Mise
en ligne 2020
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Les HOMMES du
GROUPE de CHASSE GC III/6
(3/6) La guerre
de Joseph Adolphe BIBERT 1939-1944 Troisième
partie III. En A.F.N. |
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Lien : DEWOITINE D.520 |
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Lien : BELL P-39
« Airacobra » |
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Retour vers la
première partie : I. de CHARTRES à BOUILLANCY Retour
vers la seconde partie : II de WEZ TUISY au LUC EN PROVENCE |
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SOMMAIRE de la
TROISIÈME PARTIE Cliquez sur les liens ci-dessous |
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Traversée de la
Méditerranée - Constantine 20/06/1940 –
11/07/194 |
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11/07/1940 – 15/01/1943 |
16/01/1943 – 19/06/1943 |
19/06/1943 – 03/08/1943 |
03/08/1943 – 25//04/1944 |
Après l’A.F.N : Première
Escadre Aérienne |
L’histoire
du GC III/6 rédigée ici, fruit de plusieurs années de travail, ne se lit pas comme un livre !
Si elle est présentée en trois parties, sur trois pages Internet principales
constituant simplement le squelette de ce récit, de multiples pages complémentaires (une centaine) s’ouvrent en
cascade à partir des liens soulignés (de couleur bleu-vif) : album de
photographies, biographies, articles de presses, etc. etc. A chacun d’ouvrir
ces pages comme un dictionnaire,
dont on n’a jamais fait complètement le tour, d’où le besoin et l’envie d’y revenir pour compléter son information
et, je j’espère, son plaisir... |
Ces trois
pages principales, pour ne pas les surcharger, ne contiennent qu’une partie
des photographies mises en ligne. La plupart de celles prises par Joseph
Bibert, plus personnelles, se trouvent dans les pages annexes « Album de Joseph Bibert »
ou dans les pages de biographies de
pilotes accessibles par différents liens posés chapitre par chapitre. De
même, si le récit est chronologique, ce n’est pas un « journal »
puisque l’historique du Groupe et
les livres de marche de ses deux
Escadrilles, documents officiels au jour le jour, ont été retranscrits et
mis en ligne dans trois pages annexes accessibles par les liens
suivants : |
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MOUVEMENT vers L’ALGÉRIE
LA TRAVERSÉE DE LA MEDITERANNÉE
du LUC en PROVENCE à CONSTANTINE, via PERPIGNAN et ALGER
20/06/1940 – 11/07/1940
PERPIGNAN - LA SALANQUE |
18/06/1940 |
Personnel navigant |
ALGER MAISON - BLANCHE |
20/06/1940 |
Personnel navigant |
MARSEILLE |
20/06/1940 |
Personnel au sol |
MORSOTT |
23/06/1940 |
Une partie des pilotes |
CONSTANTINE |
23/06/1940 |
Capitaine STEHLIN + les autres pilotes |
CONSTANTINE |
27/06/1940 |
Regroupement du personnel navigant |
CONSTANTINE |
30/06/1940 |
Regroupement de tout le Groupe |
ALGER |
11/07/1940 |
Tout le Groupe |
PERPIGNAN LA
SALANQUE - ALGER |
L’Échelon volant
Dans la seconde partie de « L’Histoire des Hommes du
GC III/6 » on a vu que le Groupe a quitté le Luc le 18 juin, et
non le 19 comme le dit le Général STEHLIN dans ses mémoires, pour se regrouper
à Perpignan La Salanque avant de rejoindre l’Algérie, conformément à l’ordre
donné le 16 juin par le Chef d’Etat Major, le général VUILLEMIN, de replier en
AFN les dernières unités aériennes françaises. Le 20 juin en début d’après-midi
un peu plus de trente Dewoitine 520, ceux du GC III/6 (27) mais aussi ceux
de quelques instructeurs qui ont demandé à se joindre au groupe ayant pour cela
« récupéré » un avion tout neuf à l’usine DEWOITINE de Toulouse
accompagnés de quelques pilotes isolés des groupes partis la veille se sont
posés à Alger.
Les journaux et livres de
marches des deux Escadrilles n’ont pas pu être tenus au jour le jour et ils ne
fournissent malheureusement que peu d’indications depuis la « journée
mémorable » du 15 juin (le quintuple de LE GLOAN), sur la période agitée
du transfert vers l’Algérie, sur les armistices avec l’Allemagne puis l’Italie,
sur les conditions précises du regroupement de l’ensemble du Groupe,
« navigants » et « rampants » à Constantine et sur la
tragédie de Mers el-Kébir. On peut seulement penser que le trouble devait être
profond dans les esprits.
Paul STEHLIN devenu Général
d’Armée Aérienne puis Chef d’Etat Major de l’Armée de l’Air a publié en 1964 « Témoignages pour l’Histoire »
et donne sa vision toute personnelle des conditions de cette évacuation ;
il se met beaucoup plus en avant qu’il ne l’a réellement été. Certains
historiens de l’aviation, malheureusement, ont souvent considéré que l’histoire
du GC III/6 avait été écrite définitivement à travers les quelques pages dans
lesquelles il narre son action à la tête du Groupe de mai à octobre 1940 ;
mais ce n’est pas « l’Histoire » du Groupe.
Il commence par dire qu’il a
reçu au Luc le 19 après-midi un message par avion de liaison lui indiquant que
son Groupe est attendu depuis la veille à Perpignan, puis raconte comment il a
reçu quelques heures plus tard à Perpignan dans des conditions rocambolesques
l’Ordre Particulier n°55 du 17 juin à 0h 00 (près de 48 heures plus
tard ?), signé du Général BERGERET, un des adjoints de VUILLEMIN, lui
demandant de préparer le III/6 à participer à une concentration de toutes les
forces aériennes en Algérie en vue « d’une opération brutale et puissante contre l’Italie du
Sud les îles et la Libye » en se rendant « sur le terrain
régulateur d’Oran. »
La thèse que le Général
STEHLIN veut développer est qu’aucune opération de ce genre n’a réellement été
envisagée et que cet ordre n’était qu’une mesure de précaution pour éviter que
des commandants d’escadrille ne veuillent rejoindre directement Gibraltar. « J’ai toujours
amèrement regretté de m’être laissé tromper aussi grossièrement » dit-il avant de parler de la manière dont les autorités militaires
auraient tout fait ensuite pour clouer les avions au sol en les privant de
carburant et de son projet de conduire son Groupe à Malte, avorté par l’attaque
anglaise sur Mers el-Kébir du 3 juillet. « Dans mon groupe c’est la consternation, l’un parle de
trahison des Anglais, l’autre assure que les Anglais ont été toujours nos pires
ennemis. Notre plan s’évanouit très peu de temps avant qu’il ne soit prêt. Nous
n’avons eu connaissance de l’appel du Général de Gaulle que plus tard et la
propagande de Vichy a la tâche facile de refaire de l’Angleterre l’ennemi
héréditaire. »
Rien n’est cohérent dans ses
mémoires et aucun Ancien de son Groupe n’a évoqué un quelconque plan de
départ concerté vers une terre anglaise dans les leurs !
Pourquoi cette
« erreur » de date sur le départ de l’échelon volant du III/6 à
Perpignan ? Pourquoi ces « confusions » dans les ordres
reçus ?
« Le 18 juin j’ai le sentiment d’un isolement complet […] Le
19 juin, dans l’après-midi je reçois enfin un message transmis par un avion de
liaison qui m’informe que depuis la veille mon groupe est attendu sur le
terrain de Perpignan-La Salanque… »
Commencer en 1964 un
paragraphe de ses mémoires par « Le 18 juin… » n’est peut-être pas innocent quand on veut magnifier ses états
d’âme de ce fameux jour de 1940, alors qu’on a eu connaissance de l’appel
historique du Général de Gaulle que bien plus tard ! Voilà sans
doute les bonnes réponses aux questions qui se posent.
Bien des livres ou des
chroniques ont été écrits après la guerre par ceux qui ont été aspirés dans
cette grande tourmente, et bon nombre de lignes de ces ouvrages présentent les
faits d’une manière permettant à leur auteur de donner à penser qu’ils avaient
apprécié le « sens de l’histoire » plus tôt qu’ils ne l’ont fait
réellement. Le commandant Paul STEHLIN sera finalement appelé à Vichy à
l’État-major de l’Amiral Darlan fin octobre où il occupera des fonctions plus
politiques que militaires auxquelles il a été habitué et on ne sait rien
d’autre de « sa tentative de ralliement » dont il parle en quelques lignes confuses dans ses mémoires. Encore
Chef d’Etat Major de l’Armée de l’Air en 1963, il avait tous les moyens de se
faire préparer une chronologie sans erreur de son activité au III/6 pour
rédiger ses mémoires publiés en 1964 avant de se présenter à la députation.
Dans le livre de marche de la
sixième Escadrille, son rédacteur anonyme écrit d’ailleurs le 8 juillet
1940 : « Le 11 juillet, à la suite du bombardement de Mers el-Kébir
par nos ex-amis Anglais, le groupe retourne sur le terrain d’Alger Maison-Blanche
[…]. L’armistice fut signé les 23 (erreur : c’est le
22) et 24
juin à l’avantage de nos ennemis, dont les longues dents s’useront espérons le
contre l’Angleterre qui continue la lutte plus que jamais. » L’expression « ex amis anglais » semble plus
ironique que méchante, sans doute entendue dans la bouche de certains
chefs… ! Mais l’espoir que les Anglais gagnent la guerre est clairement
exprimé sous la plume de ce pilote du GC III/6 qui tient le livre de
marche. On est bien donc loin de la « consternation » et des mots « trahison » et « pires ennemis » attribués par
Paul STEHLIN à ses pilotes parlant des Anglais…
Entre l’ordre salutaire du 16
juin de transférer la plupart des groupes aériens vers l’A.F.N. et l’armistice
du 22, il n’y a pas eu que les bons d’un côté qui voulaient immédiatement
poursuivre la lutte coûte que coûte et les mauvais de l’autre qui avaient déjà
décidé de collaborer avec les futurs vainqueurs de la guerre que tout le monde
savait perdue dans l’hexagone. C’était la débâcle. Du Chef d’État-major, le
général VUILLEMIN, au dernier des petits mécaniciens, la préoccupation initiale
et naturelle de sauver tout ce qui pouvait l’être et de se sauver soi-même a
donc été initialement la même.
Mais tout va beaucoup trop
vite, et l’armistice devenant inéluctable, pourquoi ne pas croire le Général
VUILLEMIN sincère et réaliste quand il écrit le 20 « La rupture, du fait
de l’Armée de l’Air, des clauses d’un armistice entraînerait inévitablement la
reprise des hostilités, l’occupation totale du territoire français, la
disparition de l’armature gouvernementale et, finalement, de la nation
française… » C’est certainement dans cet
état d’esprit, que la crainte de départs vers Gibraltar d’unités entières ou de
pilotes à titre individuel a conduit à donner un peu plus tard des ordres
visant à priver certaines unités des moyens de le faire, en les orientant vers
des aérodromes reculés, sans possibilité de ravitaillement en carburant et en
munitions. Et il n’y a rien non plus à redire quand le 23, le Chef d’Etat Major
donne cette fois-ci l’ordre de cesser tout transfert et de ne plus détruire
aucun matériel. Ce n’est pas un revirement, c’est un enchaînement logique.
Si la France est restée la
France grâce au Général de Gaulle, le Rebelle, et à sa vision unique de
l’histoire, sachons aussi respecter ceux, qui confrontés à l’énormité des
événements et les mains dans le cambouis, ont, à leur manière et dans le
respect de la discipline militaire, pris les décisions qu’ils croyaient être
les meilleures dans l’instant présent et dans leur sphère d’autorité. On peut
par contre être beaucoup plus critique envers les politiques qui avaient depuis
longtemps mis le pays en situation de ne pas pouvoir faire face à la menace
Hitlérienne.
Confirmation
de cette thèse Dans un texte de Patrice Facon
re-publié en 2020 dans « AIRPOWER IN 20 TH CENTURY - DOCTRINES AND
EMPLOYMENT - NATIONAL EXPERIENCES » l’auteur fait strictement la même
analyse que celle que nous avons exposée dans les lignes ci-dessous, sans
d’ailleurs avoir pu en prendre connaissance préalablement. Ce texte peut être lu en
ouvrant le lien ci-dessous : Les
dernières décisions du Général VUILLEMIN avant les armistices |
°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°
18 JUIN 1940 : Revenons plus
simplement au GC III/6. Il n’est pas discutable que ce fût bien le mardi
18 juin après-midi, entre 16 et 17h 00 que, trois par trois, les Dewoitine
quittèrent Le Luc pour Perpignan – La Salanque atteint au bout de 1h 20.
Le sgt GABARD retardé par des ennuis mécaniques auquel son fidèle
mécanicien va pouvoir remédier, n’a quitté le Luc que quelques heures plus
tard. Le s/lt SATGÉ doit laisser son D.520 n°357 codé « 27 » au lt
MARTIN de la 5ème, dont l’appareil en panné sera abandonné au Luc et
transféré plus tard, et le pilote de la 6ème gagnera Toulouse le
lendemain par ses propres moyens pour en récupérer un nouveau, ce sera le
n°346. A La Salanque, c’est le grand bazar ! Outre le GC III/6, le
II/3, le III/3, le II/4, le II/5 et le II/7 sont présents. Heureusement, dans
la journée, les Groupes III/2, I/3 et I/4 ont fait la traversée et on attend
encore le GC I/5 qui n’arrivera que le 20 juin et repartira immédiatement.
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Dewoitine
D.520 sur le terrain d’aviation de Perpignan La Salanque le 19 juin 1940 Un fût
d’essence est déposé devant chaque appareil - Les pleins sont faits à la main
à l’aide d’une pompe Japy (à droite) D’après le marquage il doit s’agir de la
première Escadrille du GC III/3 Collection Louis
Bassères – Résidant à La Salanque |
Faute de distributeurs en
nombre suffisant, le ravitaillement en essence est extrêmement lent. Les
pilotes doivent faire les pleins de leurs appareils eux-mêmes, opération
fatigante qui se poursuit tard dans la nuit à la lumière de la lune pour
certains.
Les plus chanceux sont
emmenés dans un restaurant de bord de mer pour tenter de dîner, mais il y a
tant de monde qu’ils doivent attendre leur tour. Pour leur trouver un
hébergement, un car les emmène dans un village où le maire essaye de leur
trouver des places chez l’habitant. Une femme, derrière des volets clos,
exprime bruyamment son refus en catalan, ce qui met fort en colère le capitaine
STEHLIN, peu habitué à ce qu’on lui résiste ; il sort son pistolet et
menace de tirer dans la persienne ! Le Maire peut le calmer et lui trouver
un gîte digne de lui !
19 juin 1940 : Le lendemain mercredi
19 juin, les préparatifs se poursuivent.
