Rapport du 4ème stage de François-Xavier BIBERT

Elève de seconde année à l’Ecole des Mines de Douai

à la Société Chimique, Routière et d'Entreprise Générale de Pau

Juillet – Août 1967

 

 

Photographies et planches : © F-X. Bibert 1967 – Reproduction interdite

(à l’exception des deux cartes postales couleur de la Pierre Saint-Martin)

 

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Pourquoi la publication de ce rapport de stage de 1967 en 2009 ?

L’Ecole des Mines de Douai formait à cette époque des ingénieurs en 4 ans. Elle était directement gérée par le Ministère de l’Industrie et plus particulièrement par le « Service des Mines de Douai », actuellement la D.R.I.RE. C’était l’Ingénieur en Chef des Mines qui en était officiellement le directeur, mais un sous-directeur, également Ingénieur des Mines, s’en occupait à plein temps. L’internat était obligatoire, tout comme le port de la cravate, et les chaussures cirées… Nous étions déjà dans le monde professionnel, avec 50 heures de cours par semaine et seulement un mois de vacances par an ! Si les cours théoriques n’avaient rien à envier à ceux des écoles plus renommées, 5 stages obligatoires dans l’industrie, étaient répartis sur toute la scolarité pour un total de 11 mois complets. L’école recevait trois fois plus de propositions de stages qu’elle n’en avait besoin et ils étaient généralement bien rémunérés. Après un dépucelage de 4 semaines dans une fosse des Charbonnages de France, à peine après avoir intégré l’école, 3 stages de 2 mois, d’abord en mines puis en métallurgie et enfin dans les travaux-publics, permettaient en troisième année de faire le choix de son option en toute connaissance de cause. Entre la 3ème et la 4ème année, le dernier stage d’été de 4 mois dans l’option choisie concrétisait cette magnifique formation ; c’était un véritable stage de pré-situation. Dès la sortie de l’école, la connaissance du « métier », acquise, aussi bien par les cours en salle que par l’apprentissage et la pratique sur le terrain, permettait, aux jeunes ingénieurs diplômés d’être immédiatement opérationnels. De plus, des cours réguliers d’ « O.S.T », ou « Organisation Scientifique du Travail », dispensés par des professionnels de l’industrie, s’attachaient à bien les préparer aux postes de commandement en leur inculquant des valeurs, bien mises à mal de nos jours, telles que le respect des hommes en général et du personnel ouvrier en particulier…

Diplôme d'Ingénieur de l'Ecole des Minesde Douai

Ce présent rapport de stage est un témoignage de cette époque révolue où la notion de « métier » avait encore un sens, et il donne toute sa force au texte « Métier et Performance : Discours imaginaire à l’usage d’un Vieux Sachant qui n’aurait pas envie de ne dire que quelques banalités lors de son pot de départ en retraite »  qu’on peut lire et relire sans modération sur ce site…

FXB – 05/2009

 

SOMMAIRE

 

 

Présentation de la Société Chimique, Routière et d’Entreprise Générale

Déroulement du stage

Les fabrications

Les chantiers routiers

Micro-chantier du Tonkin

Réfection de la place Clémenceau à Pau

La Pierre Saint-Martin

Bilan de stage

Annexe : Le tremblement de terre d’Arette (texte de 2009)

 

 

ALBUM DE PHOTOGRAPHIES -  PAU – LA PIERRE SAINT-MARTIN – SAINT-JEAN DE LUZ – FXB 1967

 

ALBUM DE CARTES POSTALES ANCIENNES – ARETTE - LA PIERRE SAINT-MARTIN

 

 

La Société Chimique Routière et d'Entreprise Générale

 

 

La Société Chimique Routière et d'Entreprise Générale (S.C.R.E.G.) est la dixième société française de travaux publics.

 

S.C.R.E.G. - 1967

 

Elle est constituée par la réunion des anciennes « Société Chimique et Routière de la Gironde » et « Compagnie Générale de Travaux Publics ».

 

En fait, on a l'habitude de parler du « Groupe S.C.R.E.G. » qui englobe :

 

- la division Chimie-Route de la S.C.R.E.G.

- la division Entreprise Générale de cette même société

- la Société des Mines d'Asphalte du Centre (S.M.A.C.)

- diverses filiales métropolitaines, africaines ainsi que des sociétés suisse, italienne et allemande

- l'Internationale Routière qui reste présente dans 11 pays

 

C'est toute une gamme de travaux qu'effectue aujourd’hui le groupe S.C.R.E.G. dans de nombreux pays :

 

- terrassements de toute nature

- construction de routes, d'aérodromes

- travaux d'assainissement

- génie civil

- constructions industrielles et autres (du pavillon aux grands ensembles)

- galeries souterraines

- étanchéité sous toutes ses formes

- etc.

 

Le groupe occupe environ 9500 personnes.

 

Pour la société Chimique, Routière et d'Entreprise Générale qui nous intéresse particulièrement, le capital est de 27.500.000 F, durée 99 ans, depuis 1936.

 

M. Oscar BLANCHE en est le Présidant Directeur Général.

 

Cette société est spécialisée dans :

 

- les terrassements mécaniques

- le génie rural

- le bâtiment

- l'assainissement

- la distillation de goudrons bruts

- la fabrication de tous liants et de dopes d'adhésivité

- la construction de routes et de pistes d'aérodromes en béton de ciment et en béton noir bitumineux, la stabilisation et le compactage des sols

- la fabrication et le stockage des liants routiers et des émulsions

- les épandages,

- les matériaux enrobés et les bétons bitumineux

- les travaux à la mer en béton bitumineux et en mastic bitumineux

- les chapes souples

- la régénération des routes

- les joints spéciaux pour dalles en béton de ciment

- les travaux de voirie urbaine

- les études complètes de tous les problèmes routiers

- etc.

 

S.C.R.E.G. 1967

 

On trouvera ci-dessous, la liste des principaux travaux exécutés par la société :

 

Division Chimie Route

 

- Bassin minéralier de Dunkerque (en groupement)

- Aérodromes de Solenzara (avec l'Entreprise Raimondi), de Lille-Lesquin (avec la société routière Colas), de Bastia-Poretta, d'AJaccio, de Saint-Nazaire-Montoir ( avec l'entreprise Dodin ), de Bourges, de Strasbourg-Entzheim ( avec l'entreprise Razel ), d'Etain-Rouvres, de Mérignac, de Torp (Norvège), de Djibouti (en groupement)

- Bases aériennes du Bourget, d'Orly

- Camps de la forêt de Chinon (avec l'Entreprise Cochery), des Trois-Fontaines

- Déviations de Saint-Rambert-d'Albon, d'Epônes-Mézières, de Bonneval (en groupement), de Pontacq

- Autoroutes de Normandie et du Sud (en groupement), de Metz-Thionville

- Boulevard périphérique de Paris (avec l'Entreprise Vallet-Saunal)

- Déviations de Melun, de ZUP d'Epernay, de ZUP de St Herblain

- Sahara : Routes de Ghardal'a-Ouargla (en groupement), de Tamanrasset, aérodromes de Ouargla, Colomb-Béchar, Réggane, Noumérath, Ghardai'a

- Cameroun : Route de Douala-Edéa (stabilisation du sol et revêtement)

- Aérodrome de Jagel en Allemagne

- E.D.F. : Aménagement de Jouques, berges d'Oraison (en groupement), de Rhinau, d'Huringue.

 

Division Entreprise Générale

 

- Bâtiments : Construction de 80 logements, tous corps d'état, dépôts de munition base aérienne Etain-Rouvres, construction de 36 logements à Villejuif, du groupe scolaire de Bagneux, de 480 logements à La Rochelle, d’un e hôpital de 100 lits à Croix-Chapeau

- Ouvrages d'art: Rocade entre les ponts de Bordeaux et de Saint-Sauveur à Tours, passage inférieur sur la route express Châlon-Montchanin, dépôt pour la poudrerie nationale du Ripault, gradins au stade de Chalon-sur-Saône, centrale E.D.F Brest-Portzic

 

 

 

La direction régionale de Pau de la S.C.R.E.G.

 

 

La S.C.R.E.G. a son siège social à Paris, 19 rue Brocca, dans le cinquième arrondissement, mais les travaux s'effectuent par l'intermédiaire des directions régionales qui sont implantées un peu dans toute la France, en étant particulièrement denses dans le Sud-Ouest. Il ne faut pas oublier en effet que la S.C.R.E.G. a pour origine l'ancienne Société Chimique et Routière de la GIRONDE.

 

Ainsi, dans le Sud-ouest, nous trouvons des directions régionales à :

 

- Bordeaux : 88, rue Saint-Génies.

- Toulouse : 105, rue de Fenouillet.

- Pau : 58, Avenue G. Lacoste.

 

La direction régionale de Pau est implantée sur un terrain d'environ 3000 m2, loué aux Ponts et Chaussées, dont on peut consulter le plan ci-joint.

 

On trouve sur ce terrain :

 

- Les bureaux,

- Le parc à matériel,

- Les ateliers d'entretien et de réparation,

- L'usine à émulsion (voir plus loin)

 

Ce siège, sert donc de « base de départ » pour tous les chantiers qui sont entrepris dans la région, région qui s'étend de Tarbes à Bayonne sans le département des Basses-Pyrénées.

 

La région est ensuite divisée en quatre secteurs 

 

- Tarbes

- Pau

- Oloron-sainte-Marie

- Bayonne

 

Dans chacune de ces villes un dépôt restreint de la société est installé.

 

Pour compléter cette infrastructure, notons le poste fixe d'enrobage à chaud de Lescar, à 7 Km de Pau, dont on trouvera ici une description, et le poste d'enrobage à froid de Aressy.

 

L'organigramme de la direction régionale de Pau a pour base le découpage géographique de la région par secteurs. Comme cadres, nous trouvons

 

à Pau

 

- Le Directeur régional

- Le chef des services administratifs

- L'ingénieur matériel

- L'ingénieur travaux

- L'ingénieur chef des secteurs Pau et Oloron-Sainte-Marie

- Les conducteurs de travaux de ces secteurs

 

à Tarbes et à Bayonne

 

- L'ingénieur chef de secteur,

- Le conducteur de travaux

 

Chaque conducteur de travaux a en général 4 à 6 chefs de chantier directement sous ses ordres. Ainsi, pour la direction régionale de Pau, une vingtaine de chantiers étaient en cours pendant la campagne d'été 1967. Ces chantiers emploient 120 ouvriers, travaillant à part entière pour la Chimique.

 

 

S.C.R.E.G. Organigramme - Pau  - 1967

 

Organigramme de la direction régionale de la S.C.R.E.G. à Pau

 

 

 

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Programme de stage

 

 

L'arrivée d'un stagiaire en provenance de l'Ecole des Mines de Douai, fut visiblement une surprise pour la direction régionale de la S.C.R.E.G. à Pau.

 

Un programme de stage impromptu fut donc élaboré en toute hâte le jour de son arrivée, qui, malgré les souhaits insistants du stagiaire, ne put correspondre avec les desiderata de la direction de l'Ecole des Mines de Douai.

 

L'optique de la direction régionale semble être de se débarrasser des stagiaires que le siège leur envoie, sans doute contre leur gré, en les promenant sur une multitude de chantiers, sans leur confier la moindre tâche ou responsabilité et ceci sans distinction de la provenance et du parcours préalable du stagiaire et sans analyse des objectifs du stage.

 

L'intérêt que peut présenter un stage de deux mois au point de vue initiation au commandement échappe à la société qui semble ne vouloir courir aucun risque à ce sujet.

 

Le programme proposé n'a pas été suivi. Le stagiaire a pris seul l'initiative et la responsabilité de modifier la durée de son passage sur certains chantiers, ce qui a quelque peu contrarié les responsables de l’entreprise, et ceci pour deux raisons principales :

 

- il est impossible en une semaine de découvrir le mécanisme d'un chantier et d'en analyser son management. De grosses erreurs de jugement peuvent être faites en si peu de temps. De plus, l'Ecole des Mines spécifiait explicitement dans sa circulaire, qu'elle désirait que le stagiaire soit placé sur « un » chantier

- un rapport de stage ne peut être constitué d'une mosaïque de descriptions sans analyses et commentaires. Pour avoir un soupçon de valeur, il doit comprendre l'étude complète et détaillée d'au moins un chantier, même si ce chantier n'est pas d'une importance considérable.

 

C'est pourquoi, le chantier de la Pierre-Saint-Martin, où l'emploi des explosifs pouvait permettre au stagiaire une adaptation rapide, a retenu son attention.

 

Le calendrier réel du stage fut donc le suivant :

 

 

Les fabrications

 

 

10-11 Juillet : Visite de l’usine à émulsion de Pau : rapport ci-joint

 

12-15 Juillet  : Poste d'enrobage à chaud de Lescar : visite et analyses granulométriques.

 

Le stagiaire a profité de son passage au poste d'enrobage à chaud, pour visiter les installations voisines de M. DANIEL (gravière, station de concassage, centrale à béton dont on trouvera aussi une description ci jointe).

Nota : M. Daniel a embauché, avec le grade d'Ingénieur un Douaisien d'une des dernières promotions, M. Skofka.

 

 

Les Chantiers

 

 

Ø Secteur de Pau

 

17-24 Juillet : Tournée des chantiers du secteur de Pau, avec M. Marcellin, conducteur de travaux.

 

Cette période fut la seule pendant laquelle le stagiaire fut en contact constant avec un conducteur de travaux. Le "copinage" souhaité par M. DOUCET, directeur de la Société Colas à Lille et auteur d'un exposé concernant la préparation des stages, fut donc réduit à sa plus simple expression !

Cette période comprend également, la seule matinée qui vit le stagiaire occupé à un travail utile pour la société : 11 découpes dans du carton de gabarits destinés à peindre des numéros sur une chaussée (voir plus loin !!!)

 

Les chantiers suivants furent visités :

 

Hippodrome municipal : Réfection du paddock

 

- Pose de caniveau et bordures en béton coulé sur place

- Pose d'un drain autour du manège de présentation : Creusement de la tranchée avec un  backoe-loader MASSEY-FERGUSSON 250-252

- Revêtement en enrobés

- Terrassement de futures pelouses

 

(voir photos)

 

Pau : Terrassement d'un talus dans le jardin d'une villa, avec un chargeur International 175

 

Tonkin : Tracé des parkings d'un lotissement et numérotation

 

(voir photos et rapport spécifique)

 

Lescar : Terrassement d'un passage supérieur au dessus d'une voie ferrée

 

- Chargement de tout-venant

- Réglage au bull, compactage par RICHIER VR 713 P et rouleau vibrant

- Piquetage et nivellement

 

(voir photos)

 

Beyrie en Béarn : Réfection de chemins  vicinaux, et revêtement dans des cours de ferme

 

- Estimation de devis

- Reflaschage des trous et ornières

- Chargement du 0-40 car camion à benne équipée d'une gravière, réglage par niveleuse GALION, cylindrage.

- Revêtement superficiel tricouche.

 

(voir photos)

 

Buros : Voirie dans un lotissement

 

- pose de bordures et de caniveaux

- revêtement des trottoirs en enrobés

- Pau : Etalement de binder à la niveleuse en sous-couche et cylindrage

- Base militaire : creusement d'une tranchée d'évacuation des eaux à la niveleuse

- Marancy : Voirie dans un futur groupe scolaire

- pose des égouts

- bétonnage des bouches

 

Arzac : Enrobés dans des chemins vicinaux

 

25-29 Juillet : Réfection de la place Clemenceau à Pau.

 

- revêtement par enrobés

- cylindrage et compactage

 

(voir photos et rapport spécifique)

 

 

Ø Secteur d 'Oloron

 

1-19 août : Chantier de la Pierre-Saint-Martin (Arette)

 

Ce chantier intéressant et difficile, fait l’objet d'une étude complète dans ce présent rapport. Les nombreuses photographies jointes devront être consultées pour la compréhension de problèmes nombreux et variés.

