Les Hommes du Groupe de Chasse GC III/6

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Annexe II à la page : Le Dewoitine D.520

 

 

Les Dewoitine D.520 dans la Campagne de France

Une journée parmi d’autres pour un Groupe de Chasse de l’Armée de l’Air française…

 

GC I/3

Lundi 14 mai 1940

 

 

Insignes du GC I/3

 

Insignes du Groupe de Chasse GC I/3

1ère escadrille : SPA 88  -  2ème escadrille : SPA 69

 

 

 

 

 

Journée très chargée pour le groupe. Une patrouille d’alerte décolle vers 6h00 et le sergent Albert, après avoir été pris à partie par des Morane du GC III/7, endommage un Do17 qui se pose à 6h30 au nord de Suippes.

 

Dewoitine D.520 n° 105

 

Dewoitine n° 105 – GC I/3 2ème escadrille

Capitaine Bernard CHALLE

 

 

Vers 7h00, une formation de 14 D.520 décolle pour une mission de protection haute d’un groupe de 9 Breguet d’assaut et son escorte composée de MB152 du GC I/8 et de Hurricane britanniques. Arrivés sur secteur, le capitaine Challe et ses équipiers attaquent un peloton de 9 Do17 escortés par des Messerschmitt 109. Un des bombardiers est abattu près de Sedan, mais le capitaine Challe est lui-même touché par un des chasseurs allemand et pose son appareil à Wez-Thuisy, moteur endommagé.

 

 

Dewoitine D.520 n°73

 

Dewoitine n° 73 – GC I/3 2ème escadrille

Sergent André CARRIER

 

Sergent André CARRIER

 

Le sergent André CARRIER

portant autour du cou un foulard brodé avec l’insigne de la 2ème escadrille du GC I/3

SPA 69 – « Tête de chat dans un cercle à fond bleu »

Collection Bernard Philippe

 

 

Au même moment, l’adjudant Carrier est abattu en flamme et tué, vraisemblablement, par l’adjudant-chef Johann Schmid de la I./JG 2. Son avion s’écrase à la limite du territoire de Cheveuges à Frénois dans les Ardennes. Le Lieutenant de Salaberry et l’adjudant Octave abattent chacun un chasseur allemand. Les deux Me109 s’écrasent près de Flize. D’autres pilotes de la 1ère escadrille attaquent un peloton de He111 du I./KG 55 au sud de Sedan sans arriver à en abattre un. Le lieutenant de Salaberry en abat un en collaboration avec des Hurricane du 501 squadron.

 

 

Dewoitine 520 n°115

 

Dewoitine n° 115 – GC I/3 2ème escadrille

Sous-lieutenant Hubert IRUMBERRY De SALABERRY

 

Sous-lieutenant Hubert IRUMBERRY de SALABERRY




Sous-lieutenant Hubert IRUMBERRY de SALABERRY

 

Le sous-lieutenant Hubert IRUMBERRY De SALABERRY

et son carnet d’Emploi du temps de Pilote à Istres en 1935

Album photographique familial

 

 

Entre 12h40 et 13h30, nouvelles sorties ;  RAS si on oublie le canon de l’avion du Sergent  Touret détruit au cours d’un essai de tir par l’engagement simultané de deux obus dans la culasse.

 

Vers 13h30, les sous/lieutenants Potier et Salva attaquent des bombardiers du III./KG 51. Salva en abat un mais Potier est descendu ; il saute en parachute mais le malheureux est mort avant de toucher le sol. L’avion de Salva a été touché aussi. Il raconte :

 

« Une fois de plus, j’appelle le groupe :

 

- Mon hélice est en croix. Moteur grillé.

- Vous avez été touché?

- Moi... non. Mais mon avion, je suppose. Les mitrailleurs tiraient dur.

 

Je pique un peu pour ne pas me mettre en perte de vitesse. Privé de moteur, un avion de chasse ne ressemble que de très loin à un planeur. Je ne vois rien devant moi. Et puis, cette odeur de grillé m’inquiète, ce foutu moteur avait eu la mauvaise idée de prendre feu...

 

-Je crois que je vais m’éjecter.

 

Cette fois, ce n’est pas le commandant Thibaudet qui me répond, mais le capitaine Challe. Je le croyais en mission, du côté de Sedan. J’apprendrai plus tard qu’il vient de rentrer de mission et qu’il se trouve au PC du groupe pour rendre compte. Il me surprend par son ton tendu, véhément.

 

 

SALVA - CHALLE -GC  I/3

 

Sous-lieutenant SALVA

Sous-lieutenant POTIER

Novembre 1939

 

- Les commandes marchent?

- Oui.

- L’avion obéit?

- Oui.

- Pas de flammes?

- Pas pour le moment.

- Ne saute pas!

 

Il me tutoie, ce qu’il ne fait jamais d’ordinaire. Il doit se passer quelque chose de grave.

 

- Pose toi train rentré, droit devant toi n’importe où... mais ne saute pas.

 

Malgré mon étonnement, je ne discute pas. Discipline, discipline...

 

- Bien, mon Capitaine.