Au dernier moment la
destination finale a changé, c’est maintenant Alger. Mais le vol de Perpignan
jusqu’à cette ville en 1940 n’est pas une chose si simple qu’on pourrait le
croire pour une escadrille de chasse et des pilotes qui n’ont sans doute jamais
survolé la mer si longtemps. Pour ces 2h 1/2 de vol, les réservoirs
supplémentaires de bord d’attaque des Dewoitine doivent être utilisés, mais ils
n’ont jamais été branchés en usine ; du fait qu’ils n’étaient pas
protégés, on craignait une explosion s’ils étaient touchés par une balle
incendiaire ! Pour procéder aux branchements, les mécaniciens du Groupe
n’étant pas là, les pilotes doivent prêter la main aux trois spécialistes de la
maison Dewoitine mis à leur disposition. Pour dévisser les tôles couvrant les
accès aux tuyauteries, ils doivent se passer de main en main les deux seuls
tournevis cruciformes qu’ils ont trouvés ! Il faudra prendre en compte que
le poids supplémentaire des appareils dû aux réservoirs auxiliaires réduira un temps
leur vitesse.
20 juin 1940 : Dans la matinée du
jeudi 20 juin, le Groupe décolle. Au dernier moment le s/lt SATGÉ est arrivé de
Toulouse avec un nouvel avion qui a pu lui être affecté et partir ainsi avec
ses camarades. Par contre le cne GUERRIER a au décollage un problème avec son
train d’atterrissage : il perd du temps avant de pouvoir le fermer grâce à
quelques évolutions autour du terrain et il va faire le trajet loin derrière,
en compagnie du sgt Michal CWYNAR qui l’a attendu, tous deux seuls et pris à
partie par des tirs d’artillerie espagnols à proximité des baléares. Ce n’est
qu’un hasard, mais ils avaient tous les deux installé une précieuse cargaison
derrière la plaque de blindage du siège de leur avion : CWYNAR, sa
guitare, et GUERRIER son matériel de pêche !
Les pilotes doivent faire
leur navigation sans carte, sans connaître la côte algérienne, et avec les
seules indications de vitesse et de cap données par leurs instruments, alors
que beaucoup des montres des tableaux de bord des Dewoitine ont été volées dans
la nuit ! Des pages prélevées dans les atlas des écoliers de Saint-Laurent
La Salanque, des cartes du « Calendrier des Postes » ou des
« Chemins de fer » ont été emportées par les pilotes sur lesquelles
ils ont préparés leur vol : cap 160 pendant 20 minutes, puis cap 190
pendant 55 minutes pour éviter les Baléares, puis cap 200 pour tomber un peu à
l’est d’Alger et apercevoir la « Grande Ville Blanche » à sa droite
avant de descendre sur Maison-Blanche. Un pilote a pu décalquer sur un bout de
papier sulfurisé, récupéré dans une cuisine, les contours des côtes espagnole
et africaine sur lequel il a tracé son plan de vol pour Oran, sa destination
initialement prévue ; il n’a eu le temps ensuite que de tracer une droite
pointillée entre Perpignan et Alger lorsque la destination finale fut connue et
de garder en tête les indications de cap et de temps indiquées.
Reproduction de la carte tracée par le sergent
GOUZI du GC III/3 pour son vol de Perpignan à Alger
Heureusement le capitaine
ASSOLLANT, le premier Français à avoir traversé l’Atlantique d’ouest en est en
1929 à bord de « l’Oiseau Canari », et qui, les 10 années suivantes,
a sillonné l’Afrique en tous sens comme chef pilote de l’aviation civile à
Madagascar, est un navigateur hors pair. De plus, le survol des Baléares peut
permettre de corriger éventuellement le cap s’il le faut. C’est donc lui qui
mène les avions pour cette traversée (*). La plupart des
pilotes ont le « trouillomètre » à zéro de peur d’être isolé de leur
guide !
(*)
Mémoires du lieutenant MENNEGLIER : « …Enfin le matin du
20 juin tout le Groupe décolla en direction d'Alger sous la conduite du
capitaine Assolant qui avait l'habitude de la navigation au compas… »
Mémoires
du capitaine STEHLIN : « ... Le III/6 est rassemblé au complet
au-dessus de La Salanque quand JE mets le cap sur les Baléares... ». Sans
commentaire...
Les Dewoitine passent en vue des
Iles Baléares sans rencontrer les avions ennemis que des renseignements
malveillants avaient annoncés. A proximité des côtes algériennes, un Bloch 174
vient à la rencontre des arrivants pour les guider jusqu’à Maison-Blanche où
ils atterrissent après 2h 40 ; c’est aussi la grande pagaille sur ce
terrain complètement désorganisé par l’arrivée massive en quelques heures de
tout ce qui vole encore après la campagne de France.
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Alger la « La blanche » telle que
les pilotes du GC III/6 purent l’apercevoir de loin avant de se poser sur le
terrain de Maison Blanche le 20 juin 1940 |
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A gauche,
carte « Michelin » de la région d’Alger de cette époque où figure le
terrain d’aviation de Maison Blanche, 10 km à l’est du centre-ville A droite, sur un extrait de la carte
d’état-major de la région, l’implantation plus détaillée de ce terrain vers
1935– Noter à gauche « Smar » (voir plus loin) |
Les archives du III/6, n’en parlent
pas beaucoup, mais tout ne s’est pas passé aussi bien que généralement
rapporté. Outre le cne GUERRIER et le sgt CWYNAR, le s/lt KAWNICK, parti avec
le Groupe, avait dû retourner à La Salanque, son hélice restant obstinément au
petit pas. On put le dépanner et il repartit seul vers l’Afrique du Nord.
Concernant le s/lt polonais
KAWNICK on a la chance de posséder deux témoignages d’origine totalement
différente, mais heureusement concordants, au moins pour l’essentiel :
Le premier est celui du lieutenant
mécanicien du III/6,
Témoignage du lieutenant
« …Nous passâmes tout l’après-midi à l’attendre... Il
arriva à Maison-Blanche en taxi vers 18h trempé mais souriant, et raconta son
aventure. Il était parti vers 13h de La Salanque avec une hélice qui
n’avait plus de caprice. Il n’avait pas de carte mais il avait reproduit sur
un carnet le profil de la côte algérienne entre Oran et Bougie avec au milieu
une grande ville blanche qu’on voyait de loin : Alger. Il savait qu’il
devait passer au-dessus des Îles Baléares et continuer tout droit pour
arriver à Alger. Fâché avec le compas il avait préféré simplifier le problème
et « aller droit soleil ». Il passa effectivement au-dessus des
îles Baléares mais en vue de la côte algérienne, il ne vit pas la grande
ville blanche et la chercha en suivant la côte vers l’est. En ne la voyant
toujours pas et s’apercevant qu’il s’était trompé et qu’il fallait la
chercher vers l’ouest, il fit demi-tour. Mais quand vint enfin la grande
ville blanche, il n’avait plus d’essence et il posa son avion sur l’eau,
hélice arrêtée et train rentré à 200 m de la plage de Maison-Blanche. Avant
que son avion coule, il prit sa petite valise derrière le pare-balles du
cockpit et nagea vers la plage. Il mit longtemps à trouver un taxi qui le
conduise à l’aérodrome de Maison-Blanche et se présenta au capitaine Stehlin
vers 18h, penaud, honteux de son aventure, mais heureux d’avoir retrouvé ses
amis… » |
Le second, totalement indépendamment
du III/6, est celui du général Albert PESTRE, né en Algérie en 1924, ancien
élève de l’École de l’Air (promotion AFN 1943). Il faisait partie de la
génération d’officiers de l’Armée de l’Air, qui ont partagé leur formation
entre Marrakech et les États-Unis mais qui n’ont pas participé aux opérations
aériennes en Europe. Au Groupe de Bombardement 2/20 « Bretagne » fin
1945, en Indochine, en Algérie, et commandant de la BA.105 d’Evreux en 1970,
décédé en 2009.
Page
consacrée au général Albert PESTRE
Témoignage du général
Albert PESTRE - Alors lycéen à Alger, il avait 16 ans « … En Algérie, nous étions bien loin des zones de
combat. Néanmoins un jour, c'était le 20 juin, nous fûmes les témoins directs
de la réalité de notre effondrement militaire. Entendant un bruit de moteurs
lointain ne cessant de s'amplifier, nous vîmes arriver sur nous les premiers
avions de chasse qui avaient fui la Métropole, en s'élançant au-dessus de la
Méditerranée, pour trouver refuge sur le sol africain. C'étaient des
« Curtiss P-36 » et des « Dewoitine 520 ». Leur axe
d'arrivée sur la base de Maison-Blanche les faisait passer pour la plupart
dans un vrombissement de tonnerre juste au-dessus de la propriété, à très
basse altitude, seuls ou en patrouilles de deux ou trois appareils. Chaque
fois que nous entendions un ronronnement lointain qui s'approchait, ma cousine,
mon cousin, mon frère et moi, nous nous précipitions hors de la maison pour
assister au spectacle. Puis nous suivions des yeux leurs silhouettes noires
se découpant sur le fond bleu du ciel, jusqu'à les voir à l'horizon amorcer
un large virage, avant de s'engager dans la descente vers la piste
d'atterrissage. Parmi les pilotes qui quittèrent la France, l'un d'entre eux
put tout juste atteindre le rivage de l'Algérie. Amerrissant à quelques
centaines de mètres de la côte, il réussit à s'extraire avec beaucoup de
peine de sa carlingue… Puis il s'effondra évanoui sur la plage, le front
ouvert, sa tête ayant buté sur le collimateur. » « A quoi tient
la vie… » Société des Écrivains – 2005 |
Mémoires de Jean
MENNEGLIER – 6ième Escadrille du GC III/6 « ...A Maison-Blanche nous faisons connaissance avec
l'Afrique et avec sa population de musulmans et de pieds-noirs. Il y avait
sur le terrain un excellent mess. Au bar on servait dans de grands verres le
moscatel des Pères Blancs qui, bien frais, descendait tout seul. On en
prenait et on en reprenait. A table il y avait rosé et blanc frappé à
discrétion. Rien d'étonnant à ce que l'après-midi on ait envie de faire la
sieste. Il me fallut un ou deux jours pour me rendre compte qu'il fallait se
modérer sur la boisson. Nous ne restâmes pas longtemps à Alger car on nous envoya sur un terrain de campagne
à Morsott au sud de Constantine.... » |
A Alger, les valeureux pilote
Polonais sont envoyés dans un centre de regroupement avant de gagner la
Grande-Bretagne où ils seront intégrés dans la R.A.F. Quatre pilotes de D.520
qui ont fait la traversée avec de III/6 sont intégrés dans ses effectifs :
le cne Hugues
BOULARD de POUQUEVILLE, affecté temporairement à l’État-major ; le cne
(*) Mémoires du lieutenant MENNEGLIER : « L'un
d'eux était le capitaine Sautier, un polytechnicien qui avait appartenu au
Centre d'essai en vol (C.E.V.). C'était un charmant camarade qui resta quelque
temps avec nous puis rejoignit la France où il avait laissé sa famille. »
L’Échelon roulant
18 juin 1940 : Le transfert vers
l’A.F.N. du reste de l’effectif du Groupe, dont les mécaniciens et leur chef le
lieutenant BRAUDEAU, fut plus difficile ; faute d’avion pour leur
transport, tous sont restés au Luc le mardi 18 juin après le départ des
Dewoitine en attente des ordres. A partir de là, il y a télescopage entre les
« Mémoires » du Général STEHLIN de 1964 et de celle de
Pour tenter de remettre les
choses dans l’ordre : L’adj. GOUJON, qui est arrivé à La Salanque avec
tout le Groupe le 18 juin vers 18h 30 aurait été immédiatement renvoyé au
Luc par le cne STEHLIN vers le lt BRAUDEAU pour lui porter l’ordre de
mettre en route l’échelon roulant le lendemain. Le général STEHLIN qui situe
son arrivée au Luc tard dans la soirée le 19 écrit : « ...Dès que je sais
ce qui va se passer, je renvoie GOUJON au Luc pour donner à l’échelon roulant
l’ordre de s’embarquer à Marseille pour Alger… » et il ajoute « …je suis dans l’autocar qui doit nous conduire dans un village
proche de Perpignan pour y passer la nuit quand un planton me remet une note
qui m’est destinée. C’est un ordre qui émane du Commandant en Chef des Forces
Aériennes. Il m’est ordonné, tel quel, sans pli cacheté, comme une carte
postale que tout le monde peut lire :
« Exemplaire n°27 G.Q.G.A. le 17 juin 1940, 0 heure « ORDRE PARTICULIER N° 55 POUR LE GROUPE DE CHASSE III/6 1) J’ai décidé d’entreprendre une opération brutale et puissante. Cette opération sera précédée d’une concentration rapide contre l'Italie du Sud, les îles et la Libye. Cette opération sera précédée d'une concentration rapide de toutes les forces de bombardement disponibles en Afrique du Nord, où elles seront maintenues jusqu'à obtention du résultat recherché. La couverture du déploiement de ces moyens et du territoire nord-africain contre les ripostes du bombardement italien sera assurée par l'ensemble des moyens de chasse actuellement basés dans la métropole. 2) En conséquence, dès réception du présent ordre, le Groupe de Chasse III/6 se dirigera sur l’Afrique du Nord la totalité de ses échelons volants disponibles (appareils montés par équipages de guerre). 3) Terrain de départ : La Salanque Terrain régulateur : Oran où vous trouverez des instructions concernant les terrains d'opérations où vous devrez vous rendre. Le mouvement des échelons roulant fait l’objet d’instructions particulières. Pour le Général-Commandant en chef des Forces aériennes, Pour le Major général, l'Aide-Major général chargé des opérations : Signé : BERGERET » |
Il affirme que ces ordres
verbaux étaient accompagnés d’une copie de la note du Général BERGERET. A noter
que l’adj GOUJON qui s’est posé à La Salanque en fin d’après-midi le 18 juin,
tenant compte des pleins à faire, ne pouvait qu’être de retour au Luc que tard
dans la nuit !
Tout cela semble bien abracadabrantesque !
Même si le Général STEHLIN, qui décale tout d’une journée, s’était trompé de
bonne foi, il écrit qu’il reçoit la note du Général BERGERET à Perpignan dans
la nuit, alors qu’il écrit un paragraphe plus haut que GOUJON est déjà reparti
au Luc porter ses ordres ! Ce n’est donc pas qu’une erreur de date !
L’aller-retour de l’adj GOUJON au Luc est vraiment incompréhensible, à moins
que M. BRAUDEAU ait voulu faire coïncider en 1989 une partie de son
témoignage avec les Mémoires du Général STEHLIN, sans se rendre compte que
celui-ci avait eu 25 ans plus tôt des souvenirs plus qu’incohérents ! De
plus le cahier d’ordres de la 5ème Escadrille ne porte aucune trace
de cet aller-retour Perpignan - Le Luc – Perpignan de l’adj GOUJON.
Quoi qu’il en soit, les
ordres de mouvement vers Marseille ont été forcément donnés avant que le
commandant du Groupe ne s’envole du Luc, puisque l’échelon roulant a eu le
temps de se préparer et de partir dans la nuit du 18 au 19 pour effectuer les
100 kilomètres qui les séparaient de Marseille et y arriver à l’aube. Les
Hommes sont regroupés au camp Sainte-Marthe ; outre ceux du III/6, s’y
trouvent sans doute aussi ceux du II/4 et du GAO 553 qui s’embarqueront avec
eux sur le même navire.