 

 

 

Dimanche 13 août 1967 - 23 h07

Tremblement de terre de magnitude 5,6 à la Pierre Saint-Martin

Destruction du village d’Arette dans la vallée à 70%

(voir témoignage en bas de page)

 

 

Ø Secteur de Tarbes

 

21-26 août : Chantier du Benou (Laruns)

 

- Elargissement de la voie du col de Marie-Blanche (9 Km - altitude 1200 m.)

- Empierrement et étalement de 0-40

- Revêtement tricouche superficiel

 

 

Ø Secteur de Bayonne

 

28-31 août : Chantier du Mont Artzamendi (Cambo)

 

- Elargissement de la voie du Mont Artzamendi (10 Km - voie privée des P&T conduisant à un important relais)

- Empierrement et étalement de 0-40

- Passages buses

- Pose de Gabions, talutage

- revêtement tricouche superficiel

 

Matériel nécessaire au chantier

 

- un backoe-loader CASE

- un backoe-loader JCB

- une mini-niveleuse ALLIS-CHALMERS

- un cylindre RICHIER 12 tonnes.

- un cylindre vibrant tandem BOOMAG

- un épandeur RINCHEVAL 1550 litres.

- quatre camions deux ponts.

- une JEEP

- un compresseur HOLMAN

- deux marteaux MONTABERT 25 kg

 

1-2 septembre : Chantier de Gaillat à Bayonne : étalement de tout-venant et réglage à la niveleuse ALLIS-CHALMERS, compactage

 

4-9 septembre : Chantier du C.E.G. à Saint-Jean de Luz

 

- nivellement, implantation, piquetage

- terrassement par SCRAPER 7,4 m3 tracté par un CD 8 RICHARD CONTINENTAL.

 

 

VOIR LA CARTE DES DEPLACEMENTS DU STAGIAIRE

 

 

On notera à l'énumération des chantiers visités par le stagiaire que l'éventail des techniques et des engins découvert a été important et intéressant, mais que les connaissances acquises ont été plus variées qu'approfondies.

 

Dans ce présent rapport, il ne s'agira pas de mal redire ce que l'on peut trouver de bien dans nos cours de travaux publics, mais d'essayer plutôt d'analyser certains travaux, plus sur les plans sécurité, organisation, et rapports hiérarchiques que sur le plan technique.

 

Ce qui sera dit, doit être extrapolé ; un chantier localisé n'étant qu'un moyen de tirer des conclusions peu être plus générales.

 

Le stagiaire prie la Société Chimique, Routière et 'd'Entreprise Générale de Pau de bien vouloir l'excuser, si certaines de ses « analyses » sont peut-être un peu désagréables pour elle. Il sait que « la critique est facile, et que l'art est difficile » mais il regrette sincèrement que ses attributions, fixées par la Société, l'aient cantonné dans un rôle de spectateur. Il était pourtant prêt à franchir la barrière pour prendre le risque d'affronter quelques responsabilités, si elles lui avaient été confiées.

 

La critique de la manière de conduire les chantiers observés par le stagiaire et formulées dans ces quelques pages se veut constructive. Le travail des conducteurs de travaux et des chefs de chantier est peut-être trop lourd pour qu'ils s'attardent sur les points qui ont particulièrement retenu l'attention du stagiaire. Celui-ci, en toute innocence, essaye ici de trouver remède contre ce qu'il considère comme des défauts « d'organisation » dus à la routine presque généralisée que l’on constate dans la manière d’aborder les travaux entrepris et dans les techniques de management.

 

 

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Les Fabrications

 

 

Aucun document n'a pu être consulté pour rédiger ces quelques pages, sans soute parce qu’ils n’existent pas. On ne s'étonnera donc pas de la pauvreté de certaines informations, puisque celles-ci n'ont été transmises que de bouches à oreilles.

 

Les planches jointes ont donc été dessinées par le stagiaire après une simple observation des installations.

 

 

L'Usine à Emulsion de bitume

 

 

Le bitume est un sous-produit du pétrole : Il est obtenu brut dans les raffineries. A 180° il est fluide et c'est à cette température qu'il est transporté. Il ne peut malheureusement pas être employé directement, sans traitement préalable, à cause justement de cette température relativement élevée, et du fait qu'il ne possède alors pas des qualités d'adhérence suffisante.

 

On doit donc le traiter pour remédier à ces différents points et pour diminuer sa viscosité, afin d'obtenir un plus grand étalement. L'opération est simple ; elle consiste à homogénéiser un mélange de bitume et d'émulsifiant.

 

L'émulsifiant est lui même un mélange d'eau, d'acide chlorhydrique (stabilisateur), d'huile anthracénique et de distéronia (produit émulsif). Les proportions de ces différents corps sont invariables.

 

L'émulsifiant et le bitume passent alors dans un homogénéisateur. En faisant varier le rapport émulsifiant/bitume, on obtient diverses qualités d'émulsions :

 

- le 45/55  ( 45% eau – 55% bitume )

- le 40/60  ( 40¨% eau – 60% bitume )

 

Les émulsions sont utilisées en particulier pour constituer des revêtements routiers, par épandage et recouvrement de gravillons. Il est aussi possible de les utiliser comme sous-couche des enrobés (voir plus loin) pour assurer une parfaite adhérence de ceux-ci.

 

Le processus physique qui entraîne un recouvrement parfait des pierres et graviers par le bitume est une rupture d'émulsion : Une partie de l'eau pénètre dans le sol, une autre partie s'évapore et le bitume enrobe alors complètement les matériaux. Cette rupture d'émulsion se caractérise par un virage au noir franc du produit. Le temps de rupture est calculé pour les différents types d'émulsion et est réglementé par des normes des Ponts et Chaussées.

 

Les produits

 

L'huile anthracénique et le distéronia arrivent en fûts métalliques de 200 kg et l'acide, en bonbonne de 50 l. Le bitume est livré dans des camions citerne par une entreprise de transport privée. Il provient de la raffinerie ESSO de Bordeaux. Chargé à 180°, le bitume ne perd que quelques degrés pendant le transport, car il possède un excellent coefficient calorimétrique. Il est stocké dans trois réservoirs verticaux (75 tonnes au total).

 

L'eau utilisée est celle de la ville

 

Le personnel

 

Le personnel employé se compose :

 

- d'un chef de poste

- d'un conducteur de poste

- d'un manoeuvre (entretien, chargement...)

- d'un chauffeur (chaudière au mazout)

 

L'horaire de travail est le suivant : 7 h. - 12 h. - 14 h. - 18 h.

 

Le Processus

 

Le schéma explicatif du fonctionnement des installations est ci-dessous :

 

 

S.C.R.E.G Pau - Usine émulsion de bitume - 1967

 

Synoptique de l’usine de fabrication de émulsion de bitume

 

 

 

L'émulsion est fabriquée par tours de 8,4 t. pour le 55/45 et de 8 t. pour le 40/60. La quantité de bitume nécessaire est prélevée des réservoirs par gravité, pour être envoyée dans une citerne de dosage. L'émulsifiant est préparé dans un bac, et envoyé lui aussi dans une citerne de dosage. Ces produits sont alors chassés par air comprimé dans leur bac respectif, pour alimenter ensuite l'homogénéisateur.

 

Le travail du conducteur de poste consiste à surveiller la régularité du mélange, en agissant sur le débit de l'émulsifiant : Il faut en effet que les bacs de bitume et d'émulsifiant se vident dans le même temps et avec des vitesses respectives constantes.

 

Deux aiguilles se déplaçant le long d'une règle graduée permettent de visionner cette opération. La durée d'un tour de fabrication est alors de 32 minutes.

 

Les proportions admises sont les suivantes :

 

 

 

60/40 (kg)

55/45 (kg)

bitume

4500

4500

huile

225

225

distéronia

17

17

acide

17

17

eau

3650

3250

total

8000

8400

 

 

La production atteint en été 1000 tonnes par mois, mais se trouve extrêmement réduite en hiver.

 

Tous les réservoirs sont continuellement chauffés par circulation d'eau pour maintenir une température, de 160° pour le bitume et de 90° pour l'émulsion, températures assurant une fluidité satisfaisante des produits.

 

Sécurité et organisation

 

Les installations en place ont environ 30 ans d'âge, mais semblent être dans un état de marche et de sécurité satisfaisant. Elles assurent pour le moment les besoins de la société et des autres clients (Ponts et Chaussées et entrepreneurs privés) avec une bonne fiabilité.

 

Malgré tout il faut noter certains inconvénients, tous dus à l'implantation de l'usine :

 

- La situation de l'usine au fond d'une cour étroite constitue un goulot d'étranglement aux heures de pointes. En particulier, la plupart des camions viennent faire le plein vers 7h 30 pour l'ouverture des chantiers ce qui entraîne une attente assez prolongée pour certains d'entre eux aux abords de la bascule (voir schéma ci-dessous).

 

 

S.C.R.E.G. Pau - Schéma d'implantation - 1967

 

Plan d’implantation de l’usine de fabrication de émulsion de bitume

 

 

 

- Les installations elles–mêmes de la S.C.R.E.G. sont mal situées : Seul un pont étroit permet leur accès, et qui plus est, ce pont débouche en biais d’une manière fort dangereuse sur une route très fréquentée puisqu’il s’agit de l’axe Pau-Lourdes (constituant d’ailleurs à cet endroit une partie du célèbre circuit automobile de la ville de Pau).

- La plupart des bacs et tuyauteries de bitume et d'émulsions se trouvent en hauteur, ce qui fait que le danger n'est pas visible. Il y a en effet risque de chute de corps à haute température.

 

Les règles particulières de sécurité imposées aux ouvriers sont :

 

- Port de gants et de lunettes à cause de la manipulation de corps chauds et aux vapeurs d'acide.

- Interdiction de déboucher les réservoirs des camions ; cette tâche doit être effectuée par les chauffeurs eux-mêmes. En effet la vidange de ces réservoirs se faisant à l'air comprimé, on doit s'assurer que la purge en a été préalablement faite pour éviter une projection brutale de ce bouchon, et cette responsabilité ne doit pas être partagée.

 

 

Le Poste d'Enrobage à chaud

 

 

(voir schéma et photos ci-dessous)

 

Les enrobés à chaud sont destinés à constituer un revêtement bitumineux dont la principale utilisation est la confection des chaussées au moyen d'un finisseur.

 

Les enrobés à chaud sont des graviers, portés à une température adéquate, recouverts d'une pellicule de bitume brut. L'adhérence du bitume est obtenue par un pourcentage correct de fillers dans les graviers, réglé par un fuseau granulométrique variable suivant les qualités d'enrobés réclamées. Par refroidissement on obtient un revêtement dur bien connu, puisque la plupart des 700 000 Km de routes françaises en est constituée.

 

Situation

 

Le poste d'enrobage à chaud de la S.C.R.E.G. n'est pas des plus modernes. Les progrès de l'électronique ont conduit ailleurs à des installations fixes ou mobiles d'un automatisme presque intégral. Néanmoins, étant donnés les besoins de la clientèle et la situation privilégiée du poste, il suffit à assurer la production avec un prix de revient finalement assez bas.

 

Ce poste est installé sur un terrain municipal de la commune de Lescar à 7 Km de Pau, et en bordure du Gave. Sur ce même terrain une société privée de dragage et de concassage fournit, presque sans transport, les sables et graviers nécessaires à la S.C.R.E.G. Ce poste de concassage alimente également une centrale à béton ultra moderne appartenant à la Société du Béton Contrôlé du Béarn, dont une description sommaire a été faite plus loin.

 

Infrastructure

 

La description du poste de fabrication des enrobés lui-même se trouve ci-dessous.

 

A coté du poste lui-même, un petit laboratoire est installé dans une baraque de chantier. Il y est possible :

 

- d'analyser les produits bitumineux ( enrobés et aussi émulsions de l'usine de Pau.)

- d'établir les courbes granulométriques

 

Le personnel du poste d'enrobage à chaud se compose :

 

- d'un chef de poste, qui s'occupe également du laboratoire

- d'un chauffeur d'engin (alimentation de l'installation au moyen d'un chargeur sur pneus HOUGH DH 30)

- d'un conducteur de poste (fabrication des enrobés)

- de deux manoeuvres (entretien, travaux annexes, chargement des camions)

 

 

Poste d'enrobés à chaud - Lescar - 1967

 

Poste de fabrication des enrobés à chaud de Lescar

 

 

 

Fabrication des enrobés

 

La fabrication des enrobés se divise en deux parties : Le chauffage des matériaux et le malaxage du mélange bitume et matériaux.

 

 

Chauffage des matériaux

 

Les matériaux provenant de la station de concassage sont stockés par catégories à proximité du point d'alimentation. Il est important de remarquer que les courbes granulométriques établies par la station de concassage sont pratiquement invariables, si bien que les problèmes de dosage sont inexistants. A toutes fins utiles le pré doseur (1) chargé par l'engin (2) pourrait permettre de faire varier ces courbes granulométriques, pour les réajuster. Les produits passent dans un four rotatif horizontal (3) de 10 m de longueur, chauffé par un brûleur au mazout et air pulsé entre 110 et 160°. Les fillers sont aspirés dans un cyclone (4) qui renvoie les plus grosses particules, au moyen d'une vis d'Archimède, à la sortie du four. Les plus fines, sont envoyées dans un exhausteur humide (5) qui expulse ces produits, pour une part dans l'atmosphère, et pour une autre part dans le gave de Pau (8).

 

Si la courbe granulométrique fait apparaître un manque de fillers, il est possible d'additionner de la chaux aux matériaux (5)

 

 

Poste d'enrobés à chaud - Synoptique - Lescar - 1967

 

Synoptique du poste de fabrication des enrobés à chaud de Lescar

 

 

 

Malaxage

 

Les produits portés à 110-160° sont stockés dans la trémie (9). Pour une gâchée, le conducteur de poste charge la quantité désirée de produits dans la trémie peseuse (10) et le bitume, dans un pourcentage adéquat, dans le bitumètre (11). Ce bitume est stocké dans un réservoir chauffant de 27 000 litres (12). Les produits sont envoyés dans le malaxeur (13) qui a pour rôle d'enrober toutes les particules de matériaux d'une couche de bitume. La durée du malaxage est d'environ 1h 30 et varie avec la grosseur des matériaux. Les enrobés sont ensuite stockés dans la trémie (14) de 16 tonnes qui charge directement les camions.

 

 

Poste d'enrobés à chaud - Lescar - 1967

Poste d'enrobés à chaud - Lescar - 1967

Poste de fabrication des enrobés à chaud de Lescar

A droite, l’alimentation du pré-doseur

 

Poste de fabrication des enrobés à chaud de Lescar

Chargement d’un camion

 

 

 

Les différents enrobés

 

Le poste de Lescar est équipé pour la fabrication des enrobés de couleur rouge : Terrains de tennis, trottoirs, etc.

 

La composition des produits pour une gâchée de 500 kg est alors la suivante :

 

- 435 kg de sable 0,2

- 15 kg de chaux 30/00

- 25 kg d’oxyde de fer

- 33 kg de bitume pigmentable

- 1 litre de créosate (le créosate est une substance qui permet de fixer le bitume et de le rendre plus malléable)

 

La fabrication la plus importante est évidemment celle des enrobés noirs. Les différentes grosseurs de matériaux conditionnent le pourcentage de bitume à additionner. En effet, plus les graviers sont petits, plus la surface spécifique augmente : Il faut donc un pourcentage plus élevé de bitume. Les chiffres admis sont les suivants :

 

 

Fuseau granulométrique

Gâchée (kg)

Bitume (%)

0 -10

650 – 700

6

0 -14

650 - 700

5,5

0 -25 (binder)

650 – 700

4 à 5

0 -5

450 – 500

7

 

 

Pour chaque variété d'enrobé un fuseau granulométrique est déterminé.

 

Lors d'une analyse, il faut donc obtenir une courbe granulométrique inscrite dans le fuseau. La courbe ci-dessous montre donc un manque de fillers ; cette courbe devra être remontée par addition de chaux.