 

J’examine le sol, en dessous de moi. Je vole à plus de trois mille mètres, trop haut pour juger de la qualité du terrain, savoir s’il est plat ou non, repérer les obstacles. J’aperçois tout de même un champ qui me semble assez grand... Je ne distingue pas d’arbres trop proches. Après tout, pour me poser train rentré, je n’ai pas besoin de beaucoup de place. La difficulté sera de ne pas manquer le terrain que j’aurai choisi. Sans moteur, je ne posséderai d’aucune possibilité de manoeuvre.

 

- J’aperçois un champ qui devrait faire l’affaire.

- Très bien... En tout cas, ne saute pas. Pose toi avec ton avion.

- Je vais essayer.

 

.... D’abord, à quelle vitesse faut-il voler pour ne pas “décrocher”? Avec le moteur, même au ralenti, l’hélice assure une certaine portance et le Dewoitine tient en l’air aux environs de cent quarante à l’heure, mais avec l’hélice en croix? Sans doute faut-il compter un peu plus. Je cabre un peu pour ralentir et je tâte avec prudence les réactions de mon appareil. Il fait preuve de bonne volonté et j’opte pour cent cinquante pendant la descente avec un ralentissement dans la dernière ligne droite.

 

 

OCTAVE - POTIER - GC I/3

 

Sergent CAUSSAT

Sergent-chef OCTAVE

Novembre 1939

 

Autre question : Les volets d’intrados. Si je les sors tout de suite, ma portance sera meilleure et je pourrais descendre moins vite, mais je vais être obligé d’effectuer des virages serrés. Comment se comportera mon avion, volets sortis et moteur calé, dans ces conditions? Par précaution, je décide de ne pas sortir mes volets.

 

Reste à réussir une prise de terrain en S, partant de trois mille cinq cent mètres, avec un chasseur sans moteur qui ressemble plus à un fer à repasser qu’à un planeur.

 

.... et je commence ; virage serré à droite... ligne droite... virage serré à gauche... ligne droite...

 

La difficulté, c’est que les virages, même serrés, me déportent vers l’avant. Si je ne compense pas, je vais me trouver entraîné au-delà de la lisière du champ que j’ai choisi. Je suis donc obligé de revenir sur mes pas au cours des lignes droites, ce qui place le champ trois quart arrière par rapport à ma marche et je dois me tordre le cou pour ne pas le perdre de vue.

 

- Tout va bien? me demande la voix inquiète de Challe

- Tout va bien... jusqu’à présent.

 

Virage à gauche... ligne droite... virage à droite... ligne droite...

Coup d’oeil à la corolle blanche du parachute de Potier.

 

Deux mille cinq cent mètres... deux mille... mille cinq cent...

..... Mille mètres...

 

A mesure que je me rapproche du sol, ma vision du champ s’améliore et se précise. Il est largement assez long pour mon atterrissage et ses abords me paraissent bien dégagés. De ce côté là, je n’ai aucun souci à me faire. Reste à régler ma descente pour franchir la lisière à quelques mètres d’altitude, je n’aurai pas de moteur pour corriger une erreur éventuelle.

 

- Tout va bien?

 

La radio devient de plus en plus faible. Je serai bientôt trop bas pour que la communication soit possible.

 

- Tout va bien.

 

Huit cent mètres... cinq cent... l’heure de vérité approche. Je n’ai jamais effectué de prise de terrain avec le moteur complètement coupé et, la dernière que j’ai exécutée, avec le moteur ralenti, c’était sur un avion-école qui se posait à cinquante kilomètres à l’heure.

 

-...va bien?

 

La voix de mon chef est presque inaudible.

 

- Tout va bien.

 

J’espère qu’il m’a entendu.

 

Virage à droite... courte ligne droite... il ne faut pas que je m’écarte beaucoup de mon axe d’atterrissage... virage à gauche... courte ligne droite... Un dernier changement de direction pour me placer face au champ. Je ne pourrai pas être en meilleure position. La lisière est là, devant moi, à la bonne distance. Mon moniteur de pilotage serait fier de moi. Je sors mes volets, j’effectue en quelque secondes l’ultime ligne droite. Je franchis la lisière du champ à trois mètres d’altitude. Je vole à la bonne vitesse, je sens que mon Dewoitine va se poser comme une fleur.

 

Tout va tellement bien... Le champ me paraît tellement long, et tellement plat que, à la dernière seconde, je décide de risquer un “vrai atterrissage”. Je sors mon train, j’entends les jambes qui claquent en se mettant en position basse.

 

L’instant d’après, mon avion se pose comme à la parade.

Le Dewoitine est un bon avion.”

 

( Extrait  de « Le temps des cocardes” de P. Salva - . pages 120-122)

 

 

18h00 : nouvelle mission; 8 Dewoitine décollent pour le secteur de Sedan et Alize, et entament un violent combat contre deux patrouilles de Me110 du III./JG 26. Cinq Me110 tomberont près de l’étang de Boiron situé entre Rienne, Willerzie, Lovette-saint-Pierre et Gédinne, victimes des pilotes français.

 

Le bilan de la journée s’élève donc à onze appareils ennemis détruits, mais deux pilotes sont morts (adj Carrier et s/lt Potier), deux D520 sont détruits, un abandonné à Orconte (s/lt Salva), un inutilisable sur le terrain (cne Challe), et quelques autres sont légèrement endommagés….

 

 

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