19 juin 1940 : Racontant en 1989 le
passage de l’échelon roulant à Marseille,
20 juin 1940 : Il continue ce récit
épique dans le même esprit : « J’avais gardé avec moi, outre l’a/c AUGST 14 mécaniciens
« triés sur le volet ». Nous sommes partis à Marignane dans quatre
taxis vers 18h 00 où je fus reçu par un jeune capitaine auquel j’exposai
notre cas. Il y avait deux hydravions en cours de chargement de matériel civil
pour l’Algérie. Il fit décharger ces matériels, nous offrit à manger et à boire
et quand les hydravions furent prêts au départ nous y accompagna. Nous
décollâmes à 4h 00 le 20 juin et à 9h 00 nous amerrissions à l’entrée
du port d’Alger. Quatre nouveaux taxis nous conduisirent à l’aérodrome de
Maison-Blanche où nous arrivâmes à 11 h. A midi le III/6 se posa et gagna
le hangar n°6 où les mécaniciens attendaient ». Tout ceci est trop beau : quand les avions du III/6 sont arrivés
à Alger la plupart des témoignages parlent d’une pagaille complète. Il y avait
des appareils dans tous les sens sur le terrain et sur son périmètre et il est
impossible qu’une escadrille complète ait pu se frayer un chemin jusqu’à un
hangar qui ne lui avait certainement pas été encore attribué !
Dans ses mémoires en
cinémascope, Paul STEHLIN, n’hésite pas à écrire : « ...(le
terrain de) Maison
Blanche est encombré d’avions. Il n'est pas facile de trouver une place sans
risquer une collision. Pourtant, en dix minutes, les trente-neuf Dewoitine du
groupe sont alignés au bord du terrain, les masques blancs à gauche de mon
avion, les masques noirs à droite, en une rangée impressionnante... »
On a ici un bel exemple de
ces témoignages tardifs, sans support d’archives, où la volonté de parler de
soi passe avant celle de raconter l’Histoire !
Le sgt mécanicien Robert
UMBERT, n’a pas dit clairement s’il faisait partie de ce groupe de 15
privilégiés « triés sur le volet » conformément aux ordres du cne
STEHLIN, mais il a témoigné : « …une partie des mécaniciens fût embarquée sur un hydravion
Latécoère qui décolla de l’étang de Berre au lever du jour pour se poser 5
heures plus tard dans l’arrière port de l’Agha à Alger. Le reste des
mécaniciens arriva par bateau le 27 dans la matinée »...
L’adjudant mécanicien René
COLIN, raconte pour sa part : « ...les pilotes partent pour Perpignan et les mécaniciens
avec l’échelon roulant se rendent à Marseille. Les pilotes rejoignent ensuite
Maison-Blanche sans aucun incident pour notre groupe (il oublie manifestement l’amerrissage du s/lt KAWNIK, et
l’arrivée en solitaires des sgt CWYNAR et cne GUERRIER, suite à un ennui
mécanique au décollage sur le D. 520 de ce dernier !). Quelques mécanos gagnent
Alger sur deux hydros d’Air France, des Lioré et Olivier LeO 242. Celui où
je suis est piloté par Givon (*). Le reste du personnel
arrive par la mer. Nous restons plusieurs jours à Maison-Blanche, avant de
partir pour Constantine où nous apprenons l’armistice... »
(*) Célèbre compagnon
de Mermoz à « l’Aéropostale ». Précédemment, le 2 septembre 1927, il
avait décollé du Bourget en direction de New York avec
Pas d’allusion au Hangar
n°6 ! Pas d’allusion aux 38 Dewoitine bien alignés derrière celui du
Commandant du Groupe... Finalement, quelle importance ? Un ou deux
hydravions, Latécoère ou Lioré & Olivier (*), 15 mécaniciens, un peu plus ou un peu moins ! Quelle
importance de savoir si le cne STEHLIN a pu faire une arrivée digne de lui,
attendu devant le hangar n°6 par des « mécaniciens
triés sur le volet », peut-être au garde à vous ? Il nous manque le
film !
(*) Vérification faite,
ce sont bien deux Lioré et Olivier LeO 242 qui ont fait le voyage, mais il n’y
avait pas que le III/6 à leur bord !
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Hydravion
Lioré et Olivier H.242 employé sur la ligne Marseille/Alger – Photographie
faite devant les hangars de l'hydrobase Air France à Marignane en 1937 Envergure :
28 m – Longueur : 18m 450 – Hauteur : 5 m 995 - Poids à
vide : 4 750 Kg. - Poids enlevé : 4 250 Kg - Vitesse à 100 m
(sol) : 232 km/h - Temps de montée : 13'10" à 2 000 m –
Plafond : 4.400 m. en 63’ Les passagers et le fret prenaient place à bord
au sec et les H.242 étaient mis à l'eau ensuite via une rampe. Collection René
ZUBER via Jean-Louis BLÉNEAU |
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Hydravion Lioré et Olivier H.242 employé sur
la ligne Marseille/Alger – Photographie aérienne de l'hydrobase Air France de
l’Agha d’Alger vers 1937 |
En fait, le lieutenant
BRAUDEAU a un peu oublié 45 ans plus tard que c’était le lieutenant MIRAND, le
vrai patron du personnel non navigant, en charge de l’équipe administrative du
Groupe ; si celui-ci n’a pas raconté plus tard par modestie le transfert
du III/6, de Marseille à Alger, des sous-officiers se rappellerons bien que
c’est lui qui a réglé la plupart des problèmes. Il fit la traversée à bord du
« Commandant Dorise », avec ses hommes, dans des conditions
épouvantables et fit de son mieux pour leur trouver un minimum de rations
alimentaires, soutenir le moral des plus faibles et éviter des affrontements
dus à la promiscuité avec les autres passagers...
Comme cette histoire est
bâtie autour de celle de l’a/c Joseph BIBERT, notons pour sourire qu’il n’a pas
eu la chance d’être « trié sur le volet » puisque son livret
militaire prouve qu’il n’a été « débarqué » que le 27. Il n’y avait
au III/6 que 4 sous-officiers mécaniciens qui avaient fait un stage de 8 jours
chez Dewoitine à Toulouse du 7 au 16 juin pour être spécialisés sur le
D.520 ; adj. COLIN, (chef de hangar) et sgt DESFOSSEZ pour la 5ème,
s/c BIBERT (chef de hangar) et ROBERT pour la 6ème. On peut penser
malgré tout que la présence sur le port de Marseille d’un des deux chefs de
hangars, sous-officier confirmé, pour veiller au bon chargement des matériels
du Groupe, avait été jugé utile puisqu’on sait par ailleurs que les trois
autres ont bénéficié d’un voyage confortable en avion pour accueillir dignement
leur commandant de Groupe à son arrivée en terre d’Afrique !
Extrait du livret militaire de Joseph BIBERT –
Débarquement en Algérie
21 juin 1940 : Pour revenir sur les problèmes
d’intendance, ceux du GC III/6 qui font la traversée maritime ont touché à
leur départ du Luc des rations individuelles pour se nourrir les 19 et 20
juin... Après cela c’est la grande débrouille ! Ils embarquent donc le 21
juin sur les deux antiques cargos, le « Commandant Dorise » pour le
personnel et une partie du matériel et le
« Sainte-Marguerite II » pour le reste du matériel. Ces deux
navires doivent avec une trentaine d’autres partir en convoi (*) Les échelons roulants de plusieurs autres groupes ont également
été embarqués, certains sur les mêmes navires que ceux du III/6 (GC II/4
et de GAO 553 comme dit plus haut).
(*) Les navires du convoi P8 : AMPERE,
CALEDONIEN, CAMPINA, CHATEAU LAROSE, CHELMA, COMMANDANT DORISE, CYDONIA
(britannique), ESTRID (danois), FIRUZ, FORMIGNY (britannique),
GINETTE LE BORGNE, GOUVERNEUR GENERAL CAMBON,
GOUVERNEUR GENERAL GREVY, GOUVERNEUR GENERAL TIRMAN,
IMERETHIE II, JOHN KNUNDSEN (norvégien), KROUMIR, LANGANGER, MAYAN,
MAYENNE, MEDIE II, MONT SAINT CLAIR, NICOLO ODERO, OASIS,
P.L.M.20, PALLAS, PLATON, SAGITTAIRE, SAINTE MARGUERITE II, TANAIS,
TELL et TIBERIADE.
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A gauche, le cargo « Commandant
DORISE » et à droite le « Sainte-Marguerite II » |
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Chargement d’un camion de l’échelon roulant
du GC III/6 le 20 juin 1940 sur le « Commandant DORISE » et un
aperçu des conditions de la traversée qui dura 4 jours Photographies Robert
ROHR du GC III/6 – Droits réservés |
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Toujours à bord du « Commandant
DORISE » des personnels du GAO 553, Groupe qui a aussi embarqué sur le
cargo et le départ de celui-ci dans le port de Marseille Collection de GRIVEL
via Mathieu COMAS – Droits réservés |
En savoir plus sur : Les
cargos « Commandant DORISE » et « SAINTE-MARGUERITE II »
Dans la nuit du 21 au 22
juin, alors que les navires sont encore en rade 6 à 10 bombardiers
Savoia-Marchetti SM.79 du 104ème Gruppo (46ème Stormo)
attaquent la ville en deux vagues successives. Ce qui reste de la chasse
française n’a pas pu intervenir, et la D.C.A française réagit sans succès, y
compris les jumelages anti-aériens se trouvant sur certains navires et servis
par des marins de la « Royale ». Un peu plus de 4 tonnes de bombes
tombent sur Marseille et l’Estaque, faisant près de 140 victimes civiles.
Quelques-unes atteignent la rade, mais loin des bateaux, créant cependant une
grosse panique et une course vaine aux ceintures de sauvetage.
22 au 17juin 1940 (en mer) : Ceux-ci
lèvent l’ancre le 22 juin à 17h 00 à destination d’Oran, escortés par des
unités de la Marine Nationale. Il y a 1 200 personnes à bord du
« Commandant Dorise », l’installation manque de confort et
d’hygiène, la nourriture peu abondante est médiocre. C’est pire sur le
« Sainte-Marguerite II ». Le convoi change très souvent de cap pour
dérouter les sous-marins ennemis. Le 23 le convoi est encore en face de la côte
française à Port-Vendres et il arrive en vue des Baléares à une vitesse de 9
nœuds dans la journée du 24, et à Oran le 26 à 17 heures mais des ordres
nouveaux ont été donnés pour certains bateaux de poursuivre leur route vers
Alger. Les deux vieux cargos repartent à 21 heures et tout le monde débarque à
Alger le 27 juin entre 18 et 19 heures ; les hommes sont totalement
épuisés et affamés. Tout le Groupe GC III/6, encore dispersé puisque
l’échelon volant a quitté Maison-Blanche depuis 3 jours, se trouve à ce moment
en terre africaine, en attente d’instructions.
Cantonnés au « Dépôt des
isolés métropolitains » au 25ème régiment du train-auto, ce qui
ne résout que partiellement leurs précédents problèmes d’intendance, il faudra
trois jours aux « rampants » à Alger pour regrouper le matériel et se
remettre en ordre de marche, avant de pouvoir enfin quitter la ville en
effervescence le 30 juin pour Constantine. Quelques photographies permettent de
penser que certains ont quand même eu le temps de visiter rapidement la grande
ville blanche...
MORSOTT -
CONSTANTINE |
Mémoires de Jean MENNEGLIER « ...Le 24 juin nous partîmes en deux formations vers
Morsott, notre nouveau lieu de stationnement. Aux environs de Constantine
nous butâmes sur un ciel très noir. Un vent de sable soufflait au sud. Le cne
Stehlin fit demi-tour et décida d'aller se poser sur le terrain de
Constantine. Le cne Chainat qui commandait l'autre formation, sans doute plus
familier du vent de sable à cause de son séjour au Maroc alla jusqu'à
Morsott.... ». |
Retour à L’Échelon volant
24 juin 1940 : Le Groupe reçoit l’ordre
de se rendre à Morsott, bled perdu dans les sables et la rocaille situé entre
Tébessa et Souk-Ahras à la frontière tunisienne, à 400 km est/sud-est
d’Alger, plus loin que Constantine. On est le 24 juin. Ce qui est indiscutable :
la 5ème Escadrille décolle à partir de 15h 00 (Cahier d’Ordres)
; LE GLOAN – MARTIN – TRINEL (seconde patrouille), suivis de GOUJON –
CHARDONNET – MERTZISEN et HARDOUIN (troisième), vont arriver sans encombre à
Morsott ; par contre la patrouille JACOBI – de ROUFFIGNAC – BRONDEL,
partie la première 5 minutes avant celle de LE GLOAN, va atterrir à
Constantine ! Le livre de marche de la 6ème Escadrille dit
seulement « Un providentiel (SIC) vent de sable oblige la moitié du Groupe,
conduite par le Capitaine Stehlin, à se poser sur le terrain de
Constantine » et le Cahier d’Ordres de
l’Escadrille cite seulement les 12 pilotes ayant fait le trajet Alger –
Constantine en 4 patrouilles de 3 sans préciser l’heure de décollage. On sait
par ailleurs qu’à l’atterrissage, les avions du capitaine BOULARD de
POUQUEVILLE et du sgt GAUTHIER (6ème Escadrille) se percutent, sans
dommage pour les pilotes. Belle pagaille !
En 1964, Paul STEHLIN, qui
situe d’ailleurs bizarrement cet épisode le 23 (avant l’annonce de l’armistice
avec l’Italie) au lieu du 24, raconte dans ses mémoires cet épisode en
multipliant invraisemblances et contrevérités : « L’Escadrille des masques blancs
(c’est la 5ème qui se pose effectivement à Morsott, mais sous la
conduite de CHAINAT d’après jean Menneglier) part avec Assollant en tête, celle des
masques noirs (c’est la 6ème, celle qu’il dit conduire et
qui va se poser effectivement à Constantine avec lui) suivra à une demi-heure (5
minutes d’après le cahier d’ordres), sous ma conduite. Est-ce parce que je ne connais pas
l'Afrique ou est-ce l'influence d'une grande fatigue, j'ai l'impression que la
visibilité diminue rapidement et que devant nous le ciel s'assombrit. Le fait
est que la formation s’est resserrée, ce qui est bien le signe que personne ne
veut risquer de me perdre de vue. J’ai vingt pilotes (12 tout au
plus !)
qui me suivent, la moitié d’entre eux n’a qu’une courte expérience du vol (Ils
ont tous plus de 20 missions de guerre à leur actif et de nombreuses
citations !). Je regarde la carte, nous ne sommes pas loin de Constantine. Il est
peut-être plus prudent de faire une escale pour obtenir des informations sur le
temps (il n’y a que 20 minutes de vol environ entre Constantine et
Morsott !) ». Il sous-entend à contrario
plus loin en se contredisant qu’il a fait le choix volontaire de se poser à
Constantine pour pouvoir quitter l’Algérie au plus tôt avec ses pilotes, à
destination de Malte, afin d’y poursuivre la lutte à côté des Anglais. Pour
lui, comme dit plus haut, il y avait en effet volonté de toute la hiérarchie de
réduire les escadrilles à l’immobilité en les positionnant loin de tout et sans
possibilité de ravitaillement en essence, voire de remettre les avions aux
italiens.