 

 

Analyses Granulométriques (voir photos)

 

L'analyse granulométrique est une opération simple mais longue. Son processus est le suivant :

 

- prélèvement d'une certaine masse d'enrobés

- extraction du bitume au moyen d'un extracteur de chantier modèle californien

- distillation de l'eau qui se condense au bas de la colonne réfrigérante où elle est mesurée

- lavage par un solvant (benzol) forcé à l'air comprimé à travers un filtre.

- séchage

- Analyse au moyen d'une série de 6 filtres (normes A.S.T.M.E. : 4,76–2-0,84-0,42- 0,177-0,074). Cette analyse doit se faire par lavage, ce qui augmente la précision, mais aussi la durée de l'opération.

 

 

Laboratoire d'analyses granulométriques - Balance de précision - Colonne de distillation

Filtres pour analyses granulométriques

Laboratoire de chantier à Lescar

On distingue une balance de précision, l’extracteur de chantier

 modèle californien et la colonne de distillation

 

Laboratoire de chantier à Lescar

De haut en bas les coupelles contiennent des matériaux

dont la granulométrie est la suivante :

+ 4,76 mm

2 – 4,76- mm

0,84 – 2 mm

0,42 – 0,84 mm

0,177 – 0,42 mm

0,074 – 0,177 mm

Noter la série des six filtres à la norme A.S.T.M.

 

 

 

Courbe granulométrique d'un enrobé routier

 

 

Destination et Production

 

Les enrobés fabriqués par la S.C.R.E.G. sont évidemment utilisés sur les chantiers de la société, mais ils sont aussi vendus aux entreprises extérieures et aux Ponts et Chaussées.

 

La production est fonction de la saison, puisqu'en hiver le nombre de chantiers ouverts est très faible. Elle est donc maximum en été et atteint 300 tonnes par jour : Pour ce faire les horaires de travail peuvent être considérablement gonflés. La production la plus soutenue est celle des 0-14. Les 0-25 et même les 0-40 (binders) sont utilisés en sous-couche, tandis que les 0-10 ou 0-5 sont utilisés pour des travaux plus fins.

 

Suivant la saison le bitume employé est plus ou moins visqueux, pour permettre de le travailler dans les mêmes conditions malgré les variations de température :

 

- De mars à octobre : Viscosité   80-100

- D'octobre à mars : Viscosité  180-220

 

Par temps de pluie la production est bloquée, puisque toutes les installations sont à l'air libre ainsi que les stocks de matériaux qui sont inemployables s'ils sont trop humides. Le personnel affecté au poste d'enrobage est donc occupé à des travaux d'entretien. Les plaques du malaxeur, en particulier, doivent être changées périodiquement.

 

L'horaire de travail moyen est le suivant : 6 h. - 12 h et 13 h 30 - 18 h.

 

 

La tour à Béton de la Société « Béton Contrôlé du Béarn »

 

 

La centrale à béton a été construite en 1966.

 

 

Centrale à béton - Béton contrôlé du Béarn - Pau - 1967

 

La tour à béton de la Société « Béton contrôlé du Béarn »

1       Trémie à ciment

2       Trémies à matériaux (compartiments)

3       Salle des bascules

4       Malaxeur

5       Poste de commande automatique

6       Point de chargement

7       Convoyeur à bande pour matériaux

 

 

 

Elle comprend quatre parties :

 

Les silos

 

Il y a 8 silos périphériques à matériaux et un silo central à ciment. La répartition granulométrique des différents matériaux lavés ou concassés est la suivante :

 

8/15

0/25

30/60

0/40

15/25

0/14

Variable

variable

 

Les silos à matériaux sont alimentés par un convoyeur à bande ascendant, directement à partir de la station de concassage. Le ciment est pour sa part aspiré à partir des camions citerne qui le livre. Des dispositifs piézométriques indiquent les états des stocks.

 

Les bascules

 

Il y a trois bascules, une pour chaque constituant du béton, c'est à dire les matériaux, le ciment et l'eau.

 

Le malaxeur

 

Le malaxeur assure un mélange homogène de 10 tonnes de béton en quelques minutes, valeur du chargement d'un camion.

 

Le poste de commande

 

Le fonctionnement de la centrale à béton est rendu entièrement automatique par un ordinateur électronique et un jeu de cartes perforées (une carte par variété de béton)

 

L'introduction de la carte perforée dans l'ordinateur assure :

 

- la répartition granulométrique des différents matériaux et leur pesage

- la mesure de la teneur en eau des différents éléments

- le pesage de la quantité d'eau à ajouter, en fonction des mesures précédentes

- le pesage du ciment

- le malaxage

- le chargement du camion

 

Cinq camions équipés d'un malaxeur d’une capacité de 10 tonnes assurent la distribution du béton.

 

Le personnel se compose :

 

- d'un chef de poste dont la fonction est surtout commerciale

- d'un surveillant : Introduction des cartes perforées

- d'un manœuvre : Entretien et lavage des camions au jet à chaque navette, pour éviter toute prise intempestive du béton

 

La production de cette centrale ultra moderne peut atteindre 1000 tonnes/jour, mais elle se trouve en fait limitée par la rotation des camions qui n'est pas toujours continue.

 

 

Anecdote : Les besoins en sable et graviers des entreprises de travaux publics et de construction de la région sont satisfaits par la gravière de Lescar. Les matériaux sont vendus au poids. Les camions sont donc normalement pesés à l’entrée dans la gravière à vide et repesée en charge au départ sur une magnifique et ancienne bascule mécanique Tolédo muni d’un bras de pesée et de contrepoids. Un aimant de 100 grammes placé discrètement au bon endroit et au bon moment sur le fléau peut permettre de fausser de plusieurs centaines de kg le résultat de la pesée. Cette pratique qui semble assez largement connue doit certainement arranger beaucoup de monde, excepté sans doute le propriétaire de la gravière !

 

 

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Visite de quelques chantiers

 

 

Pau - Chantier de la RN 117 - 1967

 

Terrassement d'un passage supérieur au dessus de la voie ferrée

sur la RN 117 à Lescar.

Chargement de tout-venant - - Réglage au bull

Compactage par RICHIER VR 713 P et rouleau vibrant

 

 

 

 

Travaux routiers - Mise en place de la sous-couche

Travaux routiers - Mise en place de la sous-couche

 

Réfection de chemins vicinaux à Beyrie en Béarn

Mise en place de la sous-couche de 0-40 à l’aide d’un camion de 10 tonnes équipé d’une gravière

 

Travaux routiers - Niveleuse

Travaux routiers - Aménagement d'une cour de ferme

Réfection de chemins vicinaux à Beyrie en Béarn

Réglage du 0-40 par une niveleuse GALION

 

Aménagement du chemin privatif d’accès à une ferme

Un portail interdit le passage de la niveleuse et le tout-venant

 doit être étalé à la main.

Ces travaux pour les particuliers, qui vont « profiter » du passage du

 chantier, ne sont pas initialement prévus. Ils sont « négociés » sur place …

 

 

 

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Micro-chantier du Tonkin : Marquage au sol de places de parc de stationnement

 

 

La S.C.R.E.G. a commencé le chantier du Tonkin en 1966. Il s'agissait :

 

- de préparer la construction d'un groupe de trois immeubles (terrassement, égouts, drainage etc.)

- de réaliser les chaussées et les aires de stationnement des voitures aux alentours des immeubles, une fois ceux-ci terminés (pose de bordures et caniveaux, revêtement gravillonné, et aussi pour finir, marquage au sol des places de parking)

 

La matérialisation des places de parking et leur numérotation à la peinture blanche ne présente pas nature à débordements techniques intéressants dans le cadre de ce présent rapport. Néanmoins il est possible d'en tirer un enseignement relatif à :

 

- la spécification des travaux d'une entreprise.

- la préparation et l'organisation d'un chantier, même restreint.

 

L'importance de ce micro-chantier était évidemment extrêmement faible puisque le devis s'élevait à 1500 F. Il s’agissait de tracer 55 lignes blanches de 5m de long sur 0,08m de large, payées 3 F du mètre et de numéroter les places de parc de stationnement ainsi obtenus de 1 à 53, deux places de parcs étant réservées aux visiteurs.

 

Un matin, deux ouvriers furent affectés à ce travail : Un cylindreur et un maçon qui n’avaient jamais eu à se préoccuper de peinture au sol jusque la. Le matériel suivant leur fut fourni avant de les abandonner à leur sort en rase campagne :

 

- 10 kg de peinture blanche ordinaire à 8,60 F. le kg.

-  2 pinceaux.

-  2 litres d'essence.

-  4 rouleaux de 50m de ruban adhésif

 

L’implantation des lignes, déterminée par un plan d'architecte, fut matérialisée par le Conducteur de Travaux. Les ouvriers devaient ensuite, tracer le bord des lignes au cordeau, placer une bande adhésive sur le pourtour et peindre l’intérieur…

 

Dans la matinée, 5 bandes furent terminées ! Au début, tout sembla aller bien, mises à part la difficulté à coller correctement le ruban adhésif sur les gravillons et l'extrême lenteur de ce travail réalisée de manière totalement artisanale. Mais dés que la chaleur se manifesta, l'émulsion se mélangea à la peinture qui n’eut plus de blanc que le nom, les gravillons adhérèrent aux pinceaux, en arrachant les bandes de protection le revêtement gravillonné restait bêtement collé sur ces dernières et la peinture bavait de partout. Un vrai gag !

 

A midi, plus, de 5 Kg de peinture avaient été utilisés, les pinceaux n’avaient plus un poil et l’essence faisait cruellement défaut depuis longtemps !

 

En début d'après midi, après le casse-croûte pris sur place avec les mains pleine de peinture et après avoir attendu le passage du conducteur de travaux, faute de pouvoir se déplacer, une modification de méthode fut décidée après une conférence au sommet : Emploi d'un pistolet à peinture et remplacement des bandes adhésives par des bandes de contreplaqué.

 

Passons sur les détails, mais disons néanmoins que le reste de la journée fut employé à racheter de la peinture, du diluant, à « trouver » des plaques de contre-plaqué adéquates, à emprunter un compresseur à peinture aux  Ponts et Chaussées et à tout ramener sur le chantier…

 

Le lendemain les bandes purent être tracées avec dans des conditions à peu près satisfaisantes. La propreté du travail avait subi une amélioration considérable mais le résultat global restait malgré tout assez médiocre. De plus, la qualité de la peinture employée ne laissait pas une chance de pérennité à cette œuvre mémorable !

 

Pour peindre les chiffres on devait certainement compter sur le sens artistiques de nos deux spécialistes de la peinture car rien n’était prévu pour cela quand ils eurent terminé leur 55 mètres de bandes blanches. Nouvelle intervention du conducteur de travaux. On pensa alors à acheter des gabarits ou à les faire faire par un menuisier, mais où et comment dans des délais raisonnables, alors que le compteur horaire défilait et que la machine à perdre de l’argent était déjà en marche depuis longtemps ? L’heure de gloire du stagiaire était arrivée ! Je proposai timidement de faire moi-même les gabarits dans du carton. Heureux de rentabiliser mes deux ans d’école d’ingénieur et mes cours de dessin industriel, car il faut au moins cela pour savoir faire un gabarit en carton, et pensant déjà à ma future légion d’honneur, car c’est un minimum quand à 22 ans on a le courage de prendre une telle initiative, je me mis donc au travail avec l’aide de la secrétaire du directeur, de chemises de dossier en carton trouvées dans l’armoire aux fournitures et des conseils de tous ceux qui se trouvaient là, heureux d’avoir un divertissement inhabituel pour la fin de l’après-midi…

 

Restons sérieux, et en extrapolant à des chantiers plus importants cette petite fable on peut cependant aboutir à certaines conclusions :

 

 

Spécification d’une Entreprise

 

Si la société avait déjà peint accessoirement des lignes sur des enrobés (surface plane et lisse), cette opération n'avait par contre jamais été faite sur des gravillons, idée de l’architecte totalement déraisonnable de surcroît.

 

On peut se demander d’ailleurs pourquoi accepter un si petit contrat pour le dérangement qu'il entraîne car rien n'est prévu à la société pour une telle opération :

 

- absence de compresseur mobile à peinture

- absence de gabarits pour tracer les chiffres

- aucun ouvrier spécialisé dans ce genre de travail.

 

De ce fait, le Conducteur de travaux se trouve mobilisé pendant des heures précieuses pour lui, pour un véritable bricolage. Les dépenses de main d’œuvre deviennent sans rapport avec ce qu'elles devraient être, des achats de matériel s'avèrent inutiles et les dépenses de matières sont prohibitives…

 

Evidemment une société ne doit pas se laisser envahir par la routine et doit trouver de nouveaux marchés ou de nouvelles gammes de travaux. Dans ce cas, avant d'entreprendre une nouvelle opération, une préparation plus systématique doit être faite, pour que les ingénieurs, les conducteurs de travaux et les chefs d'équipes ne perdent pas trop de temps et ne commandent pas des travaux qui apparaissent plus ou moins ridicules.

 

 

Préparation et organisation des chantiers

 

Il faut donc faire l'étude d'un nouveau travail quel qu’il soit systématiquement et sérieusement. Dans le cas qui nous intéresse on pouvait au moins :

 

- faire un essai préalable

- demander aux agences régionales de la société quelques renseignements au cas où elles auraient la pratique

- être en possession d'un compresseur et de gabarits avant d'engager les travaux et de placer les ouvriers sur le chantier, pour ne pas les mettre ainsi dans en position d'attente.

 

D'autre part, le facteur « publicité » est aussi à prendre en considération. Une société de travaux publics est un commerçant qui travaille aux yeux de tout le monde. Le travail peut être finalement bien fait, mais ne pas paraître rationnel et organisé pendant son exécution. Le client peut avoir l'impression de payer des gens qui brassent un peu trop d'air, et se tournera vers une autre entreprise lors d'un prochain besoin.

 

Dans le cas du présent chantier, le faible montant des travaux, pouvait entraîner un certain désintéressement pour les problèmes qu'ils pouvaient poser. Néanmoins une Entreprise a pour but de gagner de l'argent et non d'en distribuer. Il faut penser qu'il n'y a pas de petits travaux : Les problèmes méritent tous une étude, s'ils doivent être convenablement résolus.

 

 

Travaux routiers - Marquage au sol

Travaux routiers - Marquage au sol

 

Micro chantier du Tonkin

Marquage au sol de places de parking

 

 

Micro chantier du Tonkin

Marquage au sol de places de parking

 

 

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Chaussées en enrobés – Réfection de la place Clemenceau à Pau

 

(voir photos)

 

 

La réfection de la place Clemenceau, en plein centre de Pau, est un bon exemple de travaux publics urbains. Il s'agissait d'étaler un tapis d'enrobés de béton bitumineux 0-14, par dessus un revêtement du même type, en assez bon état, mais fissuré en de nombreux endroits. La caractéristique essentielle de tels travaux est la rapidité avec laquelle ils doivent se dérouler, pour gêner le moins possible la circulation.

 

Les problèmes qu'ils posent sur le plan technique, qu'il est inutile de développer ici, sont les mêmes que pour n'importe quels travaux routiers effectués par la gamme d'engins : Finisseur - cylindre - compacteur. La seule difficulté apparente est de conduire le finisseur et surtout de le régler, pour obtenir le profil adéquat de la chaussée, en respectant la hauteur d'enrobés à étaler. Ceci est l'affaire du spécialiste conduisant l'engin.

 

Sur le plan organisation, par contre, les difficultés sont beaucoup plus considérables : Le tracé tourmenté de la place ne permettait pas au finisseur d'effectuer de longues passes, et une surface assez considérable dut être traitée manuellement. Il y a donc, à la base, un problème de découpage à résoudre pour obtenir une surface traitable par le finisseur maximum. Tenant compte de ce découpage et du problème complexe de la circulation, une répartition chronologique des travaux devait être déterminée dans ses grandes lignes.

