservistes, des jeunes boursiers de l’aviation
civile et au sol, de simples sous-officiers et hommes du rang, mécaniciens ou
autres, embarqués dans la guerre sans vraiment s’y attendre... C’était une
époque où l’on suivait les ordres des chefs sans se poser de question et la
préoccupation de son propre devenir n’était pas forcément le moteur des
réflexions individuelles. Faire son devoir avait du sens à cette époque, même
si chacun de débrouillait aussi au jour le jour pour prendre le meilleur de
ce que leur vie leur permettait. |
Page 57 18 juin 1940 – Le Luc en Provence (2) |
Il est probable que si un
chef charismatique au GC III/6 avait décidé pour lui-même de prendre une autre
voie que l’acceptation de l’armistice, il aurait pu entraîner derrière lui
dans la dissidence une partie de ses hommes. Mais ce ne fût pas le cas et
personne aujourd’hui ne devrait se permettre de porter sur ces hommes des
jugements irréfragables ou sans nuances, comme beaucoup le font par
ignorance, sans réflexions, sans analyses, et sans affect. Personne ne
connaissait alors la fin du film, même si un homme d’exception avait décidé
de ce qu’elle serait ; sa vision de l’histoire et son sens de l’honneur
lui indiquèrent le chemin escarpé à prendre pour en arriver là. Les lignes écrites après sa
retraite militaire par le colonel Jean Menneglier, jeune sous-lieutenant issu
de l’Ecole de l’Air en 1940, pilote au GC III/6, sont presque de nature à
clore ce débat : « Il m'est difficile
de retrouver l'état d'esprit dans lequel nous nous trouvions à ce moment-là.
Nous venions de passer une période difficile toute tendue vers le combat que
nous avions à faire, résolus à le mener à bien avec les moyens dont nous disposions
même si nous savions le désavantage important que nous avions en face de
l'ennemi. Même si nous nous attendions à l'issue de cette campagne, ce qui
n'était pas très difficile à la simple écoute des communiqués ou des
nouvelles, nous étions comme assommés. D'un autre côté nous avions une espèce
de lâche soulagement d'être séparés par la mer du territoire où nous venions
de connaître tant de désillusions. L'avenir ne nous apparaissait pas très
nettement et les chances de pouvoir reprendre la lutte étaient nulles pour le
moment, séparés que nous étions de toute source de ravitaillement et de
production. Peut-être avions-nous momentanément besoin d'oublier. Nous étions à Constantine
quand éclata l'affaire de Mers el Kébir. Nous avions entendu dire
que des aviateurs français partaient en Angleterre poursuivre la guerre pour
suivre l'appel du Général de Gaulle que nous connaissions par ouï-dire sans
l'avoir nous-même entendu. C'étaient en général des pilotes qui n'étaient pas
dans des unités combattantes. Aussi l'attaque de la flotte française par
surprise au mouillage dans ce port nous surprit beaucoup et nous indigna. La
radio officielle se déchaîna contre les Anglais… … J'essaie de me
remémorer l'état d'esprit qui était le nôtre à ce moment. Il était certain
que, pour un esprit normalement constitué, la victoire de l'hitlérisme
n'était pas bonne pour nous. Elle était même moralement inacceptable.
L'Angleterre continuait la lutte… … si l'un de nos chefs
nous avait dit : « II faut continuer la lutte en Angleterre »,
nous serions partis avec lui. Nous étions disciplinés, peut-être d'une façon
insuffisamment réfléchie. Nous n'avions pas encore l'expérience, que nous aurions
à la fin de la guerre, de la subordination de notre loyalisme à une certaine
idée de la France et de sa mission et non à nos chefs directs, sauf dans la
mesure où ils se conformaient à cette idée. Bref nous étions prêts à nous
soumettre aux autorités légitimes ou paraissant telles. On nous avait appris
que le soldat ne choisit pas son ennemi et c'était notre règle d'action. Et
puis les critiques du régime de la 3ème République faites par le
gouvernement du Maréchal Pétain ne manquaient pas de fondement. Il devait
bien y avoir une cause à notre défaite qui n'était pas due seulement aux
chars et aux avions allemands. » ********** |
Page 58 SITUATION LE
25 JUIN 1940 |
AVANCE
ALLEMANDE VERS la MÉDITERRANNÉE du 12 au
25 JUIN LIGNE de
FRONT à L’ARMISTICE Après avoir parcouru ou lu ce document n’oubliez pas de revenir
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Hommes du Groupe de Chasse GC III/6 » |
Page 59 18 juin au 11 juillet 1940
– Vers l’A.F.N. et ALGER. |
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