Plus raisonnablement et plus
simplement, on peut aussi penser que vu le grand encombrement de
Maison-Blanche, la nécessité d’y faire de la place a conduit à répartir dans
l’urgence les escadrilles au mieux sur des terrains pouvant les accueillir,
conformément aux ordres du 17 juin du Général VUILLEMIN, sous la signature du
Général BERGERET, visant à concentrer les forces face à l’Italie. Ce n’est en
effet que le 24 au soir que l’armistice avec l’Italie de Mussolini a été signé,
avec une cessation des hostilités à 0h 35 le 25 au matin. A cette
heure-là, si la cinquième Escadrille est bien à Morsott, sans doute avec CHAINAT
et/ou ASSOLLANT ?, conformément aux ordres de l’État-major, le Commandant
du Groupe et une patrouille de la 5ème (dont son commandant
d’escadrille) se sont posés prudemment à Constantine, en y entraînant toute la
6ème Escadrille.
A propos de Constantine :
« … à la
place du bel aérodrome auquel je m’attends en raison de l’importance de la
ville j’aperçois une sorte de petit terrain d’aéro-club… » écrit Paul STEHLIN dans ses mémoires en poursuivant : « …à Morsott il n’y a
ni logement, ni nourriture, ni rien pour faire vivre un Groupe, c’est le
désert… à Constantine l’hôtel « Transatlantique » est
confortable… ». On comprend mieux ! Il
dit alors vouloir faire revenir immédiatement la 6ème Escadrille à
Constantine, mais qu’on lui intime l’ordre de ne pas le faire, toujours avec
cette volonté générale et organisée d’empêcher les aviateurs de se rallier aux
Anglais. Mais avec la signature de l’armistice dans la nuit, qu’aucun avion ne
soit autorisé à voler à partir du 25 au matin n’a pourtant rien d’étonnant (*) ! Tout cela est bien embrouillé et n’a finalement que peu
d’importance, hormis peut-être celle de présenter l’auteur de ces lignes sous
un jour favorable, plus de vingt ans après les faits, au moment où le Général
de Gaulle est au pouvoir et qu’on aspire à une carrière politique…
(*) Pourtant dans la matinée du 25 juin, le
capitaine JACOBI, commandant de la 5ème Escadrille, qui s’est
détourné la veille de leur destination prévue avec le cne STEHLIN, qui a
préféré le « confort » de Constantine plutôt que les
« sables » de Morsott, fait un aller-retour Constantine-Morsott avec
son Dewoitine 520 codé « 1 », sans doute pour donner quelques ordres
aux pilotes et mécaniciens se trouvant à Morsott (Cahier d’Ordres de la 5ème).
Dans les jours qui vont
suivre, conformément aux ordres donnés aux commandant des deux escadrilles par
leur commandant de Groupe, aussi bien à Morsott qu’à Constantine, les capots
des Dewoitine sont ouvert et les magnétos sont démontés pour interdire tout
départ intempestif (voir photographie plus bas). Il n’est donc vraiment pas
question d’un départ à Malte...!
29 juin 1940 : Morsott était bien la
destination prévue du III/6. Deux photographies prises par le sgt Jules
PIESVAUX de la 5ème le 29 juin y montrent en effet des D.520 du
III/6 et ses camarades mécaniciens ; COLIN et DESFOSSEZ (du stage de
Toulouse) et LE MAT. Au moins ces quatre-là faisaient-ils donc partie de ceux
qui avaient traversé la Méditerranée par avion et qui avaient été dépêchés en
avant-garde sur leur nouveau terrain d’affectation. Par contre les pilotes
posés à Morsott, privés de vol, ont laissé leurs avions sous la garde d'une
unité territoriale et de quelques mécaniciens… pour rejoindre leurs camarades à
Constantine où la vie est bien plus agréable !
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Rares
photographies témoignant de la présence d’avions du GC III/6 à Morsott entre
le 25 et le 30 juin 1940 Photographies Jules
Piesvaux – Droits réservés |
30 juin 1940 : L’échelon roulant qui
a pu récupérer péniblement à Alger ses matériels arrive finalement dans la
soirée du 30 juin à Constantine où les avions sont totalement immobilisés. Les
mécaniciens ne chôment pas ; les machines n’ont pas beaucoup profité de
leurs soins depuis de départ du Luc-en- Provence...
3 juillet 1940 : C’est Mers
el-Kébir ! On remet précipitamment les appareils en état de vol et les
pilotes de la 5ème dont l’appareil est à Morsott y retournent pour
le ramener à Constantine en vue d’une éventuelle opération de protection contre
l’agresseur britannique.
Témoignage oral (2011)
de Mme. Jane ROBERT, veuve du sgt mécanicien Lucien ROBERT du III/6 -5ème
Escadrille « ...J’étais donc à Oran en 1940 au moment de la tragédie
de Mers el-Kébir. L’Amiral Gensoul a refusé à Churchill de prendre le
contrôle de la flotte et les Anglais l’ont immédiatement bombardée : ce
fut une faute. Mais il faut dire que l’Amiral français avait fait d’abord
fait tirer sur la vedette des parlementaires anglais qui venaient à sa
rencontre, sans vouloir engager une négociation, ce que beaucoup lui ont
reproché. Un des bateaux dont tout l’équipage était à bord a immédiatement
été détruit et tous les marins se sont retrouvés au fond de l’eau, les
pauvres, complètement mazoutés : ils sont presque tous morts. Après le
désastre mon père m’a dit : on va aller voir ce que c’est. C’était
terrible, tous les bateaux étaient complètement tordus, à moitié noyés…
c’était affreux, affreux ! J’avais une amie qui était infirmière à
l’hôpital Gaudens, elle m’a dit que les marins qui arrivaient complètement
mazoutés étaient en fait asphyxiés et mourraient comme des mouches… Seul le
cuirassé « Strasbourg » avait pu s’échapper... » |
C’est donc dans des
conditions un peu rocambolesques que tous les personnels, les avions et le matériel
du III/6 éparpillés entre Morsott, Constantine et Alger se retrouvent
finalement regroupés sur le petit aérodrome de Constantine à Kroubs à la fin de
ce triste jour de juillet 1940 qui a vu une partie de la Flotte Française être
détruite par la Royal Navy à Mers el-Kébir ; 1 300 morts ! Pour
fixer cette destination finale, il y a bien dû y avoir des ordres supérieurs
au-delà du choix de son cantonnement qu’aurait fait un simple capitaine,
Commandant d’un Groupe aérien parmi d’autres ! Peut-être que ses anciennes
fonctions politiques à l’ambassade de France en Allemagne, bien que modestes,
rendaient prudents ses supérieurs ce qui lui permettait de s’autoriser quelques
libertés... Une fois tout le monde arrivé tant bien que mal à Constantine,
certains continueront à profiter des « bienfaits » de l’intendance
militaire car pris en subsistance par la 25ème compagnie du train
automobile, tandis que d’autres s’installeront confortablement à l’hôtel
Transatlantique.
Mémoires de Jean
MENNEGLIER « ...Le terrain de Constantine, le Kroubs, était tout
petit. Il avait la forme d'une culotte de petit garçon et était à une
altitude de plus de 1 000 mètres. Le vent soufflait dans la direction où
il était le plus court. Les premiers avions se posèrent dans ce sens. Je fis
moi-même un atterrissage de précaution en m'amenant au moteur à faible
vitesse. Mais d'autres pilotes voulurent se poser dans le plus grand sens
avec vent de travers. A un moment deux avions qui se posaient avec des axes
d'atterrissage différents se tamponnèrent sans autre mal que de la tôle
froissée (*)... » « …on ne pouvait pas reprocher aux Anglais de vouloir
protéger leurs côtes que les Allemands menaçaient directement alors que notre
propre résistance s'était effondrée. Mais Mers el-Kébir nous paraissait comme
un affront, un manque de confiance dans la volonté de notre Marine de
respecter les clauses de l'armistice et de ne pas laisser notre flotte tomber
sous le contrôle allemand. Évidemment plus tard, avec la présence de Darlan
au gouvernement, nous aurions pensé autrement. Bref nous étions prêts à
répondre coup pour coup aux Anglais. Le Groupe III/6 aura l'occasion de le
faire en Syrie mais je l'aurai quitté avant... » |
(*) comme dit plus haut, le cne Hugues BOULARD
de POUQUEVILLE à bord du n°386, percute le n°364 « Mektoub III » du
sgt Gauthier et lui découpe le plan droit. Ce dernier D.520 est bon pour la
réforme, tandis que le n°386 pourra être réparé… lorsque les réparations seront
de nouveau autorisées en atelier, soit près d’un an plus tard ! Ce n’est
que le début d’une longue série. Le sgt Gauthier restera sans avion jusqu’au 24
juin et ne pourra récupérer un autre appareil que le 21 août seulement ;
ce sera le D.520 n°145 qui sera codé « 32 » et baptisé « Mektoub IV ».
Voir photographie plus bas.
°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°
Joseph BIBERT est
certainement heureux de se retrouver une seconde fois en poste sur le sol
africain, après son premier
séjour à Djibouti de 1937-1939, qui fut pour lui si agréable et dont il
conserva la nostalgie sa vie durant.
Il n’aimait pas parler de
lui, et nous n’avons malheureusement pas connaissance de l’activité réelle et
de son état d’esprit pendant la période très agitée entre son départ de
Coulommiers, ses quelques jours passés au Luc, son stage à Toulouse, sa traversée
de la Méditerranée et son arrivée à Constantine. Il n’a pris aucune
photographie pendant cette période. Les trois dernières faites à Coulommiers et
les premières faites à Constantine font partie d’un même rouleau de 8 négatifs.
Pas de trace de correspondance ; aurait-il eu le temps d’écrire
d’ailleurs ? Et à quelle adresse ? Il n’avait plus aucune nouvelle de
son épouse sans doute partie en exode quelque part en France, de sa mère et de
sa sœur en Alsace, si près de l’Allemagne. L’incapacité dans laquelle il était
de leur signaler sa position et le manque de perspectives pour sa vie à venir
ont certainement été des sujets d’inquiétude permanents. Mais comme beaucoup
d’autres, il a tiré par la suite un voile pudique sur tout cela et nous n’avons
pas pu réellement aborder le problème sur le fond avec lui avant sa
disparition.
Une petite anecdote mérite
cependant d’être racontée : au Luc, avant sa mission à Toulouse, il
logeait chez un facteur dont la maison était rose. Dans la précipitation de
l’évacuation de l’hexagone il s’est retrouvé en Algérie sans une partie de ses
effets personnels qui étaient restés dans une valise chez son logeur, dont il
ne se rappelait plus, ni le nom, ni l’adresse. Il a donc écrit d’Algérie à tout
hasard une lettre à « Monsieur le Facteur, Habitant une maison rose, Le
Luc » et il y eut trois miracles consécutifs : son courrier est
parvenu à la bonne destination, ce facteur était honnête et la valise est
finalement arrivée de l’autre côté de la Méditerranée quelques semaines plus
tard, intacte et complète !
Que pensait-il de ce qui
venait d’arriver à la France ? Avait-il entendu parler du Général DE
GAULLE ? Faisait-il totalement confiance comme 95% des français de l’époque
au vieux Maréchal pour sortir le Pays de l’ornière dans laquelle ses dirigeants
l’avaient conduit. Avec le temps et connaissant la fin du film on voudrait
savoir et on imagine. Mais la réalité est sans doute assez simple. Joseph était
un modeste militaire de carrière, il faisait partie du GC III/6 et il
avait confiance en sa hiérarchie. Il a accepté les ordres donnés et il s’est
sans doute adapté à la situation, en faisant simplement au mieux pour que
celle-ci soit la moins mauvaise possible eu égard aux circonstances, et il a
attendu la suite… Le s/lt MENNEGLIER dans ses mémoires, ne dit pas autre chose (voir première partie)...
Finalement, il n’y aura pas
de vraies représailles contre l’Angleterre après Mers el-Kébir ; le
Gouvernement du Maréchal rompt seulement ses relations diplomatiques et envoie
quelques avions bombarder Gibraltar le 5 juillet sans grands dommages pour le
« Rocher ». Le III/6 se retrouve alors en quasi léthargie. Officiers,
sous-officiers, hommes de Troupe, tous en profitent pour visiter longuement la
ville et ses ponts, dont le célèbre Sidi M’Cid suspendu au-dessus des gorges du
Rhummel. Après les épreuves de la campagne de France, c’est un délassement apprécié
et le soulagement se lit sur les visages. Tous ceux qui ont un appareil photo
en profitent car ils ont la chance de trouver encore à acheter quelques
rouleaux de pellicules, denrées rares à cette époque...
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Constantine
– Début juillet 1940 – Les Dewoitine D.520 de la 6ème Escadrille –
Capots ouverts – Magnétos démonté pour les clouer au sol Photographie Joseph
Bibert – Droits réservés |
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Constantine :
Le Dewoitine D.520 n°364 « Mektoub III » du sgt Georges GAUTHIER (6ème),
plan droit arraché lors de l’atterrissage du n°386 du cne
Hugues BOULARD de POUQUEVILLE (E.M.) - Appareil au second plan Photographie |
C’est donc à Constantine que
Joseph termine le rouleau de pellicules photo, commencé lors du bombardement de
Coulommiers, un peu plus d’un mois plus tôt. Il peut recharger son Voigtlander
grâce aux ressources locales et on peut ainsi découvrir les seules
photographies connues d’un si bel alignement de Dewoitine 520, ceux de la 6ème
Escadrille du GC III/6, clichés historiques de grande qualité qu’il a faits du
terrain de Constantine, dont certains à bord d’un Lioré & Olivier
LeO 20 avec lequel il a eu l’occasion de survoler la ville.