 

Le découpage et la répartition étant pensés, les travaux peuvent suivre leur cours sans difficultés particulières, mis à part peut-être :

 

- L'approvisionnement du finisseur en enrobés (problème de rotation des camions.)

- Les relations avec les autorités de la ville (voirie et police) afin d'obtenir une sécurité la plus parfaite possible pour le travail et la circulation automobile.

 

Seuls ces problèmes, feront l'objet d'une étude dans ce présent rapport.

 

 

Infrastructure du chantier

 

 

Matériel en place

 

- 1 camion épandeur de 1500 l.

- 1 finisseur VOGELE 100 H à chenilles.

- 1 cylindre RICHIER RT8  de 8 tonnes.

- 1 compacteur à pneus RICHIER VE 713 P de 17 tonnes.

- 1 cylindre vibrant à main RICHIER V 656 de 450 kg.

 

Personnel

 

A coté les conducteurs d'engins, deux équipes de 5 hommes et leur chef d'équipe, effectuent tous les travaux manuels : Joints, enrobage autour des ronds-points, nettoyage, etc.

 

Horaire

 

Les travaux furent effectués entre le mardi 25 et le vendredi 28 juillet 1967, l'horaire de travail étant le suivant : 6 h - 12 h et  14 h - 19 h, soit 11 heures journalières.

 

 

Approvisionnement en enrobés

 

L'approvisionnement en enrobés est réalisé par des camions de charge utile 10 tonnes, qui chargent au poste d'enrobage à chaud de Lescar. La plupart de ces camions appartient à des transporteurs privés ; ceux de la société sont chargés d'assurer l'équilibre du cycle de chargement.

 

Le problème à résoudre est celui du calcul du nombre de camions à mettre en circulation, en fonction e la distance du chantier au poste de Lescar, et de l'avancement probable du finisseur, pour réduire au minimum :

 

- l'attente des camions au déchargement

- le manque d'enrobés sur le chantier

 

Il faut noter que dans le cas d'un chantier de tracé tourmenté, tel celui de la place Clemenceau, les travaux doivent être localisés au maximum pour ne pas trop gêner la circulation, si bien que l'avance du finisseur se trouve limitée par les surfaces à traiter manuellement, à proximité de la passe en cours : Il est en effet préférable d'avancer ainsi plage par plage pour augmenter la qualité des joints. Ceux-ci sont obtenus par un balayage superficiel qui élimine les matériaux les plus gros, en bouchant avec les fines, les interstices créés autour du joint.

 

De ce fait l'attente des camions se trouve être considérablement augmentée, puisqu'ils vident leur chargement en plusieurs fois, soit directement dans le finisseur, soit aux endroits à traiter manuellement.

 

Il est évident que les attentes ne peuvent être annulées, mais il doit être possible par une petite étude les réduire avec intérêt plutôt que de subir les événements.

 

 

Sécurité et Relation avec les autorités de la ville

 

La rotation des camions paraît être un problème relativement simple à coté de celui de la sécurité du chantier.

 

En effet, la société qui travaille sur une commande des services de la ville, n'est pas complètement maître de sa destinée sur le chantier ; un conducteur de travaux de la ville et divers autres fonctionnaires s'y trouvent en permanence. Pour certain, leur fonction semble être la surveillance des travaux effectués et la collaboration avec les services de police, afin de canaliser la circulation dans les couloirs qui peuvent rester disponibles ou de la dévier provisoirement. Mais beaucoup d’autres semblent n’être que des touristes.

 

D’une façon générale la sécurité de la qualité du travail effectué par la société sont fortement perturbées par les pressions faites par les agents municipaux, responsables ou non, exigeant de rouvrir trop rapidement à la circulation les tronçons de chaussées nouvellement recouvertes.

 

 

Ø Sécurité des travaux

 

Le chantier se présente de la manière suivante :

 

 

Travaux routiers - Cycle des opérations

 

 

Comme signalé plus haut, il faudrait éviter toute circulation de personnes et de véhicules dans la zone de travail, pour les raisons suivantes :

 

- l'émulsion est une substance liquide qui adhère au pneus des voitures et aux chaussures des piétons, et qui peut par leur intermédiaire non seulement souiller les bordures et les dallages de trottoirs, mais aussi les carrelages, parquets ou moquettes des commerces avoisinants…

- sur une telle surface glissante, les risques de chute sont importants ; il n'a jamais été dit que ramasser des grands-pères imprudents ou trop curieux et de les asperger d'essence pour tenter de réparer les dégâts, faisaient partie des attributions des ouvriers des sociétés de travaux publics !

- l'enrobé, réparti, réchauffé et lissé par le finisseur, n'a pas encore une consistance suffisante pour résister aux fortes pressions et les hauts talons y font des dégâts difficile à réparer, sans dire que sa haute température et sa consistance se sont pas sans effets sur les pieds féminins, les chaussures plus où moins excentriques qu’elles portent… et les pattes des chiens errants !

- les pneus des voitures arrachent les graviers superficiels de l'enrobé encore chaud et écrasent la lisière de la couche qui doit être gardée nette pour réussir un joint parfait. Si cette lisière est par trop dégradée, on doit d’ailleurs la reprendre avec un marteau-piqueur à palette, ce qui est une opération pénible et onéreuse,

- le champ de visibilité des conducteurs d'engins (cylindre et compacteur en particulier) est très limité. Ces engins sont dangereux par leurs allées et venues permanentes pour les ouvriers du chantier qui négligent souvent leur présence et surtout pour les piétons qui semblent croire que les chauffeurs sont simplement payés pour les laisser traverser et les regarder passer...

 

Ces quelques remarques mettent en évidence que les services de la ville, aidés par la police, devraient préalablement réfléchir ; en association avec l’Entreprise, à un dispositif de sécurité sérieux et adapté aux travaux urbains.

 

Les quelques jours passés à observer les piétons et les automobilistes me forcent à dire qu'il ne faut pas essayer de construire un système souple, faisant appel à l'intelligence individuelle, mais qu'au contraire, il faut être d'une intransigeance systématique, voire bornée. L'indiscipline du au « chacun pour soi » et « au moi d’abord » qui semble être l’apanage des français font que leur résistance à contourner un obstacle pourtant peu agréable d'aspect, est en effet sans limites... et pourrait faire l'objet de quelques pages humoristiques qui dénatureraient le la nature éminemment sérieuse de ce présent rapport ! En conclusion, seule l'imbécillité humaine peut expliquer ce qu’est la notion d'infini...

 

En fait, il ne suffit pas de placer des écriteaux « Déviation » ; il faut réellement barricader solidement les passages qu’on doit interdire. Demander gentiment de ne pas franchir un ruban de sécurité est une illusion et il faut se résigner à donner maintes explications inutiles et supporter des plaintes geignardes pour que les piéton et les conducteurs moyens se décident enfin à faire trente mètres de plus...

 

Pour éviter les accidents de personnes, pour travailler dans de bonne condition rentabilité, pour éviter d'avoir à réparer à ses frais les dégâts commis par les piétons et les automobilistes et pour assurer une qualité satisfaisante de ses prestations, la société de travaux publics devrait préalablement exiger et obtenir des services de la ville responsables une aide beaucoup plus efficace et responsable.

 

 

Ø Sécurité de la circulation

 

Inversement la société doit s'efforcer d'agir elle-même à chaque moment avec l’optique d’une plus grande sécurité et d’organiser les travaux en recherchant la fluidité maximum de la circulation.

 

Mais est-ce vraiment à elle de poser les panneaux de circulation provisoire, à l’initiative du seul chef d’équipe, entre 6h et 8h du matin le jour de l’ouverture du chantier, alors que les services municipaux et de police sont absents ?

 

D'autres précautions auraient du être prises. Ainsi, une mise en garde aurait du paraître dans la presse locale, pour inciter les gens à ne pas circuler sans motifs valables dans les parages de la place Clemenceau : Les travaux commencèrent visiblement à l'étonnement quasi général de la population.

 

D'autre part l'inertie générale des services de police est assez déconcertante : L'indiscipline et la mauvaise volonté des piétons et des automobilistes ne suffisent pas à expliquer le manque d'initiative, sans doute faute d’ordres de leur hiérarchie, de la plupart des agents de la circulation.

 

Lorsqu'une voie est mise en sens unique par exemple, faire rouler momentanément les voitures sur deux files pourrait augmenter leur débit du trafic.

 

De la même manière, laisser fonctionner les feux tricolores à un croisement où une seule voie est encore en service est un non-sens qui ne semble pas inquiéter qui que se soit !!!

 

Une collaboration étroite et permanente entre les conducteurs de travaux de la société et de la ville seraient donc indispensable pour harmoniser le travail des ouvriers et celui des services d'ordre. Mais il semble que les intérêts des parties divergent puisque l’un n’est que le prestataire et l’autre que le payeur. Chacun pense d’abord à défendre ses intérêts, sans comprendre que ceux-ci seraient les mêmes avec une conception de leurs relations « gagnant-gagnant ». Mais il est sans doute bien dur de faire changer certaines mentalités.

 

 


 

Réfection de la place Clemenceau à Pau  -  Juillet 1967

 

Travaux publics - Finisseur VOGELE - Mise en place des enrobés

Travaux publics - Finisseur - Mise en place des enrobés

 

Finisseur VOGELE 100 H

Sur la plate-forme, deux spécialistes règlent la hauteur de la couche d’enrobées. Pour une hauteur finale de 3 cm, il faut étaler environ 5 cm de produit étant donné le tassement produit par le cylindrage et le compactage

 

 

Finisseur VOGELE 100 H

Notons la vapeur qui dégage : L’enrobé est en effet à environ 120°. Les plaques chauffantes de l’engin permettent de le conserver à température. Le travail du chauffeur et des régleurs est particulièrement pénible

Travaux publics - Place Clémenceau - Pau

Travaux publics - Cylindrage des enrobés - Cylindre vibrant RICHIER

 

Les raccords manuels

«… le tracé tourmenté de la place Clemenceau ne permet pas au finisseur d’effectuer de longues passes et une grande surface doit être traité à la main… »

 

 

Cylindrage – Cylindre vibrant RICHIER V 656

Pour les angles et près des bordures de trottoirs le cylindrage est assuré par un cylindre à main

 

Travaux routiers - Compacteur RICHIER

Travaux publics - Cylindre à main RICHIER

 

Compactage – Compacteur RICHIER VR 713 P

 

 

Cylindrage – Cylindre RICHIER RT8

 

 

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La Pierre saint Martin

 

(voir photos)

 

Plan de situation de La Pierre Saint-MArtin

 

Localisation géographique de La Pierre-Saint-Martin

 

 

 

Sur la frontière espagnole, à la limite du Béarn et du pays Basque, la Pierre Saint Martin, à 80 km. de Pau est un site montagneux, dominée par le pic d'Annie à 2504 m. qui se prête admirablement à la pratique des sports d'hiver à une altitude d'environ 1700 mètres. Rendue célèbre par le gouffre découvert par Lépineux et où Marcel Loubens trouva une mort tragique en 1952, cette station montagnarde en est encore à son tout premier stade de développement. Une route de montagne étroite de 25 km qui longe la rivière le Vert d'Arette, permet d'y accéder à partir du pittoresque village du même nom à l'altitude de 350m.

 

De la station, un chemin de terre conduit au col de la Pierre saint Martin, sur la frontière espagnole ; le gouffre étant situé à une centaine de mètre en contrebas de ce col. La jonction avec l'Espagne est prévue au programme de développement des voies de communications avec ce pays, pour les années à venir. Les seules commodités actuelles consistent en deux hôtels et quelques remonte-pentes. L'électricité et l'eau sont installées, mais par contre aucunes liaisons téléphoniques et postales n'existent encore. Le programme de développement de cette station, prévoit la construction de nombreux groupes collectifs, d'une cinquantaine de chalets particuliers, d'une piscine, d'un stade de glace et de groupes commerciaux. Actuellement les travaux sont poursuivis sur deux fronts :

 

- Elargissement d'une portion de la route existante, qui jusqu'à présent était mise en sens unique pendant la période d'hiver : Montée le matin et descente l'après-midi. Ces travaux sont effectués par les services des Ponts et Chaussées. L'adjudication du revêtement de cette chaussée devrait se faire courant septembre

 -Création d'une route, dans le site même de la Pierre Saint-Martin, pour desservir les futures constructions. Ces travaux sont effectués par la S.C.R.E.G.

 

 

Carte postale - La Pierre Saint-Martin en été - 1967

 

Carte postale - La Pierre Saint-Martin en hiver - 1967

 

 

La Pierre Saint-Martin avant 1967

Tracé de la route à construire entre deux hôtels existants

« Hôtel-relais de la station » et « Hôtel du Pic d’Anie »

 

La Pierre Saint-Martin - Hiver 1966/1967

« Hôtel-relais de la station » à droite

 

 

Nature du chantier

 

La nature du terrain de la Pierre Saint Martin ne se retrouve nulle part ailleurs (voir photos). Il s'agit d'un véritable chaos rocheux, extrêmement crevassé et tourmenté. Le gouffre en est d'ailleurs la preuve, puisqu'il est avec 1150 m. le plus profond du monde connu à ce jour.

 

L'image la plus juste de ce paysage est celle d'un « glacier de Pierre » qui confère au site un aspect plus lunaire que désertique.

 

La consistance de la roche pierre est extrêmement variable, mais celle-ci est en général relativement tendre : Le pourcentage de calcaire y est largement prédominant.

 

La seule végétation existante consiste en quelques pins accrochés aux quelques parcelles de terres rocailleuses insérées dans les nombreuses crevasses de ce pierrier.

 

Les travaux que la Société Chimique et Routière d'Entreprise Générale doit exécuter après soumission et gain de l’appel d’offres consiste pour le début de la campagne 1967 en une route de 7 m. de large et d'environ 750 m. de long, à tracer dans le rocher et passant entre les deux hôtels actuellement existants. Son tracé approximatif est matérialisé sur la carte postale ci-jointe.

 

 

La Pierre Saint-Martin - Chantier été 2976

 

Une partie du chantier S.C.R.E.G. de la Pierre Saint-Martin – Eté 1967

L’« Hôtel du Pic d’Anie » cache l’« Hôtel-relais de la station » où logent les ouvriers du chantier

Le creusement de la route se poursuit vers l’est, en bas à gauche sur cette photographie – Voir carte postale plus haut

 

 

 

Dans ses conditions le foisonnement du rocher doit être effectué à l'explosif et le déblaiement nécessite l'utilisation d'un puissant engin à chenilles.

 

L’adjudication semble avoir été obtenu par la S.C.R.E.G. grâce aux prix très bas qu'elle en a demandé (environ 40% en dessous du chiffre prévu). Cette tactique commerciale aurait eu pour but d'implanter la Société sur le chantier, même au prix d'un déficit, afin de pouvoir se faire adjuger plus facilement les prochaines tranches de travaux.

 

La majeure partie de la route est une voie en déblai avec un profil en travers avoisinant l'horizontale. La partie centrale de la route est en remblai : Sur ces quelques dizaines de mètres, le cubage de matériaux à remblayer se trouve être à peu prés équivalent à celui qui doit être déblayé sur les deux autres tronçons.

 

Notons, que seuls les premiers trente mètres de route sont à flanc de coteau, et ceci dans un terrain très terreux :Il a été procédé ici partiellement en déblai et partiellement en remblai.

 

Les difficultés qui se présentent pour ce chantier sont donc au nombre de trois :

 

1) Difficultés de communication et éloignement de tous les grands centres.

2) Nature du terrain qui rend l'emploi des explosifs difficile, même pour des spécialistes.

3) Transport des matériaux de la partie terminale de la route jusqu'à la partie en remblai.

 

 

Infrastructure du chantier

 

Personnel

 

La S.C.R.E.G. a sous-traité à une petite entreprise spécialisée, la Société BLOUIN, tout le travail de minage.

 

Le personnel est donc réparti dans deux équipes différentes :

 

Ø Société BLOUIN

 

- 1 chef d'équipe

- 5 mineurs

 

Ø S.C.R.E.G.

 

- 1 chef de chantier

- 1 maçon

- 2 manoeuvres

- 1 chauffeur d'engin

 -1 chauffeur de camion

 

Matériel

 

Ø Matériel de minage

 

- 3 compresseurs mobiles (1 HOLMAN , 1 bloc double PEUGEOT, 1 PEUGEOT)

- 3 marteaux-perforateurs MONTABERT de 25 kg.

- 2 marteaux-perforateurs MONTABERT de 17 kg.

-1 wagon-drill ATLAS KANGOUROU

 

Ø Matériel de déblaiement

 

- 1 chargeur International 175 équipé d'un ripper

- 1 camion Berliet à benne de 10 tonnes.

 

Le fuel nécessaire, est stocké dans une citerne des Ponts et Chaussées. Il est -transporté par fût de 200 l. sur le chantier même.

 

L’accord entre les deux sociétés est extrêmement simple : La CHIMIQUE a obtenu 13,50 F. du m3 déplacé et elle paye 6 F. du m3 miné à la société BLOUIN.

 

L'harmonie dans le travail sur le chantier devrait être réalisée par une collaboration étroite entre les deux chefs, puisque le commandement des deux équipes minage et déblaiement est en principe séparé.

 

Nous reviendrons sur le délicat problème de la dualité de commandement car dans le cas de ce présent chantier, il y a quelques problèmes.

 

Le personnel est logé aux frais des sociétés dans un des deux hôtels de la station qui a été ouvert spécialement pendant l'été à l'occasion des travaux.

 

L'horaire de travail est le suivant : 6 h 30  -  12 h (avec 1/2 h de pause) et 13 h 30  -  19 h, soit 10 h 30 par jour ou 60,5 heures par semaine, la semaine se terminant le samedi midi.

 

Les conditions climatiques sont extrêmement variables, mais la station se trouve plus souvent dans les nuages qu'au dessus.

 

 

Déroulement des travaux

 

 

Le minage

 

Ø Foration des trous de mines

 

L'emploi du wagon-drill se trouve limité étant donné la nature du terrain. Après quelques hésitations, l'emploi d'un matériel léger, mais ne permettant que la foration de trous verticaux a été généralisé.

 

A l'avancement, le gros compresseur HOLMAN alimente trois marteaux. Les trous verticaux sont percés sans aucun plan précis de tir, à la profondeur déterminée par les profils fournis par les Ponts et Chaussées, avec une densité moyenne de 1 trou par m2.

 

Cette absence de schéma de tir peut s'expliquer par certains facteurs :

 

- la roche n'est pas compacte, si bien que le fleuret peut déboucher à tout instant dans une cavité ou une crevasse ce qui rend ce trou inutilisable,

le terrain est très tourmenté et des crevasses profondes de plusieurs mètres et d'épaisseur variable (10 à 200 centimètres) traversent la future chaussée,

- les mineurs ne sont pas pour la plupart des spécialistes et certains tiennent des marteaux pour la première fois : Ce sont des bergers ou des gens du pays qui se sont fait embaucher pour la saison,

-le matériel en place ne permet que la foration verticale.

 

Nous reviendrons plus loin sur ces problèmes qui méritent réflexion.

 

Caractéristiques de l’explosif N40

 

Explosif nitraté

Coefficient de puissance :        1,20

Vitesse de détonation :           4400 m/s

Densité de tassement :            1,05

Coefficient de self excitation :  75 mm

Résistance à l'humidité :         1 heure

Fumées formule légèrement sur-oxygénée

 

Explosif très analogue au N0, d'un prix légèrement inférieur, utilisé dans les carrières peu humides. Convient bien aux mines profondes.

 

Trinitrotoluène :        17%

Nitrate d'ammoniaque :   81%

Farine de bois :          2%

Ø Chargement de l’explosif

 

L'explosif utilisé est le N.40 dont on peut trouver les caractéristiques ci-dessous.

 

 

Les explosifs nitratés sont des explosifs de puissance moyenne, de grande sécurité, mais qui comparés aux dynamites sont d'une façon générale moins brisants, plus sensibles à l'humidité et de moindre densité. Par contre, ils sont moins sensibles aux chocs et aux frottements que les dynamites, avec en corollaire une moindre aptitude à transmettre la détonation.

 

Ils sont recherchés pour les roches de dureté moyenne, car ils permettent parfois une économie en raison de leur prix de vente avantageux.

 

Le chargement est évidemment fonction de la profondeur des trous. Ceux-ci varient de 0,8m à 2,40m. On peut ainsi atteindre par endroit 1 kg d’explosif par trou de mine.

 

Le bourrage est constitué par du sable simplement tassé dans le trou au moyen d'un bourroir.

 

 

Ø Tir

 

En général, le tir a lieu tous les jours ou tous les deux jours à l'avancement. On obtient ainsi une centaine de trous qui sont tirés ensemble, ce qui représente 10 à 20 mètres d'avancement pour 50 à 100 kilogrammes d'explosif.

 

Le volume de roche foisonnée est extrêmement variable : Il dépend de la nature du terrain, de la profondeur des trous, des possibilités de dégagement, etc. La moyenne attendue par les responsables de la société BLOUIN est de 5000 m3 par mois.

 

L'amorçage est obtenu par le système classique mèche de sûreté, détonateur et cordeau détonant.

 

La mèche de sûreté est constituée par une fine traînée de poudre serrée dans une sorte de fils de jute et de coton, en rubans ou en fils retordus, qui sont imprégnés de différentes substances donnant une étanchéité plus ou moins grande suivant les usages.

 

Allumée à une de ses extrémités elle a la propriété de brûler avec une grande régularité et de donner finalement à l'autre extrémité, un jet d'étincelles capable de provoquer l'explosion d'un détonateur.

 

Le détonateur est constitué par un petit tube de cuivre ou d'aluminium embouti, renfermant une charge d'explosif très sensible. Au fond de l'embouti est comprimé une charge d'acide picrique, de tétryl ou de tolite et par dessus, une charge de fulminate de mercure ou d'azoture de plomb. Cette dernière charge est protégée par un petit embouti appelé opercule percé en son centre d'un trou qui permet l'allumage de la matière fulminante.

 

Le détonateur, allumé avec une mèche de sécurité, fournit alors en détonant un choc violent accompagné d'un grand dégagement de chaleur, qui provoque la détonation du cordeau détonant, puisque c'est ce système qui est utilisé.

 

Le cordeau détonant agit comme des détonateurs qui seraient placés bout à bout, en une file continue, contre les charges d'explosifs. Amorcé au moyen d'un détonateur, il détone avec une grande violence et une grande vitesse.

 

Il est capable d'amorcer n’importe quelle charge d'explosif placée simplement à son contact.

 

Il présente sur tous les autres modes d'amorçage les avantages suivants :

 

- du fait qu'il permet de supprimer les détonateurs ou les amorces électriques à l'intérieur des trous de mine et parce qu'il est insensible aux chocs et aux frottements, il augmente très considérablement la sécurité

- il procure un meilleur rendement des explosifs qu'il amorce et augmente leur brisance, du fait de l'accroissement de vitesse qu'il permet

- il rend possible l'amorçage simultané d'un nombre illimité de coups de mines

- introduit au fond du trou de mine, il permet d'amorcer simultanément toutes les cartouches constituant la charge et, pour cette raison, il supprime radicalement le danger des cartouches inexplosées projetées dans les déblais ou demeurant dans les culots

- il permet pour la même raison, d'alterner les charges avec des bourrages et de réaliser ainsi une meilleure répartition de l'explosif qui favorise le débitage des matériaux abattus

- il peut être utilisé dans l'eau, car son enveloppe est bien étanche

 

Ce procédé de mise à feu est le seul possible dans les conditions du chantier puisqu'il faut faire exploser un grand nombre de trous à la fois et que la législation interdit l'emploi des amorces électriques en montagne, eu égard au danger représenté par les orages.

 

En plus des mineurs occupés à l'avancement, deux autres mineurs travaillent à l'arrière pour les reprises (élargissement, sautage de gros blocs, etc.). Il a été prévu que 30% du travail de minage devraient être ainsi effectués au titre des reprises.

 

Nous reviendrons plus loin  sur ces différents points.

 

 

Chargement des roches – Nivellement

 

Les caractéristiques de l'engin de chargement INTERNATIONAL HARVESTER 175 utilisé sont données ci-dessous.

 

 

Caractéristiques IH 175 B

 

Puissance au volant au régime nominal (kW) : 89,5 (120 HP)(Puissance du moteur DT-361 mesurée avec ventilateur, filtre à air, génératrice, turbo-compresseur, pompe à eau, pompe à huile et pompe à combustible jusqu'à 1.500 m d'altitude).

Vitesses de déplacement :

                    MARCHE AV        MARCHE AR

POWER SHIFT   GAMME  Km/h   m/mn     km/h   m/mn

1ère           Basse  0-3,4  0-56     0-3.9  0-64

2ème                  0-6,4  0-108    0-7,7  0-128

1ère           Haute  0-4,3  0-72     0-5,2  0-86

2ème                  0-8,4  0-140    0-10,0 0-161

Moteur : Diesel INTERNATIONAL, 4 temps à injection directe, turbocompresseur, démarrage électrique direct.

Nombre de cylindres :                6

Alésage et course :(mm)              104,8 x 114,3

Cylindrée :                          5.916 cm3

Régime nominal avec régulateur       2.400 tr/mn

Vitesse linéaire du piston           9,14 m/s

Régime de couple maximum             1.800 tr/mn

Nombre de paliers                    7

Filtre à air                         type sec

Système électrique : Démarrage direct sous 24 V par bouton poussoir, génératrice 1 5 A, 4 batteries de 6 V/135A.H.

Convertisseur de couple :Simple étage de 305 mm, accouplé à la transmission par l'intermédiaire d'un double joint universel.

Boîte de vitesses : INTERNATIONAL Power-Shift à arbre de renvoi. Les 2 vitesses AV et les 2 vitesses AR sont combinées avec une sélection de gamme haute et basse, soit : 4 vitesses AV et 4 vitesses AR. Graissage sous pression par huile filtrée.

Direction : Planétaire à simple étage et freins multidisques permettant des tournants pivotants ou graduels ; chaque chenille est contrôlée par un levier tombant sous la main. Sa réduction aux planétaires fonctionnant dans l'huile est de 1,26/1. Freinage des deux chenilles par pédale unique pour le ralentissement ou le parking.

 

 

Entraînement final des chenilles : Unité de réduction par planétaires répartissant Ses fortes charges sur un nombre de dents triple.

Le rapport de réduction (à deux étages) est de 15,979 : 1.

Couronne de barbotin démontable sans toucher aux bâtis

de chenilles.

Bâtis de chenilles : De construction monolithique en acier soudé ; montés en avant de l'entraînement final et maintenus en alignement par deux traverses rigides. Un dispositif exclusif de biellettes de compression transmet la poussée finale directement aux carters de barbotins.

Nombre de galets inférieurs de chaque côté       6

Galets supérieurs (sur roulements à rouleaux coniques)

de chaque côté                                   1

Poulie AV tambour, montée sur roulements à rouleaux coniques.

Galets inférieurs, supérieurs et poulie AV graissés à vie.

Chenilles :

Longueur de contact au sol de î'axe du barbotin

à l'axe de la poulie AV                          2,21 m

Largeur des tuiles standard                      38 cm

(largeur maxima sur demande                      40,6 cm)

Tuiles chevauchantes à profil bas et trois nervures.

Nombre de tuiles de chaque côté                  39

Surface de contact au sol                                                          16.840 cm2

Réglage de tension des chenilles entièrement hydraulique

Contenances approximatives : (l).

Système de refroidissement                       38

Réservoir de combustible                         227

Huile moteur, y compris les filtres              11,8

Transmission et bâti arrière                     136

Dimensions générales : (m).

Voie d'axe en axe des chenilles                  1,68

Hauteur hors-tout (sans les superstructures)     2,16

Garde au sol                                     0,45

Barre d’attelage, hauteur du sommet des nervures

des tuiles à l'axe de chape (au choix)           0,49 ou 0,55

 

 

Dimensions générales : (godet 4 en 1 de 1.530 l)

 

Longueur hors-tout, godet en position transport  4,98 m

Largeur hors-tout (largeur du godet)             2.19 m

 

 

 

Godet : (pour matériaux de densité 1,8 foisonné)

Capacité SAE                                     1 530 l

Capacité liquide                                 1 250 l

Nombre de dents                                  9

Poids avec dents                                 1.175 kg

Effort au godet (breakout force)                 16.000 kg

Angle de déversement maximum                     49 ¼

Hauteur hors-tout, godet levé mâchoire ouverte   5,41 m

Hauteur de déversement sous axes du godet        3.40 m

Hauteur de déversement au bord de coupe

de la lame                                       3.33 m

Hauteur de déversement au bord de coupe

du godet à 45°                                   2,62 m

Portée avant, à hauteur maxi, au bord de coupe

de la lame                                       0,95 m

Portée avant, à hauteur maxi, au bord de coupe

du godet à 45°                                   1.32 m

Angle de cavage arrière, godet au sol            43 3/4°

Profondeur de fouille, godet basculé à 10°       38 cm

 

 

Système hydraulique : (du type clos).

 

Pompe à engrenages montée sur Je convertisseur et entraînée

par le moteur.

Débit : 170 l/mn sous 134 kg/cm2 à 1.910 tr/mn.

Distributeur à 3 tiroirs.

Levier de commande des bras : levage, maintien, abaissement, position flottante.

Levier de commande du godet : cavage, maintien, déversement.

Commande de mâchoire : fermeture, maintien, ouverture.

Soupape de dérivation (facultative) pour équipement porté

AR : relevage, maintien, abaissement.

Capacité en huile du système hydraulique         102 l

Vérins  de mâchoires à double effet, alésage et

course (mm)                                      121 x 254

 

 

Poids : (approximatif)

A l’expédition avec équipement régulier

(dont contrepoids de 725 kg)                     13 380 kg

En ordre de marche avec eau et combustible       13.580 kg

 

 

 

Travaux publics - La Pierre Saint-Martin - Chargeur INTERNATIONAL HARVESTER et camion BERLIER

Chargeur INTERNATIONAL HHARVESTER 175

 

 

La Pierre Saint-Martin - Eté 1967

INTERNATIONAL HARVESTER 175 chargeant un camion BERLIET

 

La Pierre Saint-Martin – Eté 1977

François-Xavier BIBERT sur le chargeur INTERNATIONAL HARVESTER 175

 

 

 

 

Cet engin effectue deux travaux distincts :

 

Ø Chargement

 

Les matériaux foisonnés qui doivent être transportés ailleurs sont chargés par l'engin dans la benne d'un camion BERLIET, qui peut transporter ainsi 5 m3 environ.

 

Pour ce faire le chauffeur procède par étapes :

 

- préparation d'un tas de déblais

- préparation par endroit d'une plate-forme permettant les manoeuvres du camion

- chargement proprement dit du camion (environ 5 godets)

 

Ø Nivellement

 

Quand le chargement est terminé, l'engin approche au maximum les cotes définitives de la route. Il faut alors combler les crevasses, curer les parements de la route, répartir en surface les matériaux les plus fins.

 

L'engin effectue ce nivellement également à l'arrière, aux passages où des reprises ont été effectuées.

 

Toute l'habileté d'un conducteur d'engin se mesure dans ce travail de nivellement qui demande une grande pratique de la machine et aussi du profil final de la route.

 

D'autre part l'engin sert de tracteur pour le déplacement des compresseurs ; avant un tir le compresseur d'avancement doit être reculé. Ensuite le chargeur trace un chemin grossier à la surface des roches foisonnées pour l'avancer à nouveau au maximum.

 

De cette manière il n'y a aucune attente à l'avancement, puisque le minage et le déblaiement peuvent être effectués simultanément.

 

Les graphiques ci-dessous tentent de décrire un cycle de travail théorique que l'on peut déterminer seulement après une observation prolongée et attentive du chantier. En effet, en fonction de nombreuses contraintes prévisibles ou non, les cas particuliers sont quasiment plus nombreux que les cas généraux et il est donc assez rare de travailler plusieurs cycles en suivant ce schéma idéal ; le recours au système D est alors nécessaire !

 

 

Travaux publics - Creusement d'une route à l'explosif - Cycle des opérations

 

Cycle de travail théorique sur le chantier de la Pierre Saint-Martin

 

 

 

Travaux annexes et particuliers

 

Le personnel de la S.G.R.E.G. présent sur le chantier s'occupe des travaux annexes. En particulier, le chef de chantier a la charge d'implanter le tracé de la route et de le matérialiser au moyen d'un piquetage et de cotes de nivellement, permettant aux mineurs de connaître exactement la profondeur et l'emplacement des trous à forer.

 

Il y a également quelques passages buses à cimenter dans les lignes d'écoulement des eaux et c'est pour cela qu'un maçon est affecté au chantier.

 

Les manoeuvres quand à eux sont occupés la plupart du temps à des travaux d'entretien : Finissage de la chaussée, purge des parements de la route, étalement des déblais transportés par le camion...

 

Des passages particuliers de la route ont nécessité des travaux spéciaux ; il a fallu par exemple déblayer un chemin grossier pour contourner la partie centrale de la route qui est en remblai pour justement travailler à la partie finale qui fournit ce remblai.

 

Certains passages de grande hauteur ont posé des problèmes spécifiques. Un éperon rocheux de 8m de hauteur sur 10m de longueur qu’il fallait traverser a nécessité une foration particulière avec le wagon-drill et le chargement des matériaux a été extrêmement difficile.

 

Les passages aux abords des hôtels ont du être traités avec une grande précaution pour éviter tout dommage à ceux-ci. Il a fallu tirer mine après mine, avec des quantités de poudre très faibles, ce qui n'a guère contribué à créer un cycle de travail homogène et a eu malgré tout quelques effets désastreux sur les vitres des bâtisses…

 

 

 

 

 

Tous ces facteurs donnent un aspect un peu hétéroclite au chantier, qui se caractérise par l'absence d'un front d'avancement bien déterminé, ce qui surprend un observateur habitué au cycle très régulier du travail en galerie mené par du personnel particulièrement compétent.

 

La quantité de travail nécessitée par les reprises est aussi un aspect surprenant du chantier qui ne s'explique pas uniquement par la qualité du terrain. Bien qui celui-ci ne permette pas de prévoir l'effet exact des tirs, un peu plus de professionnaliste pourrait arranger les choses.

 

Nous allons voir maintenant ce que l'on peut penser de ces divers phénomènes, et analyser les problèmes importants qui se posent.

 

 

Dualité du commandement

 

Le problème est épineux. L'entreprise BLOUIN travaille toute l’année à 60% pour le compte da la S.C.R.E.G. qui lui confie tous ses travaux de foration, y compris en carrière. Aux dires de tout le monde, la présence de ces deux entreprises sur un même chantier ne pose d'habitude aucun problème, le travail s'effectuant dans une harmonie de commandement satisfaisante. Il faut donc mettre les difficultés constatées à la Pierre Saint Martin au compte d'une mauvaise coopération locale des gens en présence.

 

Pour un observateur extérieur, il se passe les phénomènes suivants :

 

- l'entreprise BLOUIN, par l'intermédiaire du chef d'équipe, ne veut forer que le cubage qui lui est payé, c'est à dire, le cubage déterminé par les plans des Ponts et Chaussées qui est le seul mesurable. Vu le faible prix qu'est payée cette foration, cette optique apparaît tout à fait normale.

- le chef de chantier de la S.C.R.E.G., par souci du travail bien fait sans doute, demande constamment une quantité de mètres forés plus importante, soit pour des raisons d'esthétique, de visibilité ou de sécurité dans le travail, en voulant donner une meilleure stabilité à la future chaussée, en foisonnant les roches sous celle-ci, etc. etc.

 

Cette conscience professionnelle est en soi, méritoire, mais les conditions financières très serrées du chantier ne permettent pas trop de fantaisies du moment que le travail commandé est effectué.

 

Ces deux points de vue, ainsi que d'autres petits accrochages, ont fini par aboutir à des contradictions qui ont créé un climat de relations professionnelles tendu, se répercutant sur la qualité et la rapidité du travail.

 

On pourrait croire que la S.G.R.E.G. aurait pu avoir intérêt à effectuer le travail de foration elle-même, pour avoir le chantier bien en main. Mais la présence d'un spécialiste apparaît comme indispensable étant données les conditions particulières du terrain. De toutes les façons, la société ne disposait pas du personnel et du matériel et nécessaires ; le former et l'acheter étaient évidemment du domaine des possibilités mais les amortissements de ces investissements auraient été problématiques.

 

Finalement les difficultés apparaissent bien comme un problème de personnes.

 

La conclusion à tirer, est de savoir que le manque de conscience professionnelle d'un chef de chantier est évidemment catastrophique, mais qu'un excès de celle-ci, virant à l'obsession de la minutie conduit à des abus et à des prétentions non fonctionnelles.

 

Il faut fixer à un chef de chantier ses limites et son champ de responsabilités. S'il est impossible de faire autrement que de lui laisser carte blanche sur certains points précis, il faut être particulièrement sûr de cette personne et malgré tout, lui demander de rendre des comptes exacts.

 

Et d'ailleurs, si un employé est particulièrement génial, il est inutile de le garder comme chef de chantier : Il faut utiliser ses brillantes capacités à un échelon supérieur !

 

 

Problèmes techniques

 

Le déroulement des travaux et leur étude rapide, conduisent à certaines remarques.

 

 

Minage

 

Nous avons déjà dit que le matériel en place  ne permettait que de forer des trous verticaux, de 0,80m, 1,60m et 2,40 m, dimensions des burins existant. Le wagon-drill pour les passages particuliers permet d'obtenir une foration plus profonde.

 

Malgré une quantité de poudre utilisée assez importante, l'effet des tirs est apparu presque toujours inférieur à ce qu'il devait être, même en se référant à la nature extrêmement particulière du terrain.

 

Très souvent, la roche n’est pas suffisamment fragmentée pour permettre un chargement facile au moyen de l'engin et les reprises deviennent alors beaucoup plus complexes.

 

Il faut noter, que l'expérience minière du chef d'équipe de la société BLOUIN, responsable du minage, est uniquement celle des carrières : De ce fait, les problèmes particuliers posés par le chantier de la Pierre Saint-Martin ont nécessité de sa part une certaine improvisation.

 

Le problème à résoudre, est de faire sauter une grande quantité de roches, de forme, de dureté et de structure diverses sans grande continuité. Il est dans ces conditions bien difficile d'énoncer des règles d'utilisation. Pourtant, il est un principe auquel on doit s'attacher constamment : « Créer des dégagements ». En effet un coup de mine a une efficacité maximum que dans la mesure ou il y a pour lui une surface de dégagement suffisante pour contenir le volume de roche qu’il peut abattre.

 

Je pense que ce principe n'est pas suffisamment respecté à la Pierre Saint-Martin. Il faudrait se servir beaucoup plus systématiquement des lignes du terrain naturel, des failles et des crevasses, pour arrêter par exemple le tir sur une de celle-ci en se créant ainsi des surfaces de dégagement privilégiées.

 

D'autre part, il semble possible, malgré la difficulté du terrain de créer des lignes de tir plus régulières toujours par un examen préalable du terrain naturel, en cherchant à suivre les lignes de moindre résistance qu’il est facile d’observer.

 

Quand par chance la roche devient plus compacte, on pourrait sans doute avec profit utiliser des relais à micro-retards à condition d'avoir foré suivant des lignes parallèles d’environ un mètre, pour augmenter artificiellement les surfaces de dégagement de chacune des rangées, en décidant préalablement de la direction du tir au lieu de faire un tir de masse.

 

Le fait de ne forer que verticalement devrait aussi être remis en question ; c'est lui qui est responsable dans une large mesure de la grande quantité de reprises à effectuer.

 

Les trous verticaux foisonnent la roche sur place, en ayant un effet prononcé sur les couches supérieures du terrain. Par contre ils sont responsables des culots important constatés à fond de trou et surtout, ils ne déplacent pas assez la roche abattue : Il ne faut évidemment pas trop la projeter puisqu'elle est nécessaire pour les partie de la route en remblai, mais il faudrait au moins pouvoir la soulever et la fragmenter un peu plus, pour permettre un chargement plus aisé et une diminution notable des reprises. Ceci pourrait être fait en combinant harmonieusement trous verticaux et trous inclinés de relevage. Au moins un marteau léger, équipé d'un simple pousseur pneumatique, pourrait le permettre.

 

Mises à part ces quelques remarques concernant la technique même de la foration, il faut signaler que l'inexpérience des mineurs employés est responsable pour une certaine part, du manque de rendement des explosifs. La répartition des trous est plus due à l'inspiration du moment, qu'à la connaissance des effets qu'elle pourrait avoir.

 

Le bourrage aussi n'est pas suffisamment soigné ; le sable simplement vidé dans les trous de mines n'a qu'un effet restreint surtout si on ne le tasse pas ou que le diamètre du bourroir est largement inférieur à celui du trou. Il faudrait posséder des bourroirs adéquats et éventuellement préparer des sachets de sable dans de la gaine plastique comme cela se pratique en carrière.

 

Un peu plus de soins et de méthode dans les tirs d'avancement pourrait diminuer le nombre des reprises à effectuer, et surtout diminuer considérablement les difficultés de chargement rencontrées en terrain mal foisonné.

 

 

Chargement  - Nivellement

 

L’efficacité et la qualité du chargement et le nivellement dépendent de deux facteurs :

 

- L'adaptation de l'engin

- La compétence du chauffeur

 

Ø L'engin

 

Dans un terrain si difficile sa qualité essentielle réside dans sa maniabilité. L'INTERNATIONAL HARVESTER 175B est suffisamment puissant pour le travail qu'on lui demande, et suffisamment petit pour passer partout, bien que sa force de pénétration en butte soit peu importante et sa rapidité de chargement assez faible.

 

Son adaptation vient du fait qu'il assure pratiquement l'équilibre du cycle de travail vis à vis du minage. L'essai d'un CATERPILLAR 977 a été évidemment concluant d’un point de vue puissance, mais l'engin avait tendance à être trop souvent arrêté par manque de travail et il talonnait d'un peu trop près les mineurs.

 

Rappelons à ce sujet un bon principe d'organisation : « Il est inutile d’utiliser une pelle mécanique quand une simple petite cuiller suffit" » (Detoeuf).

 

Les qualités de l'engin sont une chose, son état de fonctionnement en est une autre. Le chargeur qui a été monté à la Pierre St Martin consomme en moyenne 30 litres d'huile hydraulique par jour à cause des fuites multiples au niveau de vérins et du sertissage des flexibles. Il serait peut être nécessaire, surtout pour des chantiers éloignés et difficiles d'accès, d’affecter un engin en état de marche satisfaisant. Les arrêts trop nombreux dus aux pannes ont certainement pour cause un manque d'entretien général de l'engin. Ils grèvent le budget du chantier, car vu les difficultés de communication il faut un temps assez long avant de voir apparaître un mécanicien, qui ne peut d'ailleurs pas exécuter sur place de trop gros travaux.

 

Ø Le Chauffeur

 

L'adaptation au travail sur un chantier tel que celui de la Pierre St Martin est assez longue pour un chauffeur qui n'a jamais eu l'occasion de manipuler des gros blocs, c'est à dire de travailler en carrière.

 

Suivant l'habileté des chauffeurs, les rendements du chargement peuvent varier du simple au double. Or en quelques semaines, trois chauffeurs différents ont été employé sur le chantier. Dés que leur période d'adaptation était terminée, dés qu'ils semblaient avoir leur engin bien en main, ils étaient envoyés ailleurs pour conduire des engins divers.

 

Il y a certainement de bonnes raisons à ces changements brutaux ; pénurie de chauffeurs, période des congés, etc. mais les conséquences en sont malgré tout désagréables pour le chantier qui n'arrive pas à trouver son rythme et son équilibre vu  les variations aléatoires du rendement des chauffeurs.

 

De plus, dans le cas d'un chantier routier, le travail de nivellement à effectuer est très important. Nous avons déjà dit que ce travail demande de la part du chauffeur une bonne connaissance du profil final de la route. Je pense que le chef de chantier doit à ce sujet laisser le chauffeur organiser son travail lui-même au maximum : Il m'a semblé en effet qu'un chauffeur ayant une personne derrière lui, commandant à tout instant une variation de cap pour rogner tel bloc ou disloquer tel autre, perdait une partie de ses moyens.

 

Le travail du chef de chantier à la Pierre Saint Martin consiste pour une bonne part à matérialiser la chaussée. Il me semble qu'il y ait là un peu de temps perdu ; la matérialisation de la route est faite à la peinture sur son tracé même. Evidemment, dès le tir de mine, ces repères disparaissent, si bien que le travail est à refaire et surtout, le conducteur d'engin se trouve un peu dans le vague pour son nivellement puisqu'il lui faut attendre les ordres du chef de chantier pour savoir où il en est exactement.

 

Cette remarque est valable également pour les reprises, qui semblent être effectuées par endroit en plusieurs étapes parce que justement personne ne sait exactement où doit se trouver la chaussée finale.

 

Un piquetage sérieux et pérenne est donc absolument indispensable, à réaliser par exemple suivant le schéma suivant :

 

 

Piquet de nivellement d'une chaussée

 

 

Celui-ci doit être fait à quelques mètres à l'extérieur de la chaussée pour éviter d'être détérioré à chaque tir de mine. Le cordeau tendu est tiré en travers de la route et indique lorsque l'on en a besoin, sans recours au théodolite et à la complexité de son emploi pour une personne qui en a peu l'habitude, la position finale de la route. En position de repos, ce cordeau est simplement enroulé autour de l'un des piquets.

 

D'autres remarques de moindre, importance pourraient s'ajouter à celles qui viennent d'être faites, en particulier au sujet de la sécurité des différentes opérations concernant le minage. Mais le problème est trop épineux pour se prêter à de grands développements dans un rapport qui ne restera sans doute pas confidentiel.

 

C'est certainement le caractère même du chantier, un peu perdu dans la montagne, à l'abri des regards trop indiscrets qui peut entraîner certaines libertés. Mais tout en sachant que le travail parfait n'existe pas, et que s'il fallait suivre mot pour mot les législations, réglementations, prescriptions ou recommandations administratives, travailler deviendrait pratiquement impossible, certains fondamentaux en manière de sécurité devraient être respectés.

 

 


 

Chantier de la Pierre Saint-Martin – Eté 1967

 

Foration de trous de Mines - Marteau MONTABERT - 1967

Foration de trous de mines - Marteau MONTABERT - 1967

 

Minage à l’avancement

La foration à sec est réalisée au moyen de marteaux MONTABERT. La nature des terrains, ici mise en évidence, est responsable pour une grande part des grandes difficultés rencontrées

 

 

Minage des reprises

Le minage des reprises s’effectue dans un terrain déjà ébranlé, d’où un manque de rendement lors des tirs

Préparation d'un tir de Mines

Tir de Mines

 

4 photos prises au même endroit – N°1

Préparation du tir : Le chef mineur sertit un détonateur à l’extrémité de 60 cm de mèche de sûreté. Dans la zone du tir 250 trous ont été forés pour 150 kg d’explosif.

 

 

4 photos prises au même endroit – N°2

Tir : Les hommes et le matériel sont à une distance relativement courte (100 à 150 mètres)

Résultats d'un  tir de Mines

Creusement d'une route à l'explosif à La Pierre Saint-Martin

 

4 photos prises au même endroit – N°3

Deux minutes après le tir : Une dérivation du cordeau détonnant a été malheureusement défaillante. Situation scabreuse, les mineurs cherchent les cartouches non explosées avant d’envoyer l’engin de chargement. Noter les gros blocs projetés en haut sous les sapins

 

 

4 photos prises au même endroit – N°4

Deux jours après le tir : Le chargeur a déblayé les roches foisonnées et les reprises qui ont été nécessaires. Un tracé grossier de la future route apparaît

 

 

 

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BILAN DE STAGE

 

 

Les travaux publics

 

Le stage intégré dans la scolarité des élèves de seconde année de l'Ecole des Mines de Douai a pour objet de leur « faire découvrir l'industrie des travaux publics » et de leur faire acquérir la «connaissance des attributions et des responsabilités qui s'attachent à l'emploi d’agent de maîtrise ».

 

L'importance de la connaissance du milieu travaux publics pour les élèves réside surtout dans le fait qu'après deux stages miniers et un stage de métallurgie il leur fallait connaître cet autre métier pour avoir en main des éléments de choix objectifs pour les options qui leur sont proposées par l'Ecole.

 

Malheureusement, les travaux publics peuvent se présenter sous des aspects bien différents, et il est difficile après un seul stage de se faire une idée de ce qu'ils sont exactement : Le néophyte pense immédiatement aux grands travaux, à la grosse cavalerie des engins modernes et hétéroclites évoluant sur des chantiers tels que celui du barrage de Serre-Ponçon ou du Mont Cenis, ou aux calculs savants des ouvrages d'art tels que le pont de Tancarville ou de la voûte du Palais de la Défense.

 

Il m'a fallu ce stage pour comprendre que dans la carrière de beaucoup d’ingénieurs des travaux publics, ces gros travaux devaient rester le plus souvent à l'état de rêves utopiques et que la petite routine courante de petits chantiers classiques et anodins devait être plutôt la règle.

 

Je ne parlerai ici que des travaux routiers puisque ce sont quasiment les seuls que j'ai pu observer à Pau.

 

Il y a deux types de travaux routiers : Les travaux neufs et les réfections.

 

 

Les travaux neufs

 

Il s'agit d'ouvrir une ou des routes en terrain vierge. C'est le cas en particulier des autoroutes, des nouvelles routes, des déviations destinées à contourner une agglomération ou alors, des implantations de lotissements.

 

Les opérations suivantes sont en général effectuées :

 

- Implantation

- Terrassement grossier, piquetage

- Travaux de voirie : Egouts, drains...

- Pose de bordures, de caniveaux, de bouches d'égout (pour les lotissements)

- Passages busées

- Empierrement par du tout-venant

- Réglage définitif par 0-40

- Cylindrage, compactage

- Revêtement par enrobés ou revêtement superficiel tricouche

- etc.

 

Pour réaliser ces différents travaux, les engins et les matériels suivant peuvent être nécessaires :

 

- Bulldozer, traxcavator, motor-scraper et parfois matériel de minage (terrassement)

- Bétonnière (pose de bordures)

- Niveleuse, cylindre, compacteur, camions (empierrement)

- Finisseur, poste d'enrobage mobile

- Epandeuse, camion-gravière

- Pelle-rétro (creusement des fouilles)

- Chargeur

-etc.

 

Répartis sur une longueur de 500m à 2 000m, ces différents travaux peuvent être effectués simultanément si le chantier est important. On observe alors le cycle complet des opérations.

 

Pour des chantiers plus petits, ces opérations sont accomplies les unes après les autres.

 

Il est évident que de nombreuses particularités, pour chaque chantier, viennent modifier le processus général qui a été dégagé ici : Pour des chantiers difficiles d'accès, ou loin du dépôt, par exemple, des stocks de graviers peuvent être réalisés, d'où un problème nouveau de transport. De la même manière, le concassage du 0-40 peut être effectué sur place, d'où une infrastructure et une organisation encore différente.

 

 

Les réfections

 

Les réfections des routes, sont des travaux neufs simplifiés.

 

Il n'y a alors plus de problème de terrassement et de voirie : Il s'agit seulement d'étaler une nouvelle couche de revêtement.

 

Malgré toutes ces petites variantes tout à fait normales, les travaux publics routiers ont donc toujours pour finalité l'étalement d'un revêtement à base de bitume ou de matériaux analogues. Les difficultés techniques du travail traditionnel semblent faibles. Son intérêt en subit les conséquences ; il est voisin pour moi de celui que l'on peut prendre à étaler du beurre sur une tartine.

 

Seuls, les opérations de terrassement et nivellement des travaux neufs peuvent semblent engendrer des problèmes sur lesquels il faut réfléchir et travailler et apporter ainsi aux cadres et agents de maîtrise un sentiment de créativité. Mais le pourcentage des réfections prime de beaucoup celui des travaux neufs.

 

 

Responsabilités des cadres et des agents de maîtrise

 

Le stage qui m'a été proposé, ne m'a pas permis de contacts avec un Ingénieur chef de secteur, et je le regrette. De la même manière, le temps passé avec les conducteurs de travaux ne m’a donné qu'une vision superficielle de leurs attributions. Par contre, au contact direct des chefs de chantier, j'ai pu me faire une idée de leurs fonctions et de leurs capacités.

 

Je ne veux parler ici que du cas particulier de la S.C.R.E.G. ; mon ignorance de la gestion des autres entreprises ne me permettant pas de tirer la moindre conclusion générale.

 

 

Les Chefs de Chantier

 

Les chefs de chantier effectuent leur poste complet de travail sur le chantier, de la même manière qu'un surveillant dans une exploitation minière.

 

Il n'est pas question pour eux de travail de bureau ; ils n’en ont pas !. Leur seul point d'attache est une camionnette Renault 4 ou 403 Peugeot bâchée, mise à leur disposition par la société pour le transport des ouvriers, des outils et du petit matériel.

 

Ils peuvent avoir de 5 à 15 ouvriers sous leurs ordres.

 

Certains d'entre eux ne sont pas trop dépaysés si par hasard, il leur faut se servir d'un niveau et d'une mire, mais pas tous. Le seul travail intellectuel qui leur est d'ailleurs demandé, consiste en un rapport journalier et au pointage des heures de travail effectuées par les ouvriers qui leur sont affectés.

 

Leur provenance est diverse ; la plupart sortent du rang de la société. Des anciens chauffeurs de camions ou d'anciens maçons assument ainsi actuellement les fonctions de chef de chantier. Quelques uns, cependant, ont une formation technique plus poussée, dont l'origine est presque toujours des cours du soir ou des cours par correspondance.

 

Le fait que de nombreux chefs de chantier sortent du rang, entraîne un climat de travail et de relations professionnelles assez particulier. Il m'a semblé en effet qu'une grande méfiance entre ouvriers et chef de chantier en découlait. Les uns se demandent par quel stratagème l'autre a pu gravir les échelons de la hiérarchie et l'autre tire profit de sa situation pour s'affirmer et semble complètement avoir oublié sa carrière précédente en étant d'une rudesse surprenante avec ses anciens collègues.

 

Ceci est peut-être voulu en haut lieu, pour pouvoir tirer profit au maximum d'une main d'oeuvre la plus souvent peu formé, peu motivé et mouvante et qu'il faut constamment surveiller pour voir le travail avancer dans des limites acceptables.

 

Cependant, j'ai rencontré un chef de chantier, ancien chef de poste d'une importante compagnie française de sondages pétroliers, qui forçait l'admiration de tous en obtenant de ses ouvriers, ce qu'il voulait, en quelques mots, avec gentillesse, tact et discrétion.

 

La conclusion à tirer de ces faits est connue : « Il ne faut pas diviser pour régner » et c’est par la formation qu’on obtient le meilleur d’un ouvrier, pas par la contrainte.

 

Mis à part les problèmes liés au commandement des hommes, le travail des chefs de chantier n'est pas des plus sorciers. De plus, il est rendu plus facile par la routine qui semble être installée depuis longtemps à tous les degrés de la hiérarchie et des opérations.

 

On pourrait aussi parler des tentations qui sont grandes dans le métier de profiter de sa position en s’écartant plus ou moins consciemment des règles de déontologie, sujet sur lequel il faut tendre un voile pudique…

 

Comparés aux autres industries que je connais à ce jour, les travaux publics routiers sont manifestement celle où les modes opératoires semblent évoluer le moins vite. Certes, les engins ont été améliorés, mais ce sont les mécaniques qui changent et non les manières de les utiliser. Le travail est fait peut être de plus en plus rapidement et dans le meilleures conditions de confort et de sécurité mais il reste toujours le même. La technologie du « Power-Schift » par exemple, ou boîte de vitesse hydraulique associée à un convertisseur de couple a complètement modifié, pour les chauffeurs d'engins, leur manière de conduire, en la rendant plus facile et plus harmonieuse. Mais on fait toujours les mêmes travaux avec les mêmes engins alors qu’il y a fort à parier que c’est au niveau justement du choix des machines, donc du choix des méthodes, qu’il y aurait le plus à gagner.

 

Le chef de chantier n'a donc jamais eu à vraiment se recycler, à s'informer sur de nouveaux problèmes et à modifier certaines habitudes. Petit à petit il s'est enlisé dans une tranquillité passive engendrée par une routine vieille de parfois plusieurs décennies.

 

Il répartit le travail chaque matin, ce qui est presque inutile, puisque les ouvriers, à force d'habitude savent très bien ce qu'ils vont avoir à faire. Il commande le matériel et les matériaux, quand le conducteur de travaux ne l'a pas fait, il fait placer les passages busés aux distances réglementaires et parcourt le chantier le reste du temps au volant de sa voiture, constatant d'un oeil satisfait que « l'ordre » auquel il est habitué, semble respecté.

 

La S.C.R.E.G. est parfaitement armé pour les travaux routiers classiques. La compétence des chefs de chantier, qui découle de longues années de pratique, n'est pas à mettre en doute. Mais des problèmes d'encadrement se posent, dés qu'un chantier nécessite l’emploi de techniques un peu particulières. L'exemple du chantier de la Pierre Saint-Martin, développé précédemment est révélateur à ce sujet. La société a préféré sous-traiter à une entreprise spécialisée un travail un peu particulier, car son personnel n'était plus suffisamment compétent. Pourtant la S.C.R.E.G. a les reins assez solides pour s'équiper pour de nouveaux travaux. Sa volonté de le faire est manifeste : La division Entreprise Générale doit faire preuve d'opiniâtreté pour se mesurer à une concurrence considérable dans cette spécialité.

 

Il faudrait donc, que cette volonté de dépasser la routine traditionnelle, seul moyen d'atteindre l'expansion, se traduise non seulement par un effort d'équipement mais aussi par un effort d'adaptation du personnel, et surtout des chefs de chantier, aux nouveaux travaux qui pourraient leur être confiés.

 

L’esprit de formation permanente des subordonnés par chaque échelon hiérarchique dans une société est certes encore peu habituel, mais il est indispensable. C’est le seul moyen d’être certain de la bonne répercussion des ordres donnés et pour avoir le temps de penser aux problèmes qui se situent à son niveau plutôt que de faire de celui de l’échelon hiérarchique inférieur.

 

 

Les Cadres : Conducteurs de Travaux et Ingénieurs

 

Comme il a déjà été dit plus haut, les contacts que j'ai pu avoir avec ces personnes ont été minimes.

 

Toutefois, deux faits ont particulièrement retenu mon attention :

 

1) L'origine des conducteurs de travaux est souvent la même que celle des chefs de chantier. Leur connaissance et leur pratique des chantiers routiers sont excellentes, mais leur qualification pour d'autres travaux semble problématique. De plus, s'ils sont à l'aise sur le chantier, l'organisation de leur travail est moins bien orchestrée. J'ai été surpris d'apprendre, que les conducteurs de travaux bâtissaient chaque soir leur programme du lendemain. Ce « planning » à court terme, qui est en fait une absence de planning est surprenant pour des personnes qui doivent synchroniser le travail d'une quarantaine d'ouvriers et le déplacement de nombreux engins divers, sur quatre à cinq chantiers. La conséquence directe de cette absence de programme, se traduit par des centaines de kilomètres parcourues en pure perte et un temps perdu considérable.

 

2) En deux mois de stage, je suis passé ou resté sur 18 chantiers différents. Je n'ai assisté qu'une seule fois à la visite d'un chantier par l'ingénieur chef de secteur. Il m'a semblé en effet, que la partie administrative du travail de l'ingénieur représentait sa principale source d'activité. La régularité de ses horaires de travail contribue à le prouver.

 

L'ingénieur des travaux publics routiers semble se comporter beaucoup plus en « commerçant » qu'en « entrepreneur ». Les plans des travaux qu'il aura à faire effectuer ne sont généralement pas de lui : Toutes les routes sont dessinées par les services des Ponts et Chaussées de l’Etat qui sont leur principal client, pour ne pas dire « le seul ». Souvent d'ailleurs, quand il s'agit d'étaler un revêtement, aucun plan n'est à consulter ! Seul le prix reste donc à négocier. Mais rien de l’empêche ensuite de mettre les bleus et les bottes plus souvent pour faire un véritable travail d’ingénieur dont les chantiers paraissent avoir bien besoin. Ce serait certainement le meilleur moyen pour faire face aux prix très bas auxquels les chantiers sont attribués.

 

Faut-il dire pour conclure que le travail de l'ingénieur des travaux publics routiers est inintéressant. Chacun est évidemment libre de trouver intéressant ce que bon lui semble, cependant, dans la gamme étendue des travaux publics, ceux qui concernent les routes font un peu figure de parent pauvre. L'exaltation du travail bien fait, pour ma part, ne suffirait pas à être une motivation suffisante.

 

A mon sens, celui qui a goûté au plaisir d'affronter chaque matin les difficultés toujours nouvelles des chantiers miniers n'a aucune hésitation à avoir au moment du choix.

 

 

Intégration du stagiaire

 

A la lecture de ce présent rapport, certaines remarques ou allusions tendent à démontrer que des difficultés sont apparues dans les rapports de la Société qui accueillait le stagiaire et celui-ci. Le stage, certes, n'a pas été négatif, mais le stagiaire ne se félicite pas du résultat obtenu. Peut-être aussi que la qualité exceptionnelle de son stage précédent où il avait été totalement intégré avec profit dans l’organigramme de la mine qui l’accueillait, l'a rendu trop exigeant.

 

Un professeur de l'Ecole des Mines, lui avait justement fait la réflexion suivante, avant le stage, alors que le stagiaire lui faisait part de ses appréhensions : « Il n'y a pas de bons ou de mauvais stage, il n'y a que des bons ou des mauvais stagiaires ! ». J'en viens à espérer que cette réflexion ne m'avait été faite que pour m'inciter à fournir l'effort maximum pour un stage qui ne se présentait pas sous les meilleurs augures. Sinon, je devrais me forcer à croire qu'au cours de l'été 1967 je suis passé du mauvais coté de la barrière…

 

J’ai essayé tout au long des deux mois de stage de le faire évoluer vers une situation plus normale en essayant de me cantonner dans les limites de la courtoisie et de la politesse, mais bien sincèrement j’ai toujours eu l’impression de déranger.

 

La réussite d'un stage devrait être due à un double effort :

 

 

De la part du stagiaire

 

Monsieur DOUCET, directeur régional de la Société COLAS à Lille nous avait donné à ce sujet, l'essentiel des conseils à respecter :

 

- Ne pas perdre de temps (c'est à dire ne pas se faire aiguiller vers une voie de garage, ou rester le « boy » d'un ingénieur ou d'un conducteur de travaux), en sachant s'intercaler, en bon rang, dans la hiérarchie de la société

- Avoir un planning et le respecter, en recherchant malgré tout les opportunités qui méritent un débordement

- Copiner avec les conducteurs de travaux et les chefs de chantier

 

Monsieur DOUCET, fixait au stage, les buts suivants :

 

- faire le point, en confrontant l'esprit scolaire et l'esprit de l'entreprise

- connaître l'ingénieur, ses responsabilités et son « personnage »

- connaître le panorama de la profession d’un point de vue technique et hiérarchique

- connaître ses goûts»

 

De la part de l’entreprise

 

Monsieur DOUCET avait ajouté la « remarque importante » suivante, qui pour le stagiaire prend maintenant toute sa valeur : « Pour réussir ce stage, et pour atteindre les buts que vous vous êtes fixés, il faut évidemment un patron compréhensif »

 

Du 10 juillet, au 9 septembre 1967, je me suis heurté à Pau, à un mur d'indifférence, sans doute parce que le stagiaire leur avait été imposé par la direction parisienne. L'indifférence ne peut pas engendrer la compréhension.

 

Les dossiers présentant le stage fournis par l'Ecole à la société, sont bien parvenus à Pau. Malheureusement ils n'ont pas dépassé le stade du secrétariat. Présentés par mes soins à la Direction (Directeur régional et Ingénieur Travaux), ils ont repris aussitôt le chemin des archives, sans consultation.

 

Une lettre courtoise avait été expédiée par mes soins le 02/06/1967, pour demander des explications sur les modalités d'hébergement pendant le stage. La saison estivale faisait prévoir en effet quelques difficultés à ce sujet dans une région telle que le Sud-Ouest. Cette lettre est restée sans réponse. Comme prévu, les difficultés d'hébergement furent considérables, et le furent d'autant plus, suite aux nombreux déplacements imposés par le programme de stage. Ainsi je ne dus qu'à l'hospitalité d'un chef de chantier de pouvoir me loger à Biarritz. A titre anecdotique j’ai trouvé la porte de ma chambre d’hôtel close le jour de l’arrivée de l’étape du tour de France à Pau parce quelle avait été réquisitionnée sans avertissement pour les suiveurs ! Bien m’avait pris de prévoir dans mon paquetage une petite tente et un duvet qui ont été également les bienvenus à Saint-Jean de Luz. !

 

 

François Xavier BIBERT à Saint-Jean de Luz - Stage Travaux-Publics - 1967

 

Sous la tente - Chantier du C.E.G. de Saint-Jean de Luz

 

 

 

Aucun des chefs de chantier qui reçurent ma visite, ne fut prévenu de mon arrivée. Aucun n'avait donc d'instructions à mon égard, et je fus ainsi la plupart du temps placé sur la touche. Qui plus est, je dus me créer moi-même les « occasions » de transport pur me rendre sur certains chantiers isolés en montagne. Parti un lundi matin de Pau, je suis arrivé le mardi soir au chantier du Mont-Arzamendi, en pleine montagne, dans le pays basque.

 

Aucune assurance pouvant couvrir les dommages que j'aurais pu commettre sur un chantier, ne fut contractée à mon égard.

 

Il est inutile de poursuivre plus avant cette énumération, pour démontrer que l'Intégration du stagiaire fut un échec retentissant.

 

Ma position sur les chantiers était des plus ingrates. Les chefs de chantier, ne purent, sans ordres, m'occuper à la moindre tâche. J'ai bien proposé de travailler à un problème d'organisation ; mais il m'a semblé que personne de songeait à améliorer quoi que ce soit.

 

Comme il est malgré tout pénible, de rester deux mois sans rien faire en regardant les gens travailler, j'ai essayé en désespoir de cause de me rendre utile en effectuant de petits travaux. Je sais maintenant :

 

- Tenir un piquet, pendant que quelqu'un l'enfonce à la masse

- Enfoncer un piquet, pendant que quelqu'un le tient

- Tailler des piquets en biseau

- Tenir une mire, un plan, un mètre ruban

- etc. etc.

 

Bref, il est facile de tourner le déroulement de ce stage à la plaisanterie, après coup. Mais je dois avouer avoir traversé des périodes de découragement. Découragement d'autant plus sincère, que je fais partie de ceux qui croient à l'indispensabilité des stages, qui veulent en tirer le maximum et qui passent leurs périodes scolaires à attendre le moment du départ en stage, pour enfin s'extérioriser, s'affirmer et se mesurer aux réalités du monde industriel et technologique.

 

Il est pénible d'avoir la volonté d'aboutir à un résultat et d'enfoncer des portes ouvertes à longueur de journée. J'ai pourtant eu l'occasion, tout au long de ce stage, d'atteindre un des buts qui avaient été fixés par M. DOUCET c'est celui de connaître mes goûts. Le goût des travaux publics m'a semblé amer.

 

Mais les conditions de dégustation, n'étaient peut être pas les meilleures !

 

 

 

Conclusions

 

 

Je n'oublie pas cependant, que ce que j'ai vu des travaux publics, a pour cadre restreint, UN secteur d'UNE entreprise de TRAVAUX ROUTIERS. En aucun cas, mon opinion sur les travaux publics ne se fondera sur ce seul stage que je viens d'effectuer.

 

Il est exclu, certes, que je puisse un jour prendre le moindre goût à la manière d'exécuter des travaux que j'ai constatée à Pau. Faits dans un autre esprit et si les difficultés d'emploi dans une Entreprise Minière devenaient trop grandes, le secteur des travaux publics pourrait cependant devenir intéressant.

 

Mais pour cela il faudrait mettre bas les vieilles routines, en imposant des techniques de commandement nouvelles et adaptées. Un grand vent de modernité a besoin de déferler sur les travaux publics routiers : Je n'ai jamais vu en effet un planning de travaux, un programme d'entretien des engins, une fiche de poste-clé, un programmes de formation, une feuille d’analyse et de préparation d’un travail, etc. etc. Nos professeurs d’O.S.T. (Organisation Scientifique du Travail) auraient donc de quoi faire !

 

Ce stage ne m'a donc pas permis d'atteindre tous les buts fixés. Aucune expérience de commandement ne fut possible, et je ne fus en aucune manière, utile à l'Entreprise. Sur le plan technique, par contre, la visite de nombreux chantiers a permis d’aiguillonner ma curiosité et de découvrir un éventail assez complet de techniques nouvelles, ne qui n’est finalement pas si mal.

 

Je remercie, la Société Chimique, Routière et d'Entreprise Générale de Pau de m'avoir autorisé à observer ses chantiers.

 

 

 

Rapport écrit pendant le stage sur une machine à écrire portative

François-Xavier Bibert – Eté 1967

 

 

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ANNEXE

 

Le tremblement de Terre d’ARETTE du dimanche 13 août 1967

 

 

 

Arette (Pyrénées atantiques)    Vers 1935

 

 

Souvenirs…

 

Le samedi 12 août 1967 le chantier de la Pierre Saint-Martin s’interrompt pour que les ouvriers puissent profiter du pont du 15 août en rentrant pour une fois chez eux en fin de semaine.

 

Cependant, quelques bergers béarnais employés occasionnellement comme ouvriers par la S.C.R.E.G. ou la Société BLOUIN sont restés tout comme moi au petit « Hôtel-relais de la station ». Cet établissement très simple n’est ouvert ordinairement que l’hiver mais cet été il héberge exceptionnellement ceux qui travaillent sur le chantier. Il sera démoli dans les années 1990.

 

 

"Hôtel-relais de la station" - La pierre Saint-Martin -1966/1967   "Hôtel-relais de la station - La Pierre Saint-Martin" - 1966/1967

 

 

En fin de soirée, nous sommes seulement 4 ou 5 à table, lorsque débarque un jeune couple arrivé dans ce lieu désert par on ne sait quel hasard puisque la route conduisant à l’hôtel n’est pas ouverte. En rougissant tous les deux ils expliquent qu’ils viennent juste de se marier et qu’ils aimeraient bien passer là deux ou trois nuits en toute tranquillité. En altitude pour se rapprocher du ciel, sans doute…

 

Le patron ému se laisse faire. Il leur sert une bonne soupe, quelques charcuteries et met sur la table la traditionnelle tome de fromage de brebis. Il leur ouvre ensuite une des chambres libérées par ceux qui sont descendus pour le week-end où ils vont rapidement s’enfermer.

 

De bonne heure le dimanche matin, les bergers et moi-même sommes bien silencieux en prenant notre petit-déjeuner ; nous avons tous une tête un peu bizarre et les yeux particulièrement bouffis. En fait, nous n’avons guère dormi. Nous nous étions bien sûr couchés un peu tard après avoir pas mal chanté et vidé quelques bouteilles, mais une fois au lit nous avons profité toutes les deux heures des vocalises étonnantes de la jeune épouse qui semblait mettre un cœur d’enfer à faire profiter tout l’hôtel de la joie qu’elle avait à s’être mariée, sans se rendre compte que les frêles cloisons de bois séparant les petites chambres ne nous faisaient rien perdre de ce qu’il se passait derrière !

 

Le jeune couple apparaît vers midi, lui sifflotant les yeux en l’air, elle nous regardant avec un sourire gêné, rouge comme une pivoine ! Tout le monde prend son déjeuner sans trop rien dire assis autour de la même grande table, et après le café les tourtereaux repartent vite dans leur nid d’amour. L’après midi de ce dimanche 13 août, les bergers reprennent leurs magnifiques chants béarnais traditionnels à plusieurs voix, sans pouvoir couvrir tout à fait les montées de gammes de la jeune mariée qui a déjà gagné près d’un octave depuis la veille.

 

Cela dure tout l’après-midi, toute la soirée, et tout le monde chante et chante encore à la nuit tombante… Devant un amoncellement de bouteilles vides et plusieurs tomes odorantes de fromage de brebis entamées qu’on m’a fait goûter une à une, prétexte officiel à la beuverie, je ne sais plus où je suis vraiment et, abandonnant mes rudes compagnons, je vais me coucher. J’occupe l’étage supérieur de deux lits métalliques superposés dans une petite chambre spartiate que je partage avec un de ces braves béarnais, bergers de profession, chanteurs par tradition et mineurs d’occasion.

 

 

Vins et fromages de brebis du Béarn

 

 

Et puis tout va alors très vite : La bâtisse se met à trembler, des vitres se brisent, le lit se démonte et je me retrouve à l’étage du dessous, ébahi mais indemne J’avais déjà vécu un léger tremblement de terre douze ans plus tôt, quand j’habitais en Allemagne dans la vallée du Rhin, et malgré le flou qui régne dans mon cerveau embué par l’alcool et la fatigue, je comprends immédiatement ce qui vient de se passer.

 

Dans la grande salle de l’hôtel plongée dans une pénombre lunaire, les bergers ne chantent plus ; on entend seulement quelques bouteilles vides tombées intactes qui roulent encore sur le sol.

 

Je déclare péremptoirement : « C’est un tremblement de terre ! »

 

Les bergers semblent rassurés, car regardant médusés la jeune mariée qui a évacué sa chambre en toute hâte sans prendre de très grandes précautions vestimentaires, ils semblent lui reprocher d’avoir cette fois poussé le bouchon un peu trop loin !

 

 

Tremblement  de terre et montée de gammes

 

 

Plus d’électricité, pas de téléphone encore installé ; je ne me rappelle plus vraiment comment on a fini la nuit, par contre je suis absolument certain que le jeune couple s’était cette fois totalement calmé !

 

Le lendemain matin, le lundi 14 août, c’est par la radio sur un transistor à piles qu’on a eu enfin quelques informations. On prend de bonne heure le camion du chantier pour quitter notre cul de sac montagnard et descendre par l’étroite route jusqu’à Arette à l’entrée de la vallée, à 22 Km de là et 1350 mètres plus bas. Nous devons slalomer plusieurs fois entre des petits éboulis rocheux qui se sont formés sur la route, mais celle-ci reste néanmoins praticable.

 

Quarante ans plus tard, les souvenirs s’estompent et on peut en toute bonne foi s’écarter un peu de la réalité des choses quand on les raconte, mais quelques impressions fortes subsistent néanmoins.

 

Je ne sais plus quelle heure il était exactement quand nous sommes arrivées à Arette, mais je me souviens encore qu’il y régnait un silence étourdissant. Il y avait peu de monde dans les rues. Nous avons compris ce qui s’était réellement passé en découvrant avec désolation le clocher de l’église brisé en vrille exactement comme lorsqu’on casse un bâton de craie en le tordant entre ses doigts.

 

 

Tremblement de terre d'Arette

 

Tremblement de terre d’Arette –  Matinée du 14 août 1967

© F-X. Bibert 1967 – Reproduction interdite

 

 

Je me rappelle aussi la tristesse de la jeune femme qui devait tenir le magasin d’alimentation situé juste en face de l’église, regardant la belle maison toute blanche qui semblait intacte de loin, mais dont la façade gonflée était traversée par des fissures où l’on pouvait passer le bras !

 

J’ai également gardé en mémoire le visage d’un vieux du village, sa casquette et sa grande moustache, les yeux fixés sur le monument au mort près de l’église. Il semblait ne pas comprendre pourquoi les noms des victimes du conflit de 14/18 se trouvaient maintenant quasiment sous l’inscription « A nos morts de 39/45 ».Tout avait été entraîné par le séisme dans un pivotement d’environ 90°, et la pierre posée sur le socle du monument avait cherché elle aussi à faire son ¼ de tour ! « Borthelle, Borthelle, il n’est pas mort en 39 ! » disait-il en tendant le doigt ! Un peu surpris par son langage, j’ai été voir de plus près, et j’ai bien lu « Borthelle »… ! Avec un T !

 

Monument au mort d'Arette

 

Il y avait aussi cette jeune fille racontant à tout le monde qu’à l’heure du tremblement de terre elle servait encore de l’essence je ne sais plus où et qu’elle ne parvenait plus à maintenir le pistolet dans l’orifice du réservoir parce qu’elle était irrémédiablement entraînée comme une toupie.

 

Avec l’innocence de mes 22 ans j’ai proposé aux autorités de mettre à leur disposition les engins du chantier qui se trouvaient là haut dans la montagne… Grosse erreur. On m’a vite fait comprendre coté direction que j’aurais du me taire ou fixer à l’administration un tarif horaire avec un coefficient multiplicateur de 3, 4 ou 5, je ne sais plus bien, puisque vu l’urgence cette dernière aurait été bien obligé de l’accepter !

 

C’est peut être ce jour là que je me suis dit que je ferrai finalement ma carrière dans les mines plutôt que dans les travaux publics !

 

Le directeur régional de l’agence paloise m’y a peut être un peu aidé, puisque sur ma fiche d’appréciation de fin de stage on peut lire «  Sans doute pas fait pour les travaux publics, à orienter de préférence vers la mine » !

 

Ceci dit mon rapport de stage a été lu en haut lieu par la direction parisienne qui m’en a fait compliment et qui a embauché pas mal de douaisiens par la suite…

 

Pour conclure, si le tremblement de terre a bien eut lieu a 23h 07, je peux seulement affirmer que l’horloge de l’église d’Arette avançait de 8 minutes comme le prouve la photo ci-dessus que j’en ai faite en cette matinée du 14 août, avant que le clocher ne soit abattu par sécurité le lendemain.

 

 

Arette - 04/2006

 

Arette    Au même endroit - 40 ans plus tard

© F-X. Bibert 2006 – Reproduction interdite

 

 

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Si leurs noces d’émeraude passées un « vieux » couple se rappelait de ce dimanche 13 août à la Pierre Saint Martin, je me ferais un plaisir de leur envoyer une copie de la mini-K7 « des chants béarnais » que j’ai enregistrés ce jour là sur mon petit magnétophone portable Philips qui ne me quittait jamais ; elle doit bien encore traîner quelque part !

 

FXB – 05/2009

 

Tremblement de terre d'Arette - Télégramme

 

Télégramme envoyé d’Arette par l’auteur à ses parents le 14 août à 10h40- Retrouvé récemment

 

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ALBUM DE PHOTOGRAPHIES -  PAU – LA PIERRE SAINT-MARTIN – SAINT-JEAN DE LUZ – FXB 1967

 

ALBUM DE CARTES POSTALES ANCIENNES – ARETTE - LA PIERRE SAINT-MARTIN