Lieutenant

Clément Jean Marie Pierre CHAZALVIEL

(1919 -1945)

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Clément CHAZALVIEL

 

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Clément CHAZALVIEL vers 1944 (ci dessus)

Patrick CHAZALVIEL en 2005 (ci-dessous)

 

 

 

 

Patrick CHAZALVIEL, arrivé à l’Ecole des Pupilles de l’Air en 1955 à l’âge de 10 ans, est un de nos camarades orphelins qui n’ont pas connu leur père mort glorieusement pour la France pendant ou des suites de la guerre 1939/1945.

 

En 1939, ce jeune aviateur, comme beaucoup d’autres, avait moins de 30 ans. Ceux qui, déjà mariés avant la déclaration de guerre où pendant celle-ci ont eu des enfants avant de disparaître, victime de leur devoir, n’ont probablement pas eu la chance de les prendre souvent dans leur bras…

 

Les mères de ces enfants trop vite orphelins ne connurent leur époux qu’au cours de brèves permissions. À l’âge où leurs fils ou filles furent en mesure de vouloir vraiment savoir qui était leur père, elles n’avaient pas forcément autre chose en mémoire que des souvenirs intimes dont elles n’avaient pas à parler. La carrière militaire de l’homme qui avait trop rapidement partagé leur destinée, quelques dizaines d’années plus tôt, n’était sans doute pour elles que ce qu’elles avaient pu en lire sur son livret militaire…

 

Eveline CHAZALVIEL, a sans doute découvert la vraie histoire militaire de son mari en 1953 quand elle dut avoir entre les mains « l’état des services du lieutenant CHAZALVIEL Pierre, Clément, décédé le 26 novembre 1945 ». C’est en fait une assistante sociale de la caserne Vandame à Lille qui le réclama au ministère de l’air, sans doute pour obtenir de l’administration quelques droits dont elle et ses deux enfants avaient bien besoin. Les pensions de ces veuves furent en effet dérisoires face au sacrifice de leur jeune époux et de la dette que la nation avait envers eux.

 

« L’Ecole des Pupilles de l’Air de Grenoble », en donnant à ces veuves la possibilité de prendre en charge les garçons, et « La Maison des Ailes d’Echouboulains » les filles, à partir de leur sixième, permirent heureusement d’aider un peu ces familles.

 

L’histoire militaire de Clément CHAZALVIEL racontée ci-dessous est donc la transcription fidèle de ce document du 17-07-1946, dans toute sa brutale sécheresse.

 

François Xavier BIBERT (05/2008)

 

Lettre du Sécrétariat d'Etat des Forces Armées - Etats des services de Clément CHAZALVIEL

Etats des Services de Clément CHAZALVIEL - Première page

Lettre d’envoi de l’état général des services

de Clément CHAZALVIEL

Premier feuillet de l’état général des services de Clément CHAZALVIEL

Cliquez sur l’image pour voir les autres feuillets au format PDF ou lire la retranscription ci-dessous

 

Transcription FXB 2006 (xxx si illisible)

 

CHAZALVIEL Clément

Né le 10 juin 1919 –Grenoble – Isère

Fils de Pierre et Marie Segers

Domicilié à Avignon – Vaucluse

Marié le 17-7-41 (autorisation du général commandant l’air au Maroc en date du 14 juin 1941 n°5290/1)

Enfants :

Christiane Marie-Thérèse, née le 22/07/1943 à Tunis (erreur sur le document : lire Ghislaine au lieu de Christiane)

Patrick Jean-Pierre, né le 01/02/1945 à Meknès

 

 

 

 

Désignations des différentes formations

Positions diverses Ecoles

Mission ou le militaire a servi

 

1

 

 

Grades successivement obtenus

 

 

2

 

Dates correspondant à chacune des inscriptions colonnes 1 et 2

 

3

 

 

 

Observations

 

 

 

4

Engagé volontaire pour 8 ans au titre de l’école spéciale militaire de St-Cyr le 21-9-39

2è classe

21-9-39

 

Admis à l’école militaire d’application de l’Armée de l’Air à Versailles le 4-10-1939

 

4-10-39

Breveté observateur le 01/02/1940

Brevet n°6020

Dirigé sur l’école de pilotage n°102 d’Orly le 1-3-40

 

1-3-1940

 

Promu au grade  se sous-lieutenant (A) le 20-3-40

Ss Lieutenant

20-3-40

 

Dirigé sur l’école de pilotage n°102 d’Orly le 1-4-40

 

1-4-40

 

Se replie avec l’Ecole en A.F.N. Embarqué à Port Vendre le 17-6-40

 

17-6-40

 

Débarqué à Oran le 19-6-40 et dirigé sur Mascara où doit stationner l’école

 

19-6-40

 

Mis en congé renouvelable de 30 jours et administré à la Base dépôt de Blida a/c du 1_9-40

 

1-9-40

 

Affecté au groupe de reconnaissance 1/22 à Rabat le 1-12-40

 

1-12-40

 

Désigné pour suivre le stage d’instruction d’officiers observateurs qui a lieu à Rabat a/c du 10-3-41

 

10-3-1941

 

Présent après les cours au GR 1/22 le 15-6-41

 

15-6-41

 

Promu au grade de Lieutenant à compter du 20-3-42

Lieutenant

20-3-42

 

Rayé du contrôle du GR 1/22 a/c du 26-4-42

 

 

 

Affecté au Secteur n°11 à Tunis le 27-4-42

 

27-4-42

 

Affecté au GR 2/33 le 21-2-43

 

21-2-43

 

Fait mouvement de Laghouat sur Biskra le 17-7-43

 

17-7-43

 

Fait mouvement de Biskra sur Souma le 18-7-43

 

18-7-43

Breveté pilote

le 13-08-1943

Brevet n°13 062

Fait mouvement de Souma sur la Murta (Tunisie) le 19-9-43

 

19-9-43

 

Affecté école de Kasba-Tadla (réentraînement au pilotage) le 30-9-43 xxxxx

 

30-9-43

 

Affecté au dépôt des pilotes de Meknès le 10-11-43

 

10-11-43

 

Affecté au dépôt des équipages multimoteurs à Meknès le 22-10-43 (erreur de mois ?)

 

22-10-43

 

Détaché à l’école de Kasba-Tadla par TO N° xx 601/DM M2/EMGA du 29/12/43

 

29-12-43

 

Mis en route sur le C.F.C. de Meknès le 16-4-44

 

16-4-44

 

Détaché Training P47 – Mis en route le 25-5-44

 

25-5-44

 

Affecté au GC 2/3 – Mis en route par le Training le 1-7-44

 

1-7-44

 

Arrivé au GC 2/3 et présent le 8-7-44

 

8-7-44

 

Fait mouvement avec le 2/3 sur la France

Embarqué le 8-9-44

Débarqué le 9-9-44

 

8-9-44

9-9-44

 

Fait mouvement avec le GC 2/3 sur l’Allemagne

Passe la frontière le 20-9-45

 

20-9-45

 

Décédé au cours d’un vol de patrouille le 26-11-45

 

26-11-45

 

R.d.c * du GC 2/3 le 27-11-45

(*Rayé des cadres)

 

27-11-45

 

 

Sur un papier découpé et collé après la rédaction de l’état :

Promu au grade de Chevalier de la légion d’honneur par décret en date du 1/4/46

Prise de rang le 20/11/1945

JO du 18-7-1947

 

 

Date de la cessation du service 27-11-45

Motif de la cessation du service : Décédé

Lieu où le militaire se retire :

Pour les décès, genre de mort et lieu : Décédé en service aérien commandé

L’intéressé bénéficiera de la solde budgétaire visé à l’article ………. de la loi N°………. du ………….. pendant la période du ………… au …………. inclus

 

CERTIFIÉ CONFORME aux pièces et documents du dossier

A Nancy le 17 juillet 1946

Le colonel Gourillon commandant le CRA P201

Signature – Tampon

L’intéressé :

………………….

 

 

 

 

 

Compléments

 

Engagé volontaire en 1939

Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr

Ecole militaire d’application de l’Armée de l’Air à Versailles

 

Clément CHAZALVIEL en 1940

 

Clément CHAZALVIEL en 1940

 

 

 

Groupe de reconnaissance 1/22 –Rabat - 1943

 

André HARTEMANN qui sera Général de corps aérien fut :

 

*   du 01/06/40 au 25/07/40, commandant en second du groupe de reconnaissance 1/22.

 

*   du 25/07/40-01/03/41 commandant du groupe de reconnaissance 1/22.

 

Clément CHAZALVIEL fut donc sous des ordres en 1941 à Rabat

 

Ce groupe de reconnaissance comprenait deux escadrilles, la VB 109 et la VB 125 équipées à cette date de Martin 167.

 

 

Insigne du groupe de reconnaissance  VB 109

Insigne du groupe de reconnaissance VB 125

Insigne de la VB 109

Insigne de la VB 125

Profil du GLEN MARTIN 167

GLEN MARTIN 167

Dimensions :

• Envergure : 18,69m

• Longueur : 14,22m

• Hauteur : 5,01m

 Masse :

• A vide : 4890kg

• Maximale : 7124kg

Performances :

• Vitesse maximale : 489km/h

• Vitesse ascensionnelle : 720m/min

• Autonomie : 1800km

• Plafond opérationnel : 8830m

Motorisation : 2 Pratt & Whitney R-1830-SC-3G de 1065 ch.

Armement : 6 mitrailleuses de 7.5 mm, 800kg de chargement, (bombes de 10 ou 50kg).

 

 

Les carnets de vols de Clément CHAZALVIEL ont disparu. Mais on a retrouvé sa trace par hasard dans un des carnets de vol de l’adjudant-chef Jean JOUQUANT qui fut pilote au GR 1/22 : le 18 août 1941, JOUQUANT, pilote, CHAZALVIEL, observateur, et un dénommé DESALME firent un « essai avion » de 20 minutes sur le Glen Martin 167 n°57, comme le prouve le document ci-dessous :

 

 

Carnet de vol de Jean JOUQUANT

 

Extrait du carnet de vol de l’a/c Jean JOUQUANT – Pilote au GR 1/22 – 1ère escadrille

 

 

 

Ecole de pilotage de KASBA-TADLA – MAROC

texte adapté de http://www.aviation-fr.info/bestof/bestof34.php

 

Cette localité marocaine était située au pied du Moyen Atlas, à 200 km de Casablanca, sur l'oued Oum-Er-Rebia. La région appelée plaine du Tadla, était un lieu aride, froid en hiver, très chaud et sec en été.

 

Il y avait là une petite base aérienne qui avait été créée au cours des années 20 ou 30 pour assurer le stationnement des avions participant à la pacification du Maroc. Ensuite cette base avait été cédée à l'armée de terre, puis, en 1943, le régiment qui l'occupait étant parti en Italie, elle fut rétrocédée à l'armée de l'air.

 

Vue aérienne de KASBA TADLA pendant la guerre

 

Kasba-Tadla pendant la guerre

 

 

Celle-ci y avait alors créé une école de pilotage dans le but de ré entraîner et de breveter les pilotes qui n'avaient pu terminer leurs cours, à Istres, en 1940, par suite de l'armistice conclu avec l'Allemagne.

 

Les événements du 8 novembre 1942 allaient permettre à ces pilotes de reprendre le combat avec des matériels fournis par les alliés.

 

La base comprenait des casernements en dur et, côté technique, quelques hangars et baraquements. La piste était constituée par une vaste surface dépourvue de végétation. En plus de cette piste, nommée "piste centrale", il avait, à quelques distances de Kasba-Tadla, une autre piste appelée "piste sud" comportant quelques hangars en toile.

 

En piste centrale étaient stationnés les avions utilisés pour la reprise en main des pilotes. Ces avions étaient les suivants :

 

- des Morane 315 et 230 ramenés de France en 1940 ; les 315 étaient utilisés pour les tous débuts de l'entraînement alors que les 230 étaient utilisés pour la voltige

 

- des Stamp ; biplan permettant l'accoutumance au vol sur le dos car leur système de carburation permettait un vol prolongé dans cette position

 

- quelques De Havilland Tiger Moth, appelés familièrement "tigres mous".

 

- des Cessna AT17 utilisés pour l'entraînement au vol sur bimoteurs.

 

En piste sud on trouvait :

 

- des Valiant Vultee BT13, avions US utilisés dans les écoles américaines et dont la silhouette rappelait un peu celle du T6.

 

- des Douglas A24, une version entraînement d'avions utilisés par la marine américaine sous le nom de SBD Dauntless.

 

 

 

EXCEPTIONNEL !

Cliquez sur le lien ci-dessous : document PDF

Cours  de  bombardement  en  piqué  de  1944

Retranscription des notes manuscrites de Clément CHAZALVIEL

 

 

 

Les divers avions utilisés à l’école de pilotage de Kasba Tadla

pendant la guerre de 1939/1940

Morane Saulnier 315

Morane Saulnier 230

Stamp

MORANE SAULNIER

315

MORANE SAULNIER

230

STAMP

De Havilland Tiger Moth

Cessna AT17

Valiant Vultee BT 13

DE HAVILLAND

Tiger Moth

CESSNA

 AT17

VALIANT

Vultee BT13

 

Douglas A24

 

 

DOUGLAS

A24

 

 

 

 

Le Groupe de chasse GC II/3 « Dauphiné »

Texte adapté d ehttp://pagesperso-orange.fr/joel.blanc/jallier/gc2_3.html

 

 

Insigne du Groupe" La Fayette"Le 8 juin 1944 le GC II/3, équipé de 24 P-47 atterri sur le terrain d’Atto en corse où il rejoint le GC II/5 "LA FAYETTE" arrivé un mois auparavant, avec qui il forme la 4ème Escadre de Chasse. Le Groupe commence aussitôt à exécuter des missions de bombardement en piqué et de mitraillage en l’Italie, puis sur la France avant de participer à l’appuie du débarquement des alliés sur les côtes sud de la France.

 

Le 7 septembre, le Groupe s’installe à AMBÉRIEU d’où il commence à travailler sur les VOSGES et sur l’ALSACE. C’est la que Clément CHAZALVIEL le rejoint le 9 septembre.

 

 

 

Clément Chazalviel sur son Réoublic P40 Thunderbolt

 

Clément CHAZALVIEL et son REPUBLIC P-47 THUNDERBOLT

 

 

Profil du Républic P40 Thunderbolt

REPUBLIC P-47 THUNDERBOLT

Envergure : 12.43m

Longueur : 11.07 m

Hauteur : 4.50 m

Poids : 4 728 kg

Poids maximum : 7.031 kg

Surface : 28.61 m2

Altitude maximum : NC

Autonomie : 900 km

Vitesse maximum : 760km/h

Vitesse ascensionnelle 7m/min soit 9900 m en13 minutes 14’’

Plafond pratique : 12500m

Vitesse de croisière : 480km/h

Motorisation : 1 Prat&Whitney en R-2800-57 Double Wasp à 18 cylindres en étoile de 2800ch

Armements : 8 mitrailleuses de 12.7mm

 

 

Pendant quelques temps, les avions décollent de LYON BRON, le terrain d’AMBÉRIEU étant impraticable. C’est à cette époque que le Groupe effectue ses premières missions d’appui d’approche des troupes terrestres.

 

En janvier 1945, le Groupe se déplace à LUXEUIL, où les avions sont longtemps bloqués par la neige. C’est la bataille d’ALSACE, avec une flak redoutable pour les pilotes.

 

Mi février le groupe se déplace pour un mois à DÔLE, puis revient à LUXEUIL.

 

En Avril, il s’installe à COLMAR HOUSSEN et effectue toutes ses missions sur l’Allemagne et l’appui rapproché prend une place de plus en plus grande.

 

Sur ce terrain se trouvent à cette époque les groupes de chasse 3/3 Ardennes, le 2/5 La Fayette, le 2/3 Dauphiné tous équipés de REPUBLIC P-47 Thunderbolt dernier modèle, avec verrière de type goutte d'eau.

 

Il y a également deux groupes de reconnaissance, le 1/33 Belfort et le 2/33 Savoie équipés de P-51 Mustang et de P-38 F5B Lighting.

 

Jusqu’à la fin, le Groupe appuya les troupes à terre, chaque pilote exécutant jusqu’à trois sorties par jour.

 

Après la capitulation le groupe reste à COLMAR où il reprend l'instruction aérienne et la vie du temps de Paix, puis se déplace en septembre sur COBLENCE, où il reste en occupation jusqu'au 12 août 1947 avant de faire mouvement sur l'extrême orient. Mais le Lieutenant Clément CHAZALVIEL est déjà tombé, le 26 novembre 1945, six mois après la fin de la guerre…

 

 

 

Registre des accidents aériens de l’Armée de l’Air

Collision des deux P-47 44 33749 et 44.20365

 

 

Citations du Groupe de Chasse II/3 période 1943-1945

 

Citation à l'ordre de l'Armée Aérienne

"Groupe de Chasse de grande classe qui, brillamment conduit au feu tout d'abord par le Commandant BARBIER, puis par le Capitaine MENU, a obtenu des succès remarquables grâce à l'efficacité de ses bombardements et de ses mitraillages, tant sur les arrières de l'ennemi qu'en appui direct des troupes au sol

Au cours de six mois de combat, a pris une part active à la bataille pour l'île d'ELBE et au débarquement allié dans le sud de la France, a par la suite efficacement appuyé, malgré des pertes sévères, l'attaque de la 1ère Armée Française, qui devait ouvrir par la trouée de BELFORT, la route de l'ALSACE et du RHIN.

 

 

Citation à l'ordre de l'Armée Aérienne:

"Groupe de Chasse qui a magnifiquement terminé la campagne. Sous le commandement du Commandant MENU, puis du Capitaine FABRE dit GARRUS a causé de lourdes pertes à l'ennemi battant en retraite. Par l'efficacité de ses pilotes, a magnifiquement appuyé l'offensive de la 1ère Armée Française pour la libération de l'ALSACE et au cours de son avance prodigieuse en ALLEMAGNE, brisant les voies ferrées de l'ennemi, harcelant sans cesses ses communications, bombardant ses dépôts et ses cantonnements au mépris d'une D.C.A. très meurtrière. A exécuté en 5 mois 2000 sorties, totalisant plus de 4000 heures de vol de guerre.

 

Ces citations comportent l'attribution de la Croix de Guerre avec palmes.

 

 

Cliquez sur le lien ci-dessous : document PDF

Journal de marche de la 4ème Escadre de chasse

13 juin 1944 – 8 Mai 1945

 

 

Documents personnels de la famille CHAZALVIEL

 

 

Brevet de pilote d'avions militaires de Clément CHAZALVIEL - Aviation Française d'Afrique

Extrait original du cours de bombardement en piqué de Clément CHAZALVIEL

Diplôme du Brevet militaire d’aptitude aux fonctions de pilote d’avion

Extrait des notes du cours de bombardement en piqué de 1944

 

L’accident de Clément CHAZALVIEL sur son REPUBLIC P47 THUNDERBOLD

26 novembre 1945 – NIEDERMENDING – Allemagne

 

Pupilles de la Nations - Notification d'adption par l'Etat

Avis de décès

Ghislaine et Patrick CHAZALVIEL

Pupilles de la nation

Légion d'honneur de Patrick CHAZALVIEL

Citation à l'ordre de l'Armée de Clément CHAZALVIEL

Mémoire de proposition pour la Légion d’Honneur

Citation à l’ordre de l’Armée aérienne

Citation à l'ordre de l'aviation de chasse de Clément CHAZALVIEL

Citation à l'ordre de l'aviation de chasse de Clément CHAZALVIEL

Citation à l’ordre de l’aviation de chasse

Citation à l’ordre de l’aviation de chasse

 

NOTA : les quatre documents ci-dessus sont signés du capitaine Emmanuel PORODO (Ecole de l’Air 1937), commandant la 1ère escadrille du Groupe de Chasse « Dauphiné »,

dont il est fait état dans ce site sur la page consacré au C.I.C. de Chartres en 1939

 

 

Eveline CHAZALVIELl et ses deux enfants Ghislaine et Patrick en 1955 à l'Ecole des Pupilles de l'Air de Grenoble

Eveline CHAZALVIEL, la maman de Ghislaine, née en 1943 et de Patrick, né en 1945, à l’Ecole des Pupilles de l’Air de Grenoble en mai 1956

(communion solennelle de Patrick)

 

CD de Clément CHAZALVIEL

CD De Clément CHAZALVIEL

CD de Clément CHAZALVIEL

Le CD regroupant tous les documents concernant Clément CHAZALVIEL

© François Xavier BIBERT 2006

 

 

REPUBLIC P40 THUNDERBOLT

 

Le REPUBLIC P-47 THUNDERBOLT

exposé au Musée de l’AIR et de l’ESPACE du Bourget

Photo François-Xavier Bibert - 2006

 

 

 

 

Mise en page et compléments iconographiques : François Xavier BIBERT – Mai 2008

 

 

 

TÉMOIGNAGE

 

QUATRE PETITES HISTOIRES de KASBA-TADLA par un ANCIEN MÉCANICIEN de l’ÉCOLE de PILOTAGE

 

 

Une vieille bécane : Le Morane Saulnier 230.

 

En octobre 1943 l'unité à laquelle j'appartenais fut dissoute. Un matin, un LeO 45 nous emmena, des camarades et moi, à la base de Marrakech, puis, de là, après quelques jours, à Kasba-Tadla. Cette localité marocaine était située au pied du Moyen Atlas, à 200 km de Casablanca, sur l'oued Oum-ErRebia. La région appelée plaine du Tadla, était un lieu aride, froid en hiver, très chaud et sec en été.

 

Il y avait là une petite base aérienne qui avait été créée au cours des années 20 ou 30 pour assurer le stationnement des avions participant à la pacification du Maroc. Ensuite cette base avait été cédée à l'armée de terre, puis, en 1943, le régiment qui l'occupait étant parti en Italie, elle fut rétrocédée à l'armée de l'air. Celle-ci y avait alors créé une école de pilotage dans le but de réentrainer et de breveter les pilotes qui n'avaient pu terminer leurs cours, à Istres, en 1940, par suite de l'armistice conclu avec l'Allemagne. Les événements du 8 novembre 1942 allaient permettre à ces pilotes de reprendre le combat avec des matériels fournis par les alliés.

 

La base comprenait des casernements en dur et, côté technique, quelques hangars et baraquements. La piste était constituée par une vaste surface dépourvue de végétation. En plus de cette piste, nommée "piste centrale", il avait, à quelques distances de Kasba-Tadla, une autre piste appelée "piste sud" comportant quelques hangars en toile.

 

En piste centrale, où je fus affecté, étaient stationnés les avions utilisés pour la reprise en main des pilotes. Ces avions étaient des Morane 315 et 230 ramenés de France en 1940. Les 315 étaient utilisés pour les tous débuts de l'entraînement alors que les 230 étaient utilisés pour la voltige.

 

Lors de mon arrivée on avait sorti du fond d'un hangar un 230 à bout de souffle et je m'étais vu confier la tâche de redonner vie à cet appareil. On ne le destinait pas à faire de la voltige mais simplement à être utilisé comme un 315.

 

Après avoir fait des réparations sur la cellule je m'attelai à la remise en état du moteur. Celui-ci tournait encore mais aurait, en d'autres temps, été ferraillé depuis longtemps. Comme il n'y avait pas de pièces de rechange, puisque l'AFN était coupée de la métropole, je dus aller fouiller dans les recoins oubliés du magasin.

 

Un jour, alors que je faisais tourner le moteur au point fixe, un adjudant, connu pour son langage haut en couleurs, tomba en arrêt devant "mon" avion. Puis il me cria : " Ton bourrin tourne comme une patate chaude dans la gueule d'un flic ! ". Puis il ajouta : " Ca c'est marrant ! J'ai déjà connu ce piège (avion) à Istres en 1937 !".

 

Sur le moteur en étoile du 230, les culbuteurs, ainsi que leurs ressorts et leurs tiges de commande, travaillaient à l'air libre. Ils devaient être lubrifiés, lors des révisions, avec une pompe à graisse. Ayant constaté que ces culbuteurs avaient pris un jeu excessif sur leurs axes je me suis employé à en remplacer les bagues. Il y en avait encore quelques-unes au magasin. Après avoir fait maints travaux et plusieurs points fixes je considérai que l'avion était enfin disponible.

 

Cependant, selon l'usage, un vol d'essai était prévu, avec ma participation. Donc, le lendemain matin, un moniteur fut désigné pour ce vol.

 

Le 230 était, bien entendu, un avion à double commande. Le pilote occupait la place arrière tandis que le stagiaire-pilote, ou le mécano, s'installait à la place avant.

 

Sur tous ces avions il y avait bien longtemps que le dispositif de démarrage pneumatique du moteur était hors service. Par suite, pour la mise en route, nous utilisions la procédure manuelle :

 

1- Après s'être assuré auprès du pilote que le contact était coupé, le mécano faisait un brassage moteur,

2- Puis il se plaçait sur le côté de l'hélice, à environ 3 mètres d'elle et légèrement décalé vers l'avant par rapport à son plan de rotation,

3- Ensuite il interrogeait le pilote : "prêt ?", celui-ci répondait en écho : "prêt !",

4- Alors le mécano s'élançait et, tout en courant, saisissant une pale de l'hélice, passait une compression et criait "contact !",

5- Le pilote répondait "contact ! " puis, joignant le geste à la parole, mettait le contact et actionnait la magnéto de départ (à l'aide d'une manivelle). Le moteur hésitait deux ou trois secondes puis démarrait dans un nuage de fumée d'huile.

 

Revenons maintenant à notre vol d'essai.

 

Le moniteur avait prit sa place à bord du 230. Après la mise en route je pris la mienne. Un camarade retira les cales de roues. Le pilote s'éloigna des hangars, pris de la vitesse et poussant la manette à fond décolla après quelques deux cent mètres. Ensuite il mit le cap sur les montagnes avoisinantes.

 

Après avoir navigué plein sud et pris de l'altitude l'avion se trouva au-dessus d'un vallon verdoyant, contrastant avec la plaine aride du Tadla, et enclavé entre deux chaînes de montagnes. Le 230 survola quelques villages berbères et une vieille forteresse abandonnée. Une rivière aux reflets argentés, l'oued Moulouya, serpentait au fond du vallon. Après vingt minutes de vol le pilote fit demi-tour et suivi le même chemin en sens inverse.

 

A mi-parcours quelque chose vint heurter mon pare brise. C'était une tige de culbuteur qui venait de reprendre sa liberté. Des projections d'huile vinrent obscurcir le pare-brise. Le moteur se mit à vibrer et accusa une perte de puissance. Le pilote compensa immédiatement celle-ci en ouvrant plus largement les gaz, puis il repris de l'altitude et, franchissant la montagne, mis le cap sur Kasba-Tadla ou il atterrit sans encombre.

 

En examinant le moteur je m'aperçut que l'un des cylindres s'était décollé du carter en raison de la rupture de ses goujons de fixation.

 

Sur ordre de l'officier mécanicien l'avion fut remisé définitivement au fond du hangar. Peut-être s'y trouve-t-il encore aujourd'hui ?

 

02/2008 - SOSTENE21

 

 

La vie quotidienne d'un mécanicien à l'école de pilotage de Kasba-Tadla

 

La population civile de Kasba Tadla s'élevait à plusieurs milliers d'habitants avec, parmi eux, quelques dizaines de familles européennes. Les activités principales étaient l'agriculture et l'élevage.

 

L'entrée de la base donnait directement sur la rue principale de ce que l'on aurait pu appeler "le bourg". De part et d'autre de cette rue il y avait une dizaine de cafés, ou de cafés-restaurants, fréquentés surtout par le personnel de la base. La rue débouchait sur une grande place à l'extrémité de laquelle se trouvait une ancienne forteresse qui, par sa façade opposée, dominait l'Oum-er-Rebia.

 

L'effectif de la base se montait à 800 militaires : personnel du commandement et de l'administration, moniteurs-pilotes, stagiaires-pilotes, mécaniciens, auxquels venaient s'ajouter les tirailleurs marocains chargés du service de garde.

 

L'unité de l'armée de terre qui avait occupé les lieux, avant le retour de l'aviation, était partie combattre en Italie. Certaines des familles des officiers et sous-officiers de cette unité étaient restées dans des logements situés à l'intérieur de la base.

 

Je m'étais installé dans une chambre avec quatre autres collègues. L'un d'eux, mécanicien, était originaire de Barcelonnette. Un autre, lui aussi mécanicien, était de Tanger. Les deux autres étaient des stagiaires-pilotes qui venaient du Groupe de Chasse 1/3. L'un était d'Oran et l'autre de Paris.

 

Chaque jour le travail commençait à 8h et se terminait à 12h. Ensuite reprise à 13h. Fin du travail à 19h. En juillet/août les horaires étaient modifiés en raison de la chaleur estivale. Le matin, à 8h30, tous les avions devaient être en vol, sauf ceux indisponibles pour révision. Aux commandes des Morane 315 les stagiaires devaient se réaccoutumer aux diverses phases du pilotage et, parmi elles, à la P.T.S. (Prises de Terrain en S). Il s'agissait d'approcher la piste en faisant une série de lacets comportant des virages relativement serrés. A la sortie du dernier virage l'avion devait se trouver à l'altitude et dans l'axe corrects pour l'atterrissage. Après le 315 c'était le 230 et la voltige.

 

Les stagiaires passaient d'un type d'avion à un autre au fur et à mesure de l'avancement de leur instruction. A la fin du stage, suivant les résultats obtenus, ils allaient continuer leurs cours à Meknès (chasse) ou à Marrakech (bombardement).

 

Dans ma fonction de mécanicien j'avais affaire, comme mes collègues, au manque de pièces de rechange. Cette pénurie concernait, en premier lieu, les bougies d'allumage. Chacun d'entre nous disposait de deux jeux de bougies. L'un de ceux-ci équipait le moteur au départ du matin tandis que l'autre était gardé en réserve.

 

Vers 10h, après cinq ou six décollages, le moteur usé par l'âge ayant encrassé ses bougies, l'avion revenait au hangar. Je remplaçais rapidement les "vieilles" bougies par le jeu de réserve. L'avion repartait tandis que je me mettais en devoir de nettoyer les bougies démontées. Le même scénario se répétant en fin de matinée et dans l'après-midi nous passions une grande partie de notre temps à nettoyer des bougies ou, éventuellement, à en régler les électrodes.

 

Quelques temps après mon arrivée, mon 230 ayant effectué le nombre d'heures de vol prévu entre révisions je dus procéder aux vérifications d'usage, sur la cellule, le moteur, etc. Avant sa remise en service l'avion devait être essayé en vol par un moniteur pilote. Cette opération, baptisée "essai de voilure", consistait à exécuter avec l'appareil un certain nombre de figures de voltige. A cette occasion le mécano pouvait, s'il le désirait, occuper la place disponible. Personne ne reculait devant ce qui était parfois une épreuve difficile pour les estomacs délicats. D'ailleurs pour parer à toute éventualité il nous était recommandé d'emporter une musette destinée à recevoir les rejets éventuels.

 

Je fis donc comme tout le monde.

 

Le pilote, un adjudant-chef, mit les gaz, décolla et prit rapidement de l'altitude. Arrivé à environ 2000m il réduisit complètement le moteur et attendit le décrochage de l'appareil…Celui-ci fit une abattée sur le côté et s'engagea en piqué. Le pilote remit les gaz et fit une remontée rapide. Ensuite il enchaîna avec une série de tonneaux suivie de plusieurs boucles et immelmanns. Je commençais à avoir l'estomac en perdition.

 

Durant ces évolutions le moniteur vit un oiseau de grande taille qui volait au-dessous de nous. Je compris les intentions de l'adjudant-chef mais que pouvais-je faire en faveur de cet oiseau ? Le pilote dépassa celui-ci, puis, poussant sur le manche, exécuta ce que l'on pourrait appeler un immelmann à l'envers. Il fit une demi boucle vers le bas et comme, suite à cette manœuvre, nous étions sur le dos, il fit un demi-tonneau pour se rétablir. Avant que je puisse reprendre mes esprits, il y eut un choc et le pare-brise se couvrit de sang et de plumes. C’en était trop, je dus, à mon grand regret, faire usage de ma musette…

 

L'adjudant-chef mis, enfin, un terme a mon calvaire et ramena l'appareil au terrain. A sa descente d'avion il me dit que tout allait bien. C'était un brin réconfortant mais je dus, en plus du nettoyage du pare-brise, extraire un à un les débris et plumes qui étaient venus s'encastrer entre les ailettes des cylindres…

 

02/2008 - SOSTENE21

 

 

Nos conversations à l'école de pilotage de Kasba-Tadla

 

Les distractions étaient rares à Kasba-Tadla. De temps à autres les repas de fin de stages apportaient quelque animation. Le reste du temps j'allais, après le dîner, m'asseoir dans un café avec les copains de chambre. La conversation allait bon train. Chacun rapportait et commentait les incidents de la journée. L'aviation était bien entendu au centre de la discussion, mais il y avait aussi les potins qui, de bouche à oreille, se propageaient à travers la base. Ceux-ci pouvaient concerner les événements internationaux mais aussi les problèmes internes à la base et, bien souvent, les commérages visant des habitants de la localité, militaires ou civils.

 

Ainsi, par exemple, certains prétendaient avoir vu, au travers des volets d'une chambre du rez-de-chaussée de l'hôtel-restaurant, un adjudant se livrer à certains ébats avec la serveuse de l'établissement. D'après les dires il était nu comme un ver, ce qui était dans l'ordre des choses, mais, curieusement, il avait gardé sa casquette d'adjudant. Et chacun de se poser la question : était-ce pour affirmer son autorité auprès de la dame, ou bien pour assouvir un fantasme cultivé par l'un ou l’autre des participants, ou tout simplement pour cacher une calvitie naissante ? La question reste posée !

 

D'ailleurs les rapporteurs étaient-ils des témoins dignes de foi ? Personne ne pouvait affirmer quoi que ce soit, mais on en parlait quand même.

 

Il faut dire qu'il y avait 800 hommes à la base et quasiment pas de femmes. Il y avait les épouses des militaires de l'armée de terre mais celles-ci restaient, en général, fidèles à leurs maris partis combattre en Italie. Quelques-unes unes, cependant, faisaient exception à cette règle. Une fois leur réputation établie il y avait beaucoup d'amateurs mais peu d'élus.

 

En désespoir de cause il restait deux alternatives : le "quartier réservé" ou bien l'établissement tenu par une femme dénommée "la Mère Blanche". Mais peu se hasardaient en ces lieux pour autre chose que boire un thé ou une limonade. Ceux qui cédaient à la tentation étaient souvent vus, quelques temps après, rasant les murs du côté de l'infirmerie.

 

Tard dans la soirée nous regagnions notre chambre. La conversation reprenait mais, cette fois, il était questions d'événements du passé, souvent plaisants.

 

Périodiquement revenait sur le tapis une histoire dont personne ne pouvait garantir l'authenticité ; sur le Morane 230 les manches à balais des places avant et arrière pouvaient se retirer facilement par simple traction manuelle sur un axe. On racontait qu'un moniteur de l'école d'Istres, avant guerre, avait pour habitude, lorsqu'il jugeait son élève apte à être lâché en solo, de retirer son propre manche et de le jeter par-dessus bord, laissant ainsi à l'élève le soin de poser l'avion. Un jour, un garçon facétieux emporta un deuxième manche avec lui. Lorsque le moniteur jeta son manche l'élève jeta aussi le sien qui n'était, en fait, que le manche supplémentaire. Ce que voyant le moniteur aurait, disait-on, utilisé son parachute pour regagner la terre ferme, tandis que l'élève ramenait l'avion au terrain.

 

Inutile de dire que la véracité de cette histoire n'a jamais été confirmée.

 

Les anciens du groupe de chasse 1/3 évoquaient des souvenirs communs ; la tempête du 3 janvier 41, les virées sur la plage d'Ain-el-Turk, la " marche sur Misserghin ". L'année 42, avec l'arrivée des Américains, n'était pas oubliée.

 

Misserghin était une petite localité située à une dizaine de kilomètres de la base d'Oran-La Sénia. Le commandement avait décrété, durant l'année 1941, que le personnel devait entretenir sa forme physique et, pour cela, il serait dorénavant astreint à faire de la marche, comme dans l'infanterie. Un premier exercice fut organisé. Il s'agissait de faire, avec armes et bagages, le trajet aller et retour La Sénia-Misserghin. Dans cette dernière localité un repas serait servi dans le réfectoire d'un régiment cantonné sur place. Le détachement de l'armée de l'air était commandé par un capitaine du service administratif (celui-ci était, à l'origine, un pilote mais il avait été versé dans un service au sol à cause de son intempérance). A l'aller tout se passa comme prévu mais, à Misserghin, le régiment chargé d'organiser le repas avait mis les petits plats dans les grands. Ce qui devait n'être qu'un repas frugal devint plutôt un "gueuleton" avec vin à discrétion. Le retour à la base fut très problématique. On aurait pu croire que le détachement était perdu, corps et biens. Cependant les participants commencèrent à arriver, d'un pas incertain, individuellement ou par petits groupes. Les retours s'échelonnèrent sur, peut être, deux heures. Il y eut des sanctions ; salle de police ou arrêts de rigueur. L'expérience ne fut pas renouvelée…

 

Outre ces anecdotes se rapportant à la vie militaire, nous évoquions nos vies d'avant guerre, dans nos quartiers ou nos banlieues. Nous pensions à nos parents de qui nous étions sans nouvelles depuis longtemps.

 

Au début de 1944, une note, provenant du commandement de l'armée de l'air en A.F.N., fut affichée au service administratif de la base. Le commandement recherchait des mécaniciens volontaires pour une affectation, comme mécaniciens navigants mitrailleurs, dans des groupes français de bombardiers lourds opérant en Angleterre. Nous fûmes tous volontaires. Nous attendions cela depuis longtemps. . Cependant en raison du manque d'effectifs à la base aucun d'entre nous ne fut agréé.

 

Nos espoirs de participer à la libération de la France s'envolaient.

 

Plus tard, en octobre 1945, ce fut le retour en métropole et à la vie civile...

 

02/2008 - SOSTENE21

 

Du bromure dans le pinard

 

En avril 39 je me suis engagé à l’école des apprentis mécaniciens de l’armée de l’air.

 

A cette époque là, dans toute l'armée française chacun rapportait que du bromure était versé dans le "quart de vin" qui, traditionnellement, accompagnait le repas des militaires. Une chanson s'intitulant Les "bromurés" avait d'ailleurs été composée. Pour des hommes éloignés de leur foyer cette médication aurait eu pour effet, disait-on, de calmer leurs ardeurs érotiques Fallait il accorder un crédit à ces assertions ? La question reste posée !

 

Pour nous, les arpètes, un souci supplémentaire nous minait le corps et l'esprit. Chez tous ces jeunes qui sortaient, pour la plupart, de leur milieu familial, se manifestait une certaine paresse intestinale Pour parer à cette difficulté les autorités médicales faisaient verser un laxatif dans notre nourriture, c'est du moins ce qu'on disait. Quoi qu'il en soit, chaque nuit, notre sommeil était perturbé par des cavalcades incessantes dans les escaliers de l'école et des courses éperdues vers les lieux d'aisance. Les élèves étant pourvus de sabots de bois, le tapage nocturne était insupportable. Détail cocasse, par le plus malheureux des hasards les coureurs ensabotés qui arrivaient au rez-de-chaussée devaient, pour accéder aux WC, pantalon déjà sur les genoux, passer devant l'exaltante devise de Guynemer, inscrite en gros caractères sur le mur ;"FAIRE FACE" !

 

Le dimanche suivant mon arrivée à l'école j'assistais, avec les copains, dans l'amphithéâtre de la base, à la projection d'un film particulièrement captivant qui s'intitulait, je crois, "Le Tigre du Bengale". C'était un classique qui, peut être, de nos jours, termine sa vie, au fond d'un placard, dans les archives de la nouvelle école… J'étais là, à admirer les rondeurs de l'héroïne du film, lorsque je ressentis les premières atteintes du mal qui répandait la déroute dans le camp des apprentis. Je quittai alors précipitamment la salle.

 

Comme il me semblait très aléatoire de chercher des lieux d'aisance sur place je tentai d'atteindre, dans un galop d'enfer, les latrines des casernements situés à environ 500 m de là. Chemin faisant je rencontrais, tout en courant, quelques anciens arpètes qui m'abreuvèrent de sarcasmes. Pas un bosquet, pas une frondaison pour m'arrêter ! Cependant je progressais, mais, au fur et à mesure que j'approchais du but, mon abdomen se faisait de plus en plus pressant…

 

En arrivant sur les lieux de ma supposée délivrance je constatai avec angoisse que toutes les cabines étaient déjà occupées. Une file d'attente s'était formée. Certains ex constipés tambourinaient sans succès sur les portes derrière lesquelles nous entendions des bruits d'apocalypse. Vaincu par l'adversité je fus contraint, à mon corps défendant, comme beaucoup d'autres, à l'abdication de ma dignité et à la débâcle qui s’en suivit.

 

Voilà ce que furent mes piètres débuts dans l'armée de l'air. Tout cela n'a rien de très aéronautique !

 

 

02/2008 - SOSTENE21