Début juillet à Constantine : photographies de l’album n°6 de
Joseph BIBERT
Cliquez sur le bandeau des
miniatures ci-dessus pour ouvrir la page contenant ces photos
Les photographies de
Jules PIESVAUX, Jean MENNEGLIER et Georges GAUTHIER – Droits réservés
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Constantine – Dans les gorges du Rhummel –
Jules PIESVAUX de la 5ème – La passerelle Sidi M’Cid – Le monument
aux morts - Groupe de mécaniciens de la 6ème |
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Constantine – Dans les gorges du Rhummel (à
gauche) et autres vues (au centre et à droite) |
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Constantine – En haut des gorges du Rhummel
(à gauche) – Groupe de mécaniciens de la 6ème(au centre) - Sur le pont
d’El-Kantara (construit entre 1860 et 1863), vers la passerelle Sidi M’Cid (à
droite) |
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Les bains de Sidi M’Cid – GABARD – SATGÉ – X
– PIMONT de la 6ème Escadrille |
Mémoires de Jean
MENNEGLIER « ...A Constantine nous logions à l'hôtel de la Brèche
qui avait pris ce nom probablement parce que c'était à son emplacement que
les murailles de la ville avaient été percées lors de sa prise au siècle
précédent. Sous la fenêtre de ma chambre il y avait un caravansérail où on
chargeait des chameaux qui devaient partir ensuite vers le sud. Le premier
matin, ouvrant l'œil, j'entendis un bruit bizarre qui ressemblait à celui
fait par quelqu'un en train de vomir. Regardant dehors je vis les chameaux
baraqués qui blatéraient à qui mieux mieux pendant qu'on les chargeait de
grands sacs réunis par des cordes nouées au-dessus du bât. Nous établîmes notre popote au restaurant de la piscine de
Sidi M'Cid qui se trouve juste au pied des falaises qui bordent la ville au
nord. Pour y aller on pouvait prendre soit la route qui suit les gorges du
Rhummel et descend ensuite en lacets vers la piscine, soit en faisant un
grand tour pour arriver en bas de la falaise et traverser la rivière par un
pont juste à la sortie des gorges. La piscine était alimentée par une source chaude sortant de la
falaise. Il y avait un ciel bleu et un soleil chaud. Nous faisions souvent
les lézards sur ses gradins après nous être baignés. Ne pouvant plus voler
nous n'avions plus grand chose d'autre à faire… Pour passer le temps nous
nous promenions pour visiter la ville. Capdeviolle avait une carabine 22 long rifle démontable. Un
jour nous allâmes tirer des pigeons dans les gorges du Rhummel qui étaient
accessibles par un sentier escarpé avec de nombreux escaliers. Il y avait au
fond une sorte de piscine remplie d'une eau d'un bleu vert d'une couleur
extraordinaire. Nous descendîmes quelques pigeons qui furent récupérés par de
petits arabes qui traînaient au fond des gorges. Elles sont très pittoresques
à cause de leur profondeur et en deux ou trois endroits le Rhummel qui les a
creusées passe dans un tunnel ou sous des arches de rocher notamment à la
sortie où il tombe en cascade à mi-hauteur de la falaise... » |
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Chez Sidi M’Cid : HARDOUIN, GAUTHIER, LE
GLOAN, PIMONT, GOUJON etc... |
Chez Sidi M’Cid : LE GUENNEC, GUERRIER,
BRIÈRE, ROUSSILLON, PIESVAUX, PÉRALÈS |
Pilotes
du GC III/6 fin juin 1940 |
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État-major |
5ème Escadrille |
6ème Escadrille |
Cne Paul Stehlin Cne André Chainat Cne Jean Bernache-Assollant Cne Hugues
Boulard de Pouqueville |
Cne Roger Jacobi Cne Lt Robert Martin Lt Daniel de Rouffignac S/Lt S/Lt Adj Charles Goujon S/C Gabriel Mertzisen S/C Maurice Chardonnet Sgt Napoléon Trinel Sgt Roger Hardouin |
Cne Lt Georges Legrand S/Lt S/Lt Marcel Steunou S/Lt Marie-Henri Satgé S/Lt Adj Jean Diaz Adj Guy Japiot S/C S/C Paul de Haut de Sigy Sgt Sgt Roger Pimont Sgt Raymond Gabard |
Le général VUILLEMIN, sur le
départ, se fait présenter à Sétif le 6 juillet au cours d’une prise d’armes une
importante délégation des pilotes de l’aviation de chasse en mesure d’y être
présents. Au GC III/6 nombreux sont ceux qui sont mis à l’honneur et qui
reçoivent de ses mains des distinctions :
·
Cravate de commandeur de la
Légion d’Honneur au capitaine CHAINAT,
·
Croix de Chevalier de la
Légion d’Honneur au lieutenant LEGRAND et au sous-lieutenant LE GLOAN,
·
Médaille militaire aux
adjudants JAPIOT et GOUJON,
·
Croix de guerre au capitaine
GUERRIER, sous-lieutenants STENOU, SATGÉ, MENNEGLIER, CAPDEVIOLLE, au
sergent-chef LE GUENNEC et aux sergents GAUTHIER, GABARD, PIMONT et BOUIN.
Mémoires de Jean
MENNEGLIER « ...Un jour le groupe alla par la route à Sétif pour
assister à une prise d'armes pour une remise de décorations. J'avais eu droit
à une citation à l'ordre de la Brigade aérienne pour la mission pendant
laquelle nous avions été tirés par la D.C.A. sur la Somme, ce qui ne
représentait pas une performance remarquable. Je la pris comme une
compensation pour n'avoir fait qu'apercevoir un Dornier pendant toute la
durée de « ma guerre ». Il est vrai qu'on distribuait, paraît-il,
des croix de guerre aux soldats qui se présentaient à Toulouse ou à Périgueux
porteurs de leur arme après avoir fait la retraite. Le gouvernement de Vichy
fit d'ailleurs procéder à une révision générale de toutes les décorations et
en profita pour changer la couleur du ruban qui était rouge et noir par du
vert et noir en signe de deuil... » |
Un état daté du 10 juillet
donne la liste des 27 Dewoitine D.520 affectés au GC III/6 incluant les
deux appareils accidentés le 24 juin (HS), mais sans le préciser :
·
- quatre à
l’État-major : n°331 (A), 302 (S), 314 et 386 (HS)
·
- onze à la 5ème
Escadrille : n°229 (1), 301 (2), 362 (3), 349 (4),
277 (6), 340 (7), 284 (8), 360 (10), 367 (11),
368 (12) et 369 (X)
·
- douze à la 6ème
Escadrille : n°313 (21), 357 (22), 330 (24), 356 (25),
358 (26), 346 (27), 174 (28), 138 (29), 295 (30),
321 (31), 364 (32) (HS) et 197 (33).
Un état daté du 15 juillet à
Maison Blanche concernant les mêmes appareils précise que les n°364 et 386 « gravement accidentés à l’atterrissage
à Constantine ont été laissé sur place et vont être versé au parc d’Hussein-Dey
, sur ces avions les moteurs sont récupérables ». Mais comme indiqué
plus haut, devant la pénurie d’appareils, le n°386 sera finalement réparé et
reversé au Groupe un an plus tard.
ALGER
11/07/1940 – 15/01/1943
Tout change militairement
après Mers el-Kébir. L’État-major du gouvernement du Maréchal doit maintenant
défendre ses colonies contre des éventuelles agressions britanniques, et c’est dans
ce cadre que le Groupe II/6 est rappelé à Alger Maison Blanche le 11 juillet
1940 pour être au plus près de la côte algérienne.
Le cne STEHLIN, fidèle à
lui-même, veut impressionner. Il organise un défilé aérien qui survolera à 500
mètres d’altitude Constantine au départ et Alger à l’arrivée, avant
l’atterrissage du Groupe à Maison-Blanche. Lui en tête, suivi de 10 patrouilles
légères, 5 de la 5ème et 5 de la 6ème comme le montre le
cahier d’ordres de la 5ème Escadrille de cette journée.
|
Terrain
de Maison Blanche vers 1935 – Les installations militaires – Plus loin, le
village et la baie d‘Alger au nord-ouest A droite,
les installations initiales civiles le long de la route « GC 16 »
qui reliait le village de M.B. à Fondouk au sud-est Cette zone est actuellement au centre de
l’aérodrome international Houari Boumédiène Collection |
L’échelon roulant,
c’est-à-dire l’unité administrative du Groupe, les sous-officiers non pilotes
et la troupe vont dorénavant cantonner au camp d’Oued-Smar, situé à moins de
deux kilomètres à l’ouest de Maison-Blanche le long de la voie ferrée, avec une
gare et quelques anciens bâtiments militaires rudimentaires (voir carte plus
haut).
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Juillet
1940 - Installation de l’échelon du GC III/6 au cantonnement d’Oued-Smar (2km
à l’ouest de Maison Blanche) On
reconnaît des mécaniciens des deux escadrilles L’adj
COLIN au centre présente ce qui pourrait être un morceau de métal déformé où
on semble lire « RSAG » ? A gauche, s/c Joseph BIBERT (6ème)
avec son béret – A droite, sgt Jules PIESVAUX (5ème) une main dans
le dos Photographie Jules Piesvaux
– Droits réservés |
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Oued-Smar – Le service administratif du III/6
autour du lieutenant MIRAND qui le commande Collection |
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Oued-Smar
– Jules PIESVAUX et Yves LE MAT (5ème) inséparables amis... Photographie Jules Piesvaux
– Droits réservés |
Les amis
de Joseph BIBERT : Omer BORREYE (5ème) Lucien ROBERT dit « Bob » et Jean
EMERY (6ème) Photographie Jules
Piesvaux – Droits réservés |
Les
lieutenants MIRAND (service administratif) et BRAUDEAU (mécaniciens) en visite dans les
environs Collection |
Inventaire du matériel roulant du GC III/6 Alger le 13
juillet 1940 |
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Types de
véhicules |
Marque |
Nombre |
Voiture de liaison |
Simca |
1 |
|
Renault
Vivasport |
2 |
|
Peugeot
402 B |
1 |
Camion 2 tonnes |
Matford |
4 |
|
Matford En réparation au Parc d’Artillerie de Constantine |
1 |
|
Matford En instance de réforme au Parc de la Base de Sétif |
|
|
Renault Réquisitionné |
1 |
Camion 2,5
tonnes |
Renault Réquisitionné |
1 |
Camion |
Hotchkiss Réquisitionné |
1 |
Camion 3 tonnes |
Latil |
1 |
Camion 5 tonnes |
Matford |
1 |
|
Renault |
4 |
Camion + équipement Aérazur Entretien des radios |
Latil |
1 |
|
Hotchkiss |
1 |
Autobus |
Rochet -
Schneider |
1 |
Camion insuflateur air chaud |
Citroën
+ Técalemit |
3 |
Remorque magasin |
Coder |
1 |
Remorque armurerie |
Coder |
2 |
Cuisine roulante |
|
1 |
Voiture de liaison |
Simca |
1 |
Les choses se calment un peu ensuite
avec les anglais même si la presse algéroise, en quelques jours, fait
allégeance complète au régime du Maréchal. Le Groupe est en partie
démantelé ; c’est une vraie période d’hibernation d’environ 10 mois qui
commence. Comme à Constantine ceux du III/6 peuvent aussi prendre le temps de
visiter Alger et de profiter de la mer Méditerranée.
Mémoires de Jean
MENNEGLIER « ...Lorsque nous ne volions pas, nous nous promenions
dans Alger où nous allions prendre des bains de mer dans une petite crique
rocheuse à l'est de la ville vers Fort-de-l’Eau. On y retrouvait la jeunesse
pied noir. Les jours de tempête les vagues déferlaient sur les rochers jetant
des gerbes d'écume jusque sur la route du bord de mer. Je ne me lassais pas
de la contempler. Il y avait dans les rues ou sur les places des petits kiosques
où on pouvait prendre un café crème le matin. En consommant dans celui qui
était en face de la poste j'aperçus sur une étagère des gâteaux qui
ressemblaient à des chaussons aux pommes. J'en demandai un et eus du mal à
avaler la première bouchée. C'était un chausson au poivron vert. Quand on
n'est pas habitué à ce genre de friandise, ça passe difficilement. Le reste
du chausson fut balancé subrepticement dans une bouche d'égout. On prenait l'apéritif à des terrasses en plein air,
généralement devant l'opéra. A peine assis il fallait se défendre contre les
petits « yaouleds » qui voulaient à toute force vous cirer les
chaussures même quand elles étaient propres et vous mettaient d'autorité le
pied sur leur boîte. De temps en temps on les laissait faire. Il y en avait
d'autres qui vendaient des journaux. C'était drôle de les entendre crier : « L'icou
d'Algi » (l'Echo d'Alger) ou « La Dipiche » ». |
Juillet 1940 à
Alger : photographies Jules PIESVAUX – Jean MENNEGLIER
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Alger – Sur le port |
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La baie d’Alger d’ouest en est : Notre
Dame d’Alger et Bab-el-Oued (à gauche)– La jetée du nord (au centre) –
Fort-de-l’Eau et le Cap Matifou (à droite) |
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La Méditerranée |
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|
Dans la Kasbah d’Alger (à droite) |
Des départs et arrivées de
pilotes sont enregistrés, mais certains nouveaux ne peuvent être maintenus pour
respecter les exigences de la commission d’armistice (*) italienne dont le contrôle s’exerce dans tous les domaines :
(*)
« Commission d’armistice : organisme qui en trois mois, doit faire
d’un aviateur invaincu, un civil plein d’amertume » peut-on lire dans un
livre de marche…
Départs |
Arrivées |
Noms |
Observations |
29/07/40 |
|
Sgt
TRINEL |
démobilisation |
17/08/40 |
|
Cne
CHAINAT |
démobilisation |
17/08/40 |
|
Cne
ASSOLLANT |
démobilisation |
17/08/40 |
|
S/c DE
HAUT |
libération |
|
25/08/40 |
Sgt LINARD (5ème) |
du III/2 |
|
25/08/40 |
Sgt
MONRIBOT (5ème) |
du III/2 |
|
03/09/40 |
S/lt SAUVAGE (5ème) |
du III/9 |
|
03/09/40 |
Adj KUNTZEL(5ème) |
du III/9 - |
|
04/09/40 |
Sgt
MEQUET (5ème) |
du I/9 |
|
04/09/40 |
Sgt
MARGERIT (5ème) |
du I/9 |
|
09/09/40 |
Sgt
GHESQUIÈRE (6ème) |
du III/3 |
|
09/09/40 |
Sgt
MICHAUX (6ème) |
du I/9 |
|
10/09/40 |
Sgt
COISNEAU (5ème) |
du II/4 |
|
18/09/40 |
S/lt
GUILLOU (6ème) |
du II/4 |
21/09/40 |
|
Sgt LINARD (5ème) |
Jeunesse
et Montagne |
04/10/40 |
|
S/lt SAUVAGE (5ème) |
congés d’armistice |
15/10/40 |
|
Cdt
STEHLIN |
État-major
DARLAN à Vichy |
18/10/40 |
|
Adj
GOUJON |
S.C.L.A. |
22/10/40 |
|
Adj DIAZ |
Indochine |
23/10/40 |
|
Lt
LEGRAND |
congés
d’armistice |
25/10/40 |
|
Adj KUNTZEL(5ème) |
démobilisation |
??/09/40 |
|
Lt
BOIRIES (6ème) |
du
III/10 |
22/11/40 |
|
Cne
RICHARD (État-major) |
du I/9 |
01/12/40 |
|
Lt de
ROUFFIGNAC |
Jeunesse
et Montagne |
01/12/40 |
|
S/lt
MENNEGLIER |
Jeunesse
et Montagne |
01/12/40 |
|
Sgt GAUTHIER |
Jeunesse et Montagne |
|
27/12/40 |
S/lt
RIVORY (6ème) |
du I/55 |
01/04/41 |
|
Sgt
GROSDEMANCHE |
retour
III/6 - grièvement blessé le 20/09/1939 |
21/04/41 |
|
Sgt
GABARD |
libération |
22/04/41 |
|
Sgt
HARDOUIN |
libération |
23/04/41 |
|
S/c LE
GUENNEC |
vers centre
de Chasse de Blida |
23/04/41 |
|
S/c CHAMBON |
vers centre de Chasse de Blida |
23/04/41 |
|
S/c
MARGERIE |
vers
II/3 |
24/01/41 |
|
Lt LEGRAND |
retour III/6 |
|
24/04/41 |
Adj
BRODEAUX |
?? |
|
28/04/41 |
Sgt GAUTHIER |
retour III/6 |
03/05/41 |
|
Cne
GUERRIER |
État-major
Air A.F.N. |
|
06/05/41 |
S/c CHAMBON |
retour III/6 |
|
22/05/41 |
S/c
RAVILY |
du
III/23 via le I/3 |
|
22/05/41 |
S/c
ELMLINGER |
du III/2
via le I/3 |
|
23/05/41 |
Sgt
SAVINEL |
du I/9 |
|
23/05/41 |
Sgt
MORALES |
du I/9 |
Concernant le marquage des
avions, il faut savoir que dès le 9 juillet la note 3456/3-S stipule que tous
les avions doivent porter sur leurs flancs une bande blanche d’une largeur de
10 cm avec un liseré de 5 cm autour de la cocarde ; sa longueur n’est pas
précisée. Cette bande blanche a une origine tragique : le 21 juin 1940, le
s/lt Robert d’HARCOURT du GC II/3, fils du général Bernard d’HARCOURT,
inspecteur Général de la Chasse, pilotant le D.520 n°112, a confondu le Potez
631 de l'ECN 4/13 détaché à la 1/13 avec un Messerschmitt 110 et est passé à
l’attaque, criblant d’obus l’aile du Potez. Le mitrailleur arrière de l’avion
de reconnaissance français, à la 3ème passe, s’estimant en légitime
défense, a riposté et le D.520 et son pilote se sont écrasés à coté de Senlis.
En toute urgence le Général PINSARD, par sa circulaire n°2379/Gr.21/ES du 26
mai 1940, a demandé alors à ce qu’une bande blanche soit peinte sur tous les
Potez 63. Par extension, après Mers el-Kébir, la note du 9 juillet généralise
cette marque à tous les avions d’A.F.N. au
Par exemple : sur la
photographie non datée de droite ci-dessous on reconnaît de gauche à
droite ; adj Guy JAPIOT, adj Auguste KUNTZEL, sgt Raymond GABARD, adj Jean DIAZ,
devant le D.520 n°197 « Le Sachem » de GABARD qui ne porte pas encore
la bande blanche alors qu’elle est visible sur les photographies faites le 22
juillet 1940 lors de sa destruction (voir plus bas). Or l’adj KUNTZEL n’a été
affecté au III/6 que début septembre venant du GC III/3, et on sait par son
petit carnet de guerre personnel qu’avant cela il n’a été présent à Maison
Blanche que du 23 au 25 juin 1940 (le GC
III/3 a traversé la Méditerranée le 20 juin, pour se poser à Bône, puis partir
pour Relizane via Alger le 22 - sans doute y a-t-il eu quelques retardataires
dont l’adj KUNTZEL ? - et s’installer finalement le 12 juillet à Fès au
Maroc avant d’être dissous en août). D’autre part nous possédons une photo
faite au CIC de Montpellier au printemps 1940 alors que l’adj KUNTZEL était de
moniteur du sgt GABARD. En conclusion cette photo a sans doute été faite le 24
juin à Maison Blanche, peut-être au moment du départ de la 6ème
Escadrille du III/6 pour Morsott, quand l’ancien moniteur est venu saluer son
ancien élève pendant que l’adj JAPIOT étudiait la carte d’Algérie pour
localiser cette localité et préparer son vol...
|
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C.I.C. de
Montpellier - Printemps 1940 : X, adj KUNTZEL et MILLET, moniteurs, sgt
GABARD en formation devant le MS.406 n°1027 Alger Maison
Blanche – 24 juin 1940 (par déduction) : adj JAPIOT, adj KUNTZEL, sgt
GABARD, adj DIAZ, devant le D.520 n°197 « Le Sachem » de GABARD Photographies
Auguste Kuntzel – Droits réservés – Merci à |
Autre exemple : cette
photographie de la collection de Raymond PIMONT, alors sgt à la 6ème
Escadrille du III/6 sans légende. On peut identifier un Potez 63-11, un
Dewoitine 520 sans bande blanche, mais ses marques montrent qu’il appartient à
la 5ème Escadrille du GC III/3, le trimoteur Marcel Bloch MB 120
F-AMSZ qui assurait en juin 1940 la ligne régulière pour Air Afrique et le
Savoia Marchetti SM-83 « OO-AUE » de la SABENA n°20.07.38 446,
appareil initialement réquisitionné par Vichy à Alger, remis à l’École de
Pilotage Militaire Belge réfugiée en A.F.N., mais finalement remis aux italiens
le 30 août 1940. Cette photo pourrait donc avoir été prise début juillet 1940.
|
Alger
maison blanche – Sans doute le 24 juin 1940 – Potez 63-11, D.520 du GC III/3,
MB 120, Savoia Marchetti SM-83 Collection Raymond
Pimont via Rémy Denizot |
Juillet 1940 : L'activité aérienne
est officiellement réduite à 4 heures de vol par mois et par pilote. Seule, une
fraude bien organisée, permet à certains de voler un peu plus.
Un accident qui aurait pu
avoir des conséquences terribles a lieu sur l’aérodrome de Maison-Blanche le 22
juillet 1940, sans doute dû au manque d’heures de vol d’entraînement. A
14h 10 le s/c Paul DE HAUT prend le départ sur le D.520 n°199 en vue de
convoyer cet avion à Constantine sans savoir que le D.520 n°197 du sgt Raymond
GABARD, de la 6ème Escadrille comme lui, avait dû atterrir
2h 00 plus tôt en vol plané, hélice calée suite à une panne de moteur à
2 000 mètres d’altitude au-dessus de la mer, qu’il n’avait pas été déplacé
et qu’il se trouvait encore sur le terrain dont les bords étaient d’ailleurs
toujours encombrés par de nombreux appareils convoyés à Alger avant
l’armistice. Aveuglé par l’immense capot moteur du D.520, il n’aperçoit
l’obstacle que trop tard et étant déjà à grande vitesse, il tente de décoller
mais ne peut éviter une collision brutale. Le pilote s’en sort miraculeusement
avec trois semaines d’hôpital mais les deux avions dont détruits.
|
|
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Alger Maison
Blanche – 22 juillet 1940 - Les débris des Dewoitine 520 n°199 du s/c DE HAUT
et n°197 « Le Sachem » du sgt GABARD, tous deux de la 6ème
Escadrille, après l’atterrissage mal maîtrisé du premier cité Sur la photographie de gauche on aperçoit
entre les deux carcasses un trimoteur MB.120 en phase d’atterrissage Collection Raymond
Gabard via |
Le s/c de HAUT avait été
affecté d’office au III/6 parce qu’il avait demandé à effectuer la traversée de
la Méditerranée avec ce Groupe le 20 juin. Cela n’avait sans doute pas plu à
son Commandant qui, après une enquête rapide, estime dans son rapport au Commandant
de la B.A. de Maison-Blanche (n°443/G.C.3/6) que le pilote aurait dû passer
soit à droite, soit à gauche !!! … et qu’il porte donc l’entière
responsabilité de l’accident. En conséquence et comme à son habitude, il veut
une sanction et demande sa radiation immédiate du personnel navigant ;
rien de moins ! Paul Louis Marie JACOBÉ de HAUT de SIGY (1906-1995), un
des 5 enfants de
C’est seulement le 16
septembre qu’un nouvel appareil, le n°311 (33), pourra être affecté au sgt
GABARD.
Le GC III/6 à Alger – Maison -Blanche en
juillet / août 1940
|
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Dewoitine D.520 du GC III/6 à Maison Blanche
– Au centre le n°368 « 12 » et le fameux n°277 « 6 » du
s/t LE GLOAN (5ème Escadrille) et dehors les n°346 (27), n° 174
(28) et 138 (29) (6ème Escadrille) |
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D.520 n°358 « 26 - Quo Vadis » du s/lt
MENNEGLIER (6ème) |
Avion école Caproni Ca 164 acheté à l’Italie
- D.520 n°48 « II » du GC I/3 (*) |
Breguet 693 – Groupe indéterminé |
Photographies
Jean Menneglier – Droits réservés
(*) Le Dewoitine 520
n°48 est un des trois avions utilisés pour les essais d'endurance en avril 1940
(n°47 à 49) qui étaient codés de la sorte de I à III. Affecté ensuite au GC
I/3, il est resté à Alger le 10 juin 1940 lors du transfert de ce Groupe de
Perpignan à Kalaa–Djerda en Tunisie via Oran, Alger, Tunis et Oudna entre les
17 et 21 juin 1940. Récupéré par la 5ème Escadrille du III/6, il
porte encore ici les marques du GC I/3. Il sera codé « 5 » et fera le
déplacement de Casablanca, voir une photographie plus bas. Accidenté le 24
janvier 1940 à Oran où il restera indisponible une bonne partie du début de
l'année 1941, il rejoindra Alger avant le départ du III/6 pour le Levant en mai
1941, mais il sera échangé avec le n°146 du II/7 au passage du Groupe à Tunis
le24 mai 1941.
C’est en janvier 1940
que la France a commandé en Italie 100 Caproni Ca.164 pour ses écoles
d’aviation pensant ainsi montrer à Mussolini sa bonne volonté politique et
calmer ses ardeurs belliqueuses. La production s’est poursuivait jusqu'en lai
et environ 70 avions ont été livrés en France. L’Italie a ensuite récupéré 16
avions après son occupation du sud de la France en 1943.
Profil des
Dewoitine n°277 « 6 » de la 5ème (LE GLOAN) et n°358
« 26 Quo Vadis » de la 6ème Escadrille (MENNEGLIER) -
Avant et après le marquage des avions de l’armistice
|
|
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D.520
n°48 « 5 », n°284 « 8 », n°329 « 9 » de la 5ème
Escadrille, n°331 « A » (STEHLIN) et n°314
« S » (CHAINAT) |
S/lt SATGÉ et adj DIAZ de la 6ème
Escadrille |
Cne STEHLIN et sgt PMONT de la 6ème
Escadrille |
Photographies
Jean Menneglier et Collection Raymond Pimont via Rémy Denizot – Droits réservés
Dewoitine
n°331 « A » du cne STEHLIN, commandant du Groupe III/6
Photographie
à gauche Auguste Kuntzel – Droits réservés
Profil du
Dewoitine n°313 « 21 » du capitaine GUERRIER, commandant la 6ème
Escadrille et du capitaine SAUTIER n° 369 codé « X » affecté à
l’État-major du III/6
Août 1940 : La nouvelle
organisation des Forces Aériennes de l’armistice en A.F.N. est définie le 9
août 1940. Le Groupe de Chasse GC III/6 à Maison-Blanche (D.520), le
GC I/3 à Oran (D.520), le GC II/3 à Maison-Blanche (D.520) sont
rattachés au « Groupement de Chasse 26 » de Maison-Blanche qui doit
opérer en coopération avec le « Groupement 3 » constitué des GB
I/11 à Oran (LeO 451), I/19 à Sétif (DB-7) et II/61 à Blida (DB-7)
(Bombardement), ainsi qu’avec les GR I/52 (?) et II/52 à Oran (Bloch 175) et
I/36 à Sétif (Potez 63.11) (Reconnaissance).
Trois pilotes sont
démobilisés et un piloté libéré.
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L’État-major
du III/6 : lt BRAUDEAU (officier mécanicien), cne CHAINAT, cne STEHLIN, cne ASSOLLANT, cne de RIVALS-MAZÈRES, s/lt
Armand LOTTI (renfort services administratifs) |
LOTTI, de
RIVALS-MAZÈRES, BRAUDEAU, CHAINAT, STEHLIN et ASSOLLANT Dewoitine 520 n°314 du capitaine CHAINAT orné
de la bande des « As » et de la cigogne de la SPA 3 |
16 août 1940 –
Avant le départ des capitaines
Collection et photographies Georges GAUTHIER – Droits
réservés
La page du capitaine Chainat La page du capitaine Assollant
Après le
départ du capitaine Chainat, la bande des « As » et la cigogne de la
SPA 3 ont été masquées par un camouflage provisoire sur le Dewoitine n°314
Cet avion sera utilisé principalement par le
capitaine SAUTIER et il recevra finalement le code « 12 » ; voir
la photographie à Casablanca plus bas
L’arrivée de Julienne BIBERT à Alger
19 août 1940
Joseph BIBERT obtient enfin
une information sur le sort de son épouse Julienne le 20 juillet via Edmond
CHÉDEVILLE, un cousin de celle-ci qui est facteur à Philippeville et à qui elle
a écrit.
Celle-ci a été évacuée le 12
juin de Chartres sur Bordeaux avec le personnel militaire et civil du Parc
1/122 où elle travaillait comme secrétaire comptable. Lors de l’armistice les
personnels civils sont licenciés et laissés totalement en plan. Ils doivent se
débrouiller tout seuls, tandis que les militaires se déplacent d’une manière
anarchique de la Gironde au Périgord en convoi en attendant d’être fixés sur
leur sort. Julienne s’est décidée avec obstination et courage à les suivre à
distance avec sa bicyclette qu’elle avait réussi à placer dans un des camions
du convoi, jusqu’à ce que le 6 juillet 1940, elle obtienne enfin le
renseignement précieux qu’elle attendait. Elle écrit dans son carnet :
Samedi 6 juillet 1940 : « Départ de Melle Saintif à la Réole pour Mautauban. Je vais
au château du Mirail (**) pour essayer d’avoir des nouvelles de Dolph (*). Sans
résultat.
Vu lieutenant Sautheron
dans la soirée : le 3/6 est en Afrique.
Cafard et désespoir. »
(*)
« Dolph » diminutif de Adolphe, second prénom de Joseph, usuel en
Alsace,
(**) à
10 km de Bazas en Gironde où elle avait trouvé un gîte, château où
s’étaient installés les militaires du parc 1/22
Rien de plus comme
information : à partir de là, sa décision est prise, elle partira au plus
vite en Algérie le rejoindre. Elle écrit immédiatement à son cousin Edmond pour
obtenir plus de renseignements. Celui-ci reçoit son courrier 10 jours plus tard
et finit par trouver un moyen, malgré la censure, de localiser le III/6 et de
faire transmettre par un officier qu’il peut joindre au téléphone le 20 juillet
l’adresse que Julienne lui a donnée : « Parc 1/122 - Savignac - Gironde » et il lui écrit une lettre pour lui fournir des recommandations
afin de pouvoir s’embarquer à Marseille, mais la missive n’arrivera pas à
destination et lui sera retournée (enveloppe ci-dessous). Elle reçoit seulement
un télégramme le lendemain 21 juillet : le
Enveloppe de
la lettre d’Edmond CHEDEVILLE à Julienne CHEDEVILLE du 20 juillet, non
parvenue, retournée à l’envoyeur
Elle apprend dans le même
temps que sa mère et d’autres membres de sa famille partis en exode, ont échoué
à Vodable, petit village perdu dans le Puy-de-Dôme à 50 km au sud de
Clermont-Ferrand, à près de 400 km de Savignac où elle se trouve... Qu’à
cela ne tienne !
Sur sa bicyclette, elle fera
donc par étapes la route pour rejoindre Vodable à travers les monts du Massif
Central ; elle y embrassera sa mère le 31 juillet. Il lui faudra deux
semaines pour préparer son voyage vers l’Algérie et obtenir les papiers nécessaires
pour cela. Elle prend le train le 16 juillet à 16h 00 à Issoire, emmenant
avec elle sa précieuse bicyclette, arrive à Marseille le lendemain matin,
samedi 17 août à 8h10.... Dans son carnet :
Samedi 17 août 1940 : « Cie Transatlantique.
Bagages.
Départ de France à 11h (*).
Marseille disparaît dans la brume et dans la fumée. Je vais vers toi Dolph
chéri et je suis heureuse. La mer est belle. Je t’aime.
Après le dîner je rêve
longuement sur le pont.
Le clair de lune fait sur
la mer une coulée d’or vivant. Nous apercevons au loin les côtes d’Espagne. Je
rentre à regret dans la cabine à 23h30. Deux nuits seulement me séparent de toi
que j’aime mon mari chéri et cela fait battre mon cœur délicieusement.
(*)
Paquebot Gouverneur Général GUEYDON
Dimanche 18 août 1940 : « Levée tôt je
m’installe sur le pont où il fait frais et bon et je t’adresse Dolph chéri mes
pensées les plus tendres.
La terre d’Afrique
apparaît.
Après déjeuner et la sieste sur le pont, visite des machines du
bateau et de la cale. Apéritif avec le Commandant Jourdain et l’Officier
Mécanicien.
Lundi 19 août 1940 : « Journée d’impatience
et de fièvre. Une angoisse m’étreint quand je découvre Alger. Dolph sera-t-il
là ? Alger la blanche se précise, belle imposante. Sera-t-il là ?
Le jeune couple va donc
pouvoir profiter un temps d’une vie calme, même si les conditions matérielles
sont précaires, sans connaître les grandes difficultés de celles et ceux eux de
leurs familles qui essayent tant bien que mal de retrouver un sens à leur
existence incertaine, à Chartres malgré l’occupant, où en Alsace de nouveau
allemande car immédiatement annexée par le Grand Reich.
Après un séjour de jeunes
mariés à l’Hôtel de l’Oasis, ils peuvent emménager à Fort-de-l’Eau au n°71 de
l’avenue Gueirouard, dans une petite mais agréable maisonnette située à
quelques centaines de mètre de la mer, louée... à un facteur !
Fort de l’eau
avant-guerre – L’avenue GUEIROUARD est la troisième à partir du bord de mer
dans « La Station » construite à la fin du XIXème siècle
Lire : L’incroyable
vie de Gabriel GUEIROUARD
NOUVEAU En
2023, après de patientes recherches, j’ai pu retrouver la trace et prendre
contact avec un habitant de Fort-de-l’Eau, M. Jean Pierre LIVI, né en 1934 et
ayant habité avenue Gueirouard jusqu’en 1954. Après des études supérieures en
métropole et son diplôme d’ingénieur à « sup-aéro », il a fait une
brillante carrière dans la propulsion des fusées des programmes français et
européens. Je le remercie de m’avoir permis de publier ses quelques lignes de
souvenirs de sa jeunesse en Algérie : Témoignage de
Jean-Pierre LIVI, de Fort-de-l’Eau « C'est avec grand intérêt que j'ai lu vos documents en
particulier celui sur le sieur Gueirouard D'après le plan de situation
d'époque notre domicile était situé sur la ligne jouxtant les exploitations
maraichères et pas loin de celle de vos parents (n°71), puisque notre maison
était au n°84. Certaines villas avaient dû être modifiée depuis leur
construction car on y trouvait des salles de bain, des véranda vitrées, des
garages, aménagements non présents dans les plans initiaux. J'ai noté les remarques concernant les villas du bord de mer
« de style anglo-normand » que confirme cette carte postale datant
vraisemblablement de 1910. Les souvenirs que j'en ai sont différents :
seules quelques-unes avaient conservé ce style mais pour l'essentiel elles
avaient été « modernisées » pour satisfaire aux exigences des
propriétaires dans les années 30 . Ceux-ci, pour l'essentiel, étaient des
colons de la Mitidja (région de Blida).
J'ai aussi dévoré l'histoire du groupe de chasse GC III/6 où
était basé votre père pendant la guerre. Lorsqu’il a été affecté
temporairement au SCLA et qu’il travaillait dans les ateliers de l’A.I.A. à
Maison-Blanche, il a très probablement rencontré mon père qui était alors
responsable de l'atelier de révision des moteurs. Autre aspect intéressant de votre texte, l'arrivée des
anglo-américains le 8 novembre 1942 et les états d'âme de certains
que l'on peut comprendre au début, compte tenu des coups tordus de nos
« alliés (1) » anglais, à Mers-el-Kébir par exemple. (1) Alliés car la France n'était plus
belligérante mais n'avait pas à ma connaissance dénoncé les traités avec la
GB. L'évocation des montagnes de matériel US me rappelle
l'étonnement de mon père qui galérait pour avoir du matériel de rechange (en
« caviardant » l'absent sur des moteurs hors-d'usage) alors que son
homologue américain ne cherchait même pas à réparer la défaillance, allant
chercher un ensemble neuf en magasin ! Il s'en suivait une
poubellisation démente de composants, en particulier des roulements à billes
dont nous gamins étions friands pour fabriquer des « chariots » (à
l'époque nous fabriquions nos jouets pour l'essentiel). Avec mes copains plus âgés nous allions de Fort de l'Eau à
Maison Blanche à vélos où les gardes nous laissaient nous servir et parfois,
en plus, nous donnaient « chocolate, chewing‑gum". Ma fréquentation de l'aérodrome avait commencé bien plus tôt, en 1936, date de mon baptême de l'air à l'âge de 2 ans sur un Caudron (différent de celui de la photographie ci-dessus) pour me soulager d'un problème médical à la gorge (amygdales ou végétations ?) : il se disait alors que la décompression par l'altitude était bénéfique pour soigner rapidement ces inflammations ! Je ne me souviens plus si cette petite excursion dans les airs eut un résultat positif sur le plan médical, mais peut-être contribua-t-il à ma passion pour les choses de l'air et puis plus tard de l'espace… » |
Cependant les communications
avec leur famille sont provisoirement impossibles. Quelques lettres pourront
passer grâce à l’intermédiaire d’un « porteur » occasionnel ; à partir
de septembre, il ne reste plus officiellement que les invraisemblables
« cartes interzones » à 13 lignes « à biffer ou à
compléter » avec seulement deux lignes libres. Il faudra attendre juin
1941 pour pouvoir correspondre un peu plus facilement sur des cartes non
illustrées avec un recto vierge, mais censure oblige, il faut rester
prudent ! Après le débarquement des Alliés du 8 novembre 1942 en A.F.N. le
lien sera coupé jusqu’à septembre 1944, après le débarquement de Provence.
Joseph apprendra malgré tout
que son village natal de Marckolsheim en Alsace a été détruit en juin 1940 et
de que la maison de sa famille, heureusement saine et sauve, est trop
endommagée pour être habitable.
Cliquez sur le bandeau des
miniatures ci-dessus ou ci- dessus pour ouvrir la page contenant ces photos
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Alger
Maison Blanche – Août 1940 – Le capitaine STEHLIN et son Dewoitine n°321 codé
« A » -Masque sévère (5ème) et rieur (6ème) Collection Jean Emery-
Droits réservés |
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Le sous-lieutenant LE GLOAN est devenu la gloire du Groupe le 15 mai 1940 et même s’il n’a pas
volé ce jour là sur cet appareil mythique, le n°277 codé « 6 », son
Dewoitine habituel, ses mécaniciens l’ont fièrement décoré de la bande des
« As » et ont posé avec le pilote pour cette photographie restée
célèbre car souvent publiée sous diverses formes dont des cartes de
collection en diverses langues... Mais eux, sont restés les grands anonymes
de l’Histoire ! Profitons de cette page pour leur rendre l’hommage
qu’ils méritent ! De gauche à droite : · l’adj René COLIN, chef de
Hangar de la 5ème Escadrille, dit « le père Co» originaire de
Châteauroux, · le 2ème classe GUILLUMETTE · Le sgt COLIN, dit
« le fils Co » originaire de Pont à Mousson. Collection Joseph
Bibert – Droits réservés |
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20 août 1940 : Un Potez 650 dans le
« bled » :
Mémoires de Jean
MENNEGLIER « ...Je logeai avec plusieurs officiers dans un hôtel réquisitionné,
le Family Hôtel, situé dans une rue parallèle à la rue Bab-Azoun, à deux pas
du Square Bresson et du port. La popote fut établie dans un hôtel qui donnait
sur la place du Gouvernement près de la Poste principale. Et le traintrain
d'une vie qui n'était pas tout à fait celle d'une garnison commença. On
montait au terrain tous les matins avec un car et on en redescendait le soir.
Il devait y avoir un service d'alerte pour lequel quelques pilotes et
mécaniciens montaient au terrain avant le lever du jour. Il y avait quelques
vols d'entraînement. On nous utilisa même pour convoyer des avions. J'allai à
Oran avec un Potez 25 TOE, modèle spécial pour les vols outre-mer, qui devait
être passablement déréglé car je n'arrivais pas à tenir un cap correct
avec... ... Un jour je partis avec quelques pilotes pour aller
rechercher des Dewoitine laissés à Constantine. Nous partîmes avec un Potez
650 qui était une version transport de passagers du bombardier Potez 540. Un
des moteurs se mit à cafouiller. Le pilote se posa dans un grand champ à
Bouïra (Kabylie). Pendant que le mécanicien recherchait et réparait la panne
nous fumes entourés par une foule d'autochtones venus voir de près l'avion et
ses passagers... » |
On en sait un peu plus grâce
aux 3 photographies que Jean MENNEGLIER a faites ce jour-là et à son carnet de
vol. JAPIOT, LE GLOAN et MARTIN, au moins, sont de l’expédition ; voir
JAPIOT et LE GLOAN dans le Potez, MARTIN et LE GLOAN à l’ombre sous son aile.
Jean MENNEGLIER, revient le lendemain à Alger avec le D.520 n°383 (notation
dans son carnet de vol, mais rien sur le L.O. de la 6ème). On sait
par ailleurs par le LO de la 5ème que 9 D.520 ont été convoyés à
Constantine les 22 et 23 juillet : les n°48, 57, 195, 200, 310, 329, 344, 382
et justement le 383. Reste encore à déterminer les raisons de ces déplacements
d’avions de provenance diverse dont aucun n’est affecté au III/6 à cette
date...
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Le Potez
650 transportant des pilotes du GC II/6 à Constantine en panne dans le
« Bled » à Bouïra (50 km sud-est d’Alger) le lt MARTIN et le s/lt
LE GLOAN de la 5ème Escadrille Photographies Jean
Menneglier- Droits réservés |
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Alger Maison
Blanche – 28 août 1940 – Le Dewoitine n°365 du s/lt STEUNOU (*) dont le train d’atterrissage a cédé Sur le
carnet de vol du pilote sont seulement indiqués ce jour-là 2 vols
d’entraînement de 30 et 35 minutes sans mention de l’accident Photographies Jean
Menneglier- Droits réservés |
D’août à octobre 1940 à Alger – Maison Blanche : la longue
liste des « incidents »
Le rédacteur du journal de la
6ème Escadrille écrit : « Les vols de routine continuent au
ralenti ; s’ils entretiennent les pilotes, ils ne font pas de même
avec les avions, qui ont de plus en plus un grand Amour pour le plat-ventre … A
quand la quintonine (*) pour les trains Messier ? »
(*)
La quintonine élixir à base de quinquina, réputé pour ses prétendues vertus
contre le traitement de la fatigue et de l'asthénie était l’arme suprême des
Armées françaises en 1940 !
·
Le 17 août au décollage le
train d’atterrissage du D.520 n°295 (30) le s/c Le GUENNEC (6ème)
se replie sans raison apparente au cours du roulage. Le pilote récupère le 16
septembre l’ancien appareil du cne Assollant, le n°302, qui sera codé
« 30 »,
·
Le 19 août à l’atterrissage,
le lt MARTIN (5ème) ne peut maîtriser son D.520 n°301 (2) qui
part en cheval de bois. La contrainte imposée au train est telle qu’il se casse
net, l’avion termine sa course sur le ventre,
·
Les dégâts sur les deux
appareils sont trop importants pour être pris en charge par les mécaniciens du
groupe. Ils sont tous deux reversés à l’ARAA d’Alger,
·
Le 28 août le train du
n°356 (25) du s/lt STEUNOU (*) cède à l’atterrissage, l’appareil part
également à l’ARAA d’Alger. Il est remplacé le 2 septembre par le n°370 (futur
« 25 »),
·
Le 2 septembre, c’est celui
du n°360 (10) piloté par le sgt HARDOIN qui se plie ; appareil
réformé,
·
Le 4 septembre, c’est au tour
du Sgt LINARD à bord du n°195 (4) de subir la même mésaventure ;
dégâts mineurs,
·
Le 6 septembre, celui du cne
JACOBI, le n°229 (1) ; dégâts mineurs,
·
Le 7 octobre, celui du cne
SAUTIER, le n°369 (X) ; train cassé,
·
Le 7 octobre, celui du s/c
MERTZISEN, le n°368 (12). Il pourra être réparé au sein de l’A.I.A. « où le Groupe a
désormais un abonnement ! »,
Plus de trace de rapports
tonitruants du Commandant du Groupe et de demandes de sanctions. Il y en aurait
peut-être trop, ce qui ferait désordre, et peut-être sait-il déjà qu’il va être
appelé à de plus hautes fonctions à Vichy le 15 octobre ?
·
Le 18 octobre, le s/lt
STEUNOU (*) endommage son tout nouveau n°370 (25) en lui faisant faire un
demi-tour se terminant par un arrêt brutal ; un mois d’indisponibilité
pour l’avion,
·
Le 22 octobre, l’adj JAPIOT
effectue un désormais traditionnel atterrissage sur le ventre à bord du n°138
(29) de l’adj DIAZ qui n’est pas encore parti pour l’Indochine, sa nouvelle
affectation.
(*) Carnet de vol du
s/lt STEUNOU : 4 vols sur le n°370 et 1 vol sur le n°138 en septembre,
7 vols sur le n°370 en octobre jusqu’au 18, puis il utilise les n°358 (appareil
de Jean MENNEGLIER qui a quitté le Groupe) et 357 (3 vols) mais il part à
Casablanca sur le n°326 qui était un des avions de la patrouille polonaise. Au
Maroc il vole sur les n°330 ; n°358 et n°145 avant de reprendre le manche
du n°370 le 28 novembre qu’il ramènera à Alger le 20 janvier 1941. Par contre,
après une intervention des mécaniciens sur l’appareil, il fait les essais du
n°358 les 14 et 15 décembre qui se termine par un nouvel accident. Cet appareil
ne volera plus au III/6 après cela.
Le SERVICE CIVIL DES LIAISONS AERIENNES – S.C.L.A.
L’affectation de Joseph
BIBERT change le 31 août 1940 comme le montre une mention sur le Journal de
Marche de la 6ème Escadrille :
« Le s/c
Bibert est affecté au MGT »
Rien de pareil n’apparaît sur
son livret militaire ; en fait il fait partie de ceux qui n’apparaîtront
plus dans les effectifs du Groupe pour répondre à la volonté de la commission
d’armistice de les réduire. Certains rejoignent donc le S.C.L.A, « Service
Civil des Liaisons Aériennes », placé sous la tutelle officielle
« d’Air France », permettant ainsi à de nombreux appareils militaires
d’être soustraits aux inventaires officiels et de pouvoir circuler à travers
l’Empire, moyen rudimentaire de contourner les clauses de l’armistice. Joseph
n’est plus « Chef de hangar » de la 6ème Escadrille, mais
« Employé aux Moyens Généraux » du S.C.L.A.F.N. (F.N. pour Afrique du nord) avec un
travail quasi-identique, s’occupant d’avions différents, mais travaillant en
civil dans un hangar peu éloigné de celui du III/6 ! Quand nous avons
essayé de faire parler sa veuve de cette époque, elle disait : « Quand votre père
travaillait à « Air France » : elle
n’en savait pas plus ! Dans l’année 1941, sans mention particulière dans
les livres de son « retour », Joseph sera de nouveau en
escadrille !
Deux appareils du S.C.L.A. à Alger à l’automne 1940
Lockheed 18
F-ARTZ utilisé par Air France sur son réseau africain et Caudron 445 Goéland du
S.C.L.A.F.N.
Merci à
Bernard Palmieri pour cette illustration
Le
Service Civil des Liaisons Aériennes L'armée de l'air de Vichy fut autorisée
par les Commissions d'armistice à transformer la 15ème Escadre de
bombardement en groupement de transport 15 avec deux groupes basés en A.F.N.,
le GT 1/15 et le GT 2/15, auxquels viendront ultérieurement s'ajouter les GT
3/15 et 4/15. Ces groupes, équipés de Farman 221, 223, 224 et de Potez 540 et
650, effectueront de nombreuses missions de liaisons et de transport vers la
métropole (par exemple, en 1941 le « rapatriement » de l'or belge
qui sera saisi par les Allemands) ou vers nos colonies en Afrique, au Levant
(campagne de 1941), dans l'Océan indien et en Indochine. Le S.C.L.A. est créé par le
gouvernement de Vichy parallèlement à ce GT 15, (note EMAA 3754-1/1 du
16 août 1940) pour assurer officiellement les liaisons intérieures
indispensables, probablement aussi pour camoufler une partie du matériel
et fournir un entraînement aérien aux équipages militaires dont la
démobilisation a été exigée par l'occupant. Les tâches dévolues aux
S.C.L.A sont précisés ultérieurement comme suit : 1) Les S.C.L.A. et d'aviation sanitaire
ont pour objet d'effectuer, sur la demande des autorités accréditées à cet
effet, dans les conditions qui seront précisées ci-après, des voyages entre
leurs bases de stationnement et des aérodromes ou terrains désignés dans les
instructions particulières de ces services. 2) La gestion des S.C.L.A pour
l’administration des personnels, la gestion et l’entretien, du matériel, le
fonctionnement des lignes sont confiés à Air France. Le personnel est recruté
parmi le personnel d'Air France complété par du personnel (pilotes,
radio-navigants, mécaniciens), théoriquement « volontaire » pour
faire partie du S.C.L.A. à titre civil. Le service est organisé par région
suivant les besoins de liaisons : ·
Territoire de la France non occupée : S.C.L.A.M. avec quatre groupes à Vichy/Clermont-Ferrand
(groupe I), Lyon (groupe II), Toulouse (groupe III) et Marseille (groupe IV).
Le groupe de Vichy ou section d'avions ministériels (S.A.M.) a pour mission
officielle d'effectuer quotidiennement la liaison Vichy-Bourges de la délégation
française auprès de la commission allemande d'armistice. A Marseille
Marignane, la section de liaisons lointaines (S.L.L.) est chargée avec cinq
Amiot 354, 356 et 370 d'assurer les liaisons avec le Levant, Djibouti et
Madagascar. ·
Afrique du Nord - Algérie. Tunisie, Maroc : S.C.L.A.F.N., également à quatre
groupes à Alger (groupe XI), Oran (groupe XII), Rabat (groupe XIII) et Tunis
(groupe XIV). Le groupe de liaisons aériennes d'Alger Maison Blanche,
essentiellement équipé de Goéland, donnera plus tard naissance au GLAM. ·
Afrique Occidentale Française : S.C.L.A.O.F., créé en mars 1941, n’a
pas de groupes organisés, les personnels sont détachés aux points de
stationnement des appareils; il est chargé d'effectuer les liaisons internes
à la colonie, les liaisons avec l'A.F.N. étant à la charge du groupement 15
ou du S.C.L.A.F.N. L'effort principal porte sur ta
métropole, dotée de 50 avions, l'Afrique du Nord (50 avions), la Syrie (10
avions). L'aviation sanitaire perçoit 25 avions à répartir en divers
territoires. L'État-major de l'Armée de l'Air (EMAA) a prévu pour l'AOF 12
avions de liaison de type Goéland et Simoun et 10 appareils sanitaires allant
du bimoteur Potez 540 aux monomoteurs Potez 29 et Caudron 510. S.C.L.A.F.N. (M. Gonin (*)) – 30 septembre 1941
D’après Vital Ferry et Bernard Thévenet |
(*) Claude GONIN avait été l’équipier de Georges PELLETIER d’OISY,
avec Henri CAROL, en mail 1928 lors d’un un raid Parais-Tokyo sur Potez 28,
raid interrompu en Birmanie quand l’avion s’était brisé lors d’un atterrissage
de fortune dans une rizière en Birmanie. Gonin et Carol avaient étaient
légèrement blessés.
Le capitaine STEHLIN est
nommé commandant le 3 septembre 1940 et un « pot » est organisé.
Joseph, bien qu’affecté au S.C.LA., y participe, tout comme ses camarades
mécaniciens Jean EMERY, qui était élève mécanicien avec lui à Bordeaux en 1933,
et Jules PIESVAUX qui ont fait quelques photographies de ce moment de détente
dans le hangar du III/6 à proximité de quelques Dewoitine.
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3 septembre 1940 - Le Commandant STEHLIN |
Cdt STEHLIN, s/lt BRONDEL, cne RICHARD |
Hangar du GC III/6 |
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Debout :
MIRAND, GOUJON, BORREYE, X, LE GLOAN, Y, STEHLIN, SAUTIER, RICHARD,
BOIRIES, GUERRIER, STEUNOU, BRONDEL, SATGÉ Accroupis : PIMONT ?, LE GUENNEC,
MERTZISEN, Z |
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Photographies
Jean Emery et Jules Piesvaux – Droits réservés
Le 9 octobre 1940 une prise
d’Armes a lieu à Maison-Blanche à l’issue de l’arrivée à Alger du Général
WEYGAND qui a été nommé le 5 septembre « Délégué Général en Afrique
Française ». Celui-ci inspectera quelques semaines plus tard l’escadrille
de reconnaissance GR 1/36 du commandant VEYSSIÈRE à Aïn Arnat (Sétif).
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Octobre
1940 - Sétif – Aérodrome de Aïn Arnat – Le général WEYGAND inspecte le GR
1/36 équipé de Potez 63.11, qui doit agir en coopération avec le GC III/6 et
d’autres unités basées tout autour d’Alger Collection |
Le 15 octobre le commandant STEHLIN
est appelé auprès de l’Amiral DARLAN à Vichy. Il va y reprendre des activités
plus politiques, comme celles qu’il avait déjà exercées avant la guerre à
Berlin, du fait qu’il parle parfaitement l’allemand. Portant la grande tenue
blanche d’Afrique, il pose à cette occasion pour des photographies avec des
pilotes du Groupe.
Le capitaine Guillaume de
RIVALS-MAZÈRES (*) qui est rentré de convalescence en septembre lui succède
provisoirement.
(*) Le comte Guillaume
Élie Marie Bertrand DE RIVALS-MAZÈRES (1908/2001), est issu d’une vieille
famille aristocrate de Fiac dans le Tarn. Sa mère est une Toulouse-Lautrec,
cousine éloignée du célèbre peintre Henri. Diplômé de l'École Spéciale
Militaire de Saint-Cyr (1928-30), il s’est marié en premières noces en 1937
avec Geneviève PELLEY du MANOIR, descendante d’une famille noble famille
d’armateurs et de corsaires de Granville. Il sera Général de corps aérien et
Commandant de l'École de l'Air, Grand-Officier de la Légion d'honneur. Son
épouse est décédée à Toulouse en septembre 1940 quelques jours après la
naissance de son second fils (il aura trois autres enfants issus d’un second
mariage en 1945). Il est donc compréhensible que dans les archives du III/6 on
parle d’un « retour de convalescence » plutôt que des évènements familiaux
qui l’ont conduit à se rendre à Toulouse en septembre.
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Le commandant STEHLIN devant son D.520 n°331
codé « A » et à droite avec les sgt PIMONT, lt BOIRIES et lt LE
GLOAN |
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Alger-Maison Blanche – 15 octobre 1940 -
Départ pour Vichy du commandant STEHLIN De gauche
à droite : Sgt PIMONT, s/lt SATGÉ, lt LEGRAND, cne SAUTIER, cne JACOBI,
s/lt BRONDEL, cdt STEHLIN, lt BOIRIES, s/lt LE GLOAN, s/c MERTZISEN, s/c CHARDONNET, s/c LE
GUENNEC, adj GOUJON |
Du 30 octobre 1940 au 2 janvier 1941 à Casablanca
Le GC III/6 reçoit
l’ordre le 28 octobre de quitter Maison-Blanche (Algérie) pour Casablanca –
Camp Cazes (Maroc) afin de prendre la place du GC II/5 envoyé avec ses
Curtiss à Dakar (A.O.F.) dont la défense du port doit être renforcée. La 6ème
Escadrille accomplit le déplacement d’une seule traite le 29 octobre. Ceux de
la 5ème Escadrille font deux étapes, la première de 1h 15, ce qui
leur permet de passer une la soirée avec les pilotes du GC I/3 à La Sénia
(Oran). Ils arrivent à Casablanca le lendemain après 2h 00 de vol.
Joseph BIBERT, toujours au
S.C.A.C. ne participe pas à ce déplacement à Casablanca, tout comme l’adjudant
GOUJON qui l’a rejoint le 18 octobre.
Dans les semaines qui vont
suivre, des photographies des appareils du GC III/6 en vol ont été faites au-
dessus de Casablanca. Quelques-unes sont rassemblées ci-dessous, sans doute
avec d’autres qui peuvent être avoir été prises dans l’Algérois avant ou après
Casablanca, mais en tout cas avant la campagne du levant de mai 1941.
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D.520 n°48 codé « 5 » - Ancien
appareil « II » du GC I/3 – Robert MARTIN |
D.520 n°277 codé « 6 » - |
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D.520 n°284 codé « 8 » - Maurice
CHARDONNET |
D.520 n°329 codé « 9 » - |
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D.520
n°367 codé « 11» - Roger HARDOUIN Appareil ramené d’Alger le 23/11/1940 par le
cne JACOBI après réparation (aile brisée) |
D.520
n°314 codé « 12 »- Ancien appareil du cne CHAINAT – Cne SAUTIER Voir la photographie plus haut dans cette
page quand le code n’était pas encore peint |
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D.520 n°370 codé « 25» - Marcel STEUNOU |
D.520
n°302 (1) – Le code « 30 » effacé par un carré
de peinture sombre a remplacé le code « S » |
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D.520 n°321 codé « 31 » - Roger
PIMONT |
L’aile du D.520 du n°358 de Jean MENNEGLIER
et deux appareils de la 6ème Escadrille |
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(1) Le D.520 n°302 aura un destin
particulier. Pendant la campagne du Levant, le 7 juillet 1941, le capitaine
de RIVALS MAZÈRES est contraint de poser cet appareil dans le désert. Voir son
profil un peu plus bas - Récupéré par les Français Libres, il est remis en
état à Rayack pour le Groupe « Normandie » et piloté par Albert
LITTOLF |
Le Groupe est affecté
temporairement au Groupement de Chasse 23, qui comprend également de
GC I/5 de Rabat. Comme signalé dans le tableau plus haut quelques
mouvements de personnels auront lieu à Casablanca avec le départ de trois
pilotes ; lt de ROUFFIGNAC (5ème), lt MENNEGLIER (6ème)
et sgt GAUTHIER (6ème) vers des camps de Jeunesse et Montagne en
France, compensé par l’arrivée du Commandant GEILLE et du capitaine RICHARD à
l’État-major et d’un nouveau pilote à la 6ème, le lt RIVORY ancien
du GC I/55 dissous lors de l’armistice.
Nouvelles
têtes au GC III/6 : commandant GEILLE le 20/12/1940 (E.M.) - sgt
GHESQUIÈRE dit « Achille » le 9/09/1940 et lt RIVORY le 27/12/1940 (6ème)
Le Maroc échappe encore aux
investigations de la commission d’armistice et en partie aux restrictions
d’essence. Les pilotes essayent de rattraper le temps d’entraînement perdu et
ils volent beaucoup plus qu’à Alger.
Le 6 novembre 1940, avant que
les Curtiss H-75A du GC II/5 ne soient partis pour l’A.O.F., le s/lt LE
GLOAN et le s/c Gabriel MARGERIT (5ème), le cne GUERRIER et le sgt
MICHAUX (6ème) veulent confronter l’appareil américain avec le
Dewoitine D.520 (voir extrait du carnet de vol de MICHAUX ci-dessous). En
conclusion, il faut aux deux appareils un temps équivalent pour
atteindre2 000 mètres, mais avec un angle supérieur pour le chasseur
américain, et à cette altitude les vitesses sont identiques, même en piqué.
Mais une fois parvenu à 4 000 m. le D.520 prend l’avantage. En combat
tournoyant le Curtiss vire très sec, beaucoup plus que le Dewoitine, ce que les
pilotes allemands ont d’ailleurs appris à leur détriment pendant la Campagne de
France.
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13 novembre 1940 – Après deux semaines de
cohabitation sur l’aérodrome de Casablanca avec les Dewoitine du GC III/6, les Curtiss H-75A du GC II/5 se préparent à partir
pour le Sénégal (Dakar-Ouakam) aux ordres du commandant ARCHAIMBAULT Photographie Jean
Emery – Droit réservés |
Beaucoup de pilotes et de
mécaniciens ne connaissent pas encore le Maroc et ils ont le loisir de
découvrir la ville et la côte de l’Atlantique. Ils en ont ramené quelques
photographies :
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Casablanca fin 1940 – La place Lyautey,
maintenant place Mohamed V, avec la statue du Maréchal aujourd’hui déplacée,
le Palais de Justice (en bas au centre) et la Résidence devenue consulat de
France (en bas à droite) |
Photographies Jean Emery – Droits réservés
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Jean EMERY et |
Le bus
assurant la liaison de « L’Oasis » à « L’Aviation » Avec les casquettes : PIESVAUX – MEYER -
ROBERT – DANET - BRIÈRE |
MEISSONNIER et Jules PIESVAUX |
Photographies Jean Emery et Jules Piesvaux – Droits
réservés
Le 28 novembre le lt BOIRIES
tord l’hélice du n°357 (22) sur la pompe à eau du terrain. L’appareil pourra
être réparé par les mécaniciens du Groupe.
Le 30 novembre le sgt MICHAUX
subit une panne moteur et se voit contraint de poser sans incident le D.520
n°313 (21) de son commandant d’escadrille à Bouskoura, à une dizaine de
kilomètres au Sud de Casablanca (voir extrait de son carnet de vol ci-dessous) ;
une équipe de trois mécaniciens dont fait partie le sergent Lucien ROBERT sera
dépêchée sur place avec des aides marocains pour changer le moteur